Vu la procédure suivante :
I. Par une requête enregistrée le 19 janvier 2022 sous le n° 22PA00280 et des mémoires enregistrés les 22 juin, 17 août, 20 septembre et 18 novembre 2022, l'Union des entreprises de proximité (U2P), représentée par Me Leprêtre, demande à la Cour :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion du 18 novembre 2021 fixant la liste des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel en tant qu'il fixe, en son article 2, le poids respectif du Mouvement des entreprises de France (MEDEF), de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) et de l'U2P au niveau interprofessionnel, pour l'opposition à l'extension des accords collectifs prévue au titre de l'article L. 2261-19 du code du travail ;
2°) d'ordonner à l'administration de communiquer la liste des organisations adhérentes au MEDEF et à la CPME ainsi que les attestations des commissaires aux comptes relatives au nombre de salariés employés par les entreprises adhérentes et aux cotisations exigées de l'ensemble des adhérents ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que, d'une part, l'avis des membres du Haut conseil du dialogue social (HCDS) n'a pas été régulièrement recueilli par la ministre du travail et, d'autre part, la composition du HCDS est irrégulière ; l'une des personnalités qualifiées nommées par l'arrêté du 4 juillet 2019 relatif à la composition du HCDS n'était ni présente ni représentée et quatre personnes représentant la direction générale du travail ont participé à la séance du 7 juillet 2021 alors qu'elles n'étaient pas nommées en qualité de représentants de la ministre chargée du travail ; ces irrégularités l'ont privée d'une garantie ;
- l'article L. 2152-6 du code du travail ne prévoyant pas que le poids des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives au titre du droit à opposition prévu par l'article L. 2261-19 du même code doit être fixé par l'arrêté fixant la liste des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives, l'article 2 de l'arrêté en litige est entaché d'erreur de droit, voire d'incompétence ;
- les adhérents de l'organisation Nexem ne pouvaient pas être pris en compte pour le calcul de l'audience de la CPME ; ils interviennent dans le secteur de l'économie sociale et solidaire qui ne peut être considéré comme un champ couvert par les organisations professionnelles d'employeurs au niveau national et interprofessionnel au sens du 2° de l'article L. 2152-4 du code du travail ; en outre, les adhérents de l'organisation Nexem sont essentiellement des associations à but non lucratif et non des " entreprises patrimoniales ", de sorte que cette organisation ne peut pas être adhérente à la CPME qui, en vertu de ses statuts, défend les intérêts des " entreprises patrimoniales " ; elle n'a pas rendu publique son adhésion à la CPME avant le 31 décembre 2019 en méconnaissance de l'article R. 2152-9 du code du travail ; également adhérente à l'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire (UDES), elle ne peut être simultanément prise en considération au niveau multi-professionnel et au niveau interprofessionnel ;
- les adhérents de la Fédération nationale des auto-entrepreneurs (FNAE) ne pouvaient pas davantage être pris en compte pour le calcul de l'audience de la CPME dès lors que cette fédération, qui n'a pas compétence pour conclure des conventions et des accords collectifs de travail, ne peut pas être qualifiée d'organisation professionnelle d'employeurs ; elle représente des auto-entrepreneurs et des micro-entrepreneurs qui, par définition, ne sont pas des employeurs et n'ont pas pour finalité de le devenir ; elle défend ainsi un régime fiscal et social mais ne défend, ni ne représente les intérêts collectifs d'une profession ou d'un ou plusieurs métiers ; en outre, tous les adhérents de la FNAE ne versent pas une cotisation témoignant de la réalité de leur adhésion ; par ailleurs, ses statuts ne lui donnent aucune compétence pour conclure des conventions et des accords collectifs de travail ; elle ne respecte pas l'obligation de transparence financière prévue par l'article L. 2151-1 du code du travail ;
- les adhérents de la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne (FEHAP) relèvent de l'économie sociale et solidaire et ne sont pas des " entreprises patrimoniales ", de sorte qu'ils ne peuvent être pris en compte pour le calcul de l'audience de la CPME ; la FEHAP n'a pas rendu publique son adhésion à la CPME avant le 31 décembre 2019 en méconnaissance de l'article R. 2152-9 du code du travail ;
- la Chambre syndicale de la sophrologie et AGA France, organisations adhérentes à la Chambre nationale des professions libérales (CNPL), ne pouvaient pas être prises en compte pour le calcul de l'audience de la CPME dès lors que la CNPL ne remplit pas les critères de transparence financière et d'indépendance financière prévus par l'article L. 2151-1 du code du travail ;
- la prise en compte des effectifs de la Chambre syndicale de sophrologie et de Vision Expert pour le calcul de l'audience de la CNPL au profit de la CPME est irrégulière eu égard au faible montant de la cotisation versée par ses adhérents ;
- les effectifs d'AGA France ne pouvaient pas être pris en compte pour le calcul de l'audience de la CNPL au profit de la CPME dès lors que ses adhérents sont exclusivement des clients et ne peuvent pas être assimilés à des entreprises adhérentes ;
- en l'espèce, se trouvent réunies les conditions fixées par la jurisprudence pour que l'administration soit considérée comme tenue de verser au débat l'ensemble des documents l'ayant conduit à déterminer les audiences du MEDEF, de la CPME et de l'U2P.
Par des mémoires enregistrés les 1er avril, 21 juin, 29 juillet, 29 août et 15 novembre 2022, la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), représentée par Mes Navarro et Chézé-Dartencet, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par l'U2P ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense enregistrés les 12 juillet, 26 septembre et 17 novembre 2022, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de rejeter la requête ;
2°) à titre subsidiaire, si la Cour annule l'arrêté du 18 novembre 2021, de différer les effets de cette annulation jusqu'au terme d'une période de dix mois.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance en date du 17 novembre 2022, le président de la 8ème chambre a reporté la clôture de l'instruction au 18 novembre 2022 à 18 h.
II. Par une requête enregistrée le 20 janvier 2022 sous le n° 22PA00294 et des mémoires enregistrés les 27 avril, 11 juillet, 6 septembre et 15 novembre 2022, le Mouvement des entreprises de France (MEDEF), représenté par la SCP Célice-Texidor-Perier, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion du 18 novembre 2021 fixant la liste des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel ;
2°) d'enjoindre au ministre chargé du travail de prendre un nouvel arrêté, dans un délai de deux mois, après avoir procédé à une correction de la mesure d'audience en neutralisant les adhésions à la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) de l'organisation Nexem, de la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne (FEHAP) et de la Fédération nationale des auto-entrepreneurs (FNAE) ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que le Haut conseil du dialogue social (HCDS) n'a été ni informé, ni consulté par la ministre chargée du travail de manière à ce que les avis émis par ses membres soient pris en compte ;
- les adhérents de l'organisation Nexem ne pouvaient pas être pris en compte pour le calcul de l'audience de la CPME ; l'organisation Nexem fédère des associations à but non lucratif dont l'activité relève de l'économie sociale et solidaire, laquelle ne peut être considérée comme un champ couvert par les organisations interprofessionnelles d'employeurs au sens du 2° de l'article L. 2152-4 du code du travail ; en application de l'article L. 2152-2 de ce code, une même organisation ne peut pas relever à la fois du niveau national et multi-professionnel désigné par la loi et du niveau national et interprofessionnel, lesquels sont des niveaux concurrents ; or, l'organisation Nexem est toujours adhérente à l'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire (UDES), qui est l'organisation représentative au niveau national et multi-professionnel de l'économie sociale et solidaire ; en outre, la CPME, qui, en vertu de ses statuts, défend les intérêts des " entreprises patrimoniales ", n'a pas vocation à représenter des associations qui n'ont pas de capital social sur lequel les membres disposeraient d'un droit de propriété ou de créance ; l'organisation Nexem n'a pas rendu publique son adhésion à la CPME avant le 31 décembre 2019 en méconnaissance de l'article R. 2152-9 du code du travail ;
- les adhérents de la FEHAP ne pouvaient pas être pris en compte pour le calcul de l'audience de la CPME ; la FEHAP n'a pas rendu publique son adhésion à la CPME avant le
31 décembre 2019 en méconnaissance de l'article R. 2152-9 du code du travail ; son activité relève de l'économie sociale et solidaire qui ne peut être considérée comme un champ couvert par les organisations interprofessionnelles d'employeurs au sens du 2° de l'article L. 2152-4 du code du travail ; en outre, la CPME, qui en vertu de ses statuts, défend les intérêts des " entreprises patrimoniales ", n'a aucune vocation à représenter des associations qui n'ont pas de capital social sur lequel les membres disposeraient d'un droit de propriété ou de créance ;
- les adhérents de la FNAE ne pouvaient pas être pris en compte pour le calcul de l'audience de la CPME dès lors que la FNAE ne peut pas être considérée comme une organisation professionnelle d'employeurs au motif qu'elle n'est pas une association d'employeurs mais d'auto-entrepreneurs et que ses statuts ne lui donnent pas compétence pour conclure des conventions et accords collectifs ; la ministre était tenue de s'assurer de ces éléments en présence d'un doute sérieux quant à la réalité des adhésions et de l'activité professionnelle des adhérents revendiqués par la FNAE et ne pouvait refuser d'exercer tout contrôle au motif que les adhésions relèveraient d'attestations établies par un commissaire aux comptes ; par ailleurs, aucune distinction n'est opérée dans les statuts de la FNAE entre les adhérents qui exercent une activité professionnelle et ceux qui n'exercent pas une telle activité et ainsi ne peuvent être qualifiés d'entreprise ; la procédure d'adhésion à la FNAE, qui se borne au paiement de la cotisation en ligne, ne permet pas de s'assurer de la réalité de l'adhésion, ni de la qualité de professionnel de l'adhérent.
Par des mémoires en défense enregistrés les 1er avril, 16 juin, 29 juillet, 1er août et
15 novembre 2022, la Confédération des petites et moyennes entreprises, représentée par Mes Navarro et Chézé-Dartencet, conclut au rejet de la requête du MEDEF et des conclusions présentées par l'Union des entreprises de proximité (U2P).
Elle soutient que les moyens soulevés par le MEDEF et par l'U2P ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense enregistrés les 12 juillet, 26 septembre et 17 novembre 2022, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de rejeter la requête ;
2°) à titre subsidiaire, si la Cour annule l'arrêté du 18 novembre 2021, de différer les effets de cette annulation jusqu'au terme d'une période de dix mois.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par des mémoires enregistrés les 12 juillet et 17 août 2022, l'Union des entreprises de proximité, représentée par Me Leprêtre, conclut à l'annulation de l'article 2 de l'arrêté du 18 novembre 2021 fixant la liste des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel.
Elle soulève les mêmes moyens que dans l'instance n° 22PA00280.
Par une ordonnance en date du 17 novembre 2022, le président de la 8ème chambre a reporté la clôture de l'instruction au 18 novembre 2022 à 18 h.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 ;
- le décret n° 2020-875 du 15 juillet 2020 ;
- le décret n° 2020-927 du 29 juillet 2020 ;
- l'arrêté du 4 juillet 2019 portant nomination au Haut conseil du dialogue social ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de la nouvelle audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 21 novembre 2022 :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,
- les observations de Me Leprêtre, avocat de l'Union des entreprises de proximité,
- les observations de Me Celice, avocat du Mouvement des entreprises de France, et de Mme D..., représentante du MEDEF,
- les observations de Me Navarro, avocat de la Confédération des petites et moyennes entreprises,
- et les observations de MM. Broussillon, Ferhi et Hervé, représentants du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 18 novembre 2021, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion a, à son article 1er, reconnu représentatives au niveau national et interprofessionnel, au titre des organisations professionnelles d'employeurs, le Mouvement des entreprises de France (MEDEF), la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) et l'Union des entreprises de proximité (U2P) et, à son article 2, fixé au niveau interprofessionnel, pour l'opposition à l'extension des accords collectifs prévue par l'article L. 2261-19 du code du travail, le poids de ces trois organisations professionnelles d'employeurs respectivement à 66,33 %, 28,64 % et 5,03 %. Par la requête enregistrée sous le n° 22PA00280, l'U2P demande l'annulation de l'article 2 de cet arrêté. Par la requête enregistrée sous le n° 22PA00294, le MEDEF demande l'annulation des articles 1er et 2 de ce même arrêté.
2. Les deux requêtes présentent à juger des questions communes. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le cadre juridique du litige :
3. Aux termes de l'article L. 2152-6 du code du travail : " Après avis du Haut Conseil du dialogue social, le ministre chargé du travail arrête la liste des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives par branche professionnelle et des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel ou multi-professionnel. A cette fin, il vérifie que les critères définis au présent chapitre sont respectés et s'assure notamment que le montant des cotisations versées par les entreprises et, le cas échéant, les organisations professionnelles adhérentes est de nature à établir la réalité de leur adhésion ".
4. L'article L. 2151-1 du code du travail dispose que : " I. La représentativité des organisations professionnelles d'employeurs est déterminée d'après les critères cumulatifs suivants : / 1° Le respect des valeurs républicaines ; / 2° L'indépendance ; / 3° La transparence financière ; / 4° Une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation. Cette ancienneté s'apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts ; / 5° L'influence, prioritairement caractérisée par l'activité et l'expérience ; / 6° L'audience, qui se mesure en fonction du nombre d'entreprises volontairement adhérentes ou de leurs salariés soumis au régime français de sécurité sociale et, selon les niveaux de négociation, en application du 3° des articles
L. 2152-1 ou L. 2152-4. / II. Pour l'application du présent titre, sont considérées comme des organisations professionnelles d'employeurs les syndicats professionnels d'employeurs mentionnés à l'article L. 2131-1 et les associations d'employeurs mentionnées à l'article
L. 2231-1 ". Aux termes de l'article L. 2152-4 du même code : " Sont représentatives au niveau national et interprofessionnel les organisations professionnelles d'employeurs : /
1° Qui satisfont aux critères mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 2151-1 ; / 2° Dont les organisations adhérentes sont représentatives à la fois dans des branches de l'industrie, de la construction, du commerce et des services ; / 3° Dont les entreprises et les organisations adhérentes à jour de leur cotisation représentent soit au moins 8 % de l'ensemble des entreprises adhérant à des organisations professionnelles d'employeurs satisfaisant aux critères mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 2151-1 et ayant fait la déclaration de candidature prévue à l'article L. 2152-5, soit au moins 8 % des salariés de ces mêmes entreprises. Le nombre d'entreprises adhérant à ces organisations, ainsi que le nombre de leurs salariés, sont attestés, pour chacune d'elles, par un commissaire aux comptes, qui peut être celui de l'organisation, dans des conditions déterminées par voie réglementaire. La mesure de l'audience s'effectue tous les quatre ans. / Lorsqu'une organisation professionnelle d'employeurs adhère à plusieurs organisations professionnelles d'employeurs ayant statutairement vocation à être présentes au niveau national et interprofessionnel, elle répartit entre ces organisations, pour permettre la mesure de l'audience prévue au présent article, ses entreprises adhérentes. (...) ".
5. Aux termes de l'article R. 2152-9 du code du travail : " I. Pour la mesure de l'audience des organisations professionnelles d'employeurs prévus au 3° de l'article
L. 2152-4, sont prises en compte les entreprises qui adhèrent directement à l'organisation professionnelle d'employeurs candidate à l'établissement de sa représentativité ou à l'une de ses structures territoriales statutaires. / II. Sont également considérées comme adhérentes à une organisation professionnelle d'employeurs candidate à la représentativité les entreprises adhérant à une ou plusieurs organisations professionnelles d'employeurs ou à l'une de leurs structures territoriales statutaires dès lors que cette organisation : / 1° A rendu publique son adhésion par tout moyen avant le 31 décembre précédant l'année de déclaration de candidature prévue à l'article L. 2152-5 ; / 2° Verse une cotisation conformément aux règles fixées par l'organe compétent de l'organisation à laquelle elle adhère, selon des modalités assurant l'information des entreprises adhérentes quant à l'organisation destinataire de la cotisation. Cette condition est également regardée comme satisfaite lorsque l'organisation concernée produit des comptes combinés avec l'organisation à laquelle elle adhère. / (...) / IV. Les adhésions aux structures territoriales statutaires définies au I et aux organisations professionnelles d'employeurs ou à l'une de leurs structures territoriales statutaires définies au II sont prises en compte dès lors que des attestations telles que définies à l'article
R. 2152-6 ont été établies au titre de chacune de ces organisations professionnelles d'employeurs et au titre de chacune ou de l'ensemble de ces structures territoriales statutaires, accompagnées de la fiche de synthèse mentionnée à l'article R. 2152-6 : / 1° Soit par le commissaire aux comptes de l'organisation candidate ; / 2° Soit dans le cadre d'une mission de vérification de ces éléments par un commissaire aux comptes désigné par les structures ou organisations mentionnées au premier alinéa du présent IV. / Les règles prises en compte en matière de cotisations et définies conformément aux dispositions des articles R. 2152-1 et R. 2152-2 sont jointes à ces attestations. / V. Lorsqu'une structure territoriale statutaire ou une organisation professionnelle d'employeurs ne dispose pas d'entreprises qui lui sont directement adhérentes, le respect des dispositions du I et du 1° et du 2° du II du présent article est attesté par un commissaire aux comptes ". Aux termes de l'article 1er du décret du 29 juillet 2020 relatif à la mesure de l'audience syndicale dans les entreprises de moins de onze salariés et à la mesure de l'audience patronale en 2021 : " Pour la mesure de l'audience des organisations d'employeurs mentionnée au 6° de l'article L. 2151-1 du code du travail effectuée en 2021 : / 1° Par dérogation aux dispositions de l'article R. 2152-3 du même code, le nombre d'entreprises adhérentes est apprécié au 31 décembre 2019 ; / 2° Par dérogation au 1° du II de l'article R. 2152-8 du code du travail et au 1° du II de l'article
R. 2152-9 du même code, les entreprises adhérant à une organisation professionnelle d'employeurs non candidate ou à l'une de ses structures territoriales statutaires sont considérées comme adhérentes à une organisation d'employeurs candidate dès lors que l'organisation non candidate a rendu publique, par tout moyen, son adhésion à l'organisation candidate avant le 31 décembre 2019 ; / 3° Par dérogation aux dispositions de l'article
R. 2152-5 du code du travail, les entreprises adhérentes sont prises en compte dès lors qu'elles se sont acquittées de l'intégralité des cotisations dues au titre de l'année 2019 avant le 31 décembre 2020 ".
6. Aux termes de l'article L. 2261-19 du code du travail : " Pour pouvoir être étendus, la convention de branche ou l'accord professionnel ou interprofessionnel, leurs avenants ou annexes, doivent avoir été négociés et conclus au sein de la commission paritaire mentionnée à l'article L. 2232-9. / Cette commission est composée de représentants des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives dans le champ d'application considéré. / Pour pouvoir être étendus, la convention de branche ou l'accord professionnel ou interprofessionnel, leurs avenants ou annexes, ne doivent pas avoir fait l'objet dans un délai d'un mois à compter de la publication par l'autorité administrative d'un avis d'extension au Journal officiel de la République française, de l'opposition écrite et motivée d'une ou de plusieurs organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives au niveau considéré dont les entreprises adhérentes emploient plus de 50 % de l'ensemble des salariés des entreprises adhérant aux organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives à ce niveau. (...) ".
7. Enfin, aux termes de l'article L. 2152-2 du code du travail : " Sont représentatives au niveau national et multi-professionnel les organisations professionnelles d'employeurs : / 1° Qui satisfont aux critères mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 2151-1 ; / 2° Qui sont représentatives ou dont les organisations adhérentes sont représentatives sur le fondement de l'article L. 2152-1 du présent code dans au moins dix conventions collectives relevant soit des activités agricoles mentionnées aux 1° à 4° de l'article L. 722-1 et au 2° de l'article L. 722-20 du code rural et de la pêche maritime, soit de l'économie sociale et solidaire, soit du secteur du spectacle vivant et enregistré, et ne relevant pas du champ couvert par les organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ; /
3° Auxquelles adhèrent au moins quinze organisations relevant de l'un des trois champs d'activités mentionnés au 2° du présent article ; / 4° Qui justifient d'une implantation territoriale couvrant au moins un tiers du territoire national soit au niveau départemental, soit au niveau régional ". L'article L. 2152-3 du même code prévoit que : " Préalablement à l'ouverture d'une négociation nationale et interprofessionnelle, puis préalablement à sa conclusion, les organisations professionnelles d'employeurs représentatives à ce niveau informent les organisations représentatives au niveau national et multi-professionnel des objectifs poursuivis par cette négociation et recueillent leurs observations ".
En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté attaqué :
S'agissant de la compétence du ministre du travail pour fixer le poids des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives au niveau interprofessionnel pour l'opposition à l'extension des accords collectifs prévue par l'article L. 2261-19 du code du travail :
8. Aux termes de l'article 1er du décret du 15 juillet 2020 relatif aux attributions de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion : " Le ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion prépare et met en œuvre la politique du Gouvernement dans les domaines du travail, de l'emploi, de l'insertion professionnelle, notamment l'insertion par l'activité économique, de l'apprentissage, de la formation professionnelle, du dialogue social et de la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, ainsi que de l'assurance vieillesse. / A ce titre : / 1° Il prépare et met en œuvre les règles relatives (...) à la négociation collective (...) ".
9. Il résulte des dispositions citées aux points 3 à 6 et des dispositions de l'article 1er du décret du 15 juillet 2020 citées au point 8 que le ministre chargé du travail est compétent pour arrêter, sous le contrôle du juge administratif, la liste des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel ainsi que leurs audiences respectives. Par suite, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion pouvait légalement fixer, dans l'arrêté en litige, le poids des trois organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives à ce niveau pour l'opposition à l'extension des accords collectifs prévue au titre de l'article L. 2261-19 du code du travail, sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance qu'elle n'ait pas simultanément fixé leur audience respective au regard du critère du nombre des entreprises employant au moins un salarié, utile pour l'application d'autres dispositions du code du travail.
S'agissant de la régularité de la procédure :
10. En premier lieu, il ressort des mentions du projet de procès-verbal de la séance du Haut conseil du dialogue social (HCDS) du 7 juillet 2021 versé au dossier que les résultats d'audience des organisations professionnelles d'employeurs au niveau national et interprofessionnel ont été présentés au Haut Conseil pour avis, accompagnés de documents précisant le nombre d'entreprises, d'employeurs et de salariés pour chacune des organisations professionnelles candidates dans le champ interprofessionnel, ainsi que l'audience projetée en pourcentage, et que les représentants des organisations patronales, en particulier ceux du MEDEF et de l'U2P, ont présenté leurs observations, auxquelles a répondu le directeur général du travail. Le Haut Conseil a ainsi rendu un avis sur la liste des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel. La circonstance que le document versé au dossier s'intitule " projet de procès-verbal " est sans incidence sur cette appréciation en l'absence de tout élément au dossier de nature à remettre en cause la sincérité des mentions qui y sont portées. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que le HCDS n'aurait pas été informé des résultats d'audience des organisations professionnelles d'employeurs au niveau national et interprofessionnel ni consulté par la ministre chargée du travail doit être écarté.
11. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 2122-1 du code du travail : " Le Haut Conseil du dialogue social mentionné à l'article L. 2122-11 du code du travail comprend : / 1° Cinq représentants des organisations syndicales de salariés nationales et interprofessionnelles et, en nombre égal, des représentants des organisations représentatives d'employeurs au niveau national désignés par ces organisations. Des représentants suppléants en nombre égal à celui des titulaires sont désignés dans les mêmes conditions. Ils ne siègent qu'en l'absence des titulaires ; / 2° Trois représentants du ministre chargé du travail ; / 3° Trois personnes qualifiées proposées par le ministre chargé du travail ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 133-10 du code des relations entre le public et l'administration : " Le quorum est atteint lorsque la moitié au moins des membres composant la commission sont présents, y compris les membres prenant part aux débats au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle, ou ont donné mandat ".
12. Il n'est pas contesté que seules deux personnalités qualifiées étaient présentes lors de la séance du HCDS du 7 juillet 2021. Cependant, les dispositions de l'article R. 2122-1 du code du travail n'imposent pas la présence aux séances du Haut Conseil de l'ensemble des personnes qualifiées. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le quorum était atteint lors de la séance du 7 juillet 2021. Par suite, le moyen tiré par l'Union des entreprises de proximité de ce que l'avis adopté lors de cette séance serait entaché d'irrégularité au motif que Mme C..., l'une des trois personnes qualifiées proposées par la ministre chargée du travail, n'y a pas participé ne peut qu'être écarté.
13. En troisième et dernier lieu, le projet de procès-verbal de la séance du 7 juillet 2021 du HCDS fait état, dans la liste des personnes présentes, de cinq agents du ministère du travail, dont il est constant qu'ils n'ont pas la qualité de membres. Cependant, il ressort des mentions de ce document que ces agents n'ont pris la parole à aucun moment lors de la présentation des résultats de représentativité des organisations professionnelles d'employeurs au niveau national et interprofessionnel et de la discussion qui s'en est suivie et n'ont pas pris part à un vote. Par ailleurs, à la suite de la présentation de ces résultats, les membres du HCDS représentant les organisations patronales se sont exprimés très complètement pour faire connaître leurs observations et interrogations, portant notamment sur l'étendue des informations devant être reprises dans l'arrêté du ministre chargé du travail et sur la pertinence de la prise en compte, dans le champ de la mesure de la représentativité interprofessionnelle, d'associations à but non lucratif relevant du secteur de l'économie sociale et solidaire et des micro-entrepreneurs, et suscitant les réactions des autres membres du Haut Conseil. Dans ces conditions, la présence d'agents de l'administration au cours de la réunion du 7 juillet 2021, au surplus tenue par le moyen d'une conférence audiovisuelle, n'apparaît pas susceptible d'avoir exercé, en l'espèce, une influence sur les débats et sur les positions des membres du HCDS. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la composition du HCDS lors de sa séance du 7 juillet 2021 doit être écarté.
En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté attaqué :
S'agissant de l'article 1er de l'arrêté :
14. Le MEDEF soutient que les adhérents de l'organisation Nexem et de la FEHAP, qui relèvent de l'économie sociale et solidaire, et ceux de la FNAE qui représente des auto-entrepreneurs et des micro-entrepreneurs ne pouvaient pas être pris en compte dans la mesure de l'audience de la CPME. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que cette audience a été appréciée par le ministre chargé du travail, selon les résultats présentés au HCDS le 7 juillet 2021, comme correspondant à 28,64 % des salariés des entreprises adhérant aux organisations professionnelles d'employeurs mentionnées au 3° de l'article L. 2152-4 du code du travail cité au point 4, en tenant compte des 314 254 et 274 187 salariés des entreprises adhérentes respectivement à l'organisation Nexem et à la FEHAP, et alors qu'aucun salarié n'a été revendiqué ni pris en compte au titre des entreprises adhérentes à la FNAE. A supposer même que ces trois organisations doivent être écartées du calcul de l'audience de la CPME, il n'est pas soutenu ni même allégué et il ne ressort pas des pièces du dossier que les entreprises et les organisations adhérentes à la CPME ne représenteraient pas au moins 8 % des salariés des entreprises adhérant aux organisations professionnelles d'employeurs mentionnées au 3° de l'article L. 2152-4 du code du travail et qu'ainsi la CPME ne devrait pas être reconnue représentative au niveau national et interprofessionnel. Les dispositions attaquées ne sauraient être interprétées comme entérinant le nombre d'entreprises et le nombre d'employeurs résultant de la mesure d'audience de chacune des organisations professionnelles d'employeurs, quand bien même ils ont été présentés au HCDS le 7 septembre 2021. Dans ces conditions, le MEDEF ne critique pas utilement l'article 1er de l'arrêté attaqué, qui se borne à reconnaître la qualité d'organisation représentative au niveau national et interprofessionnel de la CPME, comme celle de l'U2P et la sienne.
S'agissant de l'article 2 de l'arrêté :
Quant à la prise en compte d'organisations regroupant des entreprises relevant de l'économie sociale et solidaire dans le calcul du poids des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel pour l'application de l'article L. 2261-19 du code du travail :
15. D'une part, il résulte des dispositions de l'article L. 2152-4 du code du travail qu'une organisation professionnelle d'employeurs, pour être représentative au niveau national et interprofessionnel, doit regrouper des organisations adhérentes représentatives à la fois dans des branches de l'industrie, de la construction, du commerce et des services, sans toutefois exclure que certaines organisations adhérentes soient représentatives dans d'autres branches ni prévoir que seules les entreprises des quatre branches mentionnées devraient être prises en considération pour calculer les proportions d'entreprises et de salariés prévues au 3° de cet article.
16. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article L. 2152-2 du même code qu'une organisation professionnelle d'employeurs, pour être représentative au niveau national et multi-professionnel, doit être représentative ou regrouper des organisations adhérentes représentatives dans au moins dix conventions collectives relevant de l'un des trois
secteurs que cet article énumère - les activités agricoles, l'économie sociale et solidaire ou le spectacle - à condition toutefois que ces conventions ne relèvent pas du champ couvert par les organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel.
17. Lorsqu'une organisation professionnelle d'employeurs fait le choix d'adhérer à une organisation représentative au niveau national et interprofessionnel, alors même qu'elle relève de l'un des trois secteurs énumérés à l'article L. 2152-2, ses entreprises adhérentes doivent appliquer non seulement les conventions et accords collectifs qu'elle avait déjà conclus et qu'elle n'a pas dénoncés, mais également les conventions et accords collectifs conclus par l'organisation représentative au niveau national et interprofessionnel, à tout le moins postérieurement à son adhésion. Toutefois, il résulte de l'objet des dispositions des articles L. 2152-2 et L. 2152-4, éclairées par les travaux préparatoires à la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale dont elles sont issues, qu'une même organisation adhérente ne peut être prise en compte simultanément pour apprécier la représentativité d'une organisation professionnelle d'employeurs au niveau national et interprofessionnel et au niveau national et multi-professionnel.
18. Pour l'application des articles L. 2152-2 et L. 2152-4, lorsqu'une organisation représentative dans le champ d'une convention collective relevant des activités agricoles, de l'économie sociale et solidaire ou du spectacle fait le choix d'adhérer à une organisation représentative au niveau national et interprofessionnel, cette convention relève ainsi du " champ couvert par les organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ". Dès lors, ses entreprises adhérentes ne peuvent plus être prises en considération au titre de la représentativité au niveau national et multi-professionnel mais doivent l'être pour calculer les proportions d'entreprises et de salariés prévues au 3° de l'article L. 2152-4, comme la proportion de salariés mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 2261-19, au titre de la représentativité au niveau national et interprofessionnel.
19. Il suit de là que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, ni la circonstance que l'organisation Nexem et la FEHAP regroupent des entreprises relevant du secteur de l'économie sociale et solidaire, ni celle que l'organisation Nexem était restée adhérente à l'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire ne faisaient obstacle, par elles-mêmes, à ce que la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion prenne en considération les salariés des entreprises adhérentes à ces deux organisations afin d'apprécier le poids des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel pour l'opposition à l'extension des accords collectifs prévue par l'article
L. 2261-19 du code du travail.
Quant à la publicité des adhésions de l'organisation Nexem et de la FEHAP à la CPME avant le 31 décembre 2019 :
20. En vertu des dispositions de l'article 1er du décret du 29 juillet 2020 citées au point 5, pour la mesure de l'audience des organisations d'employeurs effectuée en 2021, lorsqu'une organisation professionnelle d'employeurs avait adhéré à une organisation professionnelle d'employeurs candidate à la représentativité, ses adhérents étaient pris en compte dans le calcul de l'audience de cette dernière, dès lors qu'elle avait rendu publique son adhésion par tout moyen avant le 31 décembre 2019. Ces dispositions, s'appliquant à une mesure d'audience postérieure à leur entrée en vigueur sans remettre en cause une situation juridique définitivement constituée à cette date, n'ont pas un caractère rétroactif.
21. Si l'organisation Nexem, ainsi qu'il ressort du compte rendu de son conseil d'administration, a décidé d'adhérer à la CPME le 19 décembre 2019, aucune pièce versée au dossier, notamment pas les attestations de commissaires aux comptes, ne permet d'établir qu'elle a rendu publique cette adhésion avant le 31 décembre 2019. Si la CPME se prévaut du rapport annuel de l'organisation Nexem de 2019 faisant état de cette adhésion, ce rapport n'a été publié qu'en 2020. Par ailleurs, si le conseil d'administration de la FEHAP a approuvé, par un vote électronique organisé entre les 11 et 13 décembre 2019, l'adhésion de la FEHAP au pôle " économie sociale et solidaire " de la CPME, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, et notamment des attestations de commissaires aux comptes, que cette adhésion ait été rendue publique avant le 31 décembre 2019. Dans ces conditions, les requérants sont fondés à soutenir que la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion ne pouvait pas prendre en compte les adhérents de l'organisation Nexem et de la FEHAP dans le calcul de l'audience de la CPME.
22. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée par l'U2P ni d'examiner les autres moyens des requêtes dirigés contre cet article, que les requérants sont seulement fondés à demander l'annulation de l'article 2 de l'arrêté de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion du 18 novembre 2021 fixant le poids respectif du MEDEF, de la CPME et de l'U2P au niveau interprofessionnel, pour l'opposition à l'extension des accords collectifs prévue par l'article L. 2261-19 du code du travail.
Sur les conclusions tendant à ce que la Cour limite dans le temps les effets de l'annulation de l'article 2 de l'arrêté attaqué :
23. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'annulation de l'article 2 de l'arrêté du 18 novembre 2021 soit de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet article a produits que des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur. Ainsi, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de limiter les effets de l'annulation prononcée.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
24. Eu égard au motif d'annulation de l'article 2 de l'arrêté du 18 novembre 2021 retenu au point 21, il y a lieu d'enjoindre au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion de calculer de nouveau au niveau interprofessionnel, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, pour l'opposition à l'extension des accords collectifs prévue par l'article L. 2261-19 du code du travail, le poids des trois organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives, c'est-à-dire le MEDEF, la CPME et l'U2P, sans tenir compte des adhérents de l'organisation Nexem ni de ceux de la FEHAP.
Sur les frais liés à l'instance :
25. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à l'U2P et au MEDEF de la somme de 2 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : L'article 2 de l'arrêté de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion du
18 novembre 2021 fixant la liste des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel est annulé.
Article 2 : Il est enjoint au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion de calculer de nouveau au niveau interprofessionnel, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, pour l'opposition à l'extension des accords collectifs prévue par l'article
L. 2261-19 du code du travail, le poids des trois organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives, c'est-à-dire le Mouvement des entreprises de France, la Confédération des petites et moyennes entreprises et l'Union des entreprises de proximité, sans tenir compte des adhérents de l'organisation Nexem ni de ceux de la Fédération des établissement hospitaliers et d'aide à la personne.
Article 3 : L'Etat versera à l'Union des entreprises de proximité et au Mouvement des entreprises de France la somme de 2 000 euros chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'Union des entreprises de proximité, au Mouvement des entreprises de France, au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et à la Confédération des petites et moyennes entreprises.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Fombeur, présidente de la Cour,
- M. Le Goff, président de chambre,
- M. Ho Si Fat, président-assesseur,
- Mme Julliard, présidente-assesseure,
- Mme A..., Mme E..., Mme B..., premières conseillères.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2022.
La rapporteure,
V. E...La présidente,
P. FOMBEUR
Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Nos 22PA00280, 22PA00294 2