Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... et Mme D... E... épouse A..., ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et en pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013, 2014 et 2015.
Par un jugement nos 1908666/1-2, 1908686/1-2 du 2 février 2021, le Tribunal administratif de Paris a déchargé partiellement, en droits et en pénalités, M. et Mme A... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015, pour la part résultant de la réintégration dans leur base imposable à l'impôt sur le revenu des bénéfices non commerciaux tirés de l'activité de l'entreprise individuelle à responsabilité limitée " Thierry A... - TH G Audit et Conseil EIRL ", mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des frais d'instance et rejeté le surplus de leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 avril et 21 octobre 2021, Mme E... épouse A..., représentée par Me Annabelle Jaulin, demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement du 2 février 2021 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, de l'impôt sur le revenu restant en litige au titre de l'année 2013 ainsi que des pénalités de 40 % qui leur ont été appliquées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'option à l'impôt sur les sociétés formulée par l'EIRL Thierry A... Th G Audit et Conseil produit ses effets dès l'exercice 2013 ;
- la société a été créée en cours d'année 2013, et l'option pour l'assujettissement de ses bénéfices à l'impôt sur les sociétés a été formulée dès sa création ;
- l'option a été exercée dès le 7 mars ;
- l'EIRL ne pouvait exercer l'option avant sa constitution alors que l'activité était encore exercée sous une forme individuelle ;
- cela conduirait à une double imposition ;
- Monsieur A... n'était pas tenu de déposer une déclaration 2035 en 2013, son activité ne relevant pas des bénéfices non commerciaux, et ne se trouvait par suite pas en situation d'évaluation d'office ;
- les irrégularités affectant la procédure de contrôle ne sont par suite pas inopérantes ;
- les avis de vérification de comptabilité du 30 mars 2016 et du 15 mai 2017 mentionnent un contrôle portant sur les bénéfices non commerciaux sans que l'activité exercée par M. A... ne relève de cette catégorie de revenus ;
- l'administration a irrégulièrement procédé à une seconde vérification de comptabilité en poursuivant ses investigations quant à la nature de l'activité professionnelle de M. A... postérieurement à la fin de la vérification de comptabilité ;
- les propositions de rectification ne sont pas motivées dès lors que la procédure de taxation d'office est appliquée à la mauvaise catégorie d'imposition ;
- le tribunal administratif n'a pas répondu sur ce point ;
- le tribunal n'a pas motivé le manquement délibéré ;
- le manquement délibéré n'est pas établi.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 septembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 23 juin 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au
19 juillet 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de Mme Prévot, rapporteur public,
- et les observations de Me Jaulin, représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a fait l'objet, d'une part, d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2013 et 2014 prolongée jusqu'au 31 décembre 2015 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, à l'issue de laquelle l'administration lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2013 à 2015 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2013 et 2014 par proposition de rectification du 19 décembre 2016 et, d'autre part, d'une vérification de comptabilité en matière de bénéfices non commerciaux portant sur l'année 2015, à l'issue de laquelle l'administration lui a notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2015 par proposition de rectification du 11 septembre 2017.
M. et Mme A... ont, par ailleurs, fait l'objet d'un examen de situation fiscale personnelle au titre des années 2013 à 2015, à l'issue duquel ils se sont vu notifier des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des trois années vérifiées. Par jugement du 2 février 2021, le Tribunal administratif de Paris a déchargé en droits et en pénalités, les intéressés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015, pour la part résultant de la réintégration, dans leur base imposable à l'impôt sur le revenu, des bénéfices non commerciaux tirés de l'activité de l'entreprise individuelle à responsabilité limitée " Thierry A... - TH G Audit et Conseil EIRL ", mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des frais d'instance et rejeté le surplus de leur demande. Mme A... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas prononcé intégralement la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, de l'impôt sur le revenu auquel son foyer fiscal a été assujetti en conséquence de la réintégration des bénéfices non commerciaux tirés de l'activité de M. A... et demande en outre la décharge des pénalités de 40 % appliquées.
Sur les bénéfices non commerciaux imposés au titre de l'année 2013 :
2. Aux termes de l'article 92 du code général des impôts : " Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ". Aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : / (...) 2° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ".
3. Aux termes de l'article 1655 sexies du même code : " (...) l'entrepreneur individuel qui exerce son activité dans le cadre d'une entreprise individuelle à responsabilité limitée (...) peut opter pour l'assimilation à une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (...) 2. L'option mentionnée au 1, exercée dans des conditions fixées par décret, est irrévocable et vaut option pour l'impôt sur les sociétés ". Aux termes de l'article 350 bis de l'annexe III au même code : " I.- Pour l'exercice de l'option prévue à l'article 1655 sexies du code général des impôts, l'entreprise individuelle à responsabilité limitée adresse une notification au service des impôts du lieu de son principal établissement / La notification de l'option indique la dénomination et l'adresse de l'entreprise individuelle à responsabilité limitée, ainsi que les nom, prénom, l'adresse et la signature de l'entrepreneur individuel qui exerce son activité dans le cadre d'une entreprise individuelle à responsabilité limitée. / L'option est notifiée avant la fin du troisième mois de l'exercice au titre duquel l'entrepreneur individuel, qui exerce son activité dans le cadre d'une entreprise individuelle à responsabilité limitée, souhaite être assimilé à une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée ou à une exploitation agricole à responsabilité limitée ".
4. En vertu des articles 1er et 2 de la loi du 11 février 1994 relative à l'initiative et l'entreprise individuelle, l'obligation pour une entreprise de déclarer sa création, la modification de sa situation ou la cessation de ses activités auprès, notamment, des administrations de l'Etat, est légalement satisfaite par le dépôt d'un seul dossier comportant les diverses déclarations que l'entreprise est tenue de remettre à ces administrations et ce dossier unique, déposé auprès d'un organisme désigné à cet effet, vaut déclaration près du destinataire dès lors qu'il est régulier et complet à l'égard de celui-ci. Aux termes de l'article 371 AO de l'annexe II au code général des impôts alors applicable : " Conformément à l'article R. 123-17 du code de commerce, la déclaration présentée ou transmise au centre de formalités des entreprises compétent, dans les conditions précisées à cet article, vaut déclaration auprès de l'organisme destinataire ". Il résulte par ailleurs des annexes à l'article R. 123-30 du code du commerce que les Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) sont compétentes pour recevoir les déclarations d'existence au service des impôts des personnes morales nouvellement créées.
5. Pour exercer valablement leur option pour l'imposition selon le régime propre aux sociétés de capitaux, les EIRL doivent soit notifier cette option au service des impôts du lieu de leur principal établissement, conformément aux prescriptions de l'article 1655 sexies du code général des impôts et de l'article 350 bis de l'annexe III au même code, soit cocher la case prévue à cet effet sur le formulaire remis au centre de formalité des entreprises dont elles dépendent à l'occasion de la déclaration de leur création ou de leur modification, manifestant ainsi sans ambiguïté l'exercice de leur option. Il résulte de l'instruction que dans la déclaration d'existence adressée à l'URSSAF le 7 mars 2013, l'EIRL " Thierry A... - TH G Audit et Conseil EIRL " avait coché la case correspondant à l'option pour son assujettissement à l'impôt sur les sociétés. Elle doit être ainsi regardée comme ayant exercé cette option avant la fin du troisième mois de l'exercice en cause. Par suite, Mme A... est fondée à soutenir que son foyer fiscal ne pouvait être imposé à l'impôt sur le revenu sur les résultats de l'EIRL, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, selon la procédure d'évaluation d'office prévue, en l'absence de déclaration de ces bénéfices, par les dispositions du 2 de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales.
Sur la majoration de 40 % :
6. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
7. M. et Mme A... ont omis de déclarer les sommes de 15 447 euros et 74 912 euros au titre des traitements et salaires de Mme A... versés par la SARL Point d'Exclamation dont Mme A... est la gérante. Cette société avait comptabilisé ces sommes en charges de personnel. Les contribuables ne pouvaient sérieusement ignorer, eu égard à la qualité de gérante de la société de Mme A... et à la proportion des montants éludés, le caractère imposable de ces sommes. Le caractère délibéré du manquement s'appréciant à la date de la déclaration, la circonstance que les contribuables ont eu une attitude coopérative au cours du contrôle est dépourvue de portée. Par suite, et ainsi que l'ont estimé les premiers juges, qui ont suffisamment motivé leur jugement, l'administration établit la volonté délibérée des contribuables d'éluder l'impôt et justifie donc de la mise en œuvre des pénalités visées au a de l'article 1729 du code général des impôts.
8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles son foyer fiscal a été assujetti au titre de l'année 2013, pour la part résultant de la réintégration, dans la base imposable à l'impôt sur le revenu, des bénéfices non commerciaux tirés de l'activité de l'entreprise individuelle à responsabilité limitée " Thierry A... - TH G Audit et Conseil EIRL ". Il y a lieu par suite de prononcer la décharge en cause et de rejeter le surplus des conclusions de la requête Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : M. et Mme A... sont déchargés, en droits et en pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 pour la part résultant de la réintégration, dans leur base imposable à l'impôt sur le revenu, des bénéfices non commerciaux tirés de l'activité de l'entreprise individuelle à responsabilité limitée " Thierry A... - TH G Audit et Conseil EIRL ".
Article 2 : Le jugement nos 1908666/1-2, 1908686/1-2 du 2 février 2021 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus de la requête de Mme A... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 9 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Topin, président assesseur,
- M. Magnard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 novembre 2022.
Le rapporteur,
F. B...Le président,
I. BROTONS
Le greffier,
A. MOHAMAN YERO
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA01747