Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Holding Simoes a demandé au tribunal administratif de Melun la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2011, ainsi que des intérêts de retard correspondants.
Par un jugement n° 1801287 du 3 juin 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de la société Holding Simoes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2021, la société Holding Simoes, représentée par Me Junqua-Lamarque, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1801287 du 3 juin 2021 du tribunal administratif de Melun ;
2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée ainsi que des intérêts de retard correspondants ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le rehaussement n'est pas suffisamment motivé ;
- la vérification de comptabilité ne pouvait se dérouler entièrement en l'étude du liquidateur judiciaire que dans l'hypothèse où les documents comptables s'y trouvaient ;
- la société Bati MJ a été privée d'un débat oral et contradictoire, alors que l'administration n'a pas justifié que Mme A... était habilitée à représenter la société Bati MJ ;
- l'administration fiscale a méconnu la doctrine administrative référencée BOI-CF-PGR-20-20 ;
- l'administration fiscale ne pouvait retenir comme termes de comparaison des sociétés exerçant dans le secteur référencé 4120 B ;
- le taux de charges retenu par le service est faible s'agissant d'une société finalement placée en liquidation judiciaire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- et le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Aggiouri ;
- et les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société Bati MJ, intégrée fiscalement au sein d'un groupe dont la société mère est la société Holding Simoes, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a notifié à son liquidateur judiciaire une proposition de rectification datée du 16 décembre 2014, dans laquelle elle a, selon la procédure de rectification contradictoire, rehaussé son résultat imposable au titre de l'exercice clos au 31 mars 2011. La société Holding Simoes relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés mise à sa charge en conséquence de ce rehaussement, ainsi que des intérêts de retard correspondants.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation [...] ". Aux termes de l'article R.* 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition [...] ".
3. Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile.
4. La proposition de rectification datée du 16 décembre 2014, après avoir cité les dispositions de l'article 38 du code général des impôts puis détaillé les modalités de reconstitution des produits d'exploitation de la société au titre de l'exercice clos en 2011, sur la base des encaissements constatés sur les comptes bancaires de la société Bati MJ, précise les termes de comparaison retenus par l'administration fiscale pour reconstituer les charges de la société au titre du même exercice. A cet égard, l'administration fiscale a indiqué la raison sociale des trois sociétés retenues comme termes de comparaison, leur secteur d'activité, leur numéro SIREN et leur code NAF, leur montant de charges au titre de l'année 2011, leur chiffre d'affaires au titre de la même année, et le ratio entre ces deux valeurs. Elle a ensuite calculé le montant des charges de la société Bati MJ en affectant au chiffre d'affaire reconstitué de cette société le pourcentage issu de la moyenne des ratios de charges de chacune des sociétés mentionnées. Ainsi, et contrairement à ce que soutient la société requérante, le service vérificateur a suffisamment motivé la reconstitution des charges à laquelle il a procédé. Par suite, le moyen doit être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. / [...] ". Dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, comme il est de règle, dans ses propres locaux, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat.
6. D'une part, il résulte de l'instruction que le service vérificateur, après avoir adressé un avis de vérification de comptabilité à la société Bati MJ, le 10 juillet 2014, notifié le 11 juillet 2014, s'est rendu, le 30 juillet 2014, dans les locaux de la société. Un salarié d'une autre société domiciliée dans les mêmes locaux lui a alors indiqué que la société Bati MJ avait entamé une procédure de liquidation judiciaire. Alors que la SELARL Archibald, représentée par Me Laure, a été désignée liquidateur judiciaire par le tribunal de commerce de Melun, le 28 juillet 2014, le service vérificateur lui a adressé un courrier daté du 31 juillet 2014 dans lequel il lui indiquait que les opérations de vérification se dérouleraient dans ses locaux, une première intervention étant annoncée pour le 28 août 2014. Plusieurs interventions se sont ensuite déroulées dans les locaux de la SELARL Archibald. Dès lors que la société Bati MJ avait été placée en liquidation judiciaire, le service pouvait valablement, contrairement à ce que soutient la société requérante, conduire les opérations de vérification dans les locaux du liquidateur judiciaire. A cet égard, si la société Holding Simoes soutient que les opérations de vérification auraient dû se dérouler dans les locaux du cabinet d'expertise-comptable qui détenait la comptabilité de la société Bati MJ, il n'est pas même soutenu qu'une telle demande aurait été formulée. Par ailleurs, le service vérificateur n'était nullement tenu de demander à la société Bati MJ de transférer sa comptabilité dans les locaux de son liquidateur judiciaire. Par suite, le moyen doit être écarté.
7. D'autre part, la société Holding Simoes soutient que les échanges ont eu lieu, au cours des interventions menées dans les locaux de la SELARL Archibald, non pas avec Me Laure, mais avec une salariée de l'étude, Mme A... B..., alors qu'il n'est pas contesté Mme A... a assisté à seulement deux réunions, il résulte de l'instruction que Me Laure était informée de la tenue du contrôle, ayant été destinataire du courrier daté du 31 juillet 2014 dans lequel l'administration fiscale lui indiquait que les opérations de vérification se dérouleraient dans les locaux de son étude. Par ailleurs, il n'est pas même allégué que le vérificateur se serait refusé à tout échange de vues avec Mme A..., ou avec toute personne exerçant au sein de l'étude du liquidateur judiciaire et ayant assisté aux opérations de vérification. Par suite, et sans qu'il soit besoin de demander à l'administration fiscale de produire un " mandat de représentation " qui aurait été attribué à Mme A..., le moyen doit être écarté.
8. Enfin, la société Holding Simoes n'est pas fondée à se prévaloir d'une méconnaissance de la doctrine administrative au soutien d'un moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de la doctrine référencée BOI-CF-PGR-20-20 doit être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
9. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré / [...] ".
10. En l'absence de réponse dans le délai légal à la proposition de rectification, il incombe à la société requérante de démontrer le caractère exagéré des bases d'imposition retenues par l'administration.
11. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a reconstitué le chiffre d'affaires de la société Bati MJ au titre de l'exercice clos en 2011, qu'elle a fixé à 3 295 484 euros, en s'appuyant sur les sommes encaissées sur les comptes bancaires de la société, à l'exception des virements de compte à compte et des remboursements. Elle a par ailleurs estimé que les charges supportées par la société s'élevaient à 88 % de ce montant, en se fondant sur la moyenne des taux de charges constatés pour trois entreprises exerçant dans le secteur d'activité " travaux de construction autres bâtiments ", correspondant au code NAF 4120 B, à Paris et dans le Val-de-Marne, et déclarant un chiffre d'affaires en 2011 proche du chiffre d'affaires de la société Bati MJ reconstitué par ses soins. Si la société Holding Simoes soutient que la société Bati MJ exerçait son activité, non pas dans le secteur " travaux de construction autres bâtiments ", mais dans le secteur " travaux de maçonnerie générale et gros œuvre de bâtiment ", correspondant au code NAF 4399 C, elle n'apporte aucune précision ni élément de preuve permettant d'établir que le taux de charges des sociétés exerçant dans ce secteur serait plus important que celui retenu par le service. Ainsi, la société requérante, qui ne produit aucun élément émanant de la comptabilité de la société Bati MJ, n'établit pas que le taux de charges fixé par l'administration fiscale aurait en l'espèce été exagéré. A cet égard, la seule circonstance que la société Bati MJ a, en 2014, été placée en liquidation judiciaire, ne permet pas d'établir que son taux de charges aurait été plus élevé que celui retenu par le service vérificateur. Dès lors, la société Holding Simoes n'est pas fondée à soutenir que le montant du bénéfice réalisé par la société Bati MJ au titre de l'exercice clos en 2011 aurait été exagéré par le service vérificateur. Par suite, le moyen doit être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la société Holding Simoes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Holding Simoes est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Holding Simoes et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Ile-de-France.
Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, où siégeaient :
- Mme Vinot, présidente de chambre,
- M. Aggiouri, premier conseiller,
- M. Perroy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 juin 2023.
Le rapporteur,
K. AGGIOURILa présidente,
H. VINOT
La greffière,
A. MAIGNAN
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA04289