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07/12/2022 | FRANCE | N°21PA05986

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 07 décembre 2022, 21PA05986


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Foncière Vélizy Rose a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, à titre principal, la décharge de la retenue à la source à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014, pour un montant de 1 542 857 euros en droits, assortie des majorations et intérêts correspondants, ainsi que le versement des intérêts moratoires sur cette somme, et, à titre subsidiaire, la réduction de cette retenue à la source par application du taux de 5 % prévu par l'article 8 de la con

vention fiscale franco-luxembourgeoise.

Par un jugement n° 2003368/9 du 23 septe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Foncière Vélizy Rose a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, à titre principal, la décharge de la retenue à la source à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014, pour un montant de 1 542 857 euros en droits, assortie des majorations et intérêts correspondants, ainsi que le versement des intérêts moratoires sur cette somme, et, à titre subsidiaire, la réduction de cette retenue à la source par application du taux de 5 % prévu par l'article 8 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise.

Par un jugement n° 2003368/9 du 23 septembre 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 23 novembre 2021 et 1er mars 2022, la société Foncière Vélizy Rose, représentée par Me Jérôme Delaurière, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 septembre 2021 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) de prononcer la décharge en droits et pénalités des impositions litigieuses ainsi que la restitution des sommes versées, majorées des intérêts moratoires ;

3°) subsidiairement de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne ayant pour objet de déterminer si la mise à sa charge de la retenue à la source en litige constitue une entrave disproportionnée à la liberté d'établissement et, en cas de réponse négative si la mise à sa charge de cette retenue à la source au taux de 42,85 % constitue une entrave disproportionnée à la liberté d'établissement ;

4°) à titre subsidiaire d'autoriser l'application du taux réduit de retenue à la source de 5 % prévu à l'article 8 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise en lieu et place du taux de 30 % prévu par l'article 187 du code général des impôts et de prononcer la décharge et le remboursement résultant de cette application ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Elle soutient que :

- l'administration ne pouvait remettre en cause la qualité de bénéficiaire effectif de la société Vélizy Rose Investment (VRI) sans mettre œuvre la procédure de répression des abus de droit, les dividendes en cause ayant été effectivement perçus et régulièrement comptabilisés et redistribués par cette société qui en a eu la propriété, et la rectification opérée par l'administration étant fondée sur l'existence d'un montage artificiel ;

- elle a supporté une retenue à la source au taux de 42,85 % que sa société mère VRI n'a pas pu imputer ;

- l'application combinée des dispositions des articles 119 bis 2 et 119 ter du code général des impôts mettant à sa charge une retenue à la source au taux de 42,85 % du seul fait du rejet de la qualité de " bénéficiaire effectif " de la société VRI, au motif que celle-ci ne serait pas la bénéficiaire économique du dividende, constitue une discrimination au regard de la liberté d'établissement et, en tant que de besoin, de la liberté de circulation des capitaux garanties par le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- cette discrimination a un caractère injustifié et disproportionné ;

- la société VRI était le bénéficiaire effectif des dividendes, lesquels ont été perçus par elle et régulièrement redistribués ;

- le critère du reversement à bref délai des dividendes est insuffisant en l'espèce, le reversement ayant été effectué conformément à la décision du conseil de gérance, par une société ayant un caractère de joint-venture, dans le but de protéger les investisseurs contre les effets d'une procédure collective et permettant de réunir six investisseurs dans de bonnes conditions, sans motif fiscal ;

- le fait que la société VRI était juridiquement détenue à 100 % par la société Dewnos depuis mai 2014 n'est pas pertinent pour écarter sa qualité de bénéficiaire effectif ;

- la société VRI avait une adresse effective et non une adresse de domiciliation ;

- le fait qu'elle ait principalement utilisé la trésorerie issue de l'acompte sur dividendes perçus de sa filiale pour pouvoir elle-même procéder à la redistribution du produit correspondant ne constitue pas un élément pertinent pour refuser de reconnaitre à la société VRI la qualité de bénéficiaire effectif de l'acompte perçu ;

- la société VRI a eu recours à des moyens matériels et humains ;

- le pacte d'actionnaire et le contrat de fiducie confirment le rôle de joint-venture de la société VRI ;

- l'administration ne peut refuser l'application du taux conventionnel de 5 % sans mettre œuvre la procédure de répression des abus de droit ;

- la société VRI était le bénéficiaire effectif des dividendes au sens de la convention franco-luxembourgeoise.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive 90/435/CEE du 23 juillet 1990 ;

- la convention entre la France et le Grand-Duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune signée à Paris le 1er avril 1958 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Prévot, rapporteur public,

- et les observations de Me Delaurière, représentant la société Foncière Vélizy Rose.

Considérant ce qui suit :

1. La société Foncière Vélizy Rose SAS, qui exerce une activité de location immobilière, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur les exercices clos les 31 décembre 2013, 2014 et 2015. À l'issue de cette procédure, l'administration a notamment remis en cause l'exonération de la retenue à la source appliquée par la société sur le fondement de l'article 119 ter du code général des impôts consécutivement au versement, au cours de l'année 2014, à la société Vélizy Rose Investment (VRI), société de droit luxembourgeois, d'une somme de 3 600 000 euros à titre d'avance sur des dividendes distribués. L'administration a, par suite, mis à la charge de la société Foncière Vélizy Rose SAS une retenue à la source d'un montant de 1 542 857 euros en droits, assortie d'une majoration de 10 % en application de l'article 1728 du code général des impôts et des intérêts de retard correspondants. La société Foncière Vélizy Rose SAS relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à la décharge de ladite retenue à la source ainsi que de la majoration et des intérêts correspondants et, à titre subsidiaire, à la réduction de la retenue à la source par application du taux de 5 % prévu par l'article 8 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise.

2. Aux termes du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige " Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France (...) ". Aux termes de l'article 119 ter du même code : " 1. La retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis n'est pas applicable aux dividendes distribués à une personne morale qui remplit les conditions énumérées au 2 du présent article par une société ou un organisme soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal. / 2. Pour bénéficier de l'exonération prévue au 1, la personne morale doit justifier auprès du débiteur ou de la personne qui assure le paiement de ces revenus qu'elle est le bénéficiaire effectif des dividendes (...) ". Aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. (...) ".

3. En premier lieu, pour remettre en cause l'exonération de la retenue à la source en litige, l'administration, qui a au demeurant, à supposer que le moyen soit soulevé, régulièrement motivé la proposition de rectification conformément aux dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, a relevé, d'une part, que la société Vélizy Rose Investment a reçu la somme de 3 600 000 euros le 2 juillet 2014, qu'elle l'a reversée dans son intégralité dès le 3 juillet 2014, alors qu'elle n'avait pas d'autres fonds disponibles, à la société Dewnos Investment, également société de droit luxembourgeois, d'autre part, que la société Vélizy Rose Investment détenait l'intégralité du capital social de la société requérante et qu'elle avait elle-même pour associé unique la société Dewnos Investment, enfin, que la société Vélizy Rose Investment ne disposait d'aucun moyen humain et matériel, qu'elle n'avait pas d'autre activité que celle de porter les titres de la société Foncière Vélizy Rose SAS et que ses deux dirigeants étaient également ceux de son actionnaire unique, la société Dewnos Investment. L'administration, par ces motifs, n'a écarté aucun acte constitutif d'un abus de droit en raison de son caractère fictif, ou, en raison de ce que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, il n'aurait pu être inspiré par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que le contribuable, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles, mais s'est bornée à constater que la société Vélizy Rose Investment ne pouvait être regardée comme étant le bénéficiaire effectif de l'avance sur dividendes d'un montant de 3 600 000 euros versée par la société Foncière Vélizy Rose SAS, au sens de l'article 119 ter du code général des impôts. Par conséquent, et alors même que les dividendes en cause ont été effectivement perçus et régulièrement comptabilisés et redistribués par la société Vélizy Rose Investment qui en a eu la propriété, l'administration n'a pas implicitement mis en œuvre la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ni méconnu les dispositions de cet article. En outre, la circonstance que, dans sa version applicable à compter du 1er janvier 2016, le 3 de l'article 119 ter permette de refuser l'exonération en cause quand un montage ou une série de montages ont été mis en place à cette fin, et non pour des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité économique, n'est pas de nature à remettre en cause les constatations qui précèdent.

4. En deuxième lieu, les articles 49 et 54 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, relatifs à la liberté d'établissement, s'opposent, ainsi qu'il résulte de la décision de la Cour de justice de l'Union européenne C-170/05 du 14 décembre 2006, à une législation nationale prévoyant, pour les seules sociétés mères non-résidentes, une imposition par voie de retenue à la source des dividendes distribués par des filiales résidentes, quand bien même une convention fiscale entre l'Etat membre en cause et un autre Etat membre, autorisant cette retenue à la source, prévoit la possibilité d'imputer sur l'impôt dû dans cet autre Etat la charge supportée en application de ladite législation nationale, lorsqu'une société mère est dans l'impossibilité, dans cet autre Etat membre, de procéder à l'imputation prévue par ladite convention. Toutefois, une société ne saurait utilement se prévaloir des règles qui précèdent lorsque les sommes que sa société-mère, à qui elle a versé des sommes, n'en est pas le bénéficiaire effectif, ainsi qu'il sera expliqué au point 7. Le moyen tiré de ce que contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, elle a effectivement supporté une retenue à la source au taux de 42,85 % que sa société mère Vélizy Rose Investment n'a pas pu imputer est par suite inopérant.

5. En troisième lieu, la Cour de justice de l'Union européenne a relevé dans les motifs de son arrêt du 26 février 2019 Skatteministeriet contre T Danmark et Y Denmark Aps (aff. C-116/16 et C-117/16, point 113) que les mécanismes de la directive 90/435/CEE, en particulier son article 5, sont " conçus pour des situations dans lesquelles, sans leur application, l'exercice par les Etats membres de leurs pouvoirs d'imposition pourrait conduire à ce que les bénéfices distribués par la société filiale à sa société mère soient soumis à une double imposition. De tels mécanismes n'ont en revanche pas vocation à s'appliquer lorsque le bénéficiaire effectif des dividendes est une société ayant sa résidence fiscale en dehors de l'Union puisque, dans un tel cas, l'exonération de la retenue à la source desdits dividendes dans l'Etat membre à partir duquel ils sont versés risquerait d'aboutir à ce que ces dividendes ne soient pas imposés de façon effective dans l'Union ". Les dispositions du 2 de l'article 119 ter du code général des impôts, en ce qu'elles subordonnent le bénéfice de l'exonération à la condition que la personne morale justifie auprès du débiteur ou de la personne qui assure le paiement des dividendes qu'elle en est le bénéficiaire effectif, sont par suite compatibles avec les objectifs de la directive 90/435/CEE du 23 juillet 1990. Si la société requérante fait valoir que l'application combinée des dispositions des articles 119 bis 2 et 119 ter du code général des impôts mettant à sa charge une retenue à la source au taux de 42,85 % du seul fait du rejet de la qualité de " bénéficiaire effectif " de la société Vélizy Rose Investment, au motif que celle-ci ne serait pas la bénéficiaire économique du dividende, constitue une discrimination au regard de la liberté d'établissement et de la liberté de circulation des capitaux, elle ne saurait valablement se prévaloir de ce qu'elle a été discriminée par rapport aux sociétés qui versent effectivement des dividendes à leur société mère établie en France, dès lors qu'ainsi qu'il a sera dit au point 7., elle a versé des sommes à sa maison mère sans que celle-ci puisse être regardée comme le bénéficiaire effectif des versements. La circonstance que les sociétés-mères établies à l'étranger aient à respecter la condition d'être le bénéficiaire effectif des dividendes versés, ne saurait, eu égard à ce qui vient d'être dit et au fonctionnement du système de retenue à la source, être regardée comme imposant aux sociétés versant des dividendes à l'étranger une exigence excessive. Il en est de même de la circonstance, qui procède de la nature même de la retenue à la source, que, lorsque la personne qui assure le paiement des revenus visés par le 2 de l'article 119 bis du code général des impôts n'a pas opéré la retenue à la source prévue par cet article ou ne l'a pas versée au Trésor, le montant brut des revenus mis en paiement sur lequel doit être appliquée la retenue à la source comprend, en plus des produits effectivement versés au bénéficiaire, un montant égal à l'avantage résultant de la non perception de la retenue à la source.

6. En quatrième lieu, la Cour de justice de l'Union européenne a, dans les motifs de son arrêt susmentionné du 26 février 2019, relevé que la circonstance qu'une société agit comme société relais peut être considérée comme établie lorsque celle-ci a pour unique activité la perception des dividendes et la transmission de ceux-ci au bénéficiaire effectif ou à d'autres sociétés relais. L'absence d'activité économique effective doit, à cet égard, à la lumière des spécificités caractérisant l'activité économique en question, être déduite d'une analyse de l'ensemble des éléments pertinents relatifs, notamment, à la gestion de la société, à son bilan comptable, à la structure de ses coûts et aux frais réellement exposés, au personnel qu'elle emploie ainsi qu'aux locaux et à l'équipement dont elle dispose.

7. Il résulte de l'instruction la société Vélizy Rose Investment a reversé dans son intégralité, dès le 3 juillet 2014, à la société Dewnos Investment, également société de droit luxembourgeois, la somme de 3 600 000 euros qu'elle avait reçue le 2 juillet 2014, et qu'au titre de l'exercice en cause elle détenait l'intégralité du capital social de la société requérante et avait pour associé unique la société Dewnos Investment ainsi que les deux mêmes dirigeants que cette société. Il est constant que la société Vélizy Rose Investment a utilisé la trésorerie issue de l'acompte sur dividendes perçu de sa filiale pour procéder à cette redistribution. La Cour ne trouve au dossier aucun élément de nature à identifier, en ce qui concerne la société Vélizy Rose Investment, l'existence d'une activité distincte de celle de relais dans la perception et la redistribution de dividendes et l'utilisation, à ce titre des moyens matériels et humains. La circonstance qu'elle aurait engagé des dépenses de loyers, de bureau, d'honoraires ainsi que de rémunération qui lui auraient été facturées par la société Everrock pour un montant de 25 320,04 euros ne saurait être regardée comme suffisante à cet égard. Si la société requérante fait également valoir que la société Vélizy Rose Investment a été initialement créée dans le cadre d'un pacte d'actionnaire par un groupe d'investisseurs soucieux de se protéger contre une procédure collective, et que la réunion de toutes les actions entre les mains de la société Dewnos Investment a été accompagnée d'un contrat de fiducie liant cette dernière aux autres investisseurs, une telle circonstance n'est pas de nature à démontrer que la société Vélizy Rose Investment avait une activité distincte de celle de relais dans la perception et la redistribution de dividendes, et cela alors même que cette redistribution a été régulièrement décidée et effectuée conformément à la décision du conseil de gérance. Il suit de là que l'administration n'a pas inexactement qualifié la société Vélizy Rose Investment en estimant que celle-ci ne pouvait être regardée comme le bénéficiaire effectif de la somme de 3 600 000 euros versée le 2 juillet 2014. Il en résulte que la société Foncière Vélizy Rose SAS ne pouvait être exonérée de la retenue à la source prévue par le 2 de l'article 119 bis du code général des impôts.

8. Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention franco-luxembourgeoise susvisée : " 1. Les dividendes payés par une société qui a son domicile fiscal dans un Etat contractant à une personne qui a son domicile fiscal dans l'autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat. / § 2. a) Toutefois, ces dividendes peuvent être imposés dans l'Etat contractant où la société qui paie les dividendes a son domicile fiscal, et selon la législation de cet Etat, mais l'impôt ainsi établi ne peut excéder : / 1. 5 % du montant brut des dividendes si le bénéficiaire des dividendes est une société de capitaux qui détient directement au moins 25 % du capital social de la société de capitaux qui distribue les dividendes (...) ". Aux termes de l'article 10 bis de la même convention : " Pour bénéficier des dispositions de l'article 8, paragraphes 2, 3 et 4, (...) la personne qui a son domicile fiscal dans un des Etats contractants doit produire aux autorités fiscales de l'autre Etat contractant une attestation, visée par les autorités fiscales du premier Etat, précisant les revenus pour lesquels le bénéfice des dispositions visées ci-dessus est demandé et certifiant que ces revenus et les paiements prévus à l'article 8, paragraphes 3 et 4, seront soumis aux impôts directs, dans les conditions du droit commun, dans l'Etat où elle a son domicile fiscal. (...) ".

9. Ni ces stipulations, qui sont antérieures à l'introduction d'une clause dite de bénéficiaire effectif dans l'article 10, intitulé " dividendes ", du modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune établi par l'Organisation de coopération et de développement économiques, dans sa version adoptée par son conseil le 11 avril 1977, ni aucun des éléments relatifs au contexte ou au but dans lequel la convention précitée a été établie, ne s'opposent à ce que le bénéfice de l'application du taux réduit de retenue à la source qu'elles prévoient pour les revenus de dividendes payés à un résident de l'autre Etat partie à la convention soit subordonné à la condition que le résident en cause soit le bénéficiaire effectif de ces revenus. Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 3., la société requérante ne peut davantage soutenir que l'administration ne peut s'opposer à l'application du taux de 5 % faute d'avoir respecté les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales. Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 7., il ne résulte pas de l'instruction que la société Vélizy Rose Investment serait le bénéficiaire effectif des dividendes versés par la société Foncière Vélizy Rose SAS. Il suit de là que la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir du régime de la retenue à la source au taux de 5 % prévu par les stipulations précitées de l'article 8 de la convention franco-luxembourgeoise.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société Foncière Vélizy Rose n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Foncière Vélizy Rose est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Foncière Vélizy Rose et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2022.

Le rapporteur,

F. A...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

2

N° 21PA05986


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05986
Date de la décision : 07/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme PRÉVOT
Avocat(s) : SCP GIBSON, DUNN ET CRUTCHER LLP

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-12-07;21pa05986 ?
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