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07/06/2022 | FRANCE | N°21PA02508

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 07 juin 2022, 21PA02508


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner la Ville de Paris à l'indemniser de préjudices qu'elle estime avoir subis à la suite de sa vaccination contre l'hépatite B. Par un jugement n° 1308695/2-3 du 4 décembre 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15PA00521 du 24 avril 2018, la Cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de Mme B..., annulé ce jugement, condamné la Ville de Paris à lui verser la somme de 153 000 euros et mis les

frais d'expertise à la charge de la Ville de Paris.

Par une décision nos 421744,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner la Ville de Paris à l'indemniser de préjudices qu'elle estime avoir subis à la suite de sa vaccination contre l'hépatite B. Par un jugement n° 1308695/2-3 du 4 décembre 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15PA00521 du 24 avril 2018, la Cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de Mme B..., annulé ce jugement, condamné la Ville de Paris à lui verser la somme de 153 000 euros et mis les frais d'expertise à la charge de la Ville de Paris.

Par une décision nos 421744, 425597 du 6 mai 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi de pourvois présentés pour la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Paris et pour Mme B..., a annulé l'arrêt du 24 avril 2018 en tant qu'il a omis de statuer sur le préjudice né, pour la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, des dépenses de soins et de transport exposées pour Mme B... à compter du 4 décembre 2014, rejeté le pourvoi de

Mme B..., rejeté les pourvois incidents de la Ville de Paris et renvoyé l'affaire à la Cour dans la limite de la cassation prononcée.

Procédure devant la Cour après renvoi du Conseil d'Etat :

Par un mémoire enregistré le 28 avril 2022, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Paris demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1308695/2-3 du tribunal administratif de Paris en date du

4 décembre 2014 ;

2°) de condamner la Ville de Paris à lui verser les sommes de 97 714,67 euros au titre des prestations versées avant le jugement de première instance et 827 536,80 euros au titre des prestations versées postérieurement, assorties des intérêts de droit à compter de la première demande pour les prestations déjà servies et à partir de leur règlement pour les dépenses de santé futures ;

3°) d'ordonner la capitalisation des intérêts échus pour une année en application de l'article 1343-2 du code civil ;

4°) de condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

5°) de condamner la Ville de Paris à lui verser une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6°) de condamner la Ville de Paris aux entiers dépens.

La caisse primaire d'assurance maladie de Paris soutient que :

- elle dispose d'un recours subrogatoire en application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

- sa créance s'élève à 97 714,67 euros pour les prestations versées avant le 4 décembre 2014, 17 403,25 et 8 466,21 euros pour les dépenses de santé actuelles et les frais de transport versées avant la date de consolidation fixée au 30 mai 2017, 77 635,28 et 66 953,54 euros pour les dépenses de santé et les frais de transport exposés du 31 mai 2017 au 12 octobre 2021 et 827 536,80 euros pour les dépenses de santé futures ;

- elle peut solliciter en outre le versement d'intérêts et de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par un mémoire enregistré le 13 mai 2022, la Ville de Paris, représentée par la SCP Foussard-Froger, demande à la Cour de fixer le point de départ de la période d'indemnisation des dépenses exposées par la caisse primaire d'assurance maladie de Paris au profit de Mme B... au 5 décembre 2014 et de rectifier en conséquence le montant réclamé par la caisse au titre de la période postérieure au jugement.

Elle fait valoir que les demandes de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris sont irrecevables en tant qu'elles tendent au remboursement de dépenses exposées antérieurement au jugement du 4 décembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale,

- le code civil,

- l'arrêté du 14 décembre 2021 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- et les observations de Me Mokrane pour la ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., agente spécialisée des écoles maternelles de la Ville de Paris, a reçu en 1996 et 1997, au titre de ses fonctions, une vaccination contre l'hépatite B. A la suite de l'apparition d'une grave affection rénale (glomérulonéphrite), elle a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner la Ville de Paris à l'indemniser des préjudices qu'elle estimait liés à cette vaccination. La caisse primaire d'assurance maladie de Paris, appelée en cause par le tribunal administratif, a demandé que ses droits soient " réservés ", sans présenter de conclusions. Par un jugement du 4 décembre 2014, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme B.... Sur appel de celle-ci, la Cour administrative d'appel de Paris, après avoir appelé à la cause la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, qui n'a pas présenté de conclusions, a, par un arrêt du 24 avril 2018, annulé le jugement du tribunal et condamné la Ville de Paris à indemniser l'intéressée de divers préjudices ayant résulté pour elle de sa vaccination, ainsi qu'à payer les frais d'expertise. Saisi de pourvois en cassation présentés pour la caisse primaire d'assurance maladie de Paris et pour Mme B..., le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt du 24 avril 2018 en tant qu'il a omis de statuer sur le préjudice né, pour la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, des dépenses de soins et de transport exposées pour Mme B... à compter du 4 décembre 2014, rejeté le pourvoi de Mme B..., rejeté les pourvois incidents de la Ville de Paris, renvoyé l'affaire à la Cour dans la limite de la cassation prononcée et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Sur les débours de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris exposés avant le 4 décembre 2014 :

2. Par sa décision du 6 mai 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt du 24 avril 2018 en tant seulement qu'il a omis de statuer sur le préjudice né, pour la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, des dépenses de soins et de transport exposées pour Mme B... à compter du 4 décembre 2014 et rejeté le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris. Les conclusions de cette dernière tendant à la condamnation de la Ville de Paris à lui rembourser la somme de 95 883,97 euros correspondant à des dépenses de soins et de transport exposées pour le compte de Mme B... au cours de la période antérieure au 4 décembre 2014 excède ainsi le champ du renvoi opéré par le juge de cassation.

Sur les débours de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris exposés après le 4 décembre 2014 :

3. Il résulte de l'attestation d'imputabilité établie le 22 octobre 2021 par le médecin conseil de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris que celle-ci a exposé des frais médicaux et des frais de transport en lien direct et certain avec la pathologie dont Mme B... est atteinte à la suite de la vaccination obligatoire qu'elle a subie et pour laquelle la responsabilité de la Ville de Paris est engagée. Ces frais s'élèvent, pour la période du 4 décembre 2014 au 12 octobre 2021, à la somme de 95 038,53 euros pour les dépenses de santé et de 75 419,75 euros pour les frais de transport. Il y a lieu dès lors de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 170 458,28 euros à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Paris.

Sur les dépenses de soins et de transport après le 12 octobre 2021 :

4. La caisse primaire d'assurance maladie de Paris demande le remboursement d'un capital de 827 536,80 euros au titre des dépenses de santé exposées après le 12 octobre 2021 et qu'elle sera amenée à supporter à l'avenir, correspondant, conformément à l'attestation d'imputabilité établie le 22 octobre 2021 par son médecin conseil, au coût de deux consultations spécialisées et d'une échographie par an, ainsi que de trois dialyses par semaine et des frais de transport correspondant. Eu égard aux dispositions de l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale qui limitent le recours subrogatoire des caisses de sécurité sociale à l'encontre du responsable d'un accident corporel aux préjudices qu'elles ont pris en charge, le remboursement des prestations qu'une caisse sera amenée à verser à l'avenir, de manière certaine, prend normalement la forme du versement d'une rente et ne peut être mis à la charge du responsable sous la forme du versement immédiat d'un capital représentatif qu'avec son accord. La Ville de Paris n'ayant pas accepté qu'un capital soit versé pour un remboursement des frais futurs de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, il y a lieu de condamner la Ville de Paris à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie de Paris les dépenses qu'elle a ou sera amenée à engager, à compter du 12 octobre 2021, au titre de la prise en charge de Mme B..., en lien direct et certain avec la pathologie survenue à la suite de sa vaccination contre l'hépatite B, au fur et à mesure où elles seront engagées, sur présentation de justificatifs.

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

5. La caisse primaire d'assurance maladie de Paris, demandant pour la première fois le versement d'une somme au titre de la période postérieure au 4 décembre 2014, a droit aux intérêts de la somme de 170 458,28 euros à compter du 28 avril 2022, date d'enregistrement de son mémoire au greffe de la Cour.

6. Aux termes de l'article 1343-2 du code civil : " Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise ". La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière.

7. Si la caisse primaire d'assurance maladie de Paris a demandé la capitalisation des intérêts, il n'est pas dû une année entière d'intérêts à la date de lecture du présent arrêt. Dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, il y a lieu de rejeter cette demande.

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :

8. Aux termes de l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale : " (...) En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (...) ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 14 décembre 2021 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale pour 2022 : " Les montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 110 € et à 1 114 euros € au titre des remboursements effectués au cours de l'année 2022 ".

9. En application des dispositions précitées, il y a lieu de condamner la Ville de Paris à verser à la caisse primaire d'assurance maladie une somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Sur les frais de l'instance :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 1 500 euros à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Paris au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La Ville de Paris est condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Paris une somme de 170 458,28 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2022.

Article 2 : La Ville de Paris est condamnée à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, sur présentation des justificatifs et au fur et à mesure de ses débours, les sommes relatives aux frais de soins et de transport exposés pour le compte de Mme B... après le 12 octobre 2021.

Article 3 : La Ville de Paris versera à la caisse primaire d'assurance maladie de Paris une somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et une somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., à la Ville de Paris et à la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris.

Délibéré après l'audience du 20 mai 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Briançon, présidente,

- M. Mantz, premier conseiller,

- M. Doré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juin 2022.

Le rapporteur,

F. A...

La présidente,

C. BRIANÇON

La greffière,

A. MOHAMAN YERO

La République mande et au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA02508


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA02508
Date de la décision : 07/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BRIANÇON
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : SCP FOUSSARD-FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-07;21pa02508 ?
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