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07/12/2021 | FRANCE | N°20PA01476

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 07 décembre 2021, 20PA01476


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... B... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite du directeur du Centre des monuments nationaux rejetant sa demande de réintégration sur le poste d'adjoint au responsable de la librairie-boutique de l'hôtel de Sully et le rejet de son recours gracieux, ainsi que de la décision du Centre des monuments nationaux supprimant ce poste, outre des conclusions à fin d'injonction et des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de jus

tice administrative.

Par un jugement n°1800587/5-2 du 19 mars 2020, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... B... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite du directeur du Centre des monuments nationaux rejetant sa demande de réintégration sur le poste d'adjoint au responsable de la librairie-boutique de l'hôtel de Sully et le rejet de son recours gracieux, ainsi que de la décision du Centre des monuments nationaux supprimant ce poste, outre des conclusions à fin d'injonction et des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1800587/5-2 du 19 mars 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juin 2020, et un mémoire, enregistré le

22 octobre 2021, Mme C... B..., représentée par Me Lerat, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n°1800587 du 19 mars 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision implicite du directeur du Centre des monuments nationaux rejetant sa demande de réintégration sur le poste d'adjoint au responsable de la librairie-boutique de l'hôtel de Sully et la décision du Centre des monuments nationaux supprimant ce poste ;

3°) de mettre à la charge du Centre des monuments nationaux la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier pour insuffisance de motivation;

- la décision refusant de la réintégrer sur son ancien poste est entachée d'erreur de fait car il n'était pas encore supprimé à la date de sa demande;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation;

- elle constitue une discrimination en raison de son état de santé;

- elle constitue une sanction disciplinaire déguisée; elle est entachée de détournement de pouvoir et de procédure;

- la décision de suppression de poste est entachée d'erreur manifeste d'appréciation;

- elle constitue une discrimination en raison de son état de santé;

- elle constitue une sanction disciplinaire déguisée;

- elle est entachée de détournement de pouvoir et de procédure.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2021, le Centre des monuments nationaux, représenté par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 3500 euros soit mise à la charge de Mme C... B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... B... sont infondés.

Par une ordonnance du 28 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au

22 octobre 2021à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- l'arrêté du 22 juillet 2014 instituant des comités techniques au ministère de la culture et de la communication ;

- le cadre de gestion du personnel non titulaire du Centre des monuments nationaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès ;

- les conclusions de Mme Mach, rapporteure publique ;

- les observations de Me Lerat pour Mme C... B... ;

- et les observations de Me Brecq-Coutant pour le Centre des monuments nationaux.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... B..., agent contractuel du Centre des monuments nationaux (CMN), exerçait les fonctions de responsable adjointe au sein de la librairie-boutique de l'hôtel de Sully. Elle a été placée en congé maladie à compter du 4 mars 2015 et déclarée apte à reprendre ses fonctions à temps partiel thérapeutique à 50%, après une visite médicale du 9 février 2017. Mme C... B... a alors demandé à reprendre ses précédentes fonctions au sein de la librairie de l'hôtel de Sully. Le CMN a toutefois refusé de faire droit à sa demande, en se prévalant de la suppression du poste. Mme C... B... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de la décision du CMN refusant de la réintégrer sur son précédent poste de responsable adjoint au sein de la librairie-boutique de l'hôtel de Sully et de la décision portant suppression de ce poste. Par un jugement du 19 mars 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Mme C... B... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si Mme C... B... soutient que le jugement attaqué est entaché d'insuffisance de motivation, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments, ont répondu de façon circonstanciée à l'ensemble de ses moyens. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit donc être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision refusant de réintégrer Mme B... sur son précédent poste :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 32 du décret du 17 janvier 1986 susvisé : " A l'issue des congés prévus au titre IV, aux articles 20, 20 bis, 21, 22 et 23 du titre V et à l'article 26 du titre VI, les agents physiquement aptes et qui remplissent toujours les conditions requises sont réemployés sur leur emploi ou occupation précédente dans la mesure permise par le service. Dans le cas contraire, ils disposent d'une priorité pour être réemployés sur un emploi ou occupation similaire assorti d'une rémunération équivalente. ".

4. Il n'est pas contesté que, à la date à laquelle Mme C... B... devait reprendre ses fonctions, à l'issue de son congé maladie, son précédent poste de responsable adjoint à la librairie-boutique de l'hôtel de Sully n'avait pas encore été formellement supprimé, la décision ayant été prise le 8 février 2018. Toutefois, le CMN fait valoir qu'il ne pouvait réaffecter Mme C... B... sur son précédent poste de responsable adjoint, dès lors qu'une refonte complète de la librairie-boutique était en cours. Il ressort effectivement des pièces du dossier que le CMN, dès 2015, avait souhaité mettre en œuvre une réorganisation de l'ensemble du service, pour des motifs financiers et organisationnels. Ainsi, à la suite de l'enquête menée par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) à l'été 2015, le CMN a soumis pour avis au comité technique d'établissement, lors de sa séance du 20 octobre 2015, le projet de modification des horaires d'ouverture et de fermeture de l'établissement. En décembre 2015, certaines modifications avaient déjà été mises en place, puis le comité technique d'établissement a une nouvelle fois été saisi, pour information, le 11 février 2016, du " projet d'organigramme de la librairie Sully ". Ce projet d'organigramme comportait un seul poste de responsable de la librairie, avec trois autres postes de caissiers-vendeurs. Ce faisant, à cette date, le poste précédemment occupé par Mme C... B... n'était déjà plus mentionné au sein de l'organisation de la librairie-boutique. Dès lors, alors en outre que l'administration n'est jamais tenue de pourvoir un emploi vacant, il existait un intérêt du service, tenant à sa réorganisation matérielle, justifiant que le précédent poste de Mme C... B... ne lui soit pas proposé à la date à laquelle elle devait réintégrer le CMN et ce, alors même que le poste n'a été formellement supprimé qu'à compter du 8 févier 2018. Le CMN n'a ainsi pas commis d'erreur de fait. Compte tenu de ce que le CMN envisageait à très brève échéance la suppression de l'ancien poste de Mme C... B..., ainsi que cela résulte de ce qui vient d'être dit, aucune erreur de droit ni erreur manifeste d'appréciation ne peut davantage être retenue.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 : " (...) Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur origine, de leur orientation sexuelle ou identité de genre, de leur âge, de leur patronyme, de leur situation de famille ou de grossesse, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race. ".

6. Si Mme C... B... fait valoir qu'elle a fait l'objet d'une discrimination en raison de son état de santé, dès lors que le poste qu'elle occupait a été supprimé à l'issue de son congé maladie, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que c'est bien l'intérêt du service qui a justifié le refus de réintégration de l'intéressée sur son précédent poste. Par suite, la requérante n'a fait l'objet d'aucune discrimination en raison de son état de santé et le moyen doit être écarté.

7. En dernier lieu, Mme C... B... soutient que le refus opposé à sa demande de réintégration sur son précédent poste constitue en réalité une sanction déguisée, ou à tout le moins, un détournement de procédure, dès lors que la mesure est prise en raison des faits qui lui sont reprochés et qui ont été révélés par l'enquête du CHSCT. S'il n'est pas contesté que des agents, qui étaient placés sous l'autorité de la requérante, ont fait état de griefs à l'encontre de celle-ci lors de l'enquête menée par le CHSCT, il résulte toutefois de ce qui a été dit au point 4 que le refus est fondé, non sur ces reproches, mais sur l'intérêt du service, caractérisé par la volonté de réorganiser la librairie-boutique de l'hôtel de Sully. Dès lors, la décision litigieuse ne constitue pas une sanction déguisée et le CMN n'a commis aucun détournement de pouvoir ou de procédure.

8. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de Mme C... B... dirigées contre le refus de la réintégrer sur son ancien poste d'adjoint au responsable doivent être rejetées, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par le CMN en première instance.

En ce qui concerne la décision du 8 février 2018 portant suppression du poste de responsable-adjoint de la librairie-boutique de l'hôtel de Sully :

9. En premier lieu, la requérante soutient que la décision litigieuse est entachée erreur manifeste d'appréciation quant à l'intérêt du service. Comme il a été dit au point 4, il ressort des pièces du dossier que le CMN, dès 2015, avait souhaité mettre en œuvre une réorganisation de l'ensemble du service, pour des motifs financiers et organisationnels. A cet égard, le CMN justifie cette volonté par des motifs tenant à l'amélioration de la rentabilité de l'établissement, à l'organisation du service et à " l'ambiance " au sein de l'établissement. Tout d'abord, le projet de modification des horaires d'ouverture et de fermeture de la boutique-librairie a été soumis au comité technique, lors de sa séance du 20 octobre 2015, qui a rendu un avis défavorable et, en décembre 2015, une première partie des aménagements et modifications prévus a été mise en place. Le 11 février 2016, le comité technique a été saisi, pour information, sur le " projet d'organigramme de la librairie Sully ". Ce projet comportait un unique responsable de la librairie et ne mentionnait pas un poste d'adjoint au responsable. Enfin, le comité technique a été consulté, le 23 novembre et le 19 décembre 2017, sur le projet de réorganisation de la librairie-boutique de l'hôtel Sully, en émettant un avis défavorable, avis défavorable qui ne liait cependant pas le CMN. Par suite, il résulte de ces éléments que la suppression de l'ancien poste de Mme B... a été envisagée et décidée dans un but économique et de restructuration du service. De telles nécessités tirées de l'organisation du service, dans l'intérêt du service, étaient donc de nature à justifier la suppression du poste d'adjoint au responsable de la librairie-boutique de l'hôtel de Sully. Il s'ensuit qu'aucune erreur de droit, erreur de fait ou erreur manifeste d'appréciation n'a été commise par le CMN.

10. En deuxième lieu, les moyens tirés, d'une part, de la discrimination en raison de son état de santé, d'autre part, de la sanction disciplinaire déguisée et des détournements de pouvoir et procédure doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 6 à 8

ci-dessus.

11. En dernier lieu, si Mme C... B... soutient que la décision attaquée caractérise une situation de harcèlement moral, il ressort au contraire des pièces du dossier, comme il a été dit, qu'elle est justifiée par l'intérêt du service. Ce dernier moyen doit donc également être écarté et les conclusions à fin d'annulation de la décision du 8 février 2018 rejetées.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées au titre du même article par le CMN.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du Centre des Monuments Nationaux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... B... et au Centre des Monuments Nationaux.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 décembre 2021.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

T. CELERIER

La greffière,

Z. SAADAOUI

La République mande et ordonne au ministre de la culture en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA01476


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01476
Date de la décision : 07/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: Mme MACH
Avocat(s) : LERAT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-12-07;20pa01476 ?
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