Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé.
Par un jugement n° 2201211 du 8 septembre 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée du 7 octobre 2022, M. C..., représenté par Me Aucher, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2201211 du 8 septembre 2022 du Tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis à titre principal de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire de réexamen sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de séjour est insuffisamment motivé ;
- il méconnaît les articles L. 423-7 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant camerounais, né le 24 mars 1986, est entré sur le territoire français le 23 octobre 2016. Le 29 octobre 2021, il a sollicité le renouvellement de sa carte de séjour temporaire en qualité de parent d'enfant français. Par un arrêté du 22 décembre 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé. Par un jugement du 8 septembre 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de cet arrêté. M. C... relève appel de ce jugement.
Sur la légalité de l'arrêté du 22 décembre 2021 :
2. Aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour du droit des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Aux termes de l'article 3-1 la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
3. M. C... est le père d'une enfant de nationalité française, née le 23 juin 2018 et a, à ce titre bénéficié de titres de séjour du 2 novembre 2019 au 11 novembre 2021. Le requérant justifie d'une part par les pièces produites, et notamment les attestations de transfert d'argent, contribuer à l'entretien de son enfant, à hauteur d'une centaine d'euros par mois pour l'année 2021. En outre, il ressort des pièces produites qu'il vit de façon discontinue avec sa fille depuis sa naissance et que sa présence auprès de sa fille a été interrompue à compter de son départ du domicile familial en mars 2021. Toutefois, quand bien même le requérant ne vivrait plus avec sa fille, les éléments produits suffisent à démontrer qu'il participe à son éducation. En outre, compte-tenu des problèmes de santé de la mère de l'enfant, qui souffre d'importants troubles psychologiques, et de la mise en place d'une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert ordonnée par le juge pour enfants de B... à compter du 21 avril 2021, et alors qu'il est établi que le lien entre le requérant et sa fille n'est pas rompu, il est dans l'intérêt supérieur de l'enfant de maintenir ce lien. Par suite, M. C... est fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de la Seine-Saint-Denis a méconnu d'une part les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour du droit des étrangers et du droit d'asile et d'autre part les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution / (...) ". Aux termes de l'article L. 911-3 de ce code : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ".
6. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans la situation de droit ou de fait de M. C..., que le préfet de la Seine-Saint-Denis délivre à celui-ci une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par M. C....
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1 : Le jugement n° 2201211 du 8 septembre 2022 du Tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 22 décembre 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à M. C... une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. C... une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 7 février 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente assesseure,
- Mme Jurin, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 mars 2023.
La rapporteure,
E. A...Le président,
C. JARDIN
La greffière,
L. CHANA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22PA04396 2