La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/05/2023 | FRANCE | N°23PA00395

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge unique, 30 mai 2023, 23PA00395


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 23 janvier 2023 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer lui a refusé l'entrée en France au titre de l'asile, d'enjoindre au ministre de mettre fin à la mesure de privation de liberté dont elle fait l'objet et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
r>Par un jugement n° 2301740 du 27 janvier 2023, le magistrat désigné par le p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 23 janvier 2023 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer lui a refusé l'entrée en France au titre de l'asile, d'enjoindre au ministre de mettre fin à la mesure de privation de liberté dont elle fait l'objet et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2301740 du 27 janvier 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 janvier 2023, Mme B..., représentée par la Selarl Aequae avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que sa demande d'asile n'était pas manifestement infondée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer, représenté par la Selarl Centaure Avocats, conclut au rejet de la requête.

Par une ordonnance du 13 avril 2023, la clôture de l'instruction de l'affaire a été fixée au 15 mai 2023 à 12h00.

Par une décision en date du 1er septembre 2022, la présidente de la cour administrative d'appel de Paris a désigné M. d'Haëm, président assesseur à la 4ème chambre, pour statuer, en application des dispositions de l'article L. 352-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur les requêtes d'appel relatives au contentieux des refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile et des décisions de transfert.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Haëm, rapporteur,

- et les observations de Me Dussault, avocat du ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante malgache, née le 18 novembre 2001 et arrivée, le 19 janvier 2023, à l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle par un vol en provenance de Tananarive, a demandé, le même jour, le bénéfice de l'asile. Par une décision du 23 janvier 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a, au vu d'un avis du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du même jour, refusé son entrée en France au titre de l'asile et a ordonné son réacheminement vers Madagascar ou vers tout pays où elle sera légalement admissible. Mme B... fait appel du jugement du 27 janvier 2023 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. Aux termes de l'article L. 352-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision de refuser l'entrée en France à un étranger qui se présente à la frontière et demande à bénéficier du droit d'asile ne peut être prise que dans les cas suivants : / (...) 3° La demande d'asile est manifestement infondée. / Constitue une demande d'asile manifestement infondée une demande qui, au regard des déclarations faites par l'étranger et des documents le cas échéant produits, est manifestement dénuée de pertinence au regard des conditions d'octroi de l'asile ou manifestement dépourvue de toute crédibilité en ce qui concerne le risque de persécutions ou d'atteintes graves ". Aux termes de l'article L. 352-2 du même code : " Sauf dans le cas où l'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat, la décision de refus d'entrée ne peut être prise qu'après consultation de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui rend son avis dans un délai fixé par voie réglementaire et dans le respect des garanties procédurales prévues au titre III du livre V. L'office tient compte de la vulnérabilité du demandeur d'asile. / L'avocat ou le représentant d'une des associations mentionnées à l'article L. 531-15, désigné par l'étranger, est autorisé à pénétrer dans la zone d'attente pour l'accompagner à son entretien dans les conditions prévues au même article. / Sauf si l'accès de l'étranger au territoire français constitue une menace grave pour l'ordre public, l'avis de l'office, s'il est favorable à l'entrée en France de l'intéressé au titre de l'asile, lie le ministre chargé de l'immigration ".

3. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 352-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le ministre chargé de l'immigration peut rejeter la demande d'asile présentée par un étranger se présentant à la frontière du territoire national lorsque ses déclarations, et les documents qu'il produit à leur appui, sont sans pertinence au regard des conditions d'octroi de l'asile ou, du fait notamment de leur caractère inconsistant ou trop général, incohérent ou très peu plausible, sont manifestement dépourvus de crédibilité et font apparaître comme manifestement dénuées de fondement les craintes de persécutions ou d'atteintes graves alléguées par l'intéressé au titre de l'article 1er, A, 2 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ou de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à la protection subsidiaire.

4. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de sa demande d'asile, Mme B... a fait valoir qu'originaire de Tananarive et inscrite à l'université, elle a rejoint, au mois de janvier 2022, l'Union nationale pour la démocratie et le développement (UNDD) et a intégré, au sein de cette formation, un groupe de lanceurs d'alertes et que, dans ce cadre, elle a partagé sur les réseaux sociaux des informations, afin d'informer la population, notamment sur une affaire de disparition d'or, sur la malnutrition au sud du pays ou sur les problèmes d'électricité et d'eau. Elle a fait valoir également que, du fait de cette activité de lanceuse d'alerte, elle a fait l'objet de menaces à compter du mois d'octobre 2022 et que, craignant pour sa sécurité, elle a quitté son pays d'origine le 18 janvier 2023 pour rejoindre la France le lendemain.

5. Toutefois, il ressort des pièces du dossier et, notamment, du compte-rendu de l'entretien du 23 janvier 2023 ainsi que de ses écritures en première instance et en appel que Mme B... a tenu des propos particulièrement sommaires ou évasifs sur ses motivations à rejoindre l'UNDD au mois de janvier 2022. De même, l'intéressée a fait montre d'une méconnaissance manifeste de cette formation politique, de son organisation et de son idéologie ou de son programme. En outre, elle n'a livré que des indications élusives ou inconsistantes sur ses activités de lanceuse d'alerte, via les réseaux sociaux, sur les informations qu'elle aurait ainsi partagées ou encore sur leur origine ou leur contenu. Par ailleurs, elle n'a livré aucun commencement d'explication sérieuse sur les menaces dont elle aurait fait l'objet à compter du mois d'octobre 2022, sur leur contexte ou sur leurs auteurs, sur leur fréquence ou encore sur leur teneur, et n'a fourni aucune indication probante sur l'élément déclencheur, l'organisation et les modalités de son départ de son pays dans un tel contexte. Enfin, la requérante n'a pas produit en appel les documents dont elle s'est prévalu lors de l'audience devant le premier juge, documents qui n'ont pas été versés au dossier de première instance, alors que la seule circonstance que les refus d'entrée en France au titre de l'asile opposés à trois des personnes qui sont arrivés le même jour avec Mme B... ont été annulés par le tribunal administratif de Paris, ne saurait suffire à démontrer que sa demande d'asile ne revêtait pas un caractère manifestement infondée, l'intéressée n'ayant pas fourni le moindre éclaircissement un tant soit peu précis et crédible sur ce groupe militant auquel elle aurait appartenu.

6. Il suit de là qu'en estimant, par sa décision du 23 janvier 2023, que la demande d'asile de Mme B... était manifestement infondée et en refusant en conséquence son entrée sur le territoire français au titre de l'asile, le ministre de l'intérieur et des outre-mer n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 352-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2023.

Le magistrat désigné,

R. d'HAËMLa greffière,

O. BADOUX-GRARE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA00395 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge unique
Numéro d'arrêt : 23PA00395
Date de la décision : 30/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Rudolph D’HAEM
Rapporteur public ?: Mme JAYER
Avocat(s) : SELARL CENTAURE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-05-30;23pa00395 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award