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03/02/2023 | FRANCE | N°21PA00421

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 03 février 2023, 21PA00421


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, Mme G... K... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler, d'une part, l'arrêté du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie du 19 juillet 2019 l'admettant à faire valoir ses droits à la retraite pour inaptitude définitive à servir à compter du 1er mai 2018 et, d'autre part, l'arrêté du directeur de la caisse locale de retraites du 25 juillet 2019 lui concédant une pension de retraite proportionnelle.

Par un jugement n°s 1900381

et 1900384 du 12 novembre 2020, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, Mme G... K... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler, d'une part, l'arrêté du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie du 19 juillet 2019 l'admettant à faire valoir ses droits à la retraite pour inaptitude définitive à servir à compter du 1er mai 2018 et, d'autre part, l'arrêté du directeur de la caisse locale de retraites du 25 juillet 2019 lui concédant une pension de retraite proportionnelle.

Par un jugement n°s 1900381 et 1900384 du 12 novembre 2020, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté ses demandes, après les avoir jointes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 janvier 2021 et le 31 août 2022, Mme K..., représentée par Me Lerat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1900381 et 1900384 du 12 novembre 2020 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2019 du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ;

3°) d'annuler l'arrêté du 25 juillet 2019 du directeur de la caisse locale de retraites de Nouvelle-Calédonie ;

4°) d'enjoindre au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, à titre principal, de prendre une décision de mise à la retraite pour inaptitude définitive en lien avec le service ne prenant effet qu'à compter de l'expiration de la durée totale du congé de maladie auquel elle a droit et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) si besoin, d'ordonner une expertise en vue de déterminer si elle souffre de troubles psychiatriques et, dans l'affirmative, de se prononcer sur l'origine de ces troubles et d'apprécier s'ils présentent ou non un caractère réversible ;

6°) de mettre à la charge de la Nouvelle-Calédonie une somme de 500 000 francs CFP, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé et le moyen tiré de la méconnaissance des articles 237 et 238 du code de procédure civile n'a pas été examiné ;

- l'arrêté du 19 juillet 2019 est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un vice de procédure dès lors il n'est pas établi que la commission d'aptitude était régulièrement composée, que les membres de cette commission ont été régulièrement convoqués, qu'ils ont disposé en temps utile des éléments nécessaires à l'examen du dossier ;

- l'avis de la commission d'aptitude a été émis dans des conditions irrégulières à raison de la partialité de certains membres ;

- l'arrêté attaqué est irrégulier à raison de l'illégalité de l'article 2 de la délibération n° 309 du 27 août 2002 relative au fonctionnement et à la composition de la commission d'aptitude dès lors qu'il classe les deux praticiens hospitaliers au nombre des représentants de l'administration et est ainsi contraire au principe de neutralité du service public ;

- le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie s'est cru à tort en situation de compétence liée par rapport au sens de l'avis de la commission d'aptitude ;

- cet arrêté est entaché d'une rétroactivité illégale ;

- en prononçant sa mise à la retraite alors qu'elle n'avait pas épuisé l'intégralité de ses congés de maladie, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a méconnu les dispositions de l'article Lp. 251-1 du code des pensions de retraites des fonctionnaires de Nouvelle-Calédonie ainsi que des articles 1 et 2 de l'arrêté n° 67-481/CG du 28 septembre 1967 ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'erreur d'appréciation, dans la mesure où il ne reconnaît pas l'imputabilité au service de la maladie ;

- il constitue une sanction disciplinaire déguisée illégale en l'absence de respect des règles de procédure adéquates et est entaché de détournement de pouvoir et de procédure ;

- ni la commission d'aptitude, ni l'autorité détentrice du pouvoir de nomination ne se sont prononcées sur son taux d'invalidité ;

- l'arrêté du 25 juillet 2019 est illégal en raison de l'illégalité de l'arrêté du 19 juillet 2019 ;

- il est entaché d'un vice de procédure dès lors il n'est pas établi que la commission d'aptitude était régulièrement composée, que les membres de cette commission ont été régulièrement convoqués, qu'ils ont disposé en temps utile des éléments nécessaires à l'examen du dossier et que l'avis a été émis dans des conditions régulières.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 novembre 2021 et le 3 novembre 2022, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de Mme K... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La requête et le mémoire en réplique de Mme K... ont été communiqués à la caisse locale de retraites de la Nouvelle Calédonie, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par une lettre du 2 décembre 2022, les parties ont été informées que la Cour était susceptible de relever d'office le moyen tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 19 juillet 2019 du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie en tant que celui-ci ne se prononce pas sur le taux d'invalidité de Mme K... en raison de l'édiction de l'arrêté du 4 octobre 2022 fixant son taux d'invalidité partielle permanente à 15% à compter du 1er mai 2018.

Mme K... a produit un mémoire en réponse à cette information sur l'existence d'un moyen susceptible d'être relevé d'office, qui a été enregistré le 9 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code des pensions de retraites des fonctionnaires de Nouvelle-Calédonie ;

- l'ordonnance n° 2015-1341 du 23 octobre 2015, et notamment son article 8 ;

- l'arrêté n° 67-481/CG du 28 septembre 1967 ;

- la délibération n° 309 du 27 août 2002 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de Mme Breillon, rapporteure publique,

- et les observations de Me Lerat, avocate de Mme K....

Une note en délibéré présentée pour Mme K... a été enregistrée le 13 janvier 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Mme K... était agent d'exploitation du cadre des postes et télécommunications de la Nouvelle-Calédonie. Par un arrêté du 2 mai 2018, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er mai 2018 pour inaptitude définitive à servir. Cet arrêté a été annulé par un jugement n° 1800206 du 31 janvier 2019 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie pour insuffisance de motivation. Par le même jugement, Le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a annulé par voie de conséquence, l'arrêté du 4 mai 2018 de la directrice par intérim de la caisse locale de retraites de Nouvelle-Calédonie fixant le montant de la pension de retraite attribuée à Mme K.... A la suite de ces annulations, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, d'une part, a adopté un nouvel arrêté le 19 juillet 2019 admettant Mme K... à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er mai 2018 pour inaptitude définitive à servir et le directeur de la caisse locale de retraites, d'autre part, a pris un nouvel arrêté le 25 juillet 2019 en vue de fixer le montant de la pension de retraite attribuée à l'intéressée. Par deux requêtes distinctes, Mme K... a demandé l'annulation de ces deux arrêtés au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie. Mme K... relève appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté ces deux requêtes, après les avoir jointes.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juillet 2019 du directeur de la caisse locale de retraites de Nouvelle-Calédonie :

2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " [...] le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : / [...] 7° Sur les litiges en matière de pensions de retraite des agents publics ; / [...] ". Aux termes de l'article R. 351-2 du même code : " Lorsqu'une cour administrative d'appel ou un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever de la compétence du Conseil d'Etat, son président transmet sans délai le dossier au Conseil d'Etat qui poursuit l'instruction de l'affaire. [...] ".

3. Le jugement attaqué, en tant qu'il statue sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juillet 2019 du directeur de la caisse locale de retraites de Nouvelle-Calédonie, a été rendu en premier et dernier ressort et n'est susceptible d'être contesté que par un pourvoi en cassation formé devant le Conseil d'Etat. Il y a lieu, dès lors, en application des dispositions de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, de transmettre au Conseil d'Etat les conclusions de Mme K... tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juillet 2019 du président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie en tant que celui-ci ne se prononce pas sur le taux d'invalidité de Mme K... :

4. Il ressort des pièces du dossier que par un arrêté du 4 octobre 2022, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a fixé le taux d'invalidité partielle permanente de Mme K... à 15% à compter du 1er mai 2018. En conséquence, les conclusions de Mme K... à fin d'annulation de l'arrêté du 19 juillet 2019 en tant qu'il ne se prononce pas sur son taux d'invalidité sont devenues son objet.

Sur la régularité du jugement attaqué :

5. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

6. Si Mme K... soutient que le jugement attaqué est entaché d'insuffisance de motivation dès lors qu'il n'a pas été répondu à l'ensemble de ses arguments au soutien du moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission d'aptitude, au soutien du moyen tiré de l'existence d'une sanction déguisée et au moyen tiré de l'erreur d'appréciation, notamment en ce qui concerne la nécessité de prescrire une expertise, le tribunal, qui n'était tenu que de répondre à ces moyens, sans nécessairement répondre à tous les arguments, n'a pas entaché son jugement d'un défaut de motivation. Au surplus, si Mme K... conteste le raisonnement suivi par les premiers juges en ce qui concerne la réponse apportée au moyen tiré de l'absence de communication des pièces du dossier aux membres de la commission d'aptitude, une telle contestation, qui a trait au bien-fondé du jugement, est sans incidence sur sa régularité. Enfin, le tribunal n'était pas tenu de répondre aux développements de la requérante tirés de la méconnaissance des articles 237 et 238 du code de procédure civile par le Dr J... dès lors que cette critique du rapport d'expertise rédigé par ce praticien ne constituait qu'un argument de la requérante à l'appui de son moyen tiré de l'erreur d'appréciation, auquel les premiers juges ont répondu.

Sur la légalité de l'arrêté du 19 juillet 2019 du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie l'admettant à faire valoir ses droits à la retraite pour inaptitude définitive à servir :

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de motivation :

7. L'arrêté attaqué vise les textes dont il fait application, notamment les dispositions applicables du code des pensions de retraites des fonctionnaires relevant des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie. Il comporte également les considérations de fait qui en constituent le fondement. Par suite, cet arrêté est suffisamment motivé et satisfait aux exigences de motivation requises par la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, applicable à la Nouvelle-Calédonie, contrairement à ce que soutient la requérante, conformément à l'article 8 de l'ordonnance du 23 octobre 2015 relative aux dispositions législatives du code des relations entre le public et l'administration. En outre, la circonstance que l'avis de la directrice de la caisse locale n'ait pas été joint à l'arrêté contesté est sans incidence sur la légalité de ce dernier.

En ce qui concerne l'irrégularité de la composition de la commission d'aptitude :

8. Aux termes de l'article 2 de la délibération n° 309 du 27 août 2002 relative au fonctionnement et à la composition de la commission d'aptitude : " La commission d'aptitude comprend en nombre égal des représentants de l'administration et des représentants du personnel. / 1- Lorsque la commission d'aptitude traite de questions relatives à un fonctionnaire territorial, sa composition est la suivante : / a- Représentants de l'administration : / - le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ou son représentant : président ; / - le représentant de l'employeur de l'agent dont la situation est examinée ; / - deux praticiens hospitaliers, médecins de sante´ publique ou médecins employés par une collectivité´ ou un établissement public désignés par le président de la commission. / b- Représentants du personnel : / - les quatre représentants du personnel de la commission administrative paritaire dont relève l'agent dont la situation est examinée. / (...) / En outre, un représentant de la caisse locale de retraite (CLR) siège en tant qu'expert au sein de ladite commission quelque soit sa composition. Ce représentant n'a pas droit de vote. ".

9. En premier lieu, si Mme K... reprend en appel le moyen tiré de l'illégalité de l'article 2 de cette délibération, invoquée par voie d'exception, ce moyen peut être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

10. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme H... C..., adjointe au chef du service des affaires juridiques et du dialogue social de la direction des ressources humaines et de la fonction publique de Nouvelle-Calédonie et titulaire d'une délégation pour signer toutes décisions relatives à la procédure d'aptitude des fonctionnaires de Nouvelle-Calédonie, et Mme E... A..., cheffe du service des ressources humaines de l'office des postes et télécommunications de la Nouvelle-Calédonie, doivent être regardées comme ayant eu qualité, eu égard aux attributions découlant de leurs fonctions, pour représenter respectivement le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et l'office des postes et télécommunications de la Nouvelle-Calédonie au sein de la commission d'aptitude. Enfin, la circonstance que Mme M... B... L..., directrice adjointe à la caisse locale de retraites, n'ait pas été habilitée à représenter la caisse de retraites est sans incidence dès lors que Mme B... L... participe à la commission d'aptitude en tant qu'experte sans droit de vote.

11. En troisième lieu, concernant la désignation des médecins, membres de la commission d'aptitude, comme celle des autres membres de la commission, aucun texte ni aucun principe n'imposait à l'autorité investie du pouvoir de nomination de prendre un acte désignant nommément les médecins chargées de siéger au sein de la commission d'aptitude et la convocation de ces derniers en vue de la réunion de la commission vaut désignation. En outre, il ressort des pièces du dossier que les deux médecins convoqués, dont l'un n'a pas siégé, répondent tous les deux aux conditions de désignation fixées à l'article 2 de la délibération du 27 août 2002.

12. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que la règle de quorum posée à l'article 4 de la délibération n° 309 du 27 août 2002, selon laquelle la commission " ne peut valablement délibérer que si la moitié au moins des membres est présente ", a été respectée lors de la séance de la commission du 6 avril 2018 au cours de laquelle cinq membres étaient présents. Ainsi la circonstance que seul un praticien hospitalier, le docteur F..., ait siégé au sein de la commission d'aptitude n'a pas été de nature à priver la requérante d'une garantie. En outre, ce praticien hospitalier a siégé en qualité de représentant de l'administration en sa qualité de médecin de sante´ publique ou de médecin employé par une personne publique en application de l'article 2 précité de la délibération du 27 août 2002 sans que la requérante ne puisse utilement soutenir que cette circonstance révèle une méconnaissance des principes de neutralité ou d'impartialité.

13. En cinquième lieu, Mme K... soutient que le principe de parité n'a pas été respecté lors de la séance du 6 avril 2018 de la commission d'aptitude. Toutefois, le principe de parité posé à l'article 2 de la délibération n° 309 du 27 août 2002 ne concerne que la composition d'ensemble de la commission d'aptitude. Il ne subordonne pas la régularité des avis émis par cette commission à la présence en nombre égal de représentants de l'administration et de représentants du personnel et au rétablissement de la parité quand le nombre de représentants de l'administration et de représentants du personnel est différent. Le moyen tiré de la méconnaissance du principe de parité doit donc être écarté.

14. En sixième lieu, la circonstance que Mme A... ait représenté l'administration devant la commission d'aptitude lors de l'examen de la mutation de Mme K... lors de la séance du 5 octobre 2017 n'est pas de nature à établir que Mme A..., représentante de l'administration au sein de la commission d'aptitude, aurait manqué à son obligation d'impartialité ou n'aurait pas pu siéger au sein de la commission d'aptitude. De même, la circonstance que le docteur F... travaille au centre hospitalier sous l'autorité du docteur I..., auteur d'un rapport d'expertise du 15 décembre 2017 sur l'état de la requérante, n'est pas de nature à établir que le docteur F... aurait manqué à son obligation d'impartialité ou qu'il n'aurait pas dû siéger au sein de la commission d'aptitude.

En ce qui concerne l'irrégularité de la procédure suivie devant la convocation de la commission d'aptitude :

15. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que les membres de la commission d'aptitude ont été régulièrement convoqués à la séance du 6 avril 2018 par un courrier du 27 mars 2018 envoyés aux représentants de l'administration et aux représentants du personnel. Si la requérante soutient que l'administration n'établit pas la date de réception de ces courriers, elle n'apporte aucun élément de nature à établir que les convocations n'auraient pas été reçues par certains membres de la commission.

16. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient Mme K..., il ne ressort pas des pièces du dossier que les membres de la commission d'aptitude, et notamment les représentants du personnel, n'auraient pas disposé en temps utile des éléments nécessaires à l'examen de son dossier ou qu'ils n'auraient pas reçu la communication des éléments qu'elle a transmis, alors qu'au demeurant la commission d'aptitude s'est réunie à deux reprises le 9 mars 2008 puis le 6 avril 2018 pour examiner sa situation et que la seconde convocation a été justifiée par la nécessité d'obtenir des éléments complémentaires.

17. En troisième lieu, Mme K... ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance par M. J... dans le rapport d'expertise rédigé le 15 décembre 2017 des articles 237 et 238 du code de procédure civile. En outre, et en tout état de cause, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas du rapport d'expertise du Dr J..., que ce dernier aurait été réalisé dans des conditions irrégulières ayant nécessité la réalisation d'une seconde expertise.

En ce qui concerne la légalité interne :

18. Il ne ressort ni des termes de l'arrêté, ni des pièces du dossier que le président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie, qui a indiqué les motifs qui fondent la décision contestée, se serait cru à tort en situation de compétence liée par rapport à l'avis émis par la commission d'aptitude.

19. Pour contester l'arrêté du 19 juillet 2019 par lequel le président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie a prononcé son admission à la retraite pour invalidité, Mme K... fait valoir qu'elle ne peut être considérée comme ayant épuisé ses droits à congé de maladie dès lors que son état de santé aurait justifié qu'un congé de longue maladie ou un congé de longue durée lui soit accordé.

20. D'une part, Mme K... soutient que l'arrêté contesté méconnaît les articles 1 et 2 de l'arrêté n° 67-481/CG du 28 septembre 1967 relatif au congé de longue durée des fonctionnaires des cadres territoriaux. Toutefois les éléments produits ne permettent pas d'établir que Mme K... aurait pu bénéficier d'un congé de longue durée, qu'elle n'a au demeurant pas demandé. Dès lors elle ne saurait utilement se prévaloir des articles 1 et 2 de l'arrêté du 28 septembre 1967.

21. D'autre part, si Mme K... soutient qu'elle n'aurait pas épuisé ses droits à congés maladie, en particulier à congés de longue maladie, elle n'établit pas avoir fait une demande de congé longue maladie. En outre, les éléments apportés ne permettent pas d'établir que Mme K... n'avait pas à la date de l'arrêté contesté épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire de douze mois.

22. Si les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires, l'administration peut, en dérogeant à cette règle, leur conférer une portée rétroactive, dans la mesure nécessaire, pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation. L'annulation de la décision du 2 mai 2018 admettant Mme K... à faire valoir ses droits à la retraite par le jugement du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 31 janvier 2019 a eu pour effet de replacer celle-ci dans la position administrative qui était la sienne à cette date et à d'obliger l'autorité administrative compétente à prendre rétroactivement les mesures nécessaires pour la placer en situation régulière. Il suit de ce qui a été dit aux points 20 à 22 que la décision attaquée, qui régularise la situation de l'intéressée en comblant un vide juridique, ne méconnaît pas le principe de non rétroactivité des actes administratifs.

23. Enfin, Mme K..., en se bornant à soutenir que son inaptitude définitive est imputable au service, n'apporte aucun élément de nature à critiquer la reconnaissance de son inaptitude définitive. Ainsi, c'est donc sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation que, conformément à l'avis de la commission d'aptitude du 6 avril 2018 sur lequel il s'est fondé et émis au vu du rapport d'expertise du 15 décembre 2017 du Dr I... constatant l'invalidité permanente de la requérante ainsi d'ailleurs qu'à l'avis conforme de la directrice de la caisse locale de retraites, le président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie a estimé que Mme K... était définitivement inapte à l'exercice de toutes fonctions. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie, a prononcé son admission à la retraite.

24. Mme K... soutient que l'arrêté attaqué est entaché d'erreur d'appréciation dans la mesure où l'imputabilité au service de sa maladie n'est pas reconnue. Si l'arrêté contesté constate que l'inaptitude de la requérante est sans lien avec le service, le moyen tiré de l'imputabilité au service de son inaptitude doit être écarté comme étant inopérant à l'encontre d'une décision de mise à la retraite dès lors que l'origine de son inaptitude n'a qu'une influence sur la liquidation de sa pension de retraite et ne peut utilement être contestée qu'à l'occasion du litige relatif au montant de celle-ci.

25. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté est motivé par l'inaptitude définitive de Mme K... en dehors de toute considération disciplinaire. La requérante ne saurait donc utilement soutenir que cet arrêté constitue une sanction déguisée.

26. Enfin, le détournement de pouvoir et de procédure allégué n'est pas établi.

27. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, que Mme K... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 19 juillet 2019. Ces conclusions ne peuvent dès lors qu'être rejetée, ce qui entraîne par voie de conséquence le rejet des conclusions à fin d'injonction.

Sur les frais liés au litige :

28. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme K... au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme K... la somme demandée par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie au même titre.

DECIDE :

Article 1er : Les conclusions de la requête de Mme K... tendant à l'annulation du jugement n°s 1900381, 1900384 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juillet 2019 du directeur de la caisse de retraites de Nouvelle-Calédonie, sont transmises au Conseil d'Etat.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 19 juillet 2019 du président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie en tant qu'il ne se prononce pas sur le taux d'invalidité de Mme K....

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions du gouvernement de Nouvelle-Calédonie présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... K..., à la Nouvelle-Calédonie et à la caisse locale de retraites de Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- Mme Jurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 février 2023.

La rapporteure,

E. D...Le président,

C. JARDIN

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 21PA00421


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00421
Date de la décision : 03/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Elodie JURIN
Rapporteur public ?: Mme BREILLON
Avocat(s) : SARL NICOLAS MILLION

Origine de la décision
Date de l'import : 12/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-02-03;21pa00421 ?
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