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07/06/2022 | FRANCE | N°20PA03976

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 07 juin 2022, 20PA03976


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2018 par lequel le maire de Saint-Mandé l'a licenciée en cours de stage pour insuffisance professionnelle, avec effet au 3 août 2018, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 17 avril 2019 par lequel le maire de Saint-Mandé l'a licenciée en cours de stage pour insuffisance professionnelle, avec effet au 3 mai 2019, ensemble la décision implicite du m

aire rejetant son recours gracieux et, enfin, de condamner la commune de S...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2018 par lequel le maire de Saint-Mandé l'a licenciée en cours de stage pour insuffisance professionnelle, avec effet au 3 août 2018, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 17 avril 2019 par lequel le maire de Saint-Mandé l'a licenciée en cours de stage pour insuffisance professionnelle, avec effet au 3 mai 2019, ensemble la décision implicite du maire rejetant son recours gracieux et, enfin, de condamner la commune de Saint-Mandé à lui verser les sommes de 100 000 euros au titre du préjudice financier, 50 000 euros au titre du préjudice moral, 35 000 euros au titre des préjudices par ricochet et 30 000 euros au titre de la perte de chance.

Par un jugement nos 1808389, 1909309 du 8 octobre 2020, le tribunal administratif de Melun a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juillet 2018, a annulé l'arrêté du 17 avril 2019 et la décision implicite de rejet du recours gracieux dirigé contre cet arrêté, a condamné la commune de Saint-Mandé à verser à Mme B... une somme de 500 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2019 et de la capitalisation des intérêts et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire, enregistrée le 15 décembre 2020, un mémoire ampliatif enregistré le 16 mars 2021 et un mémoire en réplique enregistré le 17 septembre 2021, Mme B..., représentée par Me Sillet, demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Melun nos 1808389, 1909309 en date du 8 octobre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 avril 2019, ensemble la décision implicite du maire rejetant son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre à la commune de Saint-Mandé de lui verser la somme correspondant à la différence entre ce qu'elle a effectivement perçu et le traitement qu'elle aurait dû percevoir, entre le 3 août 2018, date de sa réintégration, et la date du jugement à intervenir, cette somme étant majorée des intérêts légaux à compter du 18 juin 2019 avec capitalisation des intérêts échus à compter de cette même date ;

4°) d'enjoindre à la commune de Saint-Mandé de lui communiquer un bulletin de paie de régularisation ainsi que l'intégralité des bulletins de paie rectifiés ;

5°) d'enjoindre à la commune de Saint-Mandé de prononcer sa titularisation ;

6°) d'enjoindre à la commune de Saint-Mandé d'exécuter ces injonctions dans un délai d'un mois, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

7°) de condamner la commune de Saint-Mandé à réparer le préjudice subi du fait de l'illégalité fautive des arrêtés contestés, par le versement des sommes de 100 000 euros au titre du préjudice financier, 50 000 euros au titre du préjudice moral, 35 000 euros au titre des préjudices par ricochet et 30 000 euros au titre de la perte de chance, ces sommes étant majorées des intérêts au taux légal en vigueur à compter du 18 juin 2019 avec capitalisation des intérêts échus à compter de cette même date ;

8°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Mandé la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a omis de se prononcer sur les conclusions de la demande enregistrée sous le n° 1808389 tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de la titulariser, conclusions qui n'avaient pas perdu leur objet ;

- l'arrêté du 17 avril 2019 est entaché d'un vice de procédure du fait de l'absence de consultation préalable de la commission administrative paritaire et de l'irrégularité de l'avis émis par cette commission le 26 juin 2018 ; elle n'a pas été mise en mesure de faire la preuve de ses aptitudes professionnelles ;

- elle ne pouvait être licenciée pour insuffisance professionnelle dès lors qu'elle n'avait pas suivi la formation d'intégration prévue par l'article 7 du décret n° 2006-1690 du 22 décembre 2006 ;

- l'arrêté du 17 avril 2019 est entaché d'insuffisance de motivation en méconnaissance de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses aptitudes professionnelles ; les conditions dans lesquelles son stage s'est déroulé ne permettaient pas à l'administration d'apprécier ses compétences ;

- cet arrêté est entaché de détournement de pouvoir, dès lors qu'il est en réalité fondé sur son état de santé, sa grossesse et son congé parental ;

- il est entaché d'erreur de droit au regard du principe général dont s'inspire l'article L. 122-25-2 du code du travail interdisant le licenciement des femmes en état de grossesse jusqu'à 14 semaines après la naissance ;

- ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte sont recevables et fondées ;

- l'illégalité de l'arrêté du 17 avril 2019 constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;

- l'arrêté du 19 juillet 2018 était également illégal et a été à l'origine de préjudices financier et moral ;

- ces préjudices ont été aggravés par le second licenciement ;

- ses enfants et son conjoint ont également subi des préjudices ; ce dernier a notamment été contraint de demander une mutation ;

- malgré sa réintégration au 3 aout 2018, sa situation financière n'a pas été régularisée ;

- son licenciement illégal lui a fait perdre une chance d'être titularisée ; elle est fondée à demander sa " titularisation officielle " ou, à défaut, à être indemnisée à hauteur de 30 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juillet 2021, la commune de Saint-Mandé, représentée par Me Benisty, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 avril 2019 sont irrecevables, la requérante n'ayant pas d'intérêt à agir contre cette décision annulée par les premiers juges ;

- les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- le décret n° 91-1194 du 4 novembre 1992 ;

- le décret n°2006-1690 du 22 décembre 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Doré, rapporteur,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- et les observations de Me SILLET, pour Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Après avoir été engagée par la commune de Saint-Mandé en qualité d'adjointe territoriale non titulaire à compter de juillet 2013, d'abord dans le cadre d'un contrat unique d'insertion, puis en tant que contractuelle, Mme B... a été employée en qualité d'adjointe administrative territoriale stagiaire à compter du 1er février 2017. A la suite d'un accident survenu le 6 octobre 2017, elle a été placée en congé pour une maladie en lien avec le service jusqu'au

8 novembre 2017, puis en congé de maladie ordinaire. Par un courrier du 17 juillet 2018,

Mme B... a informé la commune de son état de grossesse. Par une première décision du

19 juillet 2018, Mme B... a fait l'objet d'un licenciement en cours de stage pour insuffisance professionnelle, décision retirée par un arrêté du 8 avril 2019. Par une seconde décision du

17 avril 2019, le maire de la commune de Saint-Mandé a de nouveau licencié Mme B... en cours de stage pour insuffisance professionnelle. Le recours gracieux de Mme B... à l'encontre de cette décision, de même que sa réclamation préalable indemnitaire, sont restés sans réponse. Saisi par Mme B..., le tribunal administratif de Melun a, par une jugement du 8 octobre 2020, d'une part, constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la demande tendant à l'annulation de la décision de licenciement en cours de stage du 19 juillet 2018 compte tenu de la décision de retrait du 8 avril 2019, d'autre part, annulé la décision du 17 avril 2019 et la décision implicite de rejet du recours gracieux exercé par Mme B... à son encontre et, enfin, condamné la commune de Saint-Mandé à verser à Mme B... la somme de 500 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2019 et de la capitalisation des intérêts et rejeté le surplus des conclusions de ses demandes. Mme B... fait appel de ce jugement en tant qu'il rejette une partie de ses demandes.

Sur la fin de non-recevoir partielle opposée par la commune de Saint-Mandé :

2. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du

17 avril 2019. Par suite, ainsi que le fait valoir la commune de Saint-Mandé, les conclusions de la requête d'appel de Mme B... tendant à l'annulation de cet arrêté étaient dépourvues d'objet à la date de son enregistrement par le greffe de la Cour et, par suite, irrecevables.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Il ressort du point 4 du jugement attaqué qu'après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande enregistrée par le tribunal sous le n° 1808389 tendant à l'annulation de la décision du 19 juillet 2018, les premiers juges ont, par voie de conséquence, rejeté les conclusions accessoires aux fins d'injonction présentées par Mme B..., y compris les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de la titulariser. Par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal aurait entaché le jugement attaqué d'irrégularité en omettant de statuer sur ces conclusions doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

4. L'annulation de l'arrêté du 17 avril 2019 par lequel la commune de Saint-Mandé a licencié Mme B... en cours de stage pour insuffisance professionnelle implique seulement qu'elle soit réintégrée avec effet rétroactif à la date d'effet de la décision de licenciement annulée, soit le

3 mai 2019. En revanche, ainsi que l'a jugé le tribunal, cette annulation n'implique pas nécessairement que soit versée à Mme B... la différence entre le traitement perçu et celui qu'elle aurait dû percevoir depuis le 3 août 2018, que lui soient communiqués des bulletins de paie rectificatifs et de régularisation et que sa titularisation soit prononcée. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par Mme B... doivent être rejetées.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

S'agissant des conclusions tendant à l'indemnisation des préjudices liés à l'illégalité fautive des arrêtés du 17 juillet 2018 et du 17 avril 2019 :

Quant aux fautes :

5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que Mme B... est fondée à soutenir que l'arrêté de licenciement en cours de stage du 17 juillet 2018, avec effet au 3 août 2018, était illégal compte tenu de son état de grossesse. Contrairement à ce que soutient la commune, la circonstance que cette décision ait été retirée par un arrêté du 8 avril 2019 est sans incidence sur l'existence de cette illégalité et, par suite, d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune.

6. En second lieu, dans la partie non contestée de son jugement du 8 octobre 2020, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 17 avril 2019 au motif que la commune de Saint-Mandé ne pouvait légalement licencier Mme B... qu'à compter du 29 avril 2019, à l'expiration d'une période de quatorze semaines suivant la date de son accouchement. Cette illégalité est également constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune.

7. En revanche, il résulte de l'instruction, notamment du rapport intermédiaire de stage établi par sa supérieure hiérarchique le 4 octobre 2017, soit antérieurement à l'accident de service dont elle a été victime le 6 octobre 2017, et du rapport défavorable à sa titularisation du

18 décembre 2017, que le travail de Mme B..., qui effectuait des tâches correspondant à celles prévues par le statut particulier des adjoints administratifs territoriaux, était marqué par sa démotivation et son manque de disponibilité. Les quelques attestations produites par l'intéressée ne sont pas suffisantes pour contredire ces affirmations. En particulier, si Mme B... justifie qu'elle a travaillé plusieurs samedis, elle ne conteste pas avoir travaillé moins de samedis que ses collègues et n'avoir jamais assisté seule l'élu en charge de la célébration des mariages. Par ailleurs, si

Mme B... a été en congé maladie à compter du 6 octobre 2017, il résulte de l'instruction qu'elle était en stage depuis le 1er février 2017 et que l'administration a ainsi disposé d'un délai suffisant pour apprécier son aptitude professionnelle dans des conditions normales de stage, quand bien même elle n'aurait pas suivi la formation d'intégration prévue par l'article 7 du décret susvisé du

22 décembre 2006. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que le maire de Saint-Mandé aurait décidé de la licencier pour des motifs étrangers à sa manière de servir et tenant à ses absences pour raisons médicales, à son état de grossesse ou à sa demande de congé parental. Dans ces conditions, alors que la commune de Saint-Mandé établit l'insuffisance professionnelle de Mme B..., celle-ci ne peut demander l'indemnisation que des préjudices en lien direct avec les illégalités relevées ci-dessus entachant les arrêtés des 17 juillet 2018 et 17 avril 2019.

Quant aux préjudices :

8. En premier lieu, si Mme B... fait valoir qu'elle a été privée de revenus durant de longs mois à la suite des deux décisions illégales de licenciement en cours de stage, il résulte de l'instruction qu'elle a été réintégrée de manière rétroactive au 3 août 2018 à la suite de l'arrêté du

8 avril 2019 et l'annulation de l'arrêté du 17 avril 2019 implique également qu'elle soit réintégrée de manière rétroactive en qualité de stagiaire au 3 mai 2019. Elle fait également valoir que les décisions en cause ont été à l'origine de difficultés financières. Toutefois, en se bornant à produire une mise en demeure de payer du 8 avril 2019, un avis de saisie administrative à tiers détenteur du 10 septembre 2019 et une décision de recevabilité de la commission de surendettement des particuliers de l'Aude du 14 mai 2020, elle n'établit pas que ces difficultés financières découlent directement de son licenciement pendant la période de protection liée à son état de grossesse, seul vice affectant les arrêtés des 17 juillet 2018 et 17 avril 2019.

9. En deuxième lieu, s'agissant du préjudice moral invoqué par Mme B..., il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu notamment du caractère sommaire des certificats médicaux produits, que le tribunal aurait fait une inexacte appréciation du préjudice moral qu'elle a subi du fait de l'illégalité des arrêtés des 17 juillet 2018 et 17 avril 2019 et compte tenu de son état de vulnérabilité particulière, en lui allouant la somme de 500 euros.

10. En troisième lieu, Mme B... prétend qu'elle a été contrainte de déménager à la suite de son premier licenciement, que son conjoint a dû demander une mutation en Occitanie où les loyers sont moins élevés qu'en Ile-de-France et que leurs difficultés financières ont eu des répercussions sur leurs enfants. Toutefois, en se bornant à produire un courrier de résiliation de son bail du 5 octobre 2018, elle n'établit pas l'existence d'un lien de causalité entre ces différents évènements et le vice entachant les arrêtés des 17 juillet 2018 et 17 avril 2019.

11. En dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la décision de licencier Mme B... en cours de stage en raison de son insuffisance professionnelle était fondée. Par suite, eu égard aux seuls motifs d'illégalité des arrêtés des 17 juillet 2018 et 17 avril 2019, la requérante n'est pas fondée à demander une indemnité au titre d'une prétendue perte de chance d'être titularisée. La circonstance que l'attestation Pôle emploi qui lui a été remise le 3 mai 2019 et que ses bulletins de paie à compter du 1er janvier 2019 mentionnent, par erreur, qu'elle est titulaire est sans incidence sur sa situation.

S'agissant des conclusions tendant à l'indemnisation d'un préjudice résultant de la méconnaissance des dispositions statutaires applicables en matière de congés :

12. Mme B... fait valoir qu'elle a subi un préjudice dès lors que, malgré sa réintégration à compter du 3 août 2018, elle n'a pas perçu l'intégralité de sa rémunération.

13. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 dans sa version alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Il résulte de l'instruction que, par une décision du 14 décembre 2018, le maire de la commune de Saint-Mandé a, conformément à l'avis rendu le 5 novembre 2018 par la commission de réforme interdépartementale de la petite couronne, reconnu que Mme B... avait été victime le 6 octobre 2017 d'un accident imputable au service et l'a placée, à ce titre, en congé au titre de la législation sur les accidents de service jusqu'à son retour à son état antérieur fixé au 8 novembre 2017. Ensuite, elle a été placée en congé pour maladie ordinaire à compter du 9 novembre 2017 et donc, conformément aux dispositions précitées, sans traitement à compter de cette date, avant de bénéficier d'indemnités journalières durant sa période de congés maternité, soit du 26 décembre 2018 au 16 avril 2019.

14. Mme B... conteste la fixation de la date de sa guérison par retour à l'état antérieur au 8 novembre 2017 et fait valoir qu'elle subissait encore les séquelles de son accident de travail jusqu'au 31 octobre 2018. Elle peut ainsi être regardée comme se prévalant, à l'appui de ses conclusions indemnitaires, du préjudice né de l'illégalité de la décision du 14 décembre 2018. Toutefois, les certificats médicaux qu'elle produit se bornent à relever qu'elle souffre de lombalgies et de troubles psychologiques sans se prononcer sur son état antérieur. Dans ces conditions, alors que la commission de réforme interdépartementale de la petite couronne a, dans un avis du

5 novembre 2018, estimé que les arrêts de travail de Mme B... n'étaient en lien avec son accident de service que jusqu'au 8 novembre 2017, Mme B... n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne pouvait être placée en congé de maladie sans traitement à compter du 9 novembre 2018.

15. Par ailleurs, si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise. En admettant même que l'avis de la commission de réforme est irrégulier en raison de vices tenant, d'une part, à l'irrégularité de la composition de la commission en l'absence d'un médecin spécialiste compétent pour l'affection dont Mme B... était atteinte et, d'autre part, à la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure suivie, il résulte de l'instruction que la commune de Saint-Mandé aurait pu prendre la même décision dans le cadre d'une procédure régulière, Mme B... ne produisant aucune pièce de nature à établir que ses arrêts de travail étaient encore imputables au service après le 8 novembre 2017. Dès lors, le préjudice allégué ne peut être regardé comme la conséquence directe des vices dont l'avis de la commission de réforme serait entaché.

16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun, après avoir annulé l'arrêté du 17 avril 2019 et la décision implicite de rejet de son recours gracieux à l'encontre de cet arrêté et lui avoir alloué, en réparation de son préjudice moral, une somme de 500 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2019 et de la capitalisation des intérêts, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Sur les frais liés au litige :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Mandé, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme B... le versement de la somme que la commune de Saint-Mandé demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Mandé présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune de Saint-Mandé.

Délibéré après l'audience du 20 mai 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Briançon, présidente,

- M. Mantz, premier conseiller,

- M. Doré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 juin 2022.

Le rapporteur,

F. DORÉLa présidente

C. BRIANÇONLe greffier,

A. MOHAMAN YERO

La République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA03976


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03976
Date de la décision : 07/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRIANÇON
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : SILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-07;20pa03976 ?
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