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16/02/2022 | FRANCE | N°20PA00829

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 16 février 2022, 20PA00829


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 361 307 euros en réparation du préjudice qu'elle soutient avoir subi, correspondant au montant des impositions mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008.

Par un jugement n° 1715554/1-1 du 8 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2020, Mme B..., représentée par Me Eric Planchat

demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1715554/1-1 du 8 janvier 2020 du Tribunal ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 361 307 euros en réparation du préjudice qu'elle soutient avoir subi, correspondant au montant des impositions mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008.

Par un jugement n° 1715554/1-1 du 8 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2020, Mme B..., représentée par Me Eric Planchat demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1715554/1-1 du 8 janvier 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de l'indemniser du préjudice correspondant au montant des impositions et des pénalités d'assiette et de recouvrement mis à sa charge au titre des années 2007 et 2008 en raison de l'inconstitutionnalité du 1er alinéa du 7 de l'article 158 du code général des impôts pour l'établissement des contributions sociales assises sur les rémunérations et avantages occultes mentionnés à l'article 109 du même code ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la responsabilité de l'Etat peut être engagée du fait de lois inconstitutionnelles ;

- la décision n° 2017-643/650 du 7 juillet 2017 du Conseil constitutionnel a fait naître à son profit une créance en raison du paiement des contributions sociales indues au titre des années 2007 et 2008 ; le Conseil constitutionnel a estimé que les dispositions du 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts étaient conformes à la Constitution mais ne sauraient, sans méconnaître le principe d'égalité devant les charges publiques, être interprétées comme permettant l'application du coefficient multiplicateur de 1,25 pour l'établissement des contributions sociales assises sur les revenus réputés distribués suite à rectification ; l'assiette des contributions sociales mises à la charge de Mme B... doit être calculée au regard du revenu perçu sans que l'administration puisse appliquer le coefficient multiplicateur de 1,25 ; elle est fondée, au vu de la décision du Conseil constitutionnel à demander la condamnation de l'Etat à lui verser une somme correspondant au montant des contributions sociales et des pénalités d'assiette et de recouvrement correspondant à la différence entre l'assiette de 1,25 et le montant des revenus de capitaux mobiliers réellement distribués ;

- cette créance est protégée par les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et fait obstacle à ce que l'administration fiscale lui oppose l'autorité de la chose jugée et l'exception de recours parallèle pour rejeter son recours comme irrecevable ; c'est à tort que le tribunal, qui a méconnu la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, a relevé qu'elle ne pouvait se prévaloir des stipulations de cet article 1er du premier protocole additionnel.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, les conclusions indemnitaires sont irrecevables compte tenu de l'exception de recours parallèle ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 21 décembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 janvier 2021 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son article 62 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'hommes et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

- la décision n° 2016-610 QPC du 10 février 2017 du Conseil constitutionnel ;

- la décision n° 2017-643/650 QPC du 7 juillet 2017 du Conseil constitutionnel ;

- la décision n° 2019-793 QPC du 28 juin 2019 du Conseil constitutionnel ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique,

- et les observations de Me Planchat, avocat de Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., gérante de la SARL Métropol Hôtel, a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2007, 2008 et 2009. Parallèlement et pour la même période, la SARL Métropol Hôtel et les SCI B... de la Forge et B... Etoile, dont elle détient la moitié du capital, ont également fait l'objet de contrôles de l'administration fiscale. A l'issue de ces différentes procédures, l'administration a rehaussé le revenu imposable de Mme B.... Par un jugement du 28 novembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des impositions supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de ces trois années. Par un arrêt du 5 février 2016, devenu définitif, le Conseil d'Etat n'ayant pas admis le pourvoi en cassation que Mme B... avait formé par une décision du 16 novembre 2016, la Cour administrative d'appel de Paris a confirmé ce jugement. C'est dans ce contexte que Mme B... a, le 7 août 2017, saisi le Premier ministre d'une demande tendant à réparer le préjudice qu'elle soutient avoir subi au titre des années 2007 et 2008, résultant, d'une part, de la non-conformité de l'assiette des contributions sociales à la réserve d'interprétation posée par le Conseil constitutionnel dans sa décision

n° 2017-643/650 QPC du 7 juillet 2017 et, d'autre part, de l'inconstitutionnalité des dispositions combinées des articles L. 76 B et L. 103 du livre des procédures fiscales au regard du principe constitutionnel des droits de la défense découlant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. L'administration ayant gardé le silence sur cette demande pendant plus de deux mois doit être regardée comme l'ayant implicitement rejetée. Mme B... relève appel du jugement du 8 janvier 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 361 307 euros, correspondant au montants des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008.

2. Il résulte de l'instruction que Mme B... a demandé au tribunal ainsi qu'à la Cour de l'indemniser du préjudice correspondant au montant des impositions supplémentaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 et 2008. Cette procédure n'est, toutefois, pas différente dans son objet de celle qu'elle a précédemment engagée devant le tribunal et la Cour, à qui elle a demandé d'être déchargée de ces mêmes impositions supplémentaires, et que la Cour a définitivement rejetée dans son arrêt du 5 février 2016, ainsi que cela a été dit au point 1. du présent arrêt. Mme B... n'invoque ainsi aucun préjudice distinct de celui relatif au paiement des ces impositions. Or, un contribuable dont la demande en décharge d'une imposition a été rejetée par le juge de l'impôt n'est pas recevable à introduire une demande en réparation qui n'invoque pas de préjudice autre que celui résultant du paiement de l'imposition qui était en litige. Il suit de là que la fin de non-recevoir opposée en appel par le ministre de l'économie, des finances et de la relance et tirée de l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires à raison de l'exception de recours parallèle doit être accueillie. C'est par suite à bon droit que le tribunal a rejeté pour irrecevabilité la demande de Mme B....

3. A cet égard, Mme B... ne peut en tout état de cause se prévaloir d'aucune créance qui résulterait de la décision n° 2017-643/650 QPC du 7 juillet 2017 du Conseil constitutionnel, correspondant aux impositions mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008, qui sont définitives, ainsi qu'il a été dit précédemment. Elle n'est par suite pas fondée à se prévaloir des stipulations de l'article 1er du premier protocole à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour remettre en cause cette irrecevabilité.

4. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter sa requête en toutes ses conclusions, y compris celles qu'elle a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 2 février 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Platillero, président,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2022.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative,

F. PLATILLERO

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA00829


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00829
Date de la décision : 16/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PLATILLERO
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : CABINET NATAF et PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-16;20pa00829 ?
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