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01/03/2023 | FRANCE | N°21PA04559

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 01 mars 2023, 21PA04559


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013, 2014 et 2015, en droits et pénalités.

Par un jugement n° 1910334/1-2 du 8 juin 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 août 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Philippe Albert, demandent

à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1910334/1-2 du 8 juin 2021 du Tribunal administratif d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013, 2014 et 2015, en droits et pénalités.

Par un jugement n° 1910334/1-2 du 8 juin 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 août 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Philippe Albert, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1910334/1-2 du 8 juin 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est entaché d'omission à statuer sur le moyen tiré de ce que la SCP respectait la condition d'embauche de 50 % des salariés dans la zone franche urbaine ;

- le jugement est insuffisamment motivé en raison d'une mauvaise appréciation des faits ;

- le service a procédé à une vérification de comptabilité, sans les en informer par l'envoi de l'avis prévu à l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, et non à un contrôle sur pièces ;

- la clause de 50 % de salariés embauchés localement s'applique seulement aux nouvelles sociétés, et en tout état de cause à la seule condition qu'elles emploient deux salariés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 21 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au

16 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de Mme Prévot, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... est associé à 50 % de la SCP Cohen-Bouhanna, relevant de l'article 8 du code général des impôts, qui exerce une activité d'expertise-comptable. A la suite du contrôle sur pièces dont elle a fait l'objet, conclue par une reprise partielle de l'exonération d'impôt sur les bénéfices prévue par l'article 44 octies A du code général des impôts en cas d'implantation dans une zone franche urbaine (ZFU), M. et Mme A... ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2013 à 2015, à concurrence de la quote-part de M. A... dans le capital de la SCP. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 8 juin 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions, en droits et pénalités.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort du jugement attaqué, et en particulier de son point 9, que le Tribunal, retenant que les rémunérations versées aux salariés de la SCP étaient supérieures à deux fois le salaire minimum de croissance pour les trois années d'imposition en litige, en a déduit que la société ne pouvait dès lors bénéficier ni de l'exonération prévue par l'article 12 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996, ni, par voie de conséquence, de l'exonération prévue par les dispositions applicables de l'article 44 octies A du code général des impôts. Il s'ensuit que les premiers juges ont implicitement mais nécessairement considéré que la méconnaissance de cette condition suffisait à fonder la remise en cause du dispositif fiscal litigieux et qu'il n'était dès lors pas nécessaire d'examiner la condition de résidence, dont l'administration avait également opposé la méconnaissance pour rejeter partiellement l'exonération fiscale litigieuse. Le moyen tiré de l'omission à statuer sur le moyen tiré de ce que la SCP respectait la condition d'embauche de 50 % des salariés dans la zone franche urbaine doit dès lors être écarté. Par ailleurs, le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient inexactement apprécié les faits qui leur étaient soumis, qui porte sur le bien-fondé du jugement attaqué, est sans incidence sur sa régularité.

Sur la régularité de la procédure :

3. Aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " L'administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances. Elle contrôle également les documents déposés en vue d'obtenir des déductions, restitutions ou remboursements. A cette fin, elle peut demander aux contribuables tous renseignements, justifications, ou éclaircissements relatifs aux déclarations souscrites ou aux actes déposés. " Aux termes de l'article L. 80 F du même livre : " Pour rechercher les manquements aux règles de facturation auxquelles sont soumis les assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée en application du code général des impôts (...), les agents des impôts ayant au moins le grade de contrôleur peuvent se faire présenter les factures, la comptabilité matière ainsi que les livres, les registres et les documents professionnels pouvant se rapporter à des opérations ayant donné ou devant donner lieu à facturation et procéder à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation. (...) L'enquête définie au présent article ne relève pas des procédures de contrôle de l'impôt prévues aux articles L. 10 à L. 47 A. " L'article L. 80 H du même livre dispose : " A l'issue de l'enquête prévue à l'article L. 80 F, les agents de l'administration établissent un procès-verbal consignant les manquements constatés ou l'absence de tels manquements. La liste des documents dont une copie a été délivrée lui est annexée s'il y a lieu. (...) Les constatations du procès-verbal ne peuvent être opposées à cet assujetti ainsi qu'aux tiers concernés par la facturation que dans le cadre des procédures de contrôle mentionnées à l'article L. 47 au regard des impositions de toute nature et de la procédure d'enquête prévue à l'article L. 80 F. "

4. Il résulte de l'instruction que la brigade de contrôle et de recherches a engagé, le 26 juillet 2016, une enquête sur le fondement de l'article L. 80 F du livre des procédures fiscales, qui ne relève pas de la vérification de comptabilité prévue à l'article L. 13 du même livre, et qui a été conclue par un procès-verbal du 24 août 2016 constatant l'absence de manquement aux règles de facturation. La circonstance que l'administration fiscale ait, par ailleurs, mené un contrôle sur pièces conclu par une proposition de rectification du 12 septembre 2016 n'a pas eu plus pour effet de caractériser l'existence d'une vérification de comptabilité dès lors qu'il ressort de la proposition de rectification en cause que le service ne s'est pas fondé sur les constatations relevées à l'issue de l'enquête sur place mais sur l'examen des seules déclarations annuelles des données sociales unifiées. Si les requérants font valoir que les demandes faites dans le cadre de l'enquête dépassaient le cadre des articles L. 80 F et suivants du livre des procédures fiscales, cette circonstance est en tout état de cause sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition litigieuse. Par suite, le moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

5. D'une part, aux termes de l'article 44 octies A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Les contribuables qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2014, créent des activités dans les zones franches urbaines (...) sont exonérés d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans la zone jusqu'au 31 décembre 2010 pour les contribuables qui y exercent déjà une activité au 1er janvier 2006 ou, dans le cas contraire, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui du début de leur activité dans l'une de ces zones. (...) / Le bénéfice exonéré ne peut excéder 100 000 € par contribuable et par période de douze mois, majoré de 5 000 € par nouveau salarié embauché à compter du 1er janvier 2006 domicilié dans une zone urbaine sensible ou dans une zone franche urbaine et employé à temps plein pendant une période d'au moins six mois. Cette condition est appréciée à la clôture de l'exercice ou de la période d'imposition au titre duquel ou de laquelle l'exonération s'applique. / Pour les contribuables qui créent des activités dans une zone franche urbaine à compter du 1er janvier 2012 et emploient au moins un salarié au cours de l'exercice ou de la période d'imposition au titre desquels l'exonération s'applique, le bénéfice de l'exonération est subordonné à la condition que l'entreprise ait bénéficié de l'exonération prévue à l'article 12 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville. Cette condition est appréciée à la clôture de l'exercice ou de la période d'imposition au titre desquels l'exonération s'applique. Lorsque le contribuable n'a pas bénéficié de l'exonération mentionnée au même article 12 de façon permanente au cours d'un exercice ou d'une période d'imposition, le bénéfice exonéré est corrigé proportionnellement à la période au cours de laquelle l'exonération mentionnée audit article 12 s'est appliquée. (...) ".

6. D'autre part, aux termes de l'article 12 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville : " Les gains et rémunérations (...) versés au cours d'un mois civil aux salariés employés par un établissement implanté dans une des zones franches urbaines (...) sont, dans les conditions fixées aux II, III et IV, exonérés des cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales, des allocations familiales ainsi que du versement de transport et des contributions et cotisations au Fonds national d'aide au logement (...). A partir du 1er janvier 2009, le montant de l'exonération décroît de manière linéaire lorsque la rémunération horaire est supérieure au salaire minimum de croissance majoré de 40 % et devient nul lorsque la rémunération horaire est égale à (...) deux fois le salaire minimum de croissance à partir du 1er janvier 2011 ". Aux termes de l'article 13 de la même loi, dans sa version résultant de l'article 26 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 : " (...) III. ' Pour les entreprises créées ou implantées dans une zone franche urbaine - territoires entrepreneurs à compter du 1er janvier 2012, le bénéfice de l'exonération mentionnée au I de l'article 12 est subordonné, lors de toute nouvelle embauche, à la condition qu'à la date d'effet de cette embauche : 1° Le nombre de salariés remplissant les conditions fixées au IV du même article 12, dont l'horaire prévu au contrat de travail est au moins égal à une durée minimale fixée par décret, et résidant dans l'une des zones franches urbaines - territoires entrepreneurs ou dans l'un des quartiers prioritaires de la politique de la ville de l'unité urbaine dans laquelle est située la zone franche urbaine - territoire entrepreneur soit égal au moins à la moitié du total des salariés employés dans les mêmes conditions ; 2° Ou le nombre de salariés, embauchés à compter de la création ou de l'implantation de l'entreprise et remplissant les conditions décrites au 1° du présent III, soit égal à la moitié du total des salariés embauchés dans les mêmes conditions, au cours de la même période. Ces dispositions s'appliquent pendant une période de cinq ans à compter de la création ou de l'implantation de l'entreprise dans une zone franche urbaine - territoire entrepreneur. En cas de non-respect de la proportion mentionnée aux 1° et 2°, constaté à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date d'effet de l'embauche, l'exonération n'est pas applicable aux gains et rémunérations versés jusqu'à la date d'effet des embauches nécessaires au respect de cette proportion. "

7. Il n'est pas contesté, d'une part, que la rémunération des salariées employées par la SCP Cohen-Bouhanna en 2013 et 2014 était supérieure au double du salaire minimum interprofessionnel de croissance. Par suite, en application des dispositions précitées de l'article 12 de la loi du 14 novembre 1996, les rémunérations en cause ne bénéficiaient pas de l'exonération mentionnée à cet article et l'administration était, par voie conséquence, fondée à remettre en cause l'exonération pratiquée par la SCP sur le fondement de l'article 44 octies A du code général des impôts au titre des exercices clos en 2013 et 2014. D'autre part, comme le fait valoir l'administration, il est constant qu'aucun des trois salariés ayant été employés par la société entre son installation dans la zone franche urbaine et la fin de l'année 2015 ne résidait dans l'une des zones franches urbaines - territoires entrepreneurs ou dans l'un des quartiers prioritaires de la politique de la ville de l'unité urbaine dans laquelle est située la zone franche urbaine - territoire entrepreneur en cause. Par suite, la SCP ne respectait, en 2015, aucune des deux conditions alternatives prévues par les dispositions précitées du III de l'article 13 de la loi du 14 novembre 1996, s'appréciant au regard, pour la première, de l'unique salarié employé en 2015 et, pour la seconde, de l'ensemble des salariés ayant été embauchés entre 2012 et 2015. La SCP ne pouvait en conséquence pas plus bénéficier de l'exonération mentionnée à l'article 12 de la même loi en 2015. L'administration était dès lors également fondée à remettre en cause l'exonération pratiquée par la SCP sur le fondement de l'article 44 octies A du code général des impôts au titre de l'exercice clos en 2015.

8. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités.

Sur les frais liés à l'instance :

9. L'Etat n'étant pas la partie perdante à l'instance, les conclusions de M. et Mme A... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 15 février 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- M. Segretain, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er mars 2023.

Le rapporteur,

A. C...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA04559 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04559
Date de la décision : 01/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PLATILLERO
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme PRÉVOT
Avocat(s) : ALBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-03-01;21pa04559 ?
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