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25/06/2021 | FRANCE | N°20PA02074

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 25 juin 2021, 20PA02074


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a, par deux requêtes, demandé au Tribunal administratif de Paris d'une part, d'annuler la décision du 16 avril 2018 par laquelle le ministre de la culture a prononcé son licenciement, d'autre part, d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de la culture a rejeté le recours administratif préalable qu'il a formé le 12 juillet 2018 et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 49 730 euros, assortie des intérêts légaux à compter de sa demande préalable, en réparation des pr

éjudices résultant de l'illégalité de la décision du 16 avril 2018 prononçant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a, par deux requêtes, demandé au Tribunal administratif de Paris d'une part, d'annuler la décision du 16 avril 2018 par laquelle le ministre de la culture a prononcé son licenciement, d'autre part, d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de la culture a rejeté le recours administratif préalable qu'il a formé le 12 juillet 2018 et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 49 730 euros, assortie des intérêts légaux à compter de sa demande préalable, en réparation des préjudices résultant de l'illégalité de la décision du 16 avril 2018 prononçant son licenciement, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1810839-1820562 du 11 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 16 avril 2018 par lequel le ministre de la culture a prononcé le licenciement de M. D... et rejeté le surplus des conclusions de ses requêtes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 3 août 2020 et des mémoires en réplique enregistrés le 7 et 21 mai 2021, M. B... D... représenté par Me A..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'ordonner une expertise avant dire droit sur le fondement de l'article R. 621-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler l'article 3 du jugement du 11 juin 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

3°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de la culture a rejeté son recours administratif préalable formé le 12 juillet 2018 ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 112 307 euros en réparation des préjudices qu'il a subis, assortie des intérêts de droit à compter du 12 juillet 2018 et capitalisation de ces intérêts ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 6 268 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que son mémoire en duplique enregistré le 3 septembre 2019, soit avant la clôture de l'instruction, n'y est pas visé et qu'il n'a pas pris en compte l'ensemble des éléments versés aux débats ;

- la décision prononçant son licenciement est entachée d'incompétence ;

- cette décision est entachée de plusieurs vices de procédure dès lors qu'il n'a pas été informé, ni préalablement ni au cours de l'entretien préalable, des motifs pour lesquels son licenciement était envisagé et qu'il n'a pas pu demander communication de son dossier administratif ;

- cette décision est dépourvue de base légale dès lors que les dispositions du décret du 17 janvier 1986 ne font aucune distinction selon que le licenciement intervient en cours ou au terme de la période d'essai ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; à la date du licenciement il avait bien délivré les documents conformes attendus par sa hiérarchie ; contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, il n'a bénéficié d'aucune mise en garde de ne pas diffuser auprès de tiers des documents non validés par sa hiérarchie ; il est abusif de qualifier la société filiale de la Poste de tiers, dès lors qu'il s'agit d'une société indirectement détenue par l'Etat liée à l'UGAP par un accord-cadre, et de prétendre qu'il aurait exposé son service à des risques juridiques qui ne sont pas précisés ; il s'est contenté de suivre la procédure définie par l'UGAP et le planning prévisionnel établi par la sous-direction des systèmes d'information avec l'accord tacite de sa hiérarchie ;

- la responsabilité de l'Etat est engagée du fait de l'illégalité de l'arrêté du

16 avril 2019 prononçant son licenciement ; il a subi un préjudice moral et de santé qui s'élève à 20 000 euros, ainsi qu'un préjudice financier qui s'élève à 88 534 euros et un préjudice de carrière évalué à 15 000 euros, soit un total de 123 534 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 février 2021, la ministre de la culture conclut au rejet de la requête ;

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La ministre de la culture a produit un mémoire enregistré le 31 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., avocat de M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D... a été recruté par le ministère de la culture, comme agent contractuel pour une durée de trois ans à compter du 1er février 2018, en qualité d'acheteur public auprès du secrétariat général du ministère. Par un arrêté du 16 avril 2018, le ministre de la culture a prononcé son licenciement à compter du 1er mai 2018 au cours de sa période d'essai. Il relève appel du jugement du 11 juin 2020 du Tribunal administratif de Paris en tant que ce jugement, après avoir annulé l'arrêté du 16 avril 2018 prononçant son licenciement, a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme totale de 49 730 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. M. D... soutient que le jugement attaqué est entaché d'une violation de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, qui dispose que la décision du tribunal contient l'analyse des conclusions et mémoires produits par les parties, dès lors que son mémoire enregistré le 3 septembre 2019, soit avant la clôture de l'instruction, n'y est pas visé. Il ressort toutefois du jugement attaqué que, s'il a omis de viser le mémoire présenté par M. D... et communiqué au ministre de la culture le 4 septembre 2019, il analyse l'ensemble des moyens que le requérant y développait et a retenu, comme il le pouvait, l'un des moyens d'annulation présentés. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.

Sur les conclusions tendant à la réparation des préjudices résultant de l'illégalité fautive de la décision de licenciement :

3. Lorsqu'une personne sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité d'une décision pour un vice de procédure, il appartient au juge de plein contentieux, saisi de moyens en ce sens, de déterminer, en premier lieu, la nature de cette irrégularité procédurale puis, en second lieu, de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, si, compte tenu de la nature et de la gravité de cette irrégularité procédurale, la même décision aurait pu être légalement prise.

4. En premier lieu, si M. D... soutient à nouveau en appel que l'arrêté du 16 avril 2018 est entaché d'incompétence, il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter ce moyen.

5. En deuxième lieu, si M. D... soutient que l'arrêté du 16 avril 2018 est entaché d'un vice de procédure, faute de communication de son dossier administratif préalable à son licenciement en violation des dispositions des articles 45-2 et 47 du décret du 17 janvier 1986, ces dispositions ne s'appliquent pas aux hypothèses de licenciement d'un agent contractuel lors de la période d'essai. En outre, les dispositions de l'article 9 du même décret qui régissent le licenciement en cours ou au terme de la période d'essai ne prévoient pas la communication du dossier à l'agent. Ce moyen ne peut qu'être écarté.

6. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que M. D... a fait preuve durant sa période d'essai d'une méconnaissance du domaine des marchés publics, en particulier de la rédaction des documents essentiels à la passation d'un marché public, alors que son curriculum vitae laissait penser qu'il était en mesure de réaliser ce travail et qu'il n'a pas su acquérir les connaissances nécessaires pendant cette période. Il ressort en particulier de la note du 20 mars 2018, rédigée par sa supérieure hiérarchique à l'attention du secrétariat général du ministère, que les documents élaborés par M. D... étaient incomplets ou inadaptés aux besoins du service. Il résulte également de ce rapport et des courriels versés au dossier qu'en dépit d'une mise en garde de la cheffe de la mission des achats lors d'un entretien avec M. D... le 12 mars 2018, ce dernier a diffusé à un tiers des documents non validés par sa hiérarchie, la circonstance que ce tiers soit une société indirectement détenue par l'Etat étant sans incidence sur l'appréciation du manquement de M. D... à son obligation de se conformer aux procédures administratives internes et aux consignes de sa hiérarchie. Par suite, la décision mettant fin au contrat de M. D... au cours de sa période d'essai n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de la part du ministre de la culture.

7. Il s'ensuit que l'arrêté du 16 avril 2018 n'est entaché d'aucune autre illégalité que l'insuffisance de motivation retenue par le tribunal. Dès lors qu'il résulte de l'instruction que sans cette irrégularité formelle, la même décision aurait pu être légalement prise par le ministre de la culture, M. D... n'est pas fondé à solliciter l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité de l'arrêté prononçant son licenciement.

8. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions indemnitaires.

Sur les frais de l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, verse à M. D... la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et à la ministre de la culture.

Délibéré après l'audience du 4 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme E..., présidente,

- M. Mantz, premier conseiller,

- Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 juin 2021.

La rapporteure,

M. E...L'assesseur le plus ancien,

P. MANTZLa greffière,

S. GASPARLa République mande et ordonne à la ministre de la culture en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA02074
Date de la décision : 25/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : Mme JULLIARD
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : RABBE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-25;20pa02074 ?
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