La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/2023 | FRANCE | N°22PA00975

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 23 juin 2023, 22PA00975


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office à l'expiration de ce délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par

un jugement n° 2011013 du 15 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office à l'expiration de ce délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2011013 du 15 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er mars 2022, Mme C... épouse B..., représentée par Me Rosin, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation en fait et d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur de droit en ce que le préfet a considéré qu'elle ne peut être regardée comme séjournant en France depuis une date antérieure au délai d'exécution de la mesure d'éloignement dont elle a fait l'objet le 14 septembre 2015 ;

- elle est entachée d'erreurs de fait tenant à ses conditions d'entrée en France, à la situation de son époux au regard du séjour et à la durée de son séjour en France ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard de ces dispositions ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observations.

Par une décision du 23 décembre 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris, Mme C... épouse B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 décembre 1990 ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... épouse B..., ressortissante chinoise, née le 5 février 1980 et entrée en France, selon ses déclarations, le 11 juin 2014, a sollicité, le 11 avril 2019, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable. Par un arrêté du 15 septembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office à l'expiration de ce délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Mme C... épouse B... fait appel du jugement du 15 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, la décision attaquée portant refus de titre de séjour, qui vise, notamment, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne qu'" après un examen approfondi de son dossier, l'intéressée n'allègue aucun motif exceptionnel ou humanitaire à l'appui de sa demande de titre de séjour pour qu'elle puisse prétendre au bénéfice de [cet] article L. 313-14 ", que si elle déclare être entrée en France le 11 juin 2014, elle ne justifie pas de la réalité de cette date, qu'en outre, " elle a fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 14 septembre 2015, notifiée le 17 septembre 2015 et pour laquelle aucune décision d'annulation ou d'abrogation n'est intervenue ", qu'elle " s'est soustraite à l'exécution de cette mesure ", qu'" elle ne saurait se prévaloir d'une présence sur le territoire national en violation de la loi ", qu'ainsi, elle " ne peut être regardée comme séjournant en France depuis une date antérieure au délai d'exécution de ladite mesure " et qu'elle " ne peut donc se prévaloir d'une longue présence habituelle et continue sur le territoire national depuis lors ". La décision en litige indique également que Mme C... épouse B... " ne justifie ni de l'intensité, ni de l'ancienneté et de la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France, ni de conditions d'existence pérennes, ni même d'une insertion forte dans la société française ", qu'" elle ne justifie pas d'obstacle à poursuivre une vie privée et familiale normale dans le pays dont elle est originaire, accompagnée de son époux qui se maintient en France en situation irrégulière et de ses deux enfants " et qu'" elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales en Chine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 34 ans et où vivent ses parents ", de sorte que la présente décision ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Enfin, cette décision fait état de ce que " l'intéressée ne justifie d'aucune insertion professionnelle en France et ne justifie d'aucune perspective professionnelle pour prétendre à une admission exceptionnelle au séjour en qualité de salariée ". Ainsi, cette décision, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent, est suffisamment motivée, alors même qu'elle ne mentionne pas la scolarisation des deux enfants de Mme C... épouse B..., ni ne fait état de ce que la demande de titre de séjour de son époux, alors dépourvu de titre de séjour, était en cours d'instruction.

3. En deuxième lieu, il ne ressort ni de cette motivation, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas, avant de rejeter sa demande de titre de séjour, procédé à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de Mme C... épouse B.... Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée de ce chef la décision en litige portant refus de titre de séjour doit être écarté.

4. En troisième lieu, si Mme C... épouse B... soutient que le préfet de la Seine-Saint-Denis a entaché la décision en litige portant refus de titre de séjour d'une erreur de droit en estimant que, du seul fait de la soustraction de l'intéressée à la précédente mesure d'éloignement prise à son encontre le 14 septembre 2015, la période antérieure " au délai d'exécution " de cette mesure d'éloignement ne peut être prise en compte quant à la durée de sa présence en France, cette appréciation, certes erronée en droit, est, en l'espèce, dépourvue d'incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors qu'il résulte de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur les autres motifs qu'il a retenus et tirés de la situation personnelle et familiale de l'intéressée, qui ne caractérise pas l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels susceptibles de justifier son admission exceptionnelle au séjour.

5. En quatrième lieu, si Mme C... épouse B... soutient qu'elle est entrée régulièrement en France le 11 juin 2014, il ressort des mentions figurant sur son passeport qu'elle est entrée aux Pays-Bas à cette date sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa Schengen, valable du 11 juin 2014 au 3 juillet 2014 et délivré à Pékin par les autorités néerlandaises. A supposer qu'elle soit entrée en France le même jour, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas allégué qu'elle aurait souscrit la déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et dont l'obligation figure à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, devenue l'article L. 621-3 du même code, souscription qui est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire. En outre, si la décision attaquée portant refus de titre de séjour indique que le conjoint de la requérante, M. E... B..., " se maintient en France en situation irrégulière " alors qu'à la date de cette décision, soit le 15 septembre 2020, il était titulaire d'un récépissé de demande de carte de séjour, la détention de ce document provisoire ne préjugeait pas, en vertu des dispositions de l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, devenu l'article L. 431-3 du même code, de la décision définitive qui était susceptible d'être prise au regard du droit au séjour de l'intéressé. Enfin, il ne ressort pas de la motivation de cette décision que le préfet aurait commis une erreur de fait sur la durée de séjour en France de l'intéressée alors que, de surcroît, celle-ci n'établit pas la date de son entrée en France, ni ne produit d'éléments de justification quant à son séjour sur le territoire avant le mois d'octobre 2014. Par suite, le moyen tiré des erreurs de fait dont serait entachée de ce chef la décision en litige portant refus de titre de séjour doit être écarté.

6. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, devenu l'article L. 435-1 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ".

7. Mme C... épouse B... se prévaut de la durée de son séjour en France depuis le mois de juin 2014 et fait valoir qu'elle y séjourne depuis lors avec son époux et leurs deux enfants, nés respectivement le 14 mai 2004, en Chine, et le 6 décembre 2016, en France, et qui sont scolarisés, que son conjoint travaille pour subvenir aux besoins de la famille, qu'elle a noué en France des liens amicaux et que son fils aîné, qui a obtenu le brevet des collèges, était inscrit, au titre de l'année 2020-2021, en seconde générale. Toutefois, l'intéressée ne conteste pas avoir fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement en date du 14 septembre 2015, après le rejet de sa demande d'asile, qu'elle n'a pas exécutée, et s'est maintenue depuis lors sur le territoire français en situation irrégulière. Par ailleurs, à la date de l'arrêté en litige, elle ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'elle poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, dans son pays d'origine où résident ses parents et où elle-même a vécu jusqu'à l'âge de trente-quatre ans, ni à ce que son époux l'accompagne ou la rejoigne, avec leurs deux enfants, afin d'y reconstituer la cellule familiale, ni que ses enfants ne pourraient pas y bénéficier d'une scolarisation normale. Enfin, si elle fait valoir que l'arrêté du 21 octobre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant à son époux, M. E... B..., la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français, fixant le pays de destination et prononçant à son encontre une interdiction de retour a été annulé par un jugement n° 2012705 du 21 février 2022 du tribunal administratif de Montreuil et que, par la suite, son conjoint a obtenu une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", valable du 7 octobre 2022 au 6 octobre 2023, et son fils D... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", valable du 23 septembre 2022 au 22 septembre 2023, ces circonstances, postérieures à l'arrêté attaqué du 15 septembre 2020, sont sans incidence sur sa légalité, qui s'apprécie à la date de son édiction. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions de séjour en France de Mme C... épouse B..., le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que la situation de l'intéressée ne répondait pas, à la date de l'arrêté attaqué, à des considérations humanitaires ou à des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour au titre de l'article L. 313-14 précité.

8. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7 et, notamment, en l'absence d'obstacle à la reconstitution de la cellule familiale dans le pays d'origine de Mme C... épouse B... et à la poursuite de la scolarité de ses enfants dans ce pays, le préfet de la Seine-Saint-Denis ne saurait être regardé, par son arrêté du 15 septembre 2020 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, comme ayant porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels ces deux mesures ont été prises, ni méconnu l'intérêt supérieur de ses deux enfants, ni commis une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé.

10. Enfin, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

11. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

12. En premier lieu, l'arrêté en litige portant, en particulier, interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans vise, notamment, le III de l'article L. 511-1 précité et mentionne les éléments caractérisant la situation de Mme C... épouse B..., notamment la durée de sa présence sur le territoire français, la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France ainsi que la circonstance qu'elle a déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 14 septembre 2015, notifiée le 17 septembre 2015. Ainsi, la décision attaquée, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent, est suffisamment motivée, alors même qu'elle ne mentionne pas la scolarisation des deux enfants de l'intéressée et que le préfet ne justifie pas de la notification de cette mesure d'éloignement à Mme C... épouse B..., qui ne conteste pas, au demeurant, avoir fait l'objet d'une telle mesure après le rejet de sa demande d'asile. Par ailleurs, cette motivation, qui révèle la prise en compte par l'autorité préfectorale des critères énumérés au huitième alinéa du III de l'article L. 511-1 précité pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour en litige, ne permet pas en revanche de considérer que l'autorité préfectorale n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme C... épouse B... avant de prononcer à son encontre une telle mesure d'interdiction de retour.

13. En deuxième lieu, si, dans l'arrêté attaqué, le préfet de la Seine-Saint-Denis a indiqué, de manière erronée, qu'en application du quatrième alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " l'autorité administrative peut prononcer une interdiction de retour pour une durée maximale de 3 ans à l'encontre de l'étranger obligé de quitter le territoire français, à moins que des circonstances humanitaires ne l'en empêchent ", alors que ces dispositions prévoient que, lorsqu'un délai de départ volontaire a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de cette obligation, cette seule erreur, alors qu'en l'espèce, le préfet de la Seine-Saint-Denis a prononcé une interdiction de retour d'une durée de deux ans, et non de trois ans, doit être regardée comme n'ayant pas eu d'incidence sur la décision en litige.

14. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et, notamment, des motifs de fait énoncés au point 7, qu'en prononçant, le 15 septembre 2020, une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans à l'encontre de Mme C... épouse B..., le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ou méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... épouse B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... épouse B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... épouse B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. d'Haëm, président,

- M. Mantz, premier conseiller,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023.

Le président-rapporteur,

R. d'HAËML'assesseur le plus ancien,

P. MANTZLa greffière,

O. BADOUX-GRARE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00975


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00975
Date de la décision : 23/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. D’HAEM
Rapporteur ?: M. Rudolph D’HAEM
Rapporteur public ?: Mme LIPSOS
Avocat(s) : ROSIN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-23;22pa00975 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award