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18/10/2022 | FRANCE | N°21PA01509

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 18 octobre 2022, 21PA01509


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la délibération du 4 juillet 2019 par laquelle le jury du baccalauréat série S l'a déclaré non-admis à l'issue des épreuves du premier groupe et de mettre à la charge de l'Etat une somme de

1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1918832/1-2 du 19 janvier 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

P

ar une requête, enregistrée le 22 mars 2021, et un mémoire, enregistré le

29 septembre 2022, M. E...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la délibération du 4 juillet 2019 par laquelle le jury du baccalauréat série S l'a déclaré non-admis à l'issue des épreuves du premier groupe et de mettre à la charge de l'Etat une somme de

1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1918832/1-2 du 19 janvier 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 mars 2021, et un mémoire, enregistré le

29 septembre 2022, M. E..., représenté par Me Delarcharlerie, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 19 janvier 2021;

2°) d'annuler la délibération du 4 juillet 2019 par laquelle le jury du baccalauréat série S l'a déclaré non-admis à l'issue des épreuves du premier groupe ;

3°) d'enjoindre à l'administration de convoquer de nouveau le jury pour qu'il redélibère sur le dossier du requérant ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- le tribunal s'est à tort fondé, pour rejeter le moyen tiré du défaut d'examen de son livret scolaire, sur la circonstance qu'il n'indiquerait pas avoir fourni celui-ci alors que ce document, sous sa forme dématérialisée, est nécessairement tenu à la disposition des membres du jury ;

- l'administration n'établit pas avoir procédé à l'examen de ce livret scolaire.

- il n'est pas justifié que la délibération litigieuse serait intervenue au terme d'une procédure régulière.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2021, le recteur de l'académie de Paris et de la région académique d'Ile-de-France demande à la Cour de rejeter la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 11 avril 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au

6 mai 2022 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'éducation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,

- et les observations de M. A..., représentant le recteur de l'académie de Paris et de la région académique d'Ile-de-France.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., qui avait été ajourné une première fois aux épreuves du baccalauréat en juin 2018, a de nouveau passé cet examen, dans la série S, spécialité " sciences de l'ingénieur " à la session de juin 2019, mais a fait l'objet d'un nouvel ajournement, les notes obtenues aux épreuves du premier groupe ne lui ayant pas permis de passer les épreuves du second groupe. Il a été informé de son ajournement le 4 juillet 2019 à la réception de son relevé de notes, et a dès lors formé devant le tribunal administratif de Paris, d'une part, une demande en référé, enregistrée sous le n°1918831, tendant à la suspension de cette décision et à ce qu'il soit enjoint au recteur de l'académie de Paris de l'autoriser à s'inscrire et à prendre part aux épreuves de la session de remplacement du baccalauréat débutant le 9 septembre 2019, et, d'autre part, une demande d'annulation de cette décision d'ajournement, enregistrée sous le n°1918832. Sa demande en référé a été rejetée par ordonnance du 9 septembre 2019, puis la demande au fond l'a été à son tour par un jugement du 19 janvier 2021 dont il relève appel.

2. Il ressort des pièces du dossier que, dans son mémoire en réplique, le requérant a soulevé plusieurs moyens, consistant notamment à mettre en doute la régularité, au regard de l'article D. 334-20 du code de l'éducation, de la composition du jury du baccalauréat s'étant prononcé sur son dossier, ainsi que les modalités de la délibération dudit jury. Or, le tribunal n'ayant pas répondu à ces moyens, qui n'étaient pas inopérants alors même qu'ils auraient été imprécis, M. E... est fondé à soutenir que le jugement est de ce fait entaché d'irrégularité et à en demander l'annulation.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer sur les moyens de la demande de M. E....

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ". S'agissant de la délibération d'un jury, il est satisfait aux exigences découlant de cet article dès lors qu'une telle délibération porte la signature du président du jury accompagné des mentions, en caractères lisibles, de son prénom, de son nom et de sa qualité. Toutefois, le relevé de notes et résultats produit par M. E..., ne constitue pas la délibération du jury, mais une simple mesure d'information destinée à l'étudiant. Par suite, le moyen tiré de ce que ce document ne respecterait pas les dispositions précitées de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration est inopérant.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article D. 334-21 du code de l'éducation : " Les membres des jurys mentionnés à l'article D. 334-20 sont désignés par le recteur./ Les jurys sont présidés par un professeur des universités ou un maître de conférences nommé par le recteur sur proposition des présidents d'université. (...) Pour la composition des jurys du baccalauréat, il peut être fait appel aux personnels appartenant aux catégories suivantes : (...) 3° Professeur de l'enseignement public du second degré exerçant ou ayant exercé dans les classes de seconde, première et terminales des lycées d'enseignement général et technologique et des lycées d'enseignement général et technologique agricoles ; (...) ". Si le requérant met en doute, sans au demeurant apporter de précisions à l'appui de ce moyen, la régularité de la composition du jury ayant prononcé son ajournement au baccalauréat, il ressort des pièces produites par l'administration à la demande de la Cour et communiquées au requérant que ce jury était composé conformément aux dispositions précitées de l'article D. 334-21 du code de l'éducation. Ainsi, il ressort de l'arrêté du recteur académique du 13 juin 2019 que Mme C... D..., professeur à l'université de Paris Sud a été nommée présidente de jury pour la session de juin 2019 du baccalauréat, et le message en date du 24 juin 2019 qui lui est adressé lui indique qu'elle présidera le jury n°7513 Série S au lycée Chaptal à Paris (75008), c'est-à-dire le jury ayant délibéré sur le dossier du requérant. Par ailleurs il ressort également des documents produits que faisaient partie de ce jury des enseignants en différentes matières qui satisfaisaient aux conditions posées par l'article D. 334-21 précité. Par suite le moyen tiré de l'irrégularité de la composition du jury manque en fait.

6. En troisième lieu, M. E... met en doute la régularité de la délibération du jury ayant prononcé son ajournement aux épreuves du baccalauréat à la session de juin 2019. Toutefois il s'est borné à soutenir devant le tribunal que " rien ne permet d'affirmer que la délibération du jury s'est déroulée conformément à ce que prescrit à ce sujet la même circulaire n°2017-053 dont le requérant est fondé à se prévaloir ", en citant ensuite les termes de cette circulaire, puis, n'évoquant plus cette question dans sa requête d'appel, il a repris de manière très générale cette allégation sur une irrégularité éventuelle de la procédure dans son mémoire en réplique devant la Cour. Ce faisant il n'a pas assorti ce moyen de précisions suffisantes, de nature à permettre d'en apprécier le bien-fondé. Ledit moyen ne peut dès lors qu'être écarté, alors surtout qu'il ressort des pièces produites par le rectorat que les membres du jury ont été régulièrement convoqués et ont régulièrement délibéré sur la situation de l'intéressé le

4 juillet 2019.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article D. 334-10 du code de l'éducation dans sa version alors applicable : " Les éléments d'appréciation dont dispose le jury sont : 1° Les notes obtenues par le candidat aux épreuves prévues à l'article D. 334-4 ; 2° Pour certaines épreuves, les notes et les appréciations des professeurs portant sur les résultats obtenus en cours d'année scolaire accompagnées, le cas échéant, de travaux ou de comptes rendus de travaux réalisés par le candidat. Les modalités de cette disposition sont fixées par arrêté du ministre chargé de l'éducation nationale ; 3° Pour les épreuves mentionnées à l'article D. 334-16, les notes attribuées aux candidats par les examinateurs, accompagnées le cas échéant de leurs appréciations, des travaux ou comptes rendus de travaux des candidats ; 4° Le livret scolaire qui peut être produit par le candidat et qui est constitué dans les conditions déterminées par arrêté du ministre chargé de l'éducation nationale. / Les notes définitives résultent de la délibération du jury./ Aucun candidat ayant fourni un livret scolaire ne peut être ajourné sans que le jury ait examiné ce livret. La mention de cet examen est portée au livret scolaire sous la signature du président du jury ". Il ressort des dispositions précitées de l'article D. 334-10 4° que la production du livret scolaire, qui n'est par ailleurs pas obligatoire, est à la charge du candidat, sans que, contrairement à ce que soutient le requérant, ceci soit remis en cause par les dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 8 février 2016 qui retient seulement que le traitement automatisé du livret scolaire a pour finalité " de permettre aux élèves ou à leurs responsables légaux : 1° de consulter le livret scolaire de l'élève dès sa classe de première ; 2° de disposer du livret scolaire de l'élève sous format numérique à la clôture des délibérations des jurys d'examens du baccalauréat ". De même, si la circulaire n°2017-053 retient que " les livrets scolaires des élèves de classe terminale et les livrets de formation sont transmis aux centres de délibération, dans les conditions définies dans ce domaine par le recteur " ce document n'a, en tout état de cause, pas pour effet de poser le principe d'une transmission automatique du livret scolaire par les établissements aux centres de délibérations, alors surtout qu'elle retient ensuite que " le code de l'éducation oblige le jury à examiner le livret scolaire ou de formation anonymisé fourni par le candidat (...) ". Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le tribunal aurait à tort retenu qu'il lui incombait de fournir au jury son livret scolaire, et qu'en l'absence de justificatif d'une telle transmission il ne pouvait invoquer l'irrégularité qui résulterait du défaut de signature dudit livret par le président du jury, ou du défaut de prise en compte de ce livret par le jury.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... est seulement fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du 19 janvier 2021. Il n'est en revanche pas fondé à demander à la Cour, statuant par la voie de l'évocation, d'annuler la délibération du 4 juillet 2019 par laquelle le jury du baccalauréat série S l'a déclaré non-admis à l'issue des épreuves du premier groupe. Par suite, sa demande de première instance ne peut qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fins d'injonction et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, présentées en première instance et en appel.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1918832/1-2 du 19 janvier 2021 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande de M. E... présentée devant le tribunal est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. E... présentées devant la cour est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Paris et de la région académique d'Ile-de-France

Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 octobre 2022.

La rapporteure,

M-I. F...Le président,

T. CELERIER

La greffière,

K. PETIT

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA01509


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01509
Date de la décision : 18/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : DELACHARLERIE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-10-18;21pa01509 ?
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