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07/12/2022 | FRANCE | N°21PA03249

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 07 décembre 2022, 21PA03249


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société OAP a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur les sociétés, de taxe sur la valeur ajoutée et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016 ainsi que de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1912518/7 du 13 avril 2021, le Tr

ibunal administratif de Montreuil a prononcé la décharge de l'amende fondée sur l'article...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société OAP a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur les sociétés, de taxe sur la valeur ajoutée et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016 ainsi que de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1912518/7 du 13 avril 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé la décharge de l'amende fondée sur l'article 1759 du code général des impôts et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 11 juin et 7 septembre 2021, la société OAP, représentée par Me Philippe Pescayre, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 13 avril 2021 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées devant le tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la méthode de reconstitution de la comptabilité est excessivement sommaire et viciée ;

- le manquement délibéré fondant la pénalité de l'article 1729 du code général des impôts n'est pas justifié.

Par des mémoires en défense enregistrés les 9 août et 4 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société OAP ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 17 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 7 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Prévot, rapporteur public,

- et les observations de Me Rongeat représentant la société OAP.

Considérant ce qui suit :

1. La société OAP, qui exploite un supermarché à Sevran, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant porté sur les exercices 2014 et 2015, étendu au 31 janvier 2017 pour la seule taxe sur la valeur ajoutée. A la suite d'une reconstitution de son chiffre d'affaires, l'administration lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur la période de 2014 à 2016 et des suppléments d'impôt sur les sociétés et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre des exercices clos en 2014 et 2015, assortis de majorations et de l'amende prévue par l'article 1759 du code général des impôts. Le Tribunal administratif de Montreuil, par un jugement du 13 avril 2021, a prononcé la décharge de l'amende infligée à la société sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts et a rejeté le surplus de sa demande. La société OAP relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à ses conclusions à fin de décharge.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. (...) ".

3. Il est constant que la comptabilité des exercices contrôlés présentait de graves irrégularités et que les impositions en litige ont été établies conformément à l'avis de commission départementale des impôts directs et indirects du 7 décembre 2018. Dès lors, en application des dispositions précitées de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, il appartient à la société OAP d'apporter la preuve de l'exagération de ces impositions.

4. En deuxième lieu, si la société requérante soutient que le service ne pouvait pas fonder la reconstitution de son chiffre d'affaires sur les montants ressortant des données de caisse brutes dont l'écart par rapport au chiffre d'affaires déclaré n'a pu être expliqué, dès lors que la comptabilité n'avait pas été jugée fiable, elle ne propose aucune autre méthode de reconstitution, alors que la méthode retenue par l'administration, fondée sur des données propres à l'entreprise, ne peut être regardée comme radicalement viciée ou excessivement sommaire. Par ailleurs, la société requérante ne démontre pas le caractère exagéré des impositions en se référant aux statistiques nationales de l'INSEE et de la Fédération des centres de gestion agréés relatives aux taux de marge des commerces de boucherie et des supérettes, qui ne permettent pas une comparaison utile avec les caractéristiques de l'activité de la société, qui dispose d'un rayon boucherie au sein de son établissement, ni avec les conditions commerciales de son exercice, notamment au regard de son implantation géographique. Par suite, les moyens tirés du caractère sommaire de la reconstitution de comptabilité et du caractère exagéré des impositions en litige doivent être écartés.

5. En dernier lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : 40 % en cas de manquement délibéré. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la pénalité pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir le caractère délibéré du manquement, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

6. Il résulte de l'instruction que le service s'est fondé sur les manquements nombreux, graves, tant du point de vue de leur montant absolu ayant conduit à l'occultation de 137 416 euros, 343 647 euros et 284 144 euros de recettes respectivement pour les exercices clos en 2014, 2015 et 2016, que de leur caractère répété, constatés lors du contrôle, sur la non conservation des données des caisses balances et des caisses enregistreuses centrales servant à justifier des recettes, et sur la circonstance que la société ne pouvait ignorer ces occultations au regard de l'importance des sommes non déclarées. Dans ces conditions, et alors même que les minorations de recettes n'auraient représenté que 10,37 % du chiffre d'affaires en 2014, 13,42 % en 2015 et 8,91% en 2016, l'administration apporte la preuve du caractère délibéré des manquements constatés et, par suite, justifie du bien-fondé de l'application de la majoration de 40 % prévue au a) de l'article 1729 du code général des impôts.

7. Il résulte de tout ce qui précède, que la société OAP n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté le surplus de sa demande. Ses conclusions aux fins d'annulation de ce jugement et de décharge, en droits et majorations, des impositions restant en litige doivent ainsi être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société OAP est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société OAP et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2022.

Le rapporteur,

E. A...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA03249


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03249
Date de la décision : 07/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TOPIN
Rapporteur public ?: Mme PRÉVOT
Avocat(s) : SELARL ALERION

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-12-07;21pa03249 ?
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