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01/07/2022 | FRANCE | N°21PA04947

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 01 juillet 2022, 21PA04947


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, l'annulation de l'arrêté du 9 mars 2017 par laquelle le directeur général des douanes et droits indirects lui a infligé la sanction de la révocation, de la lettre du 16 janvier 2017 par laquelle la sous-directrice des ressources humaines, des relations sociales et de l'organisation de la direction générale des douanes et droits indirects l'a informée de la date de la séance du conseil de discipline, ainsi que de l'avis du conseil de d

iscipline émis le 24 février 2017, d'autre part, la condamnation de l'Eta...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, l'annulation de l'arrêté du 9 mars 2017 par laquelle le directeur général des douanes et droits indirects lui a infligé la sanction de la révocation, de la lettre du 16 janvier 2017 par laquelle la sous-directrice des ressources humaines, des relations sociales et de l'organisation de la direction générale des douanes et droits indirects l'a informée de la date de la séance du conseil de discipline, ainsi que de l'avis du conseil de discipline émis le 24 février 2017, d'autre part, la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 102 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Par un jugement n° 1904920 du 2 juillet 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés le 3 septembre 2021 et le 10 novembre 2021, Mme D..., représentée par la société Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1904920 du 2 juillet 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 mars 2017 du directeur général des douanes et droits indirects prononçant à son encontre la sanction de la révocation, la lettre du 16 janvier 2017 par laquelle la sous-directrice des ressources humaines, des relations sociales et de l'organisation de la direction générale des douanes et droits indirects l'a informée de la date de la séance du conseil de discipline, ainsi que l'avis émis par le conseil de discipline le 24 février 2017 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 102 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis, assortis des intérêts et de leur capitalisation ;

4°) d'enjoindre au ministre de l'économie, des finances et de la relance, d'une part, de la réintégrer dans son corps en reconstituant sa carrière, d'autre part, de l'affecter dans des fonctions qui ne soient pas situées à l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle,

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité, dès lors qu'il n'a ni visé ni analysé le dernier mémoire qu'elle a produit ;

- c'est à tort que le tribunal a écarté comme tardives ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 mars 2017 ;

- cet arrêté doit être regardé comme un acte inexistant ;

- les droits de la défense ont été méconnus ;

- elle n'a pas été informée des griefs retenus à son encontre ni de la possibilité d'obtenir la communication de son dossier ;

- elle n'a pu bénéficier de l'assistance d'un défenseur de son choix ;

- elle s'est trouvée dépourvue de tout document au soutien de sa défense ;

- les conclusions indemnitaires n'avaient pas à être précédées d'une demande préalable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la requérante ne peut utilement se prévaloir des erreurs de droit, de fait et des dénaturations que les premiers juges auraient commises pour contester la régularité du jugement contesté ;

- le jugement n'est entaché d'aucune irrégularité ;

- les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 9 mars 2017 présentées devant le tribunal administratif de Montreuil étaient tardives ;

- les conclusions aux fins d'annulation de la lettre du 16 janvier 2017 et de l'avis du conseil de discipline en date du 24 février 2017 sont irrecevables dès lors qu'elles sont dirigées contre des actes préparatoires.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;

- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

- et le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 9 mars 2017, le directeur général des douanes et droits indirects a infligé à Mme D..., inspectrice des douanes, la sanction de la révocation. Mme D... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté, de la lettre du 16 janvier 2017 la convoquant devant le conseil de discipline, et de l'avis du conseil de discipline émis le 24 février 2017, ainsi qu'à la condamnation de l'Etat au versement d'une somme de 102 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Sur la régularité du jugement attaqué :

En ce qui concerne le défaut de visa et d'analyse d'un mémoire :

2. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision [...] contient [...] l'analyse des conclusions et mémoires [...] ". Mme D... soutient que le jugement attaqué n'a ni visé ni analysé son dernier mémoire. Toutefois, ce mémoire, enregistré le 13 mai 2020, soit avant la clôture de l'instruction, laquelle a été fixée, par une ordonnance du 26 juin 2020, au 13 juillet 2020, a bien été visé et analysé par les premiers juges. Par suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne la tardiveté :

3. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

4. Un acte ne peut être regardé comme inexistant que s'il est dépourvu d'existence matérielle ou s'il est entaché d'un vice d'une gravité telle qu'il affecte, non seulement sa légalité, mais son existence même.

5. Mme D... soutient que la sanction qui lui a été infligée constituerait un acte inexistant, de sorte que les délais de recours ne pourraient lui être opposables. Toutefois, les moyens qu'elle soulève, tirés de ce qu'elle aurait été convoquée devant le conseil de discipline par une autorité incompétente pour ce faire, qu'elle n'aurait pas été informée des griefs retenus à son encontre ni de la possibilité d'obtenir la communication de l'intégralité de son dossier, que l'administration aurait méconnu les droits de la défense, et que la sanction contestée violerait le principe " non bis idem ", ne sont, en tout état de cause, pas de nature à affecter l'existence même de la sanction contestée. Par suite, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que la sanction disciplinaire qui lui a été infligée serait un acte inexistant dont le juge administratif pourrait constater la nullité sans condition de délai.

6. Toutefois, en cas de retour à l'administration, au terme du délai de mise en instance, du pli recommandé contenant la décision, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l'adresse de l'intéressé, dès lors du moins qu'il résulte soit de mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation du service postal ou d'autres éléments de preuve, que le préposé a, conformément à la réglementation en vigueur, déposé un avis d'instance informant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste. Compte tenu des modalités de présentation des plis recommandés prévues par la réglementation postale, doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet " avis de réception " sur lequel a été apposée la date de vaine présentation du courrier et qui porte, sur l'enveloppe ou l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis.

7. En l'espèce, si une étiquette apposée sur le pli comportant l'arrêté du 9 mars 2017, par lequel le directeur général des douanes et droits indirects a infligé à Mme D... la sanction de la révocation, mentionne que ce pli " a été avisé et non réclamé ", aucun élément ne permet de déduire la date à laquelle ce pli a été présenté. Ainsi, en l'absence de mentions précises, claires et concordantes sur ce courrier et de tout autre élément de preuve apporté par l'administration établissant la date de vaine présentation de ce pli, sa date de notification ne peut être regardée comme établie.

8. Par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Montreuil a rejeté comme irrecevables les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du directeur général des douanes et droits indirects en date du 9 mars 2017. Son jugement doit dès lors être annulé en tant qu'il a rejeté ces conclusions.

9. Il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation, sur les conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du directeur général des douanes et droits indirects du 9 mars 2017 :

10. En premier lieu, aux termes de l'article 18 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " [...] Tout fonctionnaire a accès à son dossier individuel dans les conditions définies par la loi ". Aux termes de l'article 19 de cette loi : " [...] Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier [...] ".

11. Il ressort des pièces du dossier que la directrice générale des douanes et droits indirects a rédigé une note, datée du 9 novembre 2016, dans laquelle elle indiquait l'ensemble des griefs reprochés à Mme D..., que l'intéressée a reçue le 14 novembre 2016, ainsi qu'en attestent sa signature et la date apposées à la fin de ce document. Cette note précisait par ailleurs que " Mme D... devra recevoir communication de l'original du dossier d'enquête et de son dossier individuel dans les locaux de la direction et pourra, si elle le désire, produire un mémoire en défense dans un délai de trois semaines à compter de la date de communication de ses dossiers ". Par ailleurs, le courrier intitulé " reconnaissance de notification " annexé à la note du 9 novembre 2016, également signé par Mme D... le 14 novembre 2016, indique que l'intéressée est informée qu'elle " pourra être assistée ou représentée par un ou plusieurs défenseurs " et " qu'elle pourra consulter au service du personnel de Roissy l'original du dossier d'enquête et de son dossier administratif individuel ", le 21 novembre 2016, le 22 novembre 2016 ou le 23 novembre 2016. Ainsi, Mme D... ne peut soutenir qu'elle n'aurait pas été en mesure de demander la communication de son dossier ni d'exercer valablement ses droits de la défense préalablement à la séance du conseil de discipline. A cet égard, la circonstance que le courrier du 16 janvier 2017 la convoquant devant le conseil de discipline, qu'elle a reçu le 24 janvier 2017, n'a pas de nouveau précisé les griefs qui lui étaient reprochés, est sans incidence sur la régularité de la procédure, dès lors que, ainsi qu'il a été dit précédemment, ces griefs étaient exposés dans la note du 9 novembre 2016. Par suite, le moyen doit être écarté.

12. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4 du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat : " Le fonctionnaire poursuivi est convoqué par le président du conseil de discipline quinze jours au moins avant la date de réunion, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception [...] ".

13. Mme D... soutient qu'elle a été convoquée devant le conseil de discipline par une autorité incompétente pour ce faire. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme D... a été convoquée devant le conseil de discipline par le courrier du 16 janvier 2017, mentionné précédemment au point 11, signé par Mme A..., sous-directrice des ressources humaines, des relations sociales et de l'organisation, présidente du conseil de discipline. Ainsi, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que l'article 4 du décret du 25 octobre 1984 aurait été méconnu.

14. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 du décret du 25 octobre 1984 : " Le fonctionnaire poursuivi peut présenter devant le conseil de discipline des observations écrites ou orales, citer des témoins et se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix. Le droit de citer des témoins appartient également à l'administration [...] ". Aux termes de l'article 4 du même décret : " [...] Ce conseil peut décider, à la majorité des membres présents, de renvoyer à la demande du fonctionnaire ou de son ou de ses défenseurs l'examen de l'affaire à une nouvelle réunion. Un tel report n'est possible qu'une seule fois ".

15. Si Mme D... soutient qu'elle aurait souhaité être assistée, lors de la séance du conseil de discipline, d'un représentant syndical, lequel aurait été empêché, et que le conseil de discipline aurait refusé de reporter l'examen de sa situation, elle n'apporte aucun élément de preuve au soutien de ses allégations, alors que l'administration fait valoir, en particulier, que l'intéressée n'a pas demandé le report de la séance du conseil de discipline. Par ailleurs, si la requérante soutient qu'elle n'aurait pu se faire assister par un avocat, elle indique elle-même qu'elle n'avait pu s'adjoindre les services d'un avocat du fait du montant des honoraires demandés. Enfin, si Mme D... soutient qu'elle s'est trouvée dépourvue de tout " document " au soutien de sa défense, il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'elle a été mise en mesure de demander la communication de son dossier. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'aurait pas été mise à même d'exercer ses droits à la défense lors de la séance du le conseil de discipline du 24 février 2017.

16. En quatrième lieu, aux termes de l'article 14 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Dans chaque corps de fonctionnaires existent une ou plusieurs commissions administratives paritaires, comprenant, en nombre égal des représentants de l'administration et des représentants du personnel. [...] / Ces commissions sont consultées sur les décisions individuelles intéressant les membres du ou des corps qui en relèvent ". Aux termes de l'article 67 de la même loi : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination qui l'exerce après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline [...] ". Aux termes de l'article 5 du décret du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires : " Les commissions administratives paritaires comprennent en nombre égal des représentants de l'administration et des représentants du personnel. Elles ont des membres titulaires et un nombre égal de membres suppléants ". Aux termes de l'article 35 du même décret : " Lorsque les commissions administratives paritaires siègent en formation restreinte, seuls les membres titulaires et, éventuellement, leurs suppléants représentant le grade auquel appartient le fonctionnaire intéressé et les membres titulaires ou suppléants représentant le grade immédiatement supérieur ainsi qu'un nombre égal de représentants de l'administration sont appelés à délibérer ". Aux termes de l'article 34 de ce décret, les commissions administratives paritaires siègent en formation restreinte lorsqu'elles sont saisies de questions résultant de l'application, notamment, de l'article 67 de la loi du 11 janvier 1984.

17. Il ressort du procès-verbal de la réunion de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline, le 24 février 2017, que quatre inspecteurs ont siégé au titre des représentants du personnel, avec voix délibérative. Ainsi, et conformément aux dispositions de l'article 35 du décret du 28 mai 1982, les représentants du personnel - qui avaient été élus, ainsi qu'en atteste la note de janvier 2017 émanant de la direction générale des douanes et droits indirects, produite par l'administration - ayant délibéré sur le cas de Mme D... appartenaient à son grade. Par ailleurs, il ressort du procès-verbal de la commission administrative paritaire qu'elle comprenait autant de représentants du personnel ayant voix délibérative que de représentants de l'administration. Ainsi, le moyen tiré de la composition irrégulière du conseil de discipline doit être écarté.

18. En cinquième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que les débats du conseil de discipline se seraient déroulés dans des conditions irrégulières. En particulier, il ne ressort pas des pièces du dossier que certains des membres de ce conseil auraient manifesté une animosité particulière à l'égard de Mme D... ou auraient fait preuve de partialité.

19. En sixième lieu, si Mme D... avait fait l'objet d'un déplacement d'office par un arrêté du 3 avril 2012, il ne ressort pas des pièces du dossier que certains des griefs qui lui ont été imputés dans l'arrêté contesté étaient déjà évoqués dans l'arrêté du 3 avril 2012. En particulier, la fausse attestation d'employeur, datée du 20 mars 2012, dont la fabrication, par Mme D..., et son utilisation auprès d'un établissement bancaire, ont motivé l'arrêté du 3 avril 2012, n'est pas mentionné par l'arrêté contesté. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe " non bis in idem " doit être écarté.

20. En septième lieu, l'arrêté contesté relève que les supérieurs hiérarchiques de Mme D... se sont aperçus, en mars 2016, alors qu'elle était en congé de formation professionnelle depuis le 1er octobre 2015, qu'elle exerçait le métier d'avocate, et qu'elle avait prêté serment auprès du barreau des Hauts-de-Seine en décembre 2015, que " le cabinet d'avocats qui l'emploie a confirmé le contrat de prestation puis de collaboration libérale qui l'a lié à Mme D... du 1er septembre 2015 au 6 avril 2016 [...], que Mme D... était en charge d'affaires portant sur la TICGN, la valeur en douane, l'espèce tarifaire, l'origine, les contrôle douaniers, les accises et la TVA au sein du cabinet " et qu'elle " avait indiqué être en disponibilité de son administration ". L'arrêté ajoute que " d'autres investigations ont permis de prouver que Mme D... avait déjà exercé une activité de conseil au sein de cabinets privés d'avril à septembre 2013 et en mai 2014 dans le cadre de stages rémunérés, alors qu'elle était en congé de maladie ". Il précise qu'aucune demande de cumul d'activités n'a été déposée par l'intéressée auprès de sa hiérarchie, et " qu'en tout état de cause, compte tenu du domaine dans lequel elle a exercé, une telle demande n'aurait pas été acceptée ". Il est également reproché à Mme D... d'avoir constitué une fausse attestation, datée du 29 septembre 2011, faisant état de la perception de primes non imposables d'un montant mensuel de 4 000 euros, qu'elle a fournie à une propriétaire de logement et à une agence immobilière. L'arrêté attaqué relève par ailleurs, d'une part, que Mme D... a justifié, à plusieurs reprises, son absence de titre de transport auprès de contrôleurs de la SNCF par la circonstance, erronée, qu'elle était en " mission de lutte contre la fraude ", d'autre part, qu'elle a proposé l'appartement mis à sa disposition à la masse des douanes à la sous-location.

21. Mme D... n'apporte aucun élément permettant de remettre en cause les faits énumérés au point précédent. Si la requérante se prévaut d'un jugement du tribunal de proximité de Courbevoie en date du 26 février 2020, ce jugement, qui statue sur une requête, présentée par la propriétaire d'un logement auparavant occupé par Mme D..., aux fins de saisir les rémunérations de Mme D..., ne se prononce pas sur les faits mentionnés au point précédent. Or, ces faits constituent des manquements aux obligations incombant à l'intéressée en sa qualité d'inspectrice des douanes et suffisaient à justifier qu'il soit prononcé à son encontre une sanction disciplinaire. A cet égard, la circonstance, qui n'est d'ailleurs pas établie, que Mme D... aurait informé le cabinet d'avocats qui l'employait des dossiers qu'elle traitait au sein de la direction générale des douanes et droits indirects, afin, selon elle, de prévenir le risque de conflit d'intérêts, est sans incidence compte tenu des faits reprochés à l'intéressée.

22. En huitième lieu, aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire [...] ". Aux termes de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Deuxième groupe : / - la radiation du tableau d'avancement ; / - l'abaissement d'échelon ; / - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours [...] ". Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

23. Les faits mentionnés au point 20, qui sont établis, justifiaient à eux seuls, compte tenu des manquements ainsi commis par Mme D... - qui se borne à se prévaloir de son " professionnalisme " - aux obligations lui incombant en sa qualité d'inspectrice des douanes, que l'autorité disciplinaire prononce à son encontre, sans entacher sa décision de disproportion, la sanction disciplinaire de la révocation.

24. Enfin, si Mme D... soutient que la sanction qui lui a été infligée serait " vexatoire " et qu'elle témoignerait d'un " acharnement " à son encontre, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette sanction, qui, ainsi qu'il a été dit précédemment, est justifiée, serait entachée d'un détournement de pouvoir.

25. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du directeur général des douanes et droits indirects en date du 9 mars 2017.

Sur les conclusions à fin d'annulation du courrier du 16 janvier 2017 convoquant Mme D... devant le conseil de discipline et de l'avis émis par le conseil de discipline le 24 janvier 2017 :

26. Le courrier du 16 janvier 2017 par laquelle la sous-directrice des ressources humaines, des relations sociales et de l'organisation de la direction générale des douanes et droits indirects a informé Mme D... de la date de la séance du conseil de discipline, et l'avis émis par le conseil de discipline le 24 février 2017 constituent des actes préparatoires, non susceptibles de recours pour excès de pouvoir. Ainsi, Mme D... n'est pas recevable à en demander l'annulation. Par suite, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du courrier du 16 janvier 2017 ainsi que de l'avis du conseil de discipline émis le 24 février 2017.

Sur les conclusions indemnitaires :

27. Il n'est pas contesté que les conclusions indemnitaires présentées par Mme D..., tendant à obtenir la condamnation de l'Etat au paiement d'une somme de 102 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subis, n'ont pas été précédées d'une demande préalable. Par suite, à défaut de liaison du contentieux, ces conclusions ne sont pas recevables et doivent être rejetées. La circonstance que Mme D... est une ancienne fonctionnaire est à cet égard sans incidence. Mme D... n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté ces conclusions indemnitaires.

28. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 9 mars 2017 présentées par Mme D..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante doivent être rejetées. Enfin, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme qu'elle demande sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1904920 du 2 juillet 2021 du tribunal administratif de Montreuil est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme D... tendant à l'annulation de l'arrêté du directeur général des douanes et droits indirects en date du 9 mars 2017.

Article 2 : La demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Montreuil tendant à l'annulation de l'arrêté du directeur général des douanes et droits indirects du 9 mars 2017 est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de Mme D... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er juillet 2022.

Le rapporteur,

K. C...La présidente,

H. VINOT

La greffière,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA04947 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04947
Date de la décision : 01/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Khalil AGGIOURI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : SCP MATUCHANSKY- POUPOT - VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-07-01;21pa04947 ?
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