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20/10/2022 | FRANCE | N°21PA05804

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 20 octobre 2022, 21PA05804


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les arrêtés du 20 juillet 2021 par lesquelles le préfet de police, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire d'une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2111406 du 12 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de M. D....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 12 novembre 2021, M. D..., assisté par Me Dahhan, demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les arrêtés du 20 juillet 2021 par lesquelles le préfet de police, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire d'une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2111406 du 12 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de M. D....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 12 novembre 2021, M. D..., assisté par Me Dahhan, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°2111406 du 12 octobre 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler les arrêtés du 20 juillet 2021 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour d'une durée de trois ans.

3) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire ;

- le motif d'atteinte à l'ordre public repose sur de simples allégations ;

- la mesure litigieuse méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme Met des libertés fondamentales, ainsi que l'article 3-1 de la convention internationale du droit des enfants ;

- les décisions portant refus de départ volontaire et interdiction de retour sont disproportionnées et entachées d'erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 août 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Par ordonnance du 8 juillet 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 août 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale du droit des enfants ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... ressortissant algérien, né en 1995, demande à la Cour, d'une part, d'annuler le jugement du 12 octobre 2021, par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté son recours pour excès de pouvoir contre l'arrêté du préfet de police en date 20 juillet 2021, lui faisant obligation de quitter le territoire sans délai, lui fixant le pays de destination et lui faisant interdiction de retour en France pendant trois ans, d'autre part, l'annulation de cet arrêté.

Sur l'obligation de quitter le territoire sans délai :

2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve A... les cas suivants : 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. ".

3. L'arrêté portant obligation de quitter le territoire n'est pas motivé par la menace pour l'ordre public que ferait peser M. D..., mais par l'absence de visa en cours de validité ou de titre de séjour, absence qui range l'intéressé au nombre des étrangers mentionnés à l'article L. 611-1 précité, pouvant faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique A... l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, A... une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Et aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative au droit des enfants : " 1° A... toutes les décisions qui les concernent, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

5. M. D... a épousé en novembre 2020 une française qui, à la date de la décision attaquée, était enceinte de ses œuvres. Il ne justifie toutefois pas de la réalité de la communauté de vie avec son épouse avant son mariage. Compte tenu de la faible durée de la vie commune et de l'absence d'enfant à la date de la décision, celle-ci n'a pas portée d'atteinte excessive au droit de M. D... au respect de sa vie privée et familiale, ni à l'intérêt supérieur de son enfant. Elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Sur le refus de délai de départ volontaire :

6. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire A... les cas suivants :/ 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Et aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, A... les cas suivants : /2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ".

7. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5, la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire de trente jours n'est pas entachée d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni d'erreur manifeste d'appréciation.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire :

8. Aux termes de l'article L. 312-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".

9. L'arrêté litigieux est motivé par la circonstance que M. D..., entré en France en 2017, serait impliqué A... un réseau de traite d'êtres humains impliquant des mineurs non accompagnés se livrant à des actes de délinquances, et que son comportement constitue ainsi une menace pour l'ordre public. Outre la circonstance que les faits en cause n'ont donné lieu à aucune poursuite pénale, M. D... est marié depuis novembre 2020 à une femme de nationalité française enceinte de ses œuvres. Compte tenu de la vocation de la mère et de l'enfant, tous deux français, à résider sur le territoire, la décision portant interdiction de retour pour une durée de deux ans est excessive.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est fondé à demander l'annulation du jugement du 12 octobre 2021, qu'en tant qu'il n'a pas annulé les dispositions de l'arrêté du préfet de police en date du 20 juillet 2021 portant interdiction de retour sur le territoire pendant trois ans.

11. Il y a lieu , A... les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. D... et non compris A... les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêté du préfet de police en date du 20 juillet 2021, portant interdiction de retour d'une durée de trois ans, à M. D... est annulé.

Article 2 : Le jugement n° 2114006 du 12 octobre 2021 du tribunal administratif de Montreuil est reformé, en tant qu'il est contraire à l'article 1er .

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.

Article 4 : l'Etat versera la somme de 1 000 euros à M. D... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Soyez, président,

- M. Simon, premier conseiller

-Mme Boizot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 octobre 2022.

Le rapporteur,

C. B...Le président,

J-E. SOYEZLa greffière,

E. LUCE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA05804


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05804
Date de la décision : 20/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SOYEZ
Rapporteur ?: M. Claude SIMON
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : DAHHAN

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-10-20;21pa05804 ?
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