Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 février 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de l'admettre au séjour au titre de l'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2105737 du 15 juillet 2021, le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Montreuil a admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire (article 1er), a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la situation de M. A... et a mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros sur le fondement du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée le 10 septembre 2021, sous le N° 21PA05049, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Montreuil du 15 juillet 2021 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Montreuil.
Il soutient que :
- c'est à tort que le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif a fait droit au moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige ;
- les autres moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2021, M. A..., représenté par Me Korn, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que l'arrêté en litige repose sur une erreur manifeste d'appréciation et se réfère aux moyens soulevés en première instance.
II. Par une requête, enregistrée le 10 septembre 2021, sous le N° 21PA05050, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Montreuil du 15 juillet 2021.
Il soutient qu'il fait valoir des moyens sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation de ce jugement, le rejet de la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif, et que l'exécution de la décision de première instance risque d'entrainer des conséquences difficilement réparables.
La requête a été communiquée à M. A... qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Niollet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant mauritanien, né le 1er mars 1991 à Lembeidie (Mauritanie), qui est entré irrégulièrement sur le territoire français en janvier 2017, a, le 22 mars 2017, sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande a été rejetée par une décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 29 juin 2018, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 14 décembre 2020 notifiée le 24 décembre suivant. Par un arrêté du 25 février 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le préfet de la Seine-Saint-Denis fait appel du jugement du 15 juillet 2021 par lequel le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Montreuil a, à la demande de M. A..., annulé cet arrêté.
Sur la demande d'aide juridictionnelle :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : " Dans les cas d'urgence (...) l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président (...) ".
3. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'admettre M. A... à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur la requête N°21PA05050 :
4. La Cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.
Sur la requête N° 21PA05049 :
5. Il ressort de l'arrêté en litige, produit par le préfet de la Seine-Saint-Denis devant la Cour, qu'il est signé de la main de Mme D... C..., directrice des migrations et de l'intégration, à qui le préfet a donné délégation par un arrêté du 10 février 2021, également produit devant la Cour. Le préfet est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le Président du tribunal administratif a annulé l'arrêté en litige comme entaché d'incompétence.
6. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Montreuil, et en appel.
Sur les autres moyens soulevés par M. A... :
7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
8. L'arrêté en litige comporte l'exposé de l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Ainsi, il est suffisamment motivé.
9. En deuxième lieu, si M. A... soutient n'avoir pas été entendu avant l'édiction de l'arrêté en litige, il ne nie pas l'avoir été dans le cadre de l'instruction de sa demande d'asile avant la décision du directeur général de l'OFPRA du 29 juin 2018 et la décision de la CNDA du 14 décembre 2020. S'il soutient avoir saisi le préfet d'une demande de titre de séjour en janvier 2021, après ces décisions, en faisant état de sa présence en France depuis l'année 2017 et de la présence régulière de ses trois frères, ainsi que de son intégration professionnelle en France, il ne l'établit pas en se référant à une copie de cette demande sans produire aucun accusé de réception postal ou autre. Ainsi, il ne fait état d'aucun élément nouveau dans sa situation, par rapport à ceux qu'il avait pu faire valoir avant les décisions de l'OFPRA et de la CNDA. Le moyen qu'il tire de violations de son droit à être entendu et de l'article 41, paragraphe 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ne peut donc en tout état de cause qu'être écarté.
10. En troisième lieu, M. A..., qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, n'établit pas avoir saisi le préfet d'une demande de titre de séjour en janvier 2021, en faisant état de sa présence en France depuis l'année 2017 et de la présence régulière de ses trois frères, ainsi que de son intégration professionnelle en France, n'est pas fondé à se prévaloir de cette demande pour soutenir que l'arrêté en litige n'aurait pas donné lieu à un examen complet de sa situation.
11. En quatrième lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Aux termes de l'article L. 743-1 du même code : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent ".
12. Il ressort de la fiche " TELEMOFPRA " issue du système d'information de l'OFPRA que, contrairement à ce que laisse entendre M. A..., son recours contre la décision du directeur général de l'OFPRA du 29 juin 2018 a bien été rejeté par une décision de la CNDA lue en audience publique le 14 décembre 2020.
13. En cinquième lieu, si M. A... a entendu se prévaloir de l'ancienneté de sa présence en France et de la présence régulière de ses trois frères, ainsi que de son intégration professionnelle en France, ces circonstances ne sont pas suffisantes pour faire regarder l'arrêté en litige comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
14. En dernier lieu, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, l'exception tirée de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, soulevée à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, ne peut qu'être écartée.
15. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 25 février 2021.
DÉCIDE :
Article 1er : M. A... est admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution de la requête N° 21PA05050.
Article 3 : Les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 2105737 du magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Montreuil du 15 juillet 2021 sont annulés.
Article 4 : La demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Montreuil est rejetée.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... A....
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 9 novembre 2021, à laquelle siégeaient :
M. Célérier, président de chambre,
M. Niollet, président-assesseur,
Mme Labetoulle, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 novembre 2021.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLe président,
T. CELERIER
La greffière,
Z. SAADAOUI
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°s 21PA05049-21PA05050