La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/12/2021 | FRANCE | N°19PA01128

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 17 décembre 2021, 19PA01128


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 101 344 euros, augmentée des intérêts à compter du 25 octobre 2016 avec capitalisation des intérêts, en réparation des fautes de l'Etat consistant en une absence d'aménagement de son poste, à un retard dans son reclassement, et à un retard dans sa promotion à la 1ère classe du grade de professeur d'Université.

Par un jugement n° 1703882 du 23 janvier 2019, le tribunal administratif de Paris

a condamné l'Etat à verser à Mme B... la somme de 2 000 euros, assortie des intérêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 101 344 euros, augmentée des intérêts à compter du 25 octobre 2016 avec capitalisation des intérêts, en réparation des fautes de l'Etat consistant en une absence d'aménagement de son poste, à un retard dans son reclassement, et à un retard dans sa promotion à la 1ère classe du grade de professeur d'Université.

Par un jugement n° 1703882 du 23 janvier 2019, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à Mme B... la somme de 2 000 euros, assortie des intérêts à compter du 25 octobre 2016 et de la capitalisation des intérêts, en réparation du préjudice moral résultant de la faute de l'Etat dans l'absence de prise des mesures nécessaires pour tenir compte de son handicap dans l'examen de son dossier d'avancement, de 2007 à 2009, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 22 mars 2019, 15 janvier et 19 mars 2020, et 27 octobre 2021, Mme B... représentée par Me Giovando, demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1703882 du 23 janvier 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 101 000 euros, somme portant intérêts au 26 octobre 2016 avec capitalisation des intérêts le 26 octobre 2017 et à chaque échéance annuelle, en réparation du préjudice de perte de rémunération et de préjudice moral qu'elle a subis à raison de l'absence d'aménagement de son poste de travail, du retard dans son reclassement, et du retard dans son déroulement de carrière du fait de l'absence de prise en compte de son handicap en vue de son avancement au grade de 1ère classe de professeur d'université de 2003 à 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'Etat, autorité de tutelle des universités qui l'employaient, a fait preuve, en ne tenant pas en compte son handicap, d'une carence fautive dans l'aménagement de son poste, de 2004 à 2006, et d'un retard fautif dans son obligation de reclassement entre 2006 et 2009 ;

- sur la période 2003-2013, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche a refusé de tenir compte de son handicap, notamment de l'impossibilité de cours en présentiel, dans l'appréciation de ses mérites pour la promotion au grade de professeur des universités de 1er classe ;

- elle avait une chance sérieuse de promotion.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 15 janvier 2020 et le 5 novembre 2021, le ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

-la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, dans sa version résultant de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ;

- le code de l'éducation nationale ;

- le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ;

- le décret n° 2009-460 du 23 avril 2009 modifiant le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférence et diverses dispositions relatives aux enseignants-chercheurs ;

- l'arrêté du 10 février 2012 portant délégation de pouvoirs en matière de recrutement et de gestion de certains personnels enseignants des établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Simon,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,

-et les observations de Me Giovando, pour Mme B....

Une note en délibéré, enregistrée le 25 novembre 2021, a été présentée pour

Mme B... par Me Giovando.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., enseignant chercheur spécialisée en psychologie et neuropsychologie de l'enfant, a été titularisée en qualité de professeur des universités de 2ème classe en 1999, rattachée à l'université de Paris X - Nanterre. Elle a été victime d'un grave accident de service, en mai 2003, lui laissant d'importantes séquelles dont notamment l'impossibilité de conserver des stations assise et debout trop prolongées. La commission de réforme des Hauts-de-Seine a rendu un premier avis le 10 novembre 2004, en estimant que l'intéressée était apte à la reprise de ses fonctions, sous la forme d'un mi-temps thérapeutique pour une durée de trois mois, en évitant les stations assise et debout prolongées. Le 25 avril 2006, la commission de réforme a rendu un second avis, en considérant que Mme B... était " apte au travail mais inapte à son poste actuel dans sa partie enseignement, les activités de recherche restant possibles ", et qu'elle devait faire l'objet d'un reclassement. En octobre 2009, elle a bénéficié d'un transfert de poste au sein de l'Université Paris V - René Descartes. Elle a souhaité être promue au grade de professeur d'université de 1ère classe, sans que sa demande n'aboutisse. Mme B... a alors saisi le Défenseur des droits qui a, en dernier lieu, rendu un avis, le 4 décembre 2012, aux termes duquel il a estimé que l'intéressée avait été victime de discriminations du fait de son handicap. Mme B... a finalement été promue au grade de professeur d'université de 1ère classe à compter du 1er janvier 2013. Par jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 28 juin 2018 n° 1504399, confirmé par arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 8 juillet 2020 n° 18VE02509, l'université Paris X - Nanterre a été condamnée à verser à la requérante la somme de 3 000 euros en principal, pour préjudice moral résultant d'une discrimination à raison de son handicap dans l'examen de sa candidature pour l'avancement au grade de professeur des universités de 1ère classe sur la période 2006-à 2009. Par jugement du tribunal administratif de Paris du 12 octobre 2016, n° 1507572, confirmé par arrêt de la Cour du 10 avril 2018, n° 16PA03817, l'université Paris V - René Descartes a été condamnée à verser à l'intéressée la somme de 3 000 euros pour préjudice moral au titre de la même faute, au titre des années 2011 et 2012. Le 24 octobre 2016, Mme B... a demandé l'indemnisation des fautes que l'Etat aurait commises, notamment à raison du retard dans son déroulement de carrière du fait de l'absence de prise en compte de son handicap en vue de sa promotion de grade de 2003 à 2013. Elle demande la réformation du jugement du tribunal administratif de Paris qui a condamné l'Etat à lui verser 2 000 euros au titre du préjudice moral subi à ce titre, et la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 101 000 euros, assortie des intérêts et de la capitalisation des intérêts, à raison de l'absence d'aménagement de son poste de travail, du retard dans son reclassement, et du retard dans son déroulement de carrière du fait de l'absence de prise en compte de son handicap en vue de sa promotion de grade de 2003 à 2013.

Sur le bien-fondé du jugement :

Sur les fautes résultant de l'absence d'aménagement de poste et le retard au reclassement :

2. Aux termes de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. (...) ". Aux termes de l'article 2 du décret du 30 novembre 1984 visé ci-dessus pris en application de cette dernière disposition : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'administration, après avis du comité médical, invite l'intéressé à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps. ". Aux termes de l'article 3 du même décret : " (...) La procédure de reclassement telle qu'elle résulte du présent article doit être conduite au cours d'une période d'une durée maximum de trois mois à compter de la demande de l'agent. " ;

3. Il résulte de l'instruction et notamment des pièces n° 65 à 68 versées par la requérante à l'appui de la note en délibéré produite, visée ci-dessus, qu'alors qu'un aménagement de son poste, dans les conditions préconisées par la commission de réforme dans son second avis du 25 avril 2006, n'était pas envisageable à l'université de Paris-Ouest Nanterre qui l'employait, le directeur général des ressources humaines du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, dès l'été 2006, a saisi le centre national de la recherche scientifique (CNRS) d'une proposition de détachement de Mme B..., que ce centre a déclinée eu égard à la nature du champ de spécialisation de la requérante. Le ministère a alors demandé à l'université de Paris-Ouest Nanterre d'examiner la possibilité d'un détachement dans le corps de directeur de recherche, ou d'une convention de délégation, auprès de l'INSERM, puis a demandé formellement, le 15 novembre 2006, au directeur de cet institut d'examiner le dossier de Mme B... dans le sens mentionné. Cet institut n'a pu accepter alors cette proposition, faute d'emploi vacant au titre de 2006. Par courriers des 16 janvier, 5 avril et 31 mai 2007, le ministère, au plus haut niveau, a demandé à l'université de Paris-Ouest Nanterre de saisir à nouveau l'INSERM de la proposition mentionnée, ou d'examiner toute reprise des fonctions de l'intéressée dans un emploi de professeur des universités aménagé " avec le maximum de souplesse ", en appelant l'attention de l'Université sur le risque d'une évocation de la situation de la requérante par la Haute autorité de lutte contre les discriminations (HALDE). Si, le 7 juillet 2008, alors qu'une convention de détachement avait été préparée entre l'université de Paris-Ouest Nanterre et l'INSERM, le ministère, par courrier de la mission de l'intégration des personnels handicapés, a différé la prise d'effet de cette convention et demandé la conclusion d'une nouvelle convention, c'est à raison de l'absence de caractère pérenne du poste proposé en vue de détachement de Mme B.... Il résulte de ce qui précède que le retard dans le reclassement de

Mme B... dans un poste de chercheur à l'INSERM, intervenu seulement en 2009, alors qu'aucun aménagement de poste à l'université de Paris-Ouest Nanterre n'avait pu être envisagé et que, au demeurant, les dispositions du décret du 23 avril 2009 permettant notamment l'organisation de fonctions d'enseignement à distance dans les universités n'étaient pas encore entrées en vigueur, ne saurait être attribué à l'Etat, dans des conditions justifiant l'engagement de sa responsabilité pour faute, dès lors que, si la gestion des professeurs de l'enseignement supérieur relevait alors de l'Etat, l'autonomie juridique de l'université de Paris-Ouest Nanterre pouvait conduire l'Etat à confier à cette université, employeur de Mme B..., la mise en œuvre des modalités d'un détachement dans un corps de chercheur de l'intéressée auprès de l'INSERM, également doté de la personnalité juridique, et que l'Etat a à plusieurs reprises favorisé le rapprochement entre ces deux établissements. Par suite, alors même qu'un délai près de trois ans s'est écoulé après l'avis du comité médical mentionné, avant que Mme B... ne bénéficie en définitive d'un transfert à l'université de Paris V Descartes, sur un poste dédié exclusivement à des activités de recherche, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que l'Etat a commis une faute dans un retard à son reclassement à raison de l'impossibilité d'adapter son poste à l'université de Paris-Ouest Nanterre.

Sur la faute résultant du retard dans le déroulement de carrière à raison de l'avancement de grade :

4. Mme B... soutient qu'en s'abstenant d'exercer ses prérogatives de gestionnaire, l'Etat a commis une faute résultant du retard dans son déroulement de carrière, à raison de son avancement au grade de 1ère classe de professeur d'Université, constitutive d'une discrimination à raison de son handicap, notamment en n'ayant pas pris en compte sa situation dans l'appréciation de ses mérites alors que la commission de réforme des Hauts-de-Seine l'avait, le 25 avril 2006, reconnue inapte à un enseignement en présence, seules les activités de recherche étant autorisées.

5. Aux termes de l'article 6 sexies de la loi du 13 juillet 1983 visée ci-dessus, dans sa version applicable : " Afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, les employeurs visés à l'article 2 prennent, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer et d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée, sous réserve que les charges consécutives à la mise en œuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées, notamment compte tenu des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l'employeur.". Aux termes de l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 visée ci-dessus, dans sa version résultant de l'article 32 de la loi du 11 février 2005, visée ci-dessus : " Aucun candidat ayant fait l'objet d'une orientation en milieu ordinaire de travail par la commission prévue à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles ne peut être écarté, en raison de son handicap, d'un concours ou d'un emploi de la fonction publique, sauf si son handicap a été déclaré incompatible avec la fonction postulée à la suite de l'examen médical destiné à évaluer son aptitude à l'exercice de sa fonction, réalisé en application des dispositions du 5° de l'article 5 ou du 4° de l'article 5 bis du titre Ier du statut général des fonctionnaires (...).

6. Les dispositions législatives précitées imposent à l'autorité administrative de prendre tant des règlements spécifiques que des mesures appropriées, au cas par cas, pour permettre l'accès de chaque personne handicapée à l'emploi auquel elle postule sous réserve, d'une part, que ce handicap n'ait pas été déclaré incompatible avec l'emploi en cause et, d'autre part, que lesdites mesures ne constituent pas une charge disproportionnée pour le service. Ces dispositions ne font pas obstacle à l'édiction, pour le bon fonctionnement du service public, des obligations de portée générale qui fixent des conditions d'aptitude physique liées à l'exercice même de certains emplois.

7. D'une part, il résulte de l'instruction que la commission de réforme des Hauts-de-Seine, dans son avis du 25 avril 2006, n'a pas reconnu Mme B... inapte à l'exercice de toute fonction d'enseignement, ces dernières devant être aménagées en présence, et les activités de recherche devant être privilégiées. En outre, Mme B... n'a été reconnue travailleur handicapé que le 4 janvier 2007 par décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées du même département. Enfin, les dispositions résultant de l'article 32 précité de la loi 11 février 2005, prévoyant la possibilité de mettre en place un enseignement à distance, ou des activités pédagogiques ou d'intérêt général de compensation, entrées en vigueur le 1er septembre 2009, faisaient obstacle jusqu'à cette date à ce que des enseignements, autrement qu'en présence, pussent être assurés. Dans ces conditions, Mme B... n'établit pas que l'Etat a commis, antérieurement à cette date, et, en tout état de cause, antérieurement à 2006, une faute, constitutive d'une discrimination à raison de son handicap, en n'ayant pas, pour l'évaluation de sa candidature à l'avancement au grade de professeur des universités de 1ère classe, apprécié ses mérites en tenant compte de sa situation de handicap, à supposer qu'elle eût présenté chaque année une demande en ce sens et que ses chances de succès à la promotion, compte tenu notamment de son ancienneté dans le corps des professeurs des universités de 2nde classe, fussent alors sérieuses.

8. D'autre part, et en revanche, il résulte de l'instruction que le ministère de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, postérieurement à l'entrée en vigueur, le 1er septembre 2009, des dispositions des articles 7 et 7-1 du décret du 6 juin 1984, modifié par le décret du 23 avril 2009 visé ci-dessus, lesquelles prévoyaient la mise en place d'un enseignement à distance, ou des activités pédagogiques ou d'intérêt général de compensation, n'a pas traité les demandes d'examen du dossier de candidature de Mme B..., ou s'est borné à rejeter sa demande au motif qu'elle ne rentrait pas complètement dans les critères pour prétendre à une promotion à la 1ère classe, la grille d'évaluation n'étant pas adaptée à sa candidature, alors que la réalisation d'activités d'enseignement à distance étaient autorisée, que les activités de recherche devaient dans son cas être privilégiées, et qu'elle avait obtenu depuis 2009 un reclassement dans une unité de recherche rattachée à l'université de Paris V - René Descartes. Il résulte également de l'instruction que ce n'est qu'en 2013, postérieurement à l'émission, le 4 décembre 2012, de recommandations du Défenseur des droits, que Mme B... a été promue à la 1ère classe, et qu'elle s'est vu reconnaître en 2014, au titre des quatre années précédentes, la prime d'encadrement doctoral et de recherche, dès lors qu'elle figurait parmi les 20 % des meilleurs dossiers examinés, remplissant tous les critères prévus pour l'octroi de cette prime. Mme B... est ainsi fondée à soutenir que l'Etat a ainsi commis, une faute de nature à engager sa responsabilité comme gestionnaire sur les années 2010 à 2012, constitutive d'une discrimination dans l'évaluation de sa candidature à l'avancement au grade de professeur des universités de 1ère classe, à raison d'une perte de chance sérieuse d'avancement à la 1ère classe. Cette faute doit également, pour la période suivant le transfert de la compétence de gestion des professeurs d'université de l'Etat aux universités, soit au plus tard après l'entrée en vigueur de l'arrêté du 10 février 2012 visé ci-dessus, être qualifiée de faute lourde dans l'exercice par l'Etat de ses activités de tutelle.

Sur le préjudice :

9. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est fondée à demander la réparation de préjudices qu'à raison d'une faute de l'Etat consistant en un retard dans sa promotion à la 1ère classe du grade de professeur d'Université à compter de 2010.

S'agissant du préjudice financier résultant du retard dans l'évolution normale de carrière :

10. Mme B..., tant au stade de sa réclamation préalable qu'en première instance et en appel, n'a pas chiffré le préjudice pécuniaire correspondant, subi à compter de l'année 2010. La demande présentée à ce titre ne peut qu'être rejetée.

S'agissant du préjudice moral :

11. Il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en évaluant le préjudice moral subi du fait de la faute de l'Etat à 4 000 euros par année en cause, soit la somme globale de 12 000 euros.

Sur les intérêts :

12. Les sommes auxquelles l'Etat est condamné porteront intérêts à la date de demande préalable de Mme C... à compter du 25 octobre 2016.

13. Ces intérêts seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts le 25 octobre 2017 et à chaque date anniversaire jusqu'au paiement effectif.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est seulement fondée à se plaindre que le tribunal administratif a évalué son préjudice à 2000 euros au lieu de 12 000 euros.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme B... au titre des frais exposés en liaison avec la présente instance et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : L'Etat est condamné à verser à Mme B... la somme de 12 000 euros.

Article 2 : La somme mentionnée à l'article 1er portera intérêts à compter du 25 octobre 2016. Les intérêts ainsi échus seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts le 25 octobre 2017 et à chaque anniversaire de cette date, jusqu'au paiement des intérêts.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris est réformé, en tant qu'il est contraire aux dispositions qui précèdent.

Article 4 : l'Etat versera la somme de 2 000 euros à Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme B... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère président de chambre,

- M. Soyez, président assesseur,

- M. Simon, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 décembre 2021.

Le rapporteur,

C. SIMONLe président,

S. CARRERE

La greffière,

E. LUCE

La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

8

N° 19PA01128


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA01128
Date de la décision : 17/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de maladie - Accidents de service.

Fonctionnaires et agents publics - Notation et avancement - Avancement - Avancement de grade.


Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: M. Claude SIMON
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : GIOVANDO

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-12-17;19pa01128 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award