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02/02/2023 | FRANCE | N°21PA03774

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 02 février 2023, 21PA03774


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Green Renov a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 octobre 2018 par laquelle le ministre de la transition écologique et solidaire a rejeté sa demande de certificats d'économie d'énergie du 24 mai 2018 référencée 4694OB/29282 " testdifloantin ".

Par un jugement n°1822497 du 6 mai 2021 le tribunal administratif de Paris a fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par un recours sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés

les 7 juillet et

28 décembre 2021, la ministre de la transition écologique demande à la Cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Green Renov a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 octobre 2018 par laquelle le ministre de la transition écologique et solidaire a rejeté sa demande de certificats d'économie d'énergie du 24 mai 2018 référencée 4694OB/29282 " testdifloantin ".

Par un jugement n°1822497 du 6 mai 2021 le tribunal administratif de Paris a fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par un recours sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés les 7 juillet et

28 décembre 2021, la ministre de la transition écologique demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1822497 du 6 mai 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Green Renov devant le tribunal administratif de Paris.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier, comme insuffisamment motivé ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu que le motif de sa décision tiré de ce que la personne qui avait signé les pièces du dossier de demande n'était pas habilitée par l'entreprise bénéficiaire des opérations d'économie d'énergie, était entaché d'une erreur de fait ;

- les autres moyens de première instance ne sont pas fondés, et elle reprend ses écritures de première instance en ce qui les concerne.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 décembre 2022, la société Green Renov, agissant par son liquidateur judiciaire habilité à cet effet, la SELARL FIDES, représentée par

Me Gutierrez, conclut au rejet du recours et à ce que soit mise à la charge de l'État une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens du recours ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'énergie ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 4 septembre 2014 fixant la liste des éléments d'une demande de certificats d'économie d'énergie et les documents à archiver par le demandeur ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,

- et les observations de Mme A... pour le ministre de la transition écologique, et de Me Brodetsky, substituant Me Gutierrez, avocat de la société Green Renov.

Considérant ce qui suit :

1. La société Green Renov a sollicité auprès du ministre chargé de l'énergie, par une demande du 24 mai 2018, complétée les 3 et 8 août de la même année, la délivrance de certificats d'économie d'énergie, sous la référence 4694OB/29282 " testdifloantin ", pour des opérations d'économie d'énergies qu'elle a fait réaliser pour la société Antin Résidences, bénéficiaire. Par décision du 5 octobre 2018 le ministre de la transition écologique et solidaire a rejeté cette demande. La société Green Renov a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de cette décision. Par jugement du 6 mai 2021, dont le ministre de la transition écologique fait appel, ce tribunal a fait droit à la demande de la société Green Renov.

Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'irrégularité du jugement attaqué ;

Sur le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Aux termes de l'article L. 221-1-1 du code de l'énergie : " Les personnes mentionnées à l'article L. 221-1 sont également soumises à des obligations d'économies d'énergie spécifiques à réaliser au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique. / Elles peuvent se libérer de ces obligations soit en réalisant, directement ou indirectement, des économies d'énergie au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique, soit en acquérant des certificats d'économies d'énergie provenant d'opérations réalisées au bénéfice de ces ménages, soit en les déléguant pour tout ou partie à un tiers, soit en contribuant à des programmes de réduction de la consommation énergétique des ménages les plus défavorisés mentionnés à l'article L. 221-7. ". Aux termes de l'article L. 221-7 du même code : " Le ministre chargé de l'énergie ou, en son nom, un organisme habilité à cet effet peut délivrer des certificats d'économies d'énergie aux personnes éligibles lorsque leur action, additionnelle par rapport à leur activité habituelle, permet la réalisation d'économies d'énergie sur le territoire national d'un volume supérieur à un seuil fixé par arrêté du ministre chargé de l'énergie. ". Aux termes de l'article R. 221-22 dudit code : " Le demandeur de certificats d'économies d'énergie doit, à l'appui de sa demande, justifier de son rôle actif et incitatif dans la réalisation de l'opération. Est considérée comme un rôle actif et incitatif toute contribution directe, quelle qu'en soit la nature, apportée, par le demandeur ou par l'intermédiaire d'une personne qui lui est liée contractuellement, à la personne bénéficiant de l'opération d'économies d'énergie et permettant la réalisation de cette dernière. Cette contribution intervient au plus tard à la date d'engagement de l'opération. (...) ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté ministériel du 4 septembre 2014 fixant la liste des éléments d'une demande de certificats d'économie d'énergie et les documents à archiver par le demandeur : " Les pièces constitutives d'une demande de certificats d'économies d'énergie sont : / - lorsque la demande porte sur des opérations relevant des fiches d'opérations standardisées d'économies d'énergie, les pièces transmises à l'appui de la demande définies par l'annexe 2 et les pièces archivées par le demandeur définies par l'annexe 5 ; (...) ". Cette annexe 2 liste ainsi les pièces justificatives relatives aux opérations d'économies d'énergie : " - l'identification du bénéficiaire de l'opération ; / - la preuve de réalisation de l'opération ; / - la preuve du rôle actif et incitatif antérieur du demandeur ; (...) / - les attestations sur l'honneur ; (...) " et précise que : " L'identification du bénéficiaire de l'opération est justifiée, selon le cas, par : / - une attestation sur l'honneur du bénéficiaire de l'opération indiquant qu'il est le seul propriétaire de l'équipement installé ; / - une attestation sur l'honneur du bénéficiaire de l'opération indiquant qu'il est le maître d'ouvrage de l'opération d'économies d'énergie et qu'il dispose de l'accord du propriétaire pour être désigné comme bénéficiaire au titre du dispositif des certificats d'économies d'énergie. Cette attestation est complétée par l'accord écrit du propriétaire pour désigner le maître d'ouvrage comme bénéficiaire de l'opération au titre du dispositif des certificats d'économies d'énergie ; (...) / Lorsque le bénéficiaire est une personne morale, la demande comporte son numéro SIREN. ".

3. Il est constant que la société Antin Résidences est éligible à la délivrance de certificats d'économies d'énergie en qualité d'organisme d'habitations à loyer modéré visé par les dispositions du 5° de l'article L. 221-7 du code de l'énergie.

4. La décision de rejet contestée est fondée sur le motif que les pièces versées au dossier de la société Green Renov n'ont pas été signées par une personne habilitée à engager les opérations d'économies d'énergie pour la société Antin Résidences, ainsi que l'a indiqué le responsable territorial habitat de cette société dans un courriel du 2 octobre 2018, qui mentionnait également qu'Antin Résidences n'avait pas engagé ces opérations.

5. Il ressort de la correspondance mentionnée par la décision contestée, versée au dossier, que le responsable de secteur de l'agence nord, qui a signé les pièces relatives aux travaux, a engagé ces opérations de sa propre initiative, sans en référer aux responsables de la société. Il ressort d'un courrier du directeur général de la société Antin Résidences, également produit au dossier, et quoique postérieur à la décision contestée, que le responsable de secteur n'était pas compétent pour engager la société, sans validation de son supérieur, et qu'il n'a pas enregistré ces informations dans le système de gestion de l'entreprise, de sorte que sa direction n'a pas été informée des travaux. En vertu des dispositions précitées de l'annexe 2 de l'arrêté du 4 septembre 2014, l'engagement de la personne morale éligible est encadré par des garanties relatives à son indentification, l'attestation sur l'honneur du bénéficiaire de l'opération devant indiquer qu'il est le seul propriétaire de l'équipement installé ou qu'il est le maître d'ouvrage de l'opération d'économies d'énergie et dispose de l'accord du propriétaire pour être désigné comme bénéficiaire au titre du dispositif des certificats d'économies d'énergie. Or, il ressort des pièces du dossier que le responsable de secteur de l'agence nord de la société Antin Résidences a signé, au nom de sa société bénéficiaire, d'une part, la " convention d'incitation " passée avec la société Green Renov, en y mentionnant sa qualité de responsable de secteur et en y apposant le seul cachet de l'agence nord et d'autre part, les attestations sur l'honneur, toujours en sa qualité de responsable de secteur, tout en certifiant être " le seul propriétaire des équipements installés ". La société Green Renov, en qualité de professionnelle, ne pouvait sérieusement ignorer qu'un responsable de secteur géographique d'une société n'est pas à même d'engager cette dernière pour répondre à ses obligations d'économies d'énergie et solliciter la délivrance de certificats correspondants. Contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, qui ont considéré que la décision était entachée d'erreur de fait relativement à l'habilitation de ce responsable par l'entreprise bénéficiaire des opérations d'économie d'énergie, la mission d'entretien courant du patrimoine confiée à l'intéressé, à laquelle se rattache l'engagement " des budgets d'entretien courant et de remise en état des logements ", telle que stipulée dans sa fiche de poste versée au dossier, ne lui permettait pas d'engager sa société dans un projet général d'économies d'énergie. Dès lors que la société Antin Résidences n'a pas été valablement engagée dans l'opération d'économies d'énergies en cause, et quoique, selon le courrier déjà mentionné du directeur général de la cette société, une mission de contrôle interne a vérifié que les travaux avaient été effectivement réalisés, la société Green Renov ne pouvait prétendre à la délivrance de certificats d'économies d'énergie en vertu de sa contribution apportée " à la personne bénéficiant de l'opération d'économies d'énergie ", au sens des dispositions précitées de l'article R. 221-22 du code de l'énergie, avec laquelle elle n'était ainsi pas contractuellement liée.

6. Le ministre de la transition écologique est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé pour le motif de l'erreur de fait sa décision du 5 octobre 2018.

7. Il appartient, toutefois, à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Green Renov devant le tribunal administratif de Paris et devant elle.

Sur les autres moyens articulés à l'encontre de la décision attaquée :

8. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / À cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; (...) ", et aux termes de l'article L. 121-1 du même code : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, (...), sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable (...) ".

9. Les dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ne peuvent pas être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de délivrance de certificats d'économies d'énergie, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé.

10. Il ressort des termes de la décision attaquée qu'elle mentionne les articles du code de l'énergie sur lesquels elle se fonde, ainsi que l'arrêté ministériel du 4 septembre 2014 fixant la liste des éléments d'une demande de certificats d'économie d'énergie et les documents à archiver par le demandeur. Comme il a déjà été dit, elle retient, en s'appuyant sur un courriel du responsable territorial habitat de la société Antin Résidences, que les pièces versées au dossier de la société Green Renov n'ont pas été signées par une personne habilitée à engager les opérations d'économies d'énergie pour la société Antin Résidences. La décision contestée comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui la fondent et est, par suite, suffisamment motivée.

11. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la société Green Renov tendant à l'annulation de la décision du 5 octobre 2018 par laquelle le ministre de la transition écologique et solidaire a rejeté sa demande de certificats d'économie d'énergie ne peuvent qu'être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dès lors qu'elle succombe dans la présente instance.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1822497 du 6 mai 2021 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Green Renov devant le tribunal administratif de Paris et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la SELARL FIDES en qualité de liquidateur judiciaire de la société Green Renov.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,

- Mme Renaudin, première conseillère,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 février 2023.

La rapporteure,

M. RENAUDINLe président,

S. DIÉMERT

La greffière,

C. POVSE

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA03774


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03774
Date de la décision : 02/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: Mme Mathilde RENAUDIN
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : SELAS DS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-02-02;21pa03774 ?
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