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20/06/2023 | FRANCE | N°21PA05992

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 20 juin 2023, 21PA05992


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 15 novembre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant à ce que soient proposées dans tous les espaces de restauration du site de Balard les boissons légalement autorisées sur le lieu de travail (vin, bière, cidre), et à ce que le contrat de restauration passé avec la société Sodexo Défense Services soit modifié en conséquence.

Par un jugement n°1914238/5-1 du 23 septembre 2021, le Tr

ibunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 15 novembre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant à ce que soient proposées dans tous les espaces de restauration du site de Balard les boissons légalement autorisées sur le lieu de travail (vin, bière, cidre), et à ce que le contrat de restauration passé avec la société Sodexo Défense Services soit modifié en conséquence.

Par un jugement n°1914238/5-1 du 23 septembre 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 novembre 2021, M. B..., représenté par

Me Gauché, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 23 septembre 2021 ;

2°) d'annuler la décision de la ministre des armées du 15 novembre 2018, mentionnée ci-dessus ;

3°) d'enjoindre à la ministre des armées de proposer à la vente, pour l'ensemble des agents, des boissons alcoolisées au sein des espaces de restauration fonctionnant en " self-service ", ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision attaquée a été prise en méconnaissance du principe d'égalité, les agents du site de Balard ne se voyant proposer des boissons alcoolisées que dans les espaces de brasserie où le prix des repas est plus élevé que dans les espaces de restauration fonctionnant en " self-service ", alors que, dans la quasi-totalité des restaurants du ministère des armées, par exemple ceux des sites parisiens de l'Ecole militaire et des Invalides, de telles boissons sont proposées dans les deux types d'espaces ;

- le principe d'égalité est également méconnu dans la mesure où les salons ordinaires de restauration des officiers généraux proposent aussi des boissons alcoolisées ;

- la décision attaquée est de plus illégale au regard des dispositions de l'article R. 4228-20 du code du travail en ce qu'elle n'est justifiée ni par la sécurité, ni par la santé physique et mentale des travailleurs, et en ce qu'elle n'est pas proportionnée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juin 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête, et à ce qu'une somme de 2.200 euros soit mise à la charge de

M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 17 novembre 2022, M. B..., conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Niollet,

- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,

- et les observations de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est affecté depuis juillet 2017 à l'état-major de l'armée de terre sur le site de Balard à Paris. Ayant constaté que les espaces de restauration fonctionnant en " self-service " de l'emprise du site ne proposaient pas de boissons alcoolisées alors que la consommation d'alcool est autorisée dans d'autres espaces, tels que les brasseries, les salons des hautes autorités et les salons ordinaires des officiers généraux, il a d'abord saisi la commission d'accès aux documents administratifs (CADA), par un courrier enregistré le 4 avril 2018, d'une demande de communication du règlement intérieur de ces espaces et du document officiel autorisant le vin pour les officiers généraux et l'interdisant pour les autres personnels. En réponse à cette demande, la ministre des armées a informé la commission que ces documents n'existaient pas. Par un avis rendu le 10 juillet 2018, la CADA a déclaré sans objet la demande d'avis, tout en relevant que le règlement intérieur du site de Balard était consultable sur " Internet ". Par un courrier du 14 août 2018, M. B... a demandé à la ministre des armées d'adopter un règlement intérieur des espaces de restauration, autorisant la consommation de boissons alcoolisées dans l'ensemble de ces espaces. Cette demande a été rejetée par une décision du 10 septembre 2018. Par un courrier du 11 octobre 2018, M. B... a réitéré les termes de son courrier du 14 août 2018, en demandant en outre la modification du contrat de restauration passé avec la société Sodexo Défense Services sous la forme d'un partenariat-public-privé pour autoriser la consommation de boissons alcoolisées dans les espaces de restauration. Dans un courrier du 15 novembre 2018, la ministre des armées a exprimé son intention d'adopter un règlement intérieur des espaces de restauration en 2019, et a rejeté le surplus des demandes de M. B.... M. B... a alors demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les décisions du 10 septembre 2018 et du 15 novembre 2018. Il fait appel du jugement du 23 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif a rejeté ses conclusions dirigées contre la décision du 15 novembre 2018.

Sur la légalité de la décision attaquée :

2. En premier lieu, le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité administrative règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier.

3. D'une part, M. B... soutient qu'à l'exception des officiers généraux, les agents du site de Balard ne se voient proposer des boissons alcoolisées (bière et vin), en accompagnement de leur repas, que dans les espaces de brasserie où le prix des repas est plus élevé que dans les espaces de restauration fonctionnant en " self-service ", alors que, dans la quasi-totalité des restaurants du ministère des armées, par exemple ceux des sites parisiens de l'Ecole militaire et des Invalides, et dans les autres restaurants administratifs, de telles boissons seraient proposées dans les deux types d'espaces. Il ressort toutefois des pièces du dossier que, compte tenu de l'importance de l'effectif qui fréquente les espaces de restauration du site de Balard, qui est de nature à rendre plus difficile la politique de prévention des risques liés à l'alcoolisme, ces espaces de restauration et leurs usagers ne se trouvent pas dans la même situation que ceux des autres sites de moindre importance, auxquels M. B... fait référence.

4. D'autre part, M. B... fait valoir que les officiers généraux se voient proposer du vin dans les " salons ordinaires " qui leur sont réservés, en accompagnement de leurs repas, pourtant identiques à ceux proposés aux autres agents dans les espaces de brasserie et dans les espaces de restauration fonctionnant en " self-service ". Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à l'instar des repas proposés aux autres agents dans les espaces de brasserie, auxquels M. B... n'établit pas être empêché d'accéder du fait d'une affluence excessive, les repas proposés aux officiers généraux sont servis à table, et qu'ainsi il est possible de s'assurer que les boissons alcoolisées ne sont servies qu'en accompagnement d'un repas. Les usagers des " salons ordinaires " ne se trouvent donc pas dans la même situation que ceux des espaces de restauration fonctionnant en " self-service ", où le même contrôle est impossible.

5. En second lieu, le moyen tiré d'une erreur de droit et du caractère disproportionné de la mesure contestée, au regard des dispositions de l'article R. 4228-20 du code du travail, doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le ministre des armées sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du ministre des armées présentées sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 juin 2023.

Le rapporteur,

J-C. NIOLLETLe président,

T. CELERIER

La greffière,

Z. SAADAOUI

La République mande et ordonne au ministre des armées, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 21PA05992


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05992
Date de la décision : 20/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : CABINET AD'VOCARE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-20;21pa05992 ?
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