Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière du Champ de course a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'arrêté n° 2019/59 du 8 février 2019 par lequel le maire de la commune de Nouméa a délivré à la SARL PCS un permis de construire en vue de réaliser un bâtiment R+2+sous-sol à usage de logements dans le lot n° 30 du lotissement Ballande situé rue de Paris.
Par un jugement n° 1900398 du 13 février 2020, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 2 mars 2020, régularisée le 6 mars 2020 et un mémoire en réplique enregistré le 7 juillet 2020, la société civile immobilière du Champ de course, représentée par la SELARL de Greslan-Lentignac, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 13 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa requête ;
2°) d'annuler le permis de construire du maire de la commune de Nouméa du 8 février 2019 délivré à la SARL PCS ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Nouméa et de la SARL PCS une somme de 500 000 francs CFP au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa demande est recevable, dès lors qu'elle a intérêt à agir contre le permis de construire contesté, que le délai de recours n'a pas couru à son encontre, en l'absence d'affichage régulier du permis de construire sur le terrain et qu'elle a notifié sa requête conformément aux dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;
- le projet soumis à permis de construire concerne un bâtiment en R+3, compte tenu de la machinerie d'ascenseur qui constitue le dernier niveau en vertu des dispositions de l'article 11 du plan d'urbanisme directeur de Nouméa, et non un immeuble en R+2 comme l'a indiqué le pétitionnaire ; le dossier de demande de permis est, dès lors, incomplet au regard des documents exigés par l'article PS. 221-15 du code de l'urbanisme de Nouvelle-Calédonie ;
- l'étude géotechnique réalisée pour un bâtiment en R+3, ne correspond pas au projet ;
- le permis de construire méconnaît les articles UB1-6 et UB1 8 du règlement du plan d'urbanisme directeur de Nouméa ;
- les risques d'aléas tsunami et inondation n'ont pas été pris en compte dans le permis de construire, et le projet ne comporte pas de dispositif de purge de l'eau du sous-sol ;
- la demande de permis de construire aurait dû être refusée sur le fondement de l'article 8 du plan d'urbanisme directeur de Nouméa compte tenu de l'absence de desserte suffisante du terrain par une voie publique.
Par un mémoire en défense, et un mémoire en réplique enregistrés les 10 mai et 2 octobre 2020, la SARL PCS, représentée par Me Laffitte, conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de la requête et à titre subsidiaire, à son rejet au fond, ainsi qu'à ce que soit mise à la charge de la SCI du Champ de course une somme de 5 028 euros, soit 600 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête est irrecevable en ce qu'elle ne critique pas le jugement attaqué ;
- la demande de première instance était tardive ;
- la requérante ne justifie pas d'un intérêt à agir ;
- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 mai et 11 juin 2020, la commune de Nouméa, représentée par Me Claveleau, conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de la requête et à titre subsidiaire, à son rejet au fond, ainsi qu'à ce que soit mise à la charge de la société civile immobilière du Champ de course une somme de 500 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête est irrecevable en ce qu'elle ne critique pas le jugement attaqué ;
- la requérante n'a pas respecté les obligations de notification du recours découlant de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme s'agissant de sa requête de première instance ;
- la demande de première instance était tardive ;
- la requérante ne justifie pas d'un intérêt à agir ;
- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés ;
- si la Cour considère comme fondé l'un des prétendus vices entachant le permis de construire, il doit être sursis à statuer dans les conditions prévues par l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme afin de permettre la régularisation du permis de construire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'urbanisme de Nouvelle-Calédonie ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Renaudin,
- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteure publique,
- les observations de Me Dufaud substituant Me Claveleau, avocat de la commune de Nouméa,
- et les observations de Me Bouchet substituant Me Laffitte, avocat de la SARL PCS.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 8 février 2019, le maire de la commune de Nouméa (Nouvelle-Calédonie) a délivré un permis de construire à la SARL PCS, afin de réaliser sur le lot n° 30 du lotissement Ballande sis rue de Paris, un immeuble de douze logements en R+2+sous-sol. La société civile immobilière du Champ de course, qui possède un appartement géré en location, dans un immeuble situé sur le lot n° 35 du même lotissement, a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie qui a rejeté cette demande par un jugement du 13 février 2020, dont la société civile immobilière du Champ de course relève appel devant la Cour.
2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme, qui sont applicables en Nouvelle-Calédonie : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R.424-15. ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'annulation de l'arrêté du 8 février 2019 du maire de Nouméa délivrant le permis de construire, n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie que le 2 octobre 2019. Or, le pétitionnaire a produit au dossier des constats d'huissier en date des 8 février, 11 mars et 8 avril 2019, démontrant que le panneau d'affichage du permis de construire a effectivement été posé sur le terrain pendant la période du 8 février au 8 avril 2019, et qu'il contenait l'ensemble des informations réglementaires requises, et notamment, de manière lisible, la mention des voies et délais de recours. Si la société civile immobilière du Champ de course soutient, en se fondant sur un constat d'huissier réalisé à sa demande le 17 septembre 2019, que ce panneau n'aurait pas été visible depuis la voie publique, il ressort des photographies produites avec les constats d'huissier réalisés à la demande du pétitionnaire, et des termes mêmes de ces constats, que le panneau était posé sur le terrain d'assiette du projet, en bordure de l'impasse qui dessert le lotissement Ballande débouchant sur la rue de Paris, et parfaitement visible depuis cette impasse. Il ressort également des pièces du dossier et il n'est pas sérieusement contesté que cette impasse est ouverte à la circulation publique et empruntée par les nombreux riverains du lotissement. Dès lors, en vertu des dispositions précitées de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme, le délai de recours contentieux à l'encontre du permis de construire a commencé à courir, à l'égard des tiers, le 8 février 2019, de sorte que, lorsque la société civile immobilière du Champ de course a déposé sa demande au greffe du tribunal administratif, soit le 2 octobre 2019, ce délai était expiré et, par suite, cette demande était tardive.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur et applicable en Nouvelle-Calédonie : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire [...] que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement [...]. ". Il appartient à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Si la société civile immobilière du Champ de course est propriétaire d'un appartement dans un immeuble situé en face du lieu d'implantation du projet, elle n'apporte aucune précision quant aux conséquences des travaux projetés sur les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Dès lors, elle ne démontre pas son intérêt à agir contre le permis de construire en cause.
5. Il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée devant les premiers juges par la société civile immobilière du Champ de course était irrecevable. Il s'ensuit que la requérante n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Nouméa et de la SARL PCS, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement de la somme que la société civile immobilière du Champ de course demande au titre des frais qu'elle a exposés. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société civile immobilière du Champ de course une somme de 1 500 euros à verser, respectivement, à la commune de Nouméa et à la SARL PCS, chacune.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société civile immobilière du Champ de course est rejetée.
Article 2 : La société civile immobilière du Champ de course versera à la commune de Nouméa et à la SARL PCS, chacune, une somme de 1500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI du Champ de course, à la commune de Nouméa et à la SARL PCS.
Copie en sera adressée, pour information, au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 21 octobre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,
- Mme Renaudin, première conseillère,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 novembre 2021.
La rapporteure,
M. RENAUDINLe président,
S. DIÉMERT
La greffière,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA00775