Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 février 2021 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile.
Par un jugement n° 2103960/8 du 23 mars 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I.- Par une requête et des pièces, enregistrées sous le n° 21PA01829 les 9 avril 2021, 3 mai 2021 et 28 mai 2021, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler le jugement n° 2103960/8 du 23 mars 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
3°) d'annuler l'arrêté du 12 février 2021 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile ;
4°) d'enjoindre au préfet de police de procéder à l'enregistrement de sa demande d'asile en procédure normale et de lui délivrer une attestation de demande d'asile ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté méconnaît l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- l'arrêté méconnaît l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mai 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
II.- Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 21PA01830 les 9 avril 2021, 3 mai 2021, 21 mai 2021 et 28 mai 2021, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 2103960/8 du 23 mars 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
3°) d'ordonner le sursis à exécution de l'arrêté du 12 février 2021 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile ;
4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une attestation de demande d'asile ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté méconnaît l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- l'arrêté méconnaît l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mai 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003, modifié par le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A..., première conseillère,
- et les observations de Me D..., en présence de Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante ivoirienne née le 3 juin 1998, a fait l'objet d'un arrêté du 12 février 2021 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile. Mme C... relève appel du jugement du 23 mars 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 février 2021 et demande que soit prononcé le sursis à l'exécution de ce jugement.
2. L'appel et la demande de sursis à exécution présentés par Mme C... étant formés contre un même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la demande d'admission à l'aide juridictionnelle à titre provisoire :
3. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président ". Aux termes de l'article 61 du décret du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et relatif à l'aide juridictionnelle et à l'aide à l'intervention de l'avocat dans les procédures non juridictionnelles : " (...) / L'admission provisoire est accordée par le président du bureau ou de la section ou le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle ou d'aide à l'intervention de l'avocat sur laquelle il n'a pas encore été statué. ".
4. Mme C..., déjà représentée par un avocat, ne justifie pas du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau d'aide juridictionnelle compétent et n'a pas joint à son appel ni à sa demande de sursis à exécution une telle demande. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l'admission provisoire de Mme C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
5. Aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, établissant les critères et les mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou apatride : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de 1'entretien individuel visé à l'article 5. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tout cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de ne pas instruire la demande de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit ou, si nécessaire pour la bonne compréhension du demandeur, oralement, et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature de ces informations, leur délivrance complète par l'autorité administrative, notamment par la remise de la brochure prévue par les dispositions précitées, constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
6. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... s'est vu remettre, le 3 décembre 2020, le guide du demandeur d'asile et le document d'information A intitulé " " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ", et le 4 décembre 2020 à l'occasion de l'entretien individuel, le document relatif aux empreintes digitales et Eurodac ainsi que le document d'information B, intitulé " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' ". Ces documents lui ont été remis en langue française en l'absence d'une version en langue dioula. S'il est précisé par des mentions apposées sur le document relatif aux empreintes digitales et sur la brochure B que les informations contenues dans ces documents ont été portées oralement à la connaissance de Mme C..., qui a déclaré ne pas savoir lire et ne parler que le dioula, par le concours d'un interprète, il ne ressort pas des pièces du dossier que les deux autres documents, qui ne lui ont, au demeurant, pas été remis à l'occasion de l'entretien individuel pour lequel elle bénéficiait d'un interprète en langue dioula, lui ont été également été traduits par un interprète. Si le préfet de police fait valoir que le français est la langue officielle de son pays d'origine, qu'elle a produit des documents en langue française et qu'elle a indiqué comprendre le français devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le document produit par le préfet ne saurait établir que Mme C... aurait déclaré comprendre le français. Au surplus, il ressort des pièces du dossier qu'elle a indiqué vouloir être auditionnée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en langue dioula, qu'elle a indiqué ne comprendre que la langue dioula lors de l'entretien individuel et qu'elle a bénéficié du concours d'un interprète lors de cet entretien et de la notification de l'arrêté contesté. La circonstance alléguée que l'intéressée a signé le compte-rendu d'entretien sans émettre de réserve n'est pas de nature à établir que Mme C... aurait compris les informations contenues dans ces documents, qui étaient rédigés dans une langue qu'elle avait indiqué ne pas comprendre. Dans ces conditions, Mme C... ne peut être regardée comme ayant effectivement bénéficié des informations mentionnées à l'article 4 du règlement du 26 juin 2013.
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de la requête, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur la demande de sursis à exécution :
8. Le présent arrêt statuant sur la demande d'annulation du jugement n° 2103960/8 du 23 mars 2021 du Tribunal administratif de Paris et de l'arrêté du 12 février 2021 du préfet de police, les conclusions de la requête n° 21PA01830 tendant au sursis à exécution de ce jugement et de cet arrêté sont devenues sans objet.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Aux termes de l'article L. 572-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé. ".
10. Eu égard au motif d'annulation, le présent arrêt implique seulement qu'il soit enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de Mme C.... Il est enjoint au préfet de police de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Mme C... n'est pas admise, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 21PA01830 de Mme C... tendant au sursis à l'exécution du jugement n° 2103960/8 du 23 mars 2021 du Tribunal administratif de Paris et de l'arrêté du 12 février 2021 du préfet de police.
Article 3 : Le jugement n° 2103960/8 du 23 mars 2021 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 4 : L'arrêté du 12 février 2021 du préfet de police est annulé.
Article 5 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de Mme C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 6 : L'Etat versera à Mme C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : Le surplus des conclusions des demandes de Mme C... est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 17 juin 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme B..., présidente de chambre,
- Mme Julliard, présidente assesseure,
- Mme A..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 juin 2021.
La rapporteure,
A-S A...La présidente,
M. B...La greffière,
S. GASPARLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 21PA01829...