La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/03/2023 | FRANCE | N°22PA00195

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 17 mars 2023, 22PA00195


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Finamur a demandé au tribunal administratif de Montreuil la restitution partielle de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), de la taxe additionnelle et des frais de gestion correspondants dont elle s'est acquittée au titre de l'année 2018, pour un montant de 1 458 533 euros.

Par un jugement n° 2011187 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire

enregistrés le 14 janvier 2022 et le 18 juillet 2022, la société Finamur, représentée par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Finamur a demandé au tribunal administratif de Montreuil la restitution partielle de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), de la taxe additionnelle et des frais de gestion correspondants dont elle s'est acquittée au titre de l'année 2018, pour un montant de 1 458 533 euros.

Par un jugement n° 2011187 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 14 janvier 2022 et le 18 juillet 2022, la société Finamur, représentée par Me Decombe, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2011187 du 16 décembre 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) de prononcer la restitution des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la spécificité des opérations de crédit-bail implique de comptabiliser la taxe foncière et la taxe sur les bureaux en Ile-de-France au sein du compte 604 " charges et opérations de

crédit-bail et assimilés " dont les dispositions ont pour objectif de déroger au principe d'enregistrement des charges " par nature " ;

- cette analyse n'a pas été remise en cause par l'autorité des normes comptables dans sa réponse adressée le 24 janvier 2013 à la présidente de l'association française des sociétés financières ;

- si les taxes en litige devaient être comptabilisées au compte 62 " charges générales d'exploitation ", le règlement comptable n° 91-01 du 16 janvier 1991 prévoit dans son article 3.5 que les charges refacturées et les produits rétrocédés à " l'euro " peuvent être présentés en déduction des produits et charges auxquels ils se rapportent. La refacturation de ces taxes afférentes aux immeubles loués en crédit-bail peut donc venir directement en déduction du compte de charges correspondant.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 mai 2022 et le 2 aout 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les moyens soulevés par la SA Finamur ne sont pas fondés ;

- au regard du caractère persistant des contestations de même nature introduites par la société devant les juridictions administratives, une amende pour recours abusif pourrait être prononcée par le juge en application de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de Mme Prévot, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que la société Finamur a refacturé aux crédits-preneurs des immeubles concernés le montant des taxes foncières et des taxes annuelles sur les locaux à usage de bureaux qu'elle avait acquittées au titre de ces immeubles. Estimant que les cotisations de taxe foncière et de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux qu'elle avait versées au titre de ces immeubles avaient la nature de charges d'exploitation bancaires devant venir en déduction de sa valeur ajoutée pour le calcul de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises en application de l'article 1586 sexies du code général des impôts, elle a présenté, le 20 décembre 2019, une réclamation tendant à obtenir la restitution partielle des cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises ainsi que de la taxe additionnelle et des frais de gestion correspondants qu'elle a acquittés au titre de l'année 2018. L'administration fiscale a rejeté cette réclamation le 3 septembre 2020. La société Finamur relève appel du jugement du 16 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses conclusions tendant à la restitution partielle de ces impositions.

2. Aux termes du 1 du II de l'article 1586 ter du code général des impôts : " La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises est égale à une fraction de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie à l'article 1586 sexies (...) ". Aux termes du III de l'article 1586 sexies de ce code : " Pour les établissements de crédit (...) / : 1. Le chiffre d'affaires comprend l'ensemble des produits d'exploitation bancaires et des produits divers d'exploitation autres que les produits suivants : / a) 95 % des dividendes sur titres de participation et parts dans les entreprises liées ; b) Plus-values de cession sur immobilisations figurant dans les produits divers d'exploitation autres que celles portant sur les autres titres détenus à long terme ; c) Reprises de provisions spéciales et de provisions sur immobilisations ; d) Quotes-parts de subventions d'investissement ; e) Quotes-parts de résultat sur opérations faites en commun. / 2. La valeur ajoutée est égale à la différence entre : / a) D'une part, le chiffre d'affaires tel qu'il est défini au 1, majoré des reprises de provisions spéciales et des récupérations sur créances amorties lorsqu'elles se rapportent aux produits d'exploitation bancaire : / b) Et, d'autre part : / - les charges d'exploitation bancaires autres que les dotations aux provisions sur immobilisations données en crédit-bail ou en location simple ; / (...) - les charges diverses d'exploitation, à l'exception des moins-values de cession sur immobilisations autres que celles portant sur les autres titres détenus à long terme et des quotes-parts de résultat sur opérations faites en commun (...) ". Ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être prises en compte dans le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Il y a lieu, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, de se reporter, dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée, au règlement du comité de la réglementation bancaire du 26 novembre 2014 relatif à l'établissement et à la publication des comptes des établissements de crédit alors en vigueur ainsi qu'au plan comptable des établissements de crédit.

3. D'une part, ce règlement qui s'est substitué aux dispositions similaires, invoquées par la société requérante, du règlement du comité de la réglementation bancaire du 16 janvier 1991, prévoit que les produits sur opérations de crédit-bail et assimilées et les charges sur opérations de crédit-bail et assimilées sont des produits et charges d'exploitation bancaires du compte de résultat des établissements exerçant une activité de crédit-bail à titre principal ou de manière significative. Le commentaire du poste 4 " charge sur opérations de crédit-bail et assimilées " indique que ce poste recouvre les charges provenant d'éléments figurant au poste 9 " crédit-bail et location avec option d'achat " de l'actif du bilan, lequel comprend les biens meubles ou immeubles effectivement loués en crédit-bail, et que ces charges sont " notamment les dotations aux amortissements et les moins-values de cession relatives à des immobilisations données en crédit-bail ". Par ailleurs, le commentaire du poste 15 " charges générales d'exploitation " précise que ce poste comprend " les impôts relatifs aux frais de personnel, et (...) les autres impôts et taxes ". Enfin, le troisième alinéa de l'article 1213-2 du même règlement dispose que " (...) les charges refacturées et les produits rétrocédés au franc le franc peuvent être présentés en déduction des produits et charges auxquels ils se rapportent ".

4. D'autre part, le plan comptable des établissements de crédit distingue les " Impôts et taxes ", comptabilisés au poste 62, des " charges diverses d'exploitation " qui doivent être comptabilisées aux postes 641 à 649 et auxquelles renvoient les " charges diverses d'exploitation " mentionnées au troisième alinéa du b) du 2 du III de l'article 1586 sexies mentionnés au point 2.

5. En premier lieu, il résulte des termes mêmes de ces dispositions que la taxe foncière sur les propriétés bâties et la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux doivent être imputées au poste 15 " charges générales d'exploitation ", lequel n'est pas déductible pour le calcul du produit net bancaire, et non au poste 4 " charges d'exploitation sur opérations de crédit-bail ", lequel est déductible. Si la société requérante fait valoir la présence de l'adverbe " notamment " dans la description du contenu de ce dernier poste, pour en déduire que la liste des opérations qui y figure ne serait pas limitative, et se prévaut d'un principe de comptabilisation au sein du produit net bancaire de l'ensemble des produits et des charges afférents aux opérations de crédit-bail en fonction de la seule destination de ces produits et charges, ces arguments ne sauraient prévaloir sur les termes exprès du règlement du 26 novembre 2014 alors en vigueur.

6. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient la société requérante, la réponse faite par le président de l'Autorité des normes comptables le 24 janvier 2013 à la présidente de l'association française des sociétés financières, qui se borne à évoquer l'option prévue par l'article 1213-2, ne prend pas position sur l'imputation au poste 4 de la taxe foncière afférente à un bien donné en crédit-bail et aucune conséquence ne peut en être tirée pour l'application des dispositions citées ci-dessus de l'article 1586 sexies du code général des impôts.

7. En troisième lieu, la société Finamur fait valoir qu'elle refacture aux preneurs la taxe foncière sur les propriétés bâties et la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, de sorte que, selon elle, ces taxes ne seraient pas à prendre en compte dans la valeur ajoutée dès lors qu'elles relèveraient des charges et produits refacturés à l'euro l'euro. Toutefois, si les dispositions précitées de l'article 1213-2 du règlement du 26 novembre 2014 prévoient, de manière générale, la possibilité de déduire les charges refacturées des produits auxquels elles s'appliquent, elles ne sauraient avoir pour effet de rendre déductible fiscalement, pour le calcul de la valeur ajoutée, une charge telle que la taxe foncière ou la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, qui incombe par nature au propriétaire du bien et dont la refacturation au crédit-preneur doit être regardée comme un complément de loyer demandé à celui-ci.

8. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ". La faculté prévue par cette disposition constituant un pouvoir propre du juge, la demande présentée par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique à l'appui de son mémoire en défense, tendant à ce que la société Finamur soit condamnée à une telle amende, à supposer qu'il ait entendu la maintenir alors qu'il ne les reprend pas dans ses conclusions, ne sont en tout état de cause pas recevables.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Finamur n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Finamur est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme (SA) Finamur et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction des grandes entreprises (division des affaires juridiques).

Délibéré après l'audience du 17 février 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Soyez, président,

- Mme Boizot, première conseillère,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mars 2023.

La rapporteure,

C. A...

Le président,

J.-E. SOYEZ

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00195


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00195
Date de la décision : 17/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SOYEZ
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: Mme PRÉVOT
Avocat(s) : CABINET P.D.G.B

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-03-17;22pa00195 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award