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05/11/2021 | FRANCE | N°21PA00094

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 05 novembre 2021, 21PA00094


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 19 septembre 2019 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de regroupement familial partiel introduit au profit de sa fille.

Par un jugement n° 2000292 du 4 décembre 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 8 janvier 2021 M. B..., représenté par Me Tavares de Pinho, demande à la Cour :


1°) d'annuler le jugement n° 2000292 du 4 décembre 2020 du tribunal administratif de Montreuil ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 19 septembre 2019 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de regroupement familial partiel introduit au profit de sa fille.

Par un jugement n° 2000292 du 4 décembre 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 8 janvier 2021 M. B..., représenté par Me Tavares de Pinho, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2000292 du 4 décembre 2020 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler la décision du 19 septembre 2019 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis d'autoriser le regroupement familial demandé ou, à défaut, de lui enjoindre de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen et d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est estimé tenu de refuser le regroupement en raison de son caractère partiel ;

- il viole les dispositions de l'article L. 411-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a été pris en violation de l'intérêt des enfants ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale du droit des enfants ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences personnelles.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observation.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 février 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Simon a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant burkinabé, a sollicité le 21 juin 2018 le regroupement familial au profit de sa fille D... B..., née le 13 juin 2001. Sa demande a été rejetée par le préfet de la Seine-Saint-Denis le 19 septembre 2019. Il demande à la Cour l'annulation du jugement du 4 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté le recours formé contre la décision préfectorale du 19 septembre 2019, ainsi que l'annulation de ladite décision.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. B... ne peut donc utilement soutenir que le tribunal a entaché sa décision d'erreur de fait pour demander l'annulation du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, la décision du 19 septembre 2019, qui indique qu'elle est prise en application du livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne le caractère partiel du regroupement sollicité et statue sur l'intérêt des enfants et la situation privée et familiale du requérant, comporte l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle est ainsi suffisamment motivée.

4. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui a notamment pris position sur l'intérêt des enfants et la situation familiale, se serait à tort estimé en situation de compétence liée pour statuer sur la demande de regroupement familial sollicité, en raison de son caractère partiel, alors même que le préfet n'a pas expressément pris position sur l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de régularisation.

5. En quatrième lieu, le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui a estimé que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y avait pas lieu à déroger au principe de regroupement de la totalité de la famille, compte tenu de l'intérêt des enfants, n'avait pas à examiner la décision au regard des dispositions de l'article L. 411-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors en vigueur, lesquelles ne s'appliquent qu'en cas de regroupement familial sur place.

6. En cinquième lieu, la demande de regroupement partiel déposée par M. B... concernait sa fille aînée, âgée alors de dix-sept ans, les deux autres enfants mineurs du requérant n'étant pas concernés. M. B... soutient, toutefois, que ce choix est motivé par l'âge de sa fille aînée qui ne pourra plus solliciter le regroupement par la suite, ainsi que par son état de santé, par l'exiguïté de son logement trop petit pour accueillir trois enfants, et qu'il espère pouvoir faire venir les deux autres lorsque sa demande de logement social sera satisfaite, alors qu'il a pu faire reconnaître sa demande de logement prioritaire, dans le cadre du droit au logement opposable. Il fait également valoir que les enfants sont au Burkina Faso, sous la garde de sa propre mère âgée et handicapée et qui a des difficultés pour faire face à leur éducation et leur entretien. Il ressort toutefois des pièces du dossier que, d'une part, la gravité de l'état de santé de l'enfant de M. B... n'est pas établie de manière circonstanciée et certaine, et, d'autre part, que compte tenu de l'intérêt qui s'attache au maintien des relations étroites entre les enfants, A... la rupture avec la cellule familiale résultant du déplacement vers la France de l'aînée de ses enfants, et des relations distendues avec son père qui vit en France depuis 2010, même s'il se rend régulièrement au Burkina Faso et les fait ponctuellement venir lui rendre visite en France, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas entaché sa décision d'erreur d'appréciation en estimant que l'intérêt des enfants n'impliquait pas de déroger au principe du regroupement de la totalité de la famille.

7. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. M. B..., qui s'est vu à plusieurs reprises reconnaître l'autorité parentale sur ses enfants à l'occasion de déplacements de ces derniers en France, et effectue régulièrement des séjours au Burkina Faso, vit toutefois en France depuis 2010 et se trouve ainsi éloigné de ces derniers. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit ainsi être écarté.

9. En septième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants (...) l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale. ".

10. Pour les motifs énoncés aux points 3 et 5 du présent arrêt, la décision attaquée ne méconnaît pas les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

11. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que la décision attaquée n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B... ou de son enfant.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation doivent dès lors être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par M. B... doivent dès lors être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 visée ci-dessus font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président de chambre,

- M. Soyez, président assesseur,

- M. Simon, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 5 novembre 2021.

Le rapporteur,

C. SIMONLe président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA00094


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00094
Date de la décision : 05/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Autorisation de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: M. Claude SIMON
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : TAVARES DE PINHO

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-11-05;21pa00094 ?
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