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21/06/2022 | FRANCE | N°21PA02235

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 21 juin 2022, 21PA02235


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... A... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à titre principal à l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2020 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2010871/3-1 du 26 mars 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête,

enregistrée le 26 avril 2021, Mme B... A..., représentée par

Me Hervet, demande à la Cour :

1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... A... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à titre principal à l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2020 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2010871/3-1 du 26 mars 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 avril 2021, Mme B... A..., représentée par

Me Hervet, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 mars 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté mentionné ci-dessus du 23 juin 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, " salarié ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

- cette décision est entachée d'insuffisance de motivation ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale par exception d'illégalité du refus de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention de New-York du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant.

Un mémoire a été déposé le 6 juin 2022 par le préfet de police, postérieurement à la clôture automatique de l'instruction trois jours francs avant la date d'audience.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A..., ressortissante congolaise née le 17 août 1988, entrée en France le

2 novembre 2012 sous couvert d'un visa " D " étudiant a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salariée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 23 juin 2020, le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... A... relève appel du jugement du 26 mars 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de séjour :

2. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision litigieuse doit être écarté par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges aux points 3 et 4 du jugement attaqué, qui est suffisamment motivé.

3. En deuxième lieu, comme l'a donc jugé à juste titre le tribunal, le préfet de police a suffisamment motivé le refus de séjour opposé à l'intéressée, ce qui démontre qu'il a procédé à un examen sérieux et complet de sa demande, nonobstant l'erreur ponctuelle quant à l'année de naissance de sa fille. Le moyen tiré du défaut d'examen de la demande doit donc être écarté.

4. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ". En présence d'une demande de régularisation présentée sur ce fondement de droit par un étranger qui n'est pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présente pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier que Mme B... A... arrivée en France sous couvert d'un visa étudiant valable du 24 octobre 2012 au 24 octobre 2013, a bénéficié d'une carte de séjour étudiant valable du 22 janvier 2014 au 21 janvier 2015. Elle a ensuite été mise en possession de récépissés de demande de renouvellement de son titre de séjour, dont le dernier était valable jusqu'au 10 septembre 2016. Si elle fait valoir qu'elle réside habituellement en France depuis 2012, cette seule circonstance ne saurait constituer, à elle seule, un motif exceptionnel de nature à justifier la régularisation sur le fondement des dispositions précitées. Par ailleurs, elle a occupé différents emplois à temps partiel pour financer ses études puis a continué postérieurement, entre fin 2013 et mi-2019, ponctuellement ou par intérim, en tant qu'enquêtrice, intervenante à domicile, animatrice, hôtesse caissière, chef de partie et contrôleuse. Cependant, comme l'ont estimé à juste titre les premiers juges, ces éléments ne suffisent pas à caractériser une situation relevant de circonstances exceptionnelles justifiant son admission exceptionnelle au séjour au titre de son activité professionnelle.

6. D'autre part, si la fille de l'intéressée est scolarisée en France depuis le

7 novembre 2017, cette seule circonstance ne caractérise pas des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels prévus par les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pas davantage que la présence de la requérante depuis novembre 2012 sur le territoire français.

7. Enfin, la requérante ne peut utilement se prévaloir à l'appui de son moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, des énonciations, dépourvues de valeur réglementaire et qui ne constituent pas des lignes directrices, de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent donc être écartés.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, l'illégalité de la décision de refus de séjour n'étant pas établie, l'exception d'illégalité de cette décision doit être écartée.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

11. S'il ressort des pièces du dossier que la fille de Mme B... A... est scolarisée en France depuis novembre 2017, cette circonstance n'est toutefois pas, à elle seule, de nature à caractériser une méconnaissance des stipulations précitées. Si la requérante soutient que sa sœur et les enfants de celle-ci résident sur le territoire français, elle n'apporte aucun élément à l'appui de cette allégation. Elle n'établit pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 24 ans et où vivent toujours ses parents et sa fratrie. En outre la seule maîtrise de la langue française et l'exercice ponctuel d'une activité professionnelle, telle que décrite ci-dessus, ne sont pas davantage de nature à établir que l'intéressée aurait fixé en France le centre de ses intérêts privés et familiaux. Dans ces conditions, en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet de police n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte contraire aux stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

12. En dernier lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions politiques ou privées, de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

13. En l'espèce, la fille de la requérante, de nationalité congolaise comme elle, née en 2005, n'a été scolarisée en France qu'à partir de 2017 et rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale de Mme B... A... se reconstitue dans son pays d'origine avec sa fille qui pourra y poursuivre sa scolarité. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 juin 2022.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

T. CELERIER

La greffière,

K. PETIT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA02235


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA02235
Date de la décision : 21/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: Mme MACH
Avocat(s) : HERVET

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-21;21pa02235 ?
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