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04/06/2021 | FRANCE | N°21PA00727

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 04 juin 2021, 21PA00727


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2015974/3-3 du 12 janvier 2021, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de M. D... dans un délai d'un mois.

Proc

dure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 février 2021, et par un mémoire com...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2015974/3-3 du 12 janvier 2021, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de M. D... dans un délai d'un mois.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 février 2021, et par un mémoire complémentaire, enregistré le 7 avril 2021, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1er à 3 de ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 12 janvier 2021 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D... devant le Tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a fait droit au moyen tiré d'une violation du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- les autres moyens soulevés par M. D... devant le tribunal administratif ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mai 2021, M. D..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête du préfet de police ;

2°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans le délai de deux mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jours de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les observations de M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant algérien né le 17 mars 1958 à Rouached (Algérie), est entré en France en juin 1994 selon ses déclarations. Il a, le 10 avril 2017, sollicité la délivrance d'un certificat de résidence. Par un jugement du 14 mai 2019, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision rejetant implicitement cette demande, et a enjoint au préfet de police de réexaminer cette même demande. Par un arrêté du 11 septembre 2020, le préfet de police a de nouveau rejeté la demande de M. D..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le préfet de police fait appel du jugement du 12 janvier 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté.

Sur la requête du préfet de police :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".

3. Pour annuler l'arrêté du préfet de police comme intervenu en méconnaissance des stipulations citées ci-dessus de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur les certificats médicaux et les autres pièces médicales produits par M. D..., dont il ressort que son état de santé, caractérisé par un diabète de type 2, insulino dépendant, une insuffisance cardiaque, une insuffisance rénale, une neuropathie ainsi qu'une rétinopathie, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Le tribunal administratif a estimé que ces pièces établissaient en outre que M. D... ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié à ses pathologies dans son pays.

4. Il ressort toutefois des pièces produites par le préfet de police que les spécialités Lanzoprazole, Coumandine, Uvedose, Toujeo Solostar et Novorapid flexpen et les autres produits que comporte le traitement médicamenteux de M. D..., sont disponibles en Algérie, soit sous la forme prescrite, soit sous une forme équivalente, et dans ce cas, avec des médicaments dont les principes actifs sont les mêmes que ceux prescrits à M. D.... Le préfet de police est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur les motifs rappelés ci-dessus pour annuler l'arrêté en litige.

5. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D... devant le Tribunal administratif de Paris, et en appel.

Sur les autres moyens soulevés par M. D... :

6. Si l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ne prévoit pas de modalités d'admission exceptionnelle au séjour semblables à celles prévues à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

7. Il ressort du courrier du Conseil de M. D... daté du 18 octobre 2019 demandant le réexamen de sa demande de titre de séjour à la suite du jugement du Tribunal administratif de Paris du 14 mai 2019, qu'il cite expressément l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'avis du Conseil d'Etat du 22 mars 2010, n° 333679, pour solliciter la délivrance d'un titre de séjour.

8. Il ressort par ailleurs de l'arrêté en litige et du premier mémoire en défense produit par le préfet de police devant le tribunal administratif, qui n'a pas été démenti par la suite, que le préfet de police n'a pas exercé le pouvoir discrétionnaire dont il est investi sur ce point, pour apprécier l'opportunité d'une mesure de régularisation de la situation de M. D.... M. D... est donc fondé à soutenir que cet arrêté est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa demande, et, pour ce motif, à en demander l'annulation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 11 septembre 2020.

Sur les conclusions de M. D... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. D... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. D... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... D....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. C..., président-assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, 4 juin 2021.

Le rapporteur,

J-C. C...Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

K. PETIT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA00727 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00727
Date de la décision : 04/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : KOSZCZANSKI et BERDUGO

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-04;21pa00727 ?
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