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01/02/2022 | FRANCE | N°20PA01347

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 01 février 2022, 20PA01347


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Inter Dépannage a demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger de l'obligation de payer les sommes mises à sa charge par vingt-et-un titres de perception du

31 décembre 2017, émis par le préfet de police et portant les numéros 14466, 14467, 14468, 14469, 14544, 14545, 14547, 14548, 14549, 14550, 14551, 14553, 14554, 14555, 14556, 14557, 14558, 14559, 14560, 14561 et 14562, et de mettre à la charge de la ville de Paris ou, à défaut, de l'Etat, la somme de 5 000 euros au titre

des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Inter Dépannage a demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger de l'obligation de payer les sommes mises à sa charge par vingt-et-un titres de perception du

31 décembre 2017, émis par le préfet de police et portant les numéros 14466, 14467, 14468, 14469, 14544, 14545, 14547, 14548, 14549, 14550, 14551, 14553, 14554, 14555, 14556, 14557, 14558, 14559, 14560, 14561 et 14562, et de mettre à la charge de la ville de Paris ou, à défaut, de l'Etat, la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1807088/4-2 du 5 mars 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 mai 2020 et 5 octobre 2020, la

SARL Inter Dépannage représentée par Me Sfez, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 5 mars 2020 ;

2°) d'annuler les vingt et un titres exécutoires contestés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

-le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- le tribunal a entaché son jugement d'erreur manifeste d'appréciation en jugeant qu'elle n'établissait pas que les titres litigieux n'étaient pas fondés ;

- le tribunal a entaché son jugement d'erreur de droit en retenant que les règles des articles L. 133-3 et L. 133-6 du code de commerce ne trouvaient pas à s'appliquer alors que le marché public dont est titulaire la requérante doit s'analyser comme un contrat de transports de marchandises au sens de l'article L. 133-1 du même code ;

- le tribunal a également entaché son jugement d'erreur de droit en jugeant que l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) était applicable, alors que cette clause prévoit l'engagement systématique de la responsabilité du titulaire du marché et limite la responsabilité de la ville, et est de ce fait contraire à la jurisprudence.

Par une ordonnance du 24 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au

26 juillet 2021.

Un mémoire en défense a été présenté pour la ville de Paris après clôture de l'instruction le 7 janvier 2022 ,

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Labetoulle,

- les conclusions de Mme Mach, rapporteure publique,

- et les observations de Me Gorse substituant Me Falala pour la ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Inter Dépannage a été titulaire du lot n°3 du marché conclu, à compter du 16 juin 2016, avec la préfecture de police, agissant pour le compte de la ville de Paris, et relatif aux opérations d'enlèvement de la voie publique des engins à moteur à deux, trois ou quatre roues, remorques et caravanes en stationnement illicite à Paris et aux opérations de transfert de préfourrière en fourrière. En application de la loi n°2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain, la maire de la ville de Paris s'est ensuite substituée de plein droit au préfet de police dans l'exécution de ce marché à compter du

1er janvier 2018. Dans le cadre dudit marché, et avant cette substitution, le préfet de police, après avoir dû indemniser les propriétaires de véhicules ayant souffert de dommages lors de leur enlèvement et de leur transfert en fourrière, s'était retourné contre la société Inter Dépannage pour obtenir remboursement des sommes mises à sa charge et avait ainsi émis, notamment, vingt-et-un titres de perception en date du 31 décembre 2017. La SARL Inter Dépannage a dès lors saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande enregistrée sous le n°1807088 et issue de la régularisation d'une demande antérieure concernant un total de soixante-trois titres, et a sollicité la décharge de l'obligation de payer les sommes fixées par les vingt et un titres litigieux. Toutefois le tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande par un jugement du

5 mars 2020 dont la SARL Inter Dépannage relève appel.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort du jugement attaqué qu'il a cité les stipulations de l'article 11 du CCAP du marché conclu avec la SARL Inter Dépannage, sur le fondement desquelles le préfet de police a émis à l'encontre de cette société les titres exécutoires litigieux, puis qu'il a répondu à chacun des moyens qu'elle avait soulevés. De plus, au vu du contenu des écritures de première instance, le tribunal a pu, à juste titre, et sans entacher son jugement d'une insuffisance de motivation, écarter le moyen mettant en cause le bien-fondé des titres querellés en faisant valoir que la requérante se bornait à les contester en termes très généraux et n'établissait pas, ce faisant, qu'ils ne seraient pas fondés. Ainsi le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué, soulevé d'ailleurs dans la requête sommaire et non repris dans les écritures complémentaires de la requérante, ne peut, à tous égards, qu'être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Si la SARL Inter Dépannage fait valoir que le tribunal aurait " entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en jugeant (qu'elle) n'établissait pas que les titres de perception dont l'annulation était sollicitée n'étaient pas fondés ", ce moyen, qui n'est, lui non plus, pas repris dans son mémoire complémentaire, n'est, pas plus que celui soulevé en première instance et tendant à contester le bien-fondé des titres querellés, assorti de précisions de nature à permettre d'en apprécier le bien-fondé, et ne peut, dès lors, qu'être écarté.

4. Aux termes de l'article L. 133-3 du code de commerce : " La réception des objets transportés éteint toute action contre le voiturier pour avarie ou perte partielle si dans les trois jours, non compris les jours fériés, qui suivent celui de cette réception, le destinataire n'a pas notifié au voiturier, par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée, sa protestation motivée./ Si dans le délai ci-dessus prévu il est formé une demande d'expertise en application de l'article L. 133-4, cette demande vaut protestation sans qu'il soit nécessaire de procéder comme il est dit au premier alinéa. /Toutes stipulations contraires sont nulles et de nul effet. Cette dernière disposition n'est pas applicable aux transports internationaux. ". Il résulte de ces dispositions que les délais de prescription qu'elles prévoient sont applicables aux contrats de transport au sens du code civil, c'est à dire aux contrats dont l'objet se limite au transport de personnes ou de marchandises.

5. En l'espèce, l'objet du marché conclu entre la préfecture de police et la SARL Inter Dépannage porte sur l'enlèvement de la voie publique des engins à moteur à deux, trois ou quatre roues, remorques et caravanes désignés par la préfecture de police et les opérations de transfert des préfourrières vers les fourrières. Ainsi, ce marché ne se limite pas au transport de véhicules. Par suite, les règles spéciales concernant la prescription dans les contrats de transport définies à l'article L. 133-3 cité ci-dessus du code de commerce ne trouvent pas à s'appliquer.

6. En dernier lieu, pour soutenir que l'article 11 du CCAP ne pouvait légalement lui être appliqué, la SARL Inter Dépannage fait valoir qu'une clause d'irresponsabilité d'une personne publique ne s'applique pas si les dommages sont entièrement imputables à cette personne publique et que la survenance d'un cas de force majeure ou d'une faute de la personne publique permet d'écarter l'application de la clause d'un marché public prévoyant la responsabilité automatique de l'entrepreneur en cas de dommages. Toutefois, d'une part, il résulte des termes de l'article 11 du CCAP que l'engagement de la responsabilité de la société titulaire du marché est subordonné, principalement, à la mention dans le descriptif établi lors de l'arrivée en fourrière ou en préfourrière de dommages n'apparaissant pas dans l'état descriptif sommaire établi lors de l'enlèvement, ou, à défaut, à l'existence d'un lien plausible entre le mode d'enlèvement et les dommages constatés, et, par ailleurs, qu'il appartient à cette société de contester, le cas échéant, le titre exécutoire émis à son encontre. Dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que ces stipulations prévoiraient l'engagement systématique de sa responsabilité ou constitueraient une clause d'exonération de la responsabilité de la collectivité publique. D'autre part, elle n'établit ni même n'allègue que les dommages causés à des véhicules et à l'origine des titres exécutoires litigieux seraient dus à un cas de force majeure ou à une faute de la personne publique. Par suite, elle n'est, à aucun titre, fondée à soutenir que la mise en œuvre des stipulations de l'article 11 du CCAP aurait conduit à lui appliquer indument un régime de responsabilité systématique illégal.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Inter Dépannage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête ne peut par suite qu'être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Inter Dépannage est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Inter Dépannage et à la ville de Paris

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er février 2022

La rapporteure,

M-I. LABETOULLELe président,

T. CELERIER

La greffière,

K. PETIT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA01347


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01347
Date de la décision : 01/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: Mme MACH
Avocat(s) : SFEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-01;20pa01347 ?
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