Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler deux arrêtés du 5 août 2022 par lesquels le préfet de police l'a, d'une part, obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé et, d'autre part, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois.
Par un jugement n° 2212651 du 23 septembre 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée du 7 octobre 2022, M. B..., représenté par Me Gonzalez, demande à la Cour :
1°) de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler le jugement n° 2212651 du 23 septembre 2022 du Tribunal administratif de Montreuil ;
3°) d'annuler les arrêtés du 5 août 2022 du préfet de police ;
4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à son avocat au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les arrêtés attaqués sont insuffisamment motivés ;
- il ne constitue pas une menace à l'ordre public ;
- les arrêtés attaqués méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi sur l'aide juridictionnelle ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain, né le 7 septembre 1996 a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler, d'une part, l'arrêté du 5 août 2022 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination et, d'autre part, l'arrêté du même jour par lequel le préfet de police a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois. M. B... relève appel du jugement du 23 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président ". Aux termes de l'article 61 du décret du 28 décembre 2020 susvisé : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence (...). / L'admission provisoire est accordée par (...) le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle (...) sur laquelle il n'a pas encore été statué ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le requérant n'a pas déposé de demande d'aide juridictionnelle depuis l'enregistrement de sa requête. Par suite et en l'absence d'urgence, il n'y a pas lieu de l'admettre à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, l'arrêté du 5 août 2022 portant obligation de quitter le territoire français vise les textes dont il fait application, notamment les dispositions et stipulations applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il précise l'identité, la date et le lieu de naissance de M. B... ainsi que sa nationalité. Il précise que M. B... ne justifie pas posséder de titre de séjour pour se maintenir sur le territoire français et ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire. Par suite, cet arrêté est suffisamment motivé.
5. En deuxième lieu, si M. B... se prévaut de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cet article n'était plus en vigueur à la date de l'arrêté attaqué. S'il peut être regardé comme soutenant à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire du fait qu'il ne constitue pas une menace à l'ordre public, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'obligation de quitter le territoire contestée a été prise sur le fondement du 1° de l'article L.611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'elle est motivée par la circonstance que M. B... ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / (...) ".
7. Si M. B... soutient qu'il réside chez sa sœur, de nationalité française et qu'il est également proche d'une autre de ses sœurs, titulaire d'un titre de séjour, il est célibataire et sans enfant à charge. En outre, M. B... n'apporte aucun élément de nature à établir la durée de son séjour en France. Ainsi, compte tenu de ces éléments, la décision contestée ne porte pas au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté. Pour les mêmes raisons, le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation de l'intéressé.
Sur le refus de délai de départ volontaire :
8. En premier lieu, le refus de délai de départ volontaire comporte l'énoncé des éléments de droit et de fait qui constituent le fondement des décisions en cause. Il est donc suffisamment motivé.
9. En deuxième lieu, le refus de délai de départ volontaire est motivée d'une part par l'existence d'une menace à l'ordre public et d'autre part par l'existence d'un risque que M. B... se soustraie à cette décision dès lors qu'il ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et qu'il n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour. M. B... ne conteste pas ce second motif. Ainsi, quand bien même M. B... ne constituerait pas une menace à l'ordre public, il ressort des pièces du dossier que le préfet de police aurait pris la même décision.
10. En troisième lieu, pour les mêmes raisons que celles exposées au paragraphe 7, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur l'interdiction de retour sur le territoire :
11. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
12. Il ressort des pièces du dossier que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois est motivée par la triple circonstance que M. B... constitue une menace à l'ordre public, qu'il allègue être entré en France depuis deux ans et qu'il est célibataire et sans enfant. Toutefois, la simple circonstance que M. B... ait été interpellé pour des faits de vol en réunion alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ces faits ont donné lieu à poursuite, ne suffit pas à établir qu'il constitue une menace à l'ordre public. En outre, et eu égard aux attaches familiales dont il dispose en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait sans tenir compte de ce motif prononcé à l'encontre de l'intéressé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 5 août 2022 en tant qu'il prononce à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
14. L'annulation prononcée par le présent arrêt de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français n'implique pas le réexamen de la situation de M. B....
Sur les frais liés à l'instance :
15. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y pas lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par M. B... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : M. B... n'est pas admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le jugement n° 2212651 du 23 septembre 2021 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du préfet de police du 5 août 2022 portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.
Article 3 : L'arrêté du préfet de police du 5 août 2022 est annulé en tant qu'il prononce à l'encontre de M. B... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 7 février 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente assesseure,
- Mme Jurin, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 mars 2023.
La rapporteure,
E. A...Le président,
C. JARDIN
La greffière,
L. CHANA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22PA04395 2