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28/06/2022 | FRANCE | N°21PA02526

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 28 juin 2022, 21PA02526


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Auditeurs Associés Conseils a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, et des pénalités correspondantes, auxquels elle a été assujettie au titre des périodes d'imposition comprises entre le 1er janvier 2012 et le 30 juin 2015, ainsi que de l'amende pour défaut de désignation des bénéficiaires de revenus réputés distribu

s, à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014.

Par un jugement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Auditeurs Associés Conseils a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, et des pénalités correspondantes, auxquels elle a été assujettie au titre des périodes d'imposition comprises entre le 1er janvier 2012 et le 30 juin 2015, ainsi que de l'amende pour défaut de désignation des bénéficiaires de revenus réputés distribués, à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1911403 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la SARL Auditeurs Associés Conseils.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2021, la SARL Auditeurs Associés Conseils, représentée par Me Gueunier, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1911403 du 9 mars 2021, du tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, et des pénalités correspondantes, auxquels elle a été assujettie au titre des périodes d'imposition comprises entre le 1er janvier 2012 et le 30 juin 2015, ainsi que de l'amende pour défaut de désignation des bénéficiaires de revenus réputés distribués, à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la proposition de redressement n'est pas suffisamment motivée ;

- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée ne sont pas justifiés ;

- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort ne sont pas fondés compte tenu des rectifications opérées spontanément par la société, retracées dans un à nouveau créditeur au compte " TVA déductible " ;

- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée déduite par anticipation ne sont pas fondés, ces rappels n'ayant pas tenu compte de paiements effectués au cours de l'exercice 2015 après la fin de la période vérifiée, et les paiements des fournisseurs étant justifiés à la date du 30 juin 2015 ;

- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée à raison de frais de réception ne sont pas justifiés ;

- le profit sur le Trésor n'est pas dû, compte tenu de l'irrégularité des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ;

- l'administration ne peut remettre en cause les reports en à nouveau sur les comptes courants d'associés, ces opérations correspondant au règlement de frais de restaurant par les associés concernés ;

- la déduction d'une provision pour créance irrécouvrable n'est pas fondée ;

- les charges d'assurance responsabilité et de cotisation retraite sont justifiées ;

- les pénalités et amendes ne sont pas motivées ;

- il n'y a ni manquement délibéré ni manœuvre frauduleuse ;

- en l'absence de revenus distribués, et de désinvestissement, l'amende pour défaut de désignation des bénéficiaires n'est pas applicable.

Par un mémoire, enregistré le 2 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Auditeurs Associés Conseils, qui exerce une activité d'expertise comptable, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2012 au 30 juin 2014, étendue, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, au 30 juin 2015. Elle demande régulièrement à la Cour l'annulation du jugement du 9 mars 2021, par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des compléments d'imposition à l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie, ainsi que des pénalités correspondantes et de l'amende pour défaut de désignation des bénéficiaires de revenus réputés distribués à laquelle elle a été assujettie pour les années 2013 et 2014.

2. Dans le cadre de l'effet dévolutif, le juge d'appel, qui est saisi du litige, se prononce non sur les motifs du jugement de première instance mais directement sur les moyens mettant en cause la régularité et le bien-fondé des impositions en litige. Par suite, la SARL Auditeurs Associés Conseils ne peut utilement soutenir que les premiers juges ont entaché leur jugement d'erreur d'appréciation et d'erreur dans la dévolution de la charge de la preuve.

Sur la régularité du jugement :

3. Si la SARL Auditeurs Associés Conseils soutient que les premiers juges ont omis de répondre au moyen, soulevé à l'appui de la contestation de l'amende en litige, tiré de ce que le service devait apporter la preuve de l'appréhension des bénéfices réputés distribués à raison d'un passif non justifié, constitué de crédits portés sur les comptes courants d'associés, il ressort du point 22 du jugement entrepris que les premiers juges ont retenu que l'application de l'amende en cause n'était pas subordonnée à la démonstration de l'appréhension des bénéfices en cause par leurs bénéficiaires. Par suite, le moyen soulevé manque en fait et doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

4. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile.

5. Comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges au point 5 de leur jugement, dont il convient de s'approprier les motifs, la proposition de rectification adressée à la société Auditeurs Associés Conseils était suffisamment motivée.

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

6. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Aux termes de l'article 271 du code général des impôts :

" I. - 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable (...). II. - 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ;(...) 2. La déduction ne peut pas être opérée si les redevables ne sont pas en possession soit desdites factures, soit de la déclaration d'importation sur laquelle ils sont désignés comme destinataires réels. ".

7. En premier lieu, concernant les périodes d'imposition comprise entre le 1er janvier 2012 et le 30 juin 2013, l'administration a identifié, par rapprochement entre les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée de la société requérante et sa comptabilité, une insuffisance de reversement de taxe sur la valeur ajoutée collectée d'un montant de 6 678 euros. Si la société requérante soutient qu'elle a spontanément régularisé ses déclarations de taxe déductible au cours de la période concernée, en réduisant leur montant de 15 495 euros, ces régularisations, justifiées au cours du contrôle, ont été prises en compte par le service au titre du rappel de taxe déduite, mentionné au point 9 suivant du présent arrêt, et sont sans influence sur le montant de la taxe collectée en litige.

8. En deuxième lieu, l'administration a remis en cause, au titre de la taxe sur la valeur ajoutée déductible, un report à nouveau inscrit au 1er janvier 2012 pour un montant de 13 806 euros. Il résulte de l'instruction que ce report, inscrit au titre d'une régularisation comptable et non du solde restant à déduire de la période précédente, n'est pas justifié par la société requérante, à laquelle incombe la preuve en cause, par la présentation de factures en attente de paiement sur la période antérieure. En outre, l'administration a tenu compte du montant de cet à nouveau pour déterminer le rappel correspondant à de la taxe déduite à tort qu'elle a notifié au titre des périodes comprises entre le 1er janvier 2012 et le 30 juin 2013, mentionné au point 9 suivant du présent litige.

9. En troisième lieu, l'administration a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a estimé avoir été déduite à tort, au titre de chaque période d'imposition mensuelle entre janvier 2012 et juin 2015, motif pris de corrections apportées au crédit du compte 445600 " TVA déductible ", chaque fin de période, par voie d'écritures d'" opérations diverses " ayant pour effet de rehausser le montant du crédit afin de le porter à un niveau voisin ou supérieur au montant du débit à la même date. Compte tenu du montant de l'à nouveau mentionné au point 8 précédent, et après déduction, au titre des périodes achevées au 30 juin 2013, de la régularisation de 15 495 euros mentionnée au point 7 précédent, elle a ainsi notifié des rappels sur taxe déductible pour les sommes de 26 912 euros, 49 981 euros et 7 523 euros au titre des périodes d'imposition achevées respectivement au 30 juin 2013, 30 juin 2014 et 30 juin 2015. La SARL Auditeurs Associés Conseils se borne, à hauteur d'appel, à soutenir que le montant de ces rappels a été déterminé sommairement par seule référence à une ligne comptable d'" opérations diverses ", et, s'agissant des périodes d'imposition achevées au 30 juin 2013, que ce montant inclut le report à nouveau de 13 806 euros, mentionné au point 8, censé correspondre à une opération de régularisation. Toutefois, la société requérante, à laquelle incombe la charge d'établir la nature des opérations diverses concernées, et qui a, en cours de contrôle, fait valoir qu'elles correspondent à des opérations de régularisations inscrites au débit du compte, pour les sommes de 39 826 euros au 30 juin 2013, 22 237,45 euros au 30 juin 2014, cette dernière portée en à nouveau sur la période suivante, ne justifie pas de la réalité de telles opérations de régularisation, et notamment pas du paiement de sommes non réglées antérieurement. A cet égard, la circonstance invoquée, tenant à l'absence de rectification au titre des années 2010 et 2011, lors d'un précédent contrôle, ne saurait justifier que des régularisations aient dû être pratiquées au cours de périodes postérieures en litige. Par ailleurs, l'administration a tenu compte, pour la détermination du rappel correspondant aux périodes achevées au 30 juin 2012, de l'à nouveau de 13 806 euros mentionné précédemment. Par suite, aucun double emploi ne peut être constaté.

10. En quatrième lieu, la SARL Auditeurs Associés Conseils a inscrit au titre de la taxe déductible du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014, la taxe acquittée au titre de frais de réception que le service a remise en cause en l'absence de factures justificatives, pour la somme de 23 313 euros. Si la société requérante soutient avoir régularisé ses écritures après avoir constaté qu'elle avait égaré lesdites factures, l'administration fait toutefois valoir, sans être démentie, que ces régularisations ne lui sont jamais parvenues. En tout état de cause, la seule production d'une copie d'un extrait du compte de charges 625700 mentionnant une écriture libellée " annul mission recep " pour un montant de 23 313 euros ne saurait suffire à établir la réalité de la régularisation alléguée au titre de la taxe sur la valeur ajoutée ayant ouvert droit à déduction.

11. En cinquième lieu, pour les périodes d'imposition achevées au 30 juin 2014, la société requérante a déduit la taxe correspondant à une somme de 23 313 euros au titre de dépenses de réception. L'administration a rappelé la taxe correspondante en l'absence de tout justificatif. Si la société établit avoir passé à ce titre une écriture de régularisation au 30 décembre 2015, cette circonstance, qui modifie la taxe due au titre de périodes d'imposition postérieures au contrôle en cause, est sans influence sur le bien-fondé du rehaussement.

12. En sixième lieu, l'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er juillet 2014 au 30 juin 2015, pour la somme de 75 161 euros, motif pris de ce que, les prestations des fournisseurs en cause n'ayant pas été réglées, même partiellement, aucune déduction ne pouvait être pratiquée en l'absence de taxe devenue exigible dans les conditions prévues au 2 du I de l'article 271 précité du code général des impôts. Pour établir ce rappel, l'administration a comparé les factures de cinq prestataires de service restant à payer au vu des soldes des comptes fournisseurs correspondants, au solde nul du compte " TVA déductible " au 30 juin 2015, impliquant une déduction complète de la taxe correspondante. Si la SARL Auditeurs Associés Conseils soutient avoir régularisé ses écritures comptables à la fin de l'exercice qui s'achevait le 31 décembre 2015, soit postérieurement à la période vérifiée, cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence sur le montant des rappels en cause, pratiqués au titre de périodes d'imposition antérieures, lesquelles, eu égard aux modalités de déclaration de la société qui relève du régime de déclaration mensuelle, pouvaient à bon droit être arrêtées par l'administration à une date antérieure à la clôture de l'exercice comptable en cause. En outre, si elle verse au dossier, s'agissant de trois des cinq fournisseurs concernés, des extraits de comptes de tiers faisant apparaître, au 30 juin 2015, une égalité entre les soldes débiteurs et créditeurs, pouvant permettre de présumer un règlement complet de leurs prestations, ces écritures ne présentent pas de date certaine et ne sont pas appuyées par des justificatifs comptables contemporains des écritures ainsi produites, attestant du caractère effectif des paiements en cause.

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

13. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'œuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire ". Les charges pouvant être admises en déduction du bénéfice imposable, en application des dispositions de l'article 39 du code général des impôts, doivent avoir été exposées dans l'intérêt direct de l'entreprise ou se rattacher à sa gestion normale, correspondre à des charges effectives et être appuyées de justificatifs. Il appartient au contribuable de justifier du bien-fondé des charges inscrites dans sa comptabilité.

14. En premier lieu, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels a été assujettie la SARL Auditeurs Associés Conseils étant fondés, ainsi qu'il a été dit précédemment, le moyen tiré de l'absence de bien-fondé du profit sur le Trésor ne peut qu'être écarté.

15. En deuxième lieu, la SARL Auditeurs Associés Conseils a inscrit au 1er janvier 2012 le report d'un solde de 47 473 euros au crédit du compte courant d'associés, que l'administration a taxé comme passif injustifié. Si la société requérante soutient que ces sommes correspondent à des frais de représentation pris en charge par les associés, elle n'établit pas, par la production de justificatifs de frais de repas assortis de la mention du nom des associés qui y ont pris part, la prise en charge des frais en cause par ces derniers. La circonstance que l'administration n'a pas remis en cause ces inscriptions lors du précédent contrôle de comptabilité portant sur les exercices 2010 et 2011 n'interdisait pas au service de demander des justificatifs quant à la présence de cette dette au passif à l'ouverture de l'exercice 2012.

16. En troisième lieu, la SARL Auditeurs Associés Conseils a inscrit au titre de l'exercice clos le 30 juin 2013 des dépenses d'assurance professionnelle concernant l'un de ses associés. La facture d'appel de prime produite est toutefois libellée au nom d'un autre cabinet d'expertise comptable et la société n'établit pas qu'une part de ces primes d'assurance aurait concerné l'activité de l'associé en cause en son sein.

17. En quatrième lieu, l'inscription au titre de l'exercice clos le 30 juin 2013 de la somme de 1 000 euros à titre de provision pour créance irrécouvrable, censée correspondre à une créance sur un client admis en procédure de liquidation au cours de cet exercice, n'est pas davantage justifiée dès lors que la société débitrice n'a fait l'objet d'une clôture pour insuffisance d'actif qu'en 2015 et que la société requérante, qui n'a pas produit à la procédure collective, ne se prévaut d'aucune démarche pour faire valoir une prétendue créance.

18. En cinquième lieu, au titre des exercices clos en 2013 ou 2014, selon les cas, la société a inscrit des charges correspondant à des rappels de la part patronale de cotisations retraite. La société n'établit toutefois ni l'existence de ce rappel ni son paiement effectif, les sommes figurant pour 2014 sur des déclarations de cotisations auprès du groupe Humanis ne portant pas sur les mêmes montants que ceux en litige.

19. En sixième lieu, pour l'exercice 2014, la société requérante a inscrit en charges la somme de 23 313 euros au titre de dépenses de réception qui a été remise en cause par l'administration en l'absence de tout justificatif. Si la société établit avoir passé à ce titre une écriture de régularisation au 30 décembre 2015, cette circonstance, qui modifie les résultats d'un exercice distinct, est sans influence sur le bien-fondé du rehaussement.

En ce qui concerne les pénalités :

20. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : /a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ; c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses (...). ".

21. Les mentions de la proposition de rectifications relatives à la pénalité de l'article 1729 constituent une motivation suffisante, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges aux points 18 et 19 de leur jugement, dont il convient d'adopter les motifs.

22. Eu égard à la qualité et à l'expérience en matière comptable de la société requérante, qui a pour objet l'expertise comptable et ne pouvait ignorer les règles résultant du code général des impôts en matière d'établissement des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée et de justification de charges, les manquements relatifs aux rappels de taxe collectée, à la taxe déduite par anticipation, aux dépenses de réceptions injustifiées, ou au passif injustifié, qui reposent sur des incohérences entre les déclarations et les écritures comptables justificatives, et auxquelles, au demeurant, la société requérante, tant en cours de contrôle qu'en phase contentieuse, n'a pas apporté d'explication convaincante, revêtent un caractère délibéré pouvant faire l'objet de la pénalité de 40 % prévue à l'article 1729 précité. Par ailleurs, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée déduite de manière fictive, analysés au point 9 du présent arrêt, sont justifiés, ainsi qu'il a été dit, par une pratique répétée et non justifiée de correction des comptes " TVA déductible ", destinée à majorer indument le crédit de ce compte par des écritures d'" opérations diverses ", tout en neutralisant cette majoration par une écriture de débit symétrique à titre de régularisation en fin d'exercice, permettant ainsi de présenter des comptes équilibrés susceptibles de présumer de droits à déduction justifiés. Une telle pratique, eu égard à sa répétition, à sa sophistication et à l'apparence de régularité des comptes qu'elle avait pour but de créer, doit être regardée comme constituant une manœuvre frauduleuse passible de la pénalité de 80 % prévue à l'article 1729 précité.

23. Aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. /En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ". Aux termes de l'article 1759 du même code : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées. Lorsque l'entreprise a spontanément fait figurer dans sa déclaration de résultat le montant des sommes en cause, le taux de l'amende est ramené à 75 %. ".

24. L'administration a constaté l'inscription de sommes en apport sur les comptes courants d'associés pour 17 825,38 euros au titre de l'exercice clos en 2013 et de 13 584 euros au titre de l'exercice clos en 2014. Faute pour la société de justifier de tels apports, elle a regardé les éléments de passifs en cause comme correspondant à des bénéfices distribués au sens des dispositions du 1° de l'article 109,1 du code général des impôts. Elle était dès lors en droit, sans que la société requérante puisse valablement soutenir qu'elle devait préalablement démontrer l'appréhension des bénéfices en cause par les associés, de demander à la société de lui communiquer des informations sur les bénéficiaires desdites sommes. En outre, les distributions présumées en cause ayant été opérées au profit de tiers à la société requérante, celle-ci ne saurait faire valoir que ces distributions ne correspondent pas à un désinvestissement, la circonstance qu'au cours de l'exercice 2015, la société ait décidé d'augmenter son capital par intégration des soldes de comptes courant d'associé étant sans incidence sur l'existence de distributions présumées à la clôture des deux exercices précédents. Par suite, l'administration était fondée à mettre en œuvre la procédure de désignation prévue à l'article 117 précité du code général des impôts, et, à raison de l'absence de toute réponse de la société requérante à cette demande, à lui infliger l'amende prévue à l'article 1759 précité du même code.

25. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Auditeurs Associés Conseils n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par jugement du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes. Ses conclusions à fin d'annulation et de décharge ou d'attribution des frais de l'instance doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Auditeurs Associés Conseils est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée (SARL) Auditeurs Associés Conseils et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Soyez, président assesseur,

- M. Simon, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 juin 2022.

Le rapporteur,

C. A...Le président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA02526


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA02526
Date de la décision : 28/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: M. Claude SIMON
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : GUEUNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-28;21pa02526 ?
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