Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a saisi le Tribunal administratif de la Polynésie française d'une demande tendant à obtenir l'exécution complète du jugement n° 1900485 du 16 juin 2020.
Par un jugement n° 2100525 du 14 décembre 2021, le Tribunal administratif de la Polynésie française a enjoint à la Polynésie française de calculer la contribution de solidarité territoriale et l'assurance maladie à précompter pour chacun des mois pour lesquels l'indemnisation des gardes de M. A... est due et de verser au requérant les intérêts moratoires sur l'intégralité de la somme due à compter du 16 juin 2020, ainsi que ces intérêts majorés de 5 points à compter du 17 août 2020 jusqu'à la date de versement du principal, dans le délai de deux mois à compter de la notification de son jugement, a mis la somme de 30 000 francs CFP à la charge de la Polynésie française au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. A....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 15 février 2022, le 30 mars 2022 et le 11 juin 2022, M. A..., représenté par Me Eftimie-Spitz, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2100525 du 14 décembre 2021du Tribunal administratif de la Polynésie française en ce qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions relatives aux intérêts moratoires et au prononcé d'une astreinte et limité à 30 000 francs CFP la somme allouée au titre des frais de l'instance ;
2°) d'enjoindre à la Polynésie française de lui verser les intérêts moratoires sur la somme de 10 181 835 francs CFP au taux légal à compter du 3 novembre2015, puis au taux légal majoré à compter du 17 août 2020 et jusqu'au 23 septembre 2020 ;
3°) d'enjoindre à la Polynésie française de lui verser les intérêts moratoires sur la somme de 2 442 774 francs CFP au taux légal à compter du 3 novembre 2015, puis au taux légal majoré à compter du 24 septembre 2020 ;
4°) de mettre à la charge de la Polynésie française le versement de la somme de 300 000 francs CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les intérêts moratoires sont dus à compter de la demande préalable même s'ils sont demandés pour la première fois en appel ;
- les intérêts doivent être majorés deux mois après la notification du jugement du 16 juin 2020 ;
- la demande d'astreinte est justifiée par le comportement de la Polynésie française qui n'a pas exécuté le jugement du 14 décembre 2021.
Par un mémoire enregistré le 25 mai 2022, la Polynésie française, représentée par Me Marchand, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de Mme Breillon, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... A..., médecin urgentiste employé par la Polynésie française et affecté à l'hôpital de Taravao, a demandé à la Polynésie française le paiement d'indemnités de garde qu'il estimait lui être dues en application de l'arrêté n° 996 CM du 17 juillet 2007 portant organisation et indemnisation des services de garde dans les hôpitaux périphériques de la direction de la santé. Par un jugement n° 1900485 du 16 juin 2020 devenu définitif, le Tribunal administratif de la Polynésie française a condamné la Polynésie française à verser à M. A... la somme de 10 181 835 francs CFP ainsi que 100 000 francs CFP au titre des frais liés à l'instance, et rejeté le surplus de ses conclusions.
2. Après que le Polynésie française lui a versé en septembre 2020 une somme de 7 739 061 francs CFP, M. A... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française d'assurer l'exécution complète de ce jugement du 16 juin 2020 en enjoignant à la Polynésie française, sous astreinte, de lui verser le reliquat dû de 2 442 774 francs CFP, ainsi que les intérêts moratoires sur la somme de 10 181 835 francs CFP au taux légal à compter du 3 novembre 2015, puis au taux légal majoré à compter du 17 août 2020 au 23 septembre 2020, et enfin les intérêts moratoires sur la somme de 2 442 774 francs CFP au taux légal majoré à compter du 24 septembre 2020.
3. Par un jugement du 14 décembre 2021 le Tribunal administratif de la Polynésie française a, d'une part, enjoint à la Polynésie française de calculer la contribution de solidarité territoriale et l'assurance maladie à précompter pour chacun des mois pour lesquels l'indemnisation des gardes de M. A... est due et de verser au requérant les intérêts moratoires sur l'intégralité de la somme due à compter du 16 juin 2020, ainsi que ces intérêts majorés de 5 points à compter du 17 août 2020 jusqu'à la date de versement du principal, d'autre part, mis la somme de 30 000 francs CFP à la charge de la Polynésie française au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, enfin, rejeté le surplus des conclusions de la demande. M. A... fait appel de ce jugement, en tant seulement que celui-ci n'a pas fait droit à sa demande tendant à la fixation du point de départ des intérêts moratoires assortissant les sommes lui étant dues à la date de sa demande préalable, le 3 novembre 2015, n'a pas prononcé d'astreinte et ne lui a alloué qu'une somme de 30 000 francs CFP au titre des frais de l'instance.
4. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. Si le jugement dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai et prononcer une astreinte ". En l'absence de définition, par le jugement dont l'exécution lui est demandée, des mesures qu'implique nécessairement cette décision, il appartient au juge saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative d'y procéder lui-même en tenant compte des situations de droit et de fait existant à la date de sa décision.
Sur les intérêts moratoires :
5. Si, lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1231-6 du code civil courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine, il est constant que M. A... n'a demandé que l'indemnisation de ses gardes soit assortie des intérêts au taux légal ni dans sa demande préalable, ni devant le Tribunal administratif de Polynésie française dans l'instance n° 1900485. Par suite, le jugement du 16 juin 2020, devenu définitif, ne lui a pas octroyé ces intérêts sur la somme de 10 181 835 francs CFP que la Polynésie française a été condamnée à lui verser, et l'exécution de ce jugement impliquait seulement que cette somme porte intérêts au profit de M. A... à compter de la date de ce jugement. M. A... n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a fixé le point de départ des intérêts moratoires assortissant les sommes lui étant dues au 16 juin 2020.
Sur l'astreinte :
6. Il résulte de l'instruction qu'à la date du présent arrêt, la Polynésie française n'a versé, en exécution du jugement du 16 juin 2020, que la somme de 7 739 061 francs CFP le 23 septembre 2020 ainsi que la somme de 30 000 francs CFP le 16 mars 2022 et que ces sommes ne correspondent pas à la complète exécution du jugement n° 1900485 du 16 juin 2020, dans les conditions fixées par le jugement n° 2100525 du 14 décembre 2021, dont il n'a pas été relevé appel. Dans ces conditions, et en l'absence de toute difficulté d'exécution établie ou même invoquée par la Polynésie française, il y a lieu de prononcer contre la Polynésie française, à défaut pour elle de justifier de cette exécution dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, une astreinte de 100 euros par jour jusqu'à la date à laquelle le jugement n° 1900485 du 16 juin 2020 aura reçu exécution.
Sur les frais liés à la première instance :
7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
8. Par le jugement attaqué, le Tribunal a condamné la Polynésie française à payer la somme de 30 000 francs CFP à M. A... au titre des dispositions précitées du code de justice administrative. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le Tribunal ait fait une inexacte appréciation du montant des frais exposés en première instance par M. A.... Par suite, les conclusions du requérant tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement attaqué doivent être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance d'appel :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la Polynésie française demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la Polynésie française une somme de 800 euros à verser à M. A... sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Il est enjoint à la Polynésie française de verser à M. A..., dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, le reliquat de l'indemnité lui étant due, calculé conformément au jugement n° 2100525 du 14 décembre 2021 du Tribunal administratif de la Polynésie française, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration de ce délai.
Article 2 : La Polynésie française communiquera à la Cour copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter l'article 1er du présent arrêt.
Article 3 : La Polynésie française versera à M. A... une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de la Polynésie française au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et à la Polynésie française.
Délibéré après l'audience du 13 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente assesseure,
- Mme Jurin, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2022.
La rapporteure,
P. B...Le président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGISLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA00712