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22/03/2022 | FRANCE | N°21PA01028

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 22 mars 2022, 21PA01028


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à titre principal à l'annulation de l'arrêté du 13 novembre 2020 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2020079/4 du 2 février 2021, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistré

e le 26 février 2021, M. B..., représenté par Me Nunes, demande à la Cour :

1°) de l'admettre au b...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à titre principal à l'annulation de l'arrêté du 13 novembre 2020 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2020079/4 du 2 février 2021, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 février 2021, M. B..., représenté par Me Nunes, demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 2 février 2021 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2020 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, d'une part, faute d'avoir sursis à statuer dans l'attente de la décision statuant sur sa demande d'aide juridictionnelle, d'autre part, pour défaut de réponse au moyen tire de l'erreur de fait, enfin, pour insuffisance de motivation s'agissant des autres moyens ;

- la décision contestée est insuffisamment motivée et n'a pas été précédée d'un examen complet de sa situation personnelle ;

- en l'absence de décision de refus de titre de séjour, le préfet ne pouvait légalement prendre la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur de fait car, contrairement à ce qu'elle indique, il est entré en France muni d'un passeport, sous couvert d'un visa Schengen ;

- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il justifie d'une ancienneté de séjour de dix-neuf ans sur le territoire français, où il vit avec ses deux filles ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les articles 3-1 et 16 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est illégale dès lors qu'il doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour au titre du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mars 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... sont infondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du

25 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pagès a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 13 novembre 2020, à la suite d'un contrôle d'identité, le préfet de police a obligé M. B..., ressortissant gabonais né le 12 février 1974, à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 2 février 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire :

2. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du

25 mars 2021. Dès lors, il n'y a plus lieu de statuer sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire présentée par le requérant.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Le requérant avait soulevé le moyen tiré de l'erreur de fait, la mention qu'il était entré irrégulièrement en France et qu'il était dépourvu de passeport étant matériellement inexacte. Le premier juge n'a pas répondu à ce moyen qui n'est pas inopérant. Dès lors, le jugement attaqué est, pour ce motif, irrégulier sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens d'irrégularité, et M. B... est fondé à demander son annulation.

4. Il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de

M. B... devant le Tribunal administratif de Paris et sur ses conclusions d'appel.

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête:

5. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".

6. Le préfet de police a édicté l'arrêté attaqué sur le fondement du 1° de l'article

L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que l'intéressé "est dépourvu de document transfrontière ( passeport) et ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français" et qu'il est "actuellement dépourvu de titre de séjour en cours de validité".

7. Le requérant soutient que le préfet de police a commis une erreur de fait en soutenant que c'est à tort que lui a été opposé le défaut d'entrée régulière en France. Il a produit d'ailleurs en première instance son visa d'entrée et un récépissé constatant le dépôt d'une demande de statut de réfugié du 12 décembre 2001 mentionnant une entrée en France le 5 août 2001.

Cette erreur de fait, non contestée par le préfet et qui ne demande pas une substitution de base légale, a une incidence sur la décision attaquée dans les circonstances de l'espèce. Dès lors,

M. B... est fondé, pour ce motif, à demander l'annulation de l'arrêté attaqué.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt, qui annule l'arrêté du 13 novembre 2020 du préfet de police obligeant M. B... à quitter le territoire français et fixant le pays de destination, implique nécessairement que le préfet de police délivre à ce dernier une autorisation provisoire de séjour et réexamine sa situation administrative. Il y a donc lieu, en vertu des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de police de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. B... et de réexaminer sa situation administrative dans un délai de deux mois à compter du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu en l'espèce d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Nunes renonce à la part contributive de l'Etat.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'admission au titre de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le jugement n° 2020079/4 du 2 février 2021 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 13 novembre 2020 du préfet de police pris à l'encontre de M. B... sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer une autorisation provisoire de séjour à

M. B... et de réexaminer sa situation administrative dans un délai de deux mois à compter du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à Me Nunes, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 mars 2022.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

T. CELERIER

La greffière,

K. PETIT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA01028


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01028
Date de la décision : 22/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: Mme MACH
Avocat(s) : NUNES

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-22;21pa01028 ?
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