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04/06/2021 | FRANCE | N°19PA01246

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 04 juin 2021, 19PA01246


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La compagnie Albingia et la société Angelo Meccoli et Cie ont saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à la condamnation in solidum des établissements SNCF et SNCF Réseau à les indemniser à hauteur respective de 220 188, 82 euros pour la compagnie Albingia et de 34 500 euros pour la société Angelo Meccoli et Cie, outre des conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1719889 du 7 février 2019, le Tribunal ad

ministratif de Paris a rejeté leur demande .

Procédure devant la Cour :

Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La compagnie Albingia et la société Angelo Meccoli et Cie ont saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à la condamnation in solidum des établissements SNCF et SNCF Réseau à les indemniser à hauteur respective de 220 188, 82 euros pour la compagnie Albingia et de 34 500 euros pour la société Angelo Meccoli et Cie, outre des conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1719889 du 7 février 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande .

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 avril 2019, et un mémoire en réplique, enregistré le 27 janvier 2020, la compagnie Albingia et la société Angelo Meccoli et Cie, représentées par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 février 2019 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de condamner in solidum les établissements SNCF et SNCF Réseau à les indemniser à hauteur respective de 220 188,82 euros pour la compagnie Albingia et de 34 500 euros pour la société Angelo Meccoli et Cie ;

3°) de mettre à la charge, in solidum, des établissements SNCF et SNCF Reseau une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- c'est à tort que les premiers juges ont prononcé la mise hors de cause de l'établissement SNCF ;

- c'est à tort que les premiers juges leur ont opposé l'irrecevabilité fondée sur l'article 85.1 du cahier des clauses et conditions générales applicables aux marchés de travaux passés par la SNCF, dans sa version n° 2 du 24 novembre 2008 ;

- si SNCF et SNCF Réseau ont également opposé une irrecevabilité fondée sur l'article 58.4 du même cahier, c'est également à tort, car à titre principal il s'agit d'une clause léonine d'exclusion de responsabilité qui doit être annulée, à titre subsidiaire, il y a bien une faute lourde du préposé des établissements SNCF et SNCF Réseau ;

- les dommages matériels s'élèvent à 134 688,82 euros HT ;

- les dommages immatériels résultant de l'immobilisation de l'engin s'élèvent à 120 000 euros HT ;

- la société Meccoli a en outre supporté une franchise de 34 500 euros HT.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 septembre 2019 et 2 mars 2020, les établissements SNCF et SNCF Réseau, représentés par Me B..., concluent au rejet de la requête et demandent, en outre, qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge in solidum de la compagnie Albingia et de la société Angelo Meccoli et Cie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que les moyens soulevés par la compagnie Albingia et la société Meccoli sont infondés.

Par une ordonnance du 31 janvier 2020, la cloture de l'instruction a été fixée au 3 mars 2020 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil,

- le code des marchés publics,

- le code des transports,

- la loi n°2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire,

- le cahier des clauses et conditions générales applicables aux marchés de travaux passés par la SNCF, dans sa version n° 2 du 24 novembre 2008,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- et les observations de Me B... pour les établissements SNCF et SNCF Réseau.

Considérant ce qui suit :

1. La Société nationale des chemins de fer (SNCF) a conclu un marché de travaux le 1er août 2012 avec la société Meccoli et Cie ayant pour objet le balayage et le regarnissage mécanique de la voie courante des lignes classiques du RFN et le dégagement des entretoises métalliques des traverses. Le 25 février 2013, la régaleuse de la société Meccoli et Cie se trouvait sur le site de Toury en voie 6 afin de se rendre en voie 1. Alors que l'engin circulait à l'extrémité de la voie 6, le taquet dérailleur 4 enclenché sur le rail a entraîné un freinage d'urgence qui n'a pas empêché le franchissement du taquet sur les cinq essieux de l'engin qui a été immobilisé sur les voies principales et endommagé. La société Meccoli et Cie et la compagnie Albingia, son assureur, ont saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tenant à la condamnation de SNCF et SNCF Réseau à les indemniser des préjudices qu'elles estiment subis de ce fait. La société Meccoli et Cie et la compagnie Albingia relèvent appel du jugement du 7 février 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Sur la mise hors de cause de la SNCF :

2. Aux termes de l'article 29 de la loi du 4 août 2014 visée ci-dessus portant réforme ferroviaire : " I. - Les biens appartenant à SNCF Mobilités, ainsi que ceux appartenant à l'Etat et gérés par SNCF Mobilités et attachés aux missions de gestion de l'infrastructure mentionnées à l'article L. 2111-9 du code des transports, dans sa rédaction résultant de la présente loi, notamment ceux figurant dans les comptes dissociés établis en application de l'article L. 2122-4 du même code, sont, à la date du 1er janvier 2015, transférés en pleine propriété à SNCF Réseau. A cette même date, SNCF Réseau est substitué à SNCF Mobilités pour les droits et obligations de toute nature, y compris immatériels, attachés à ces mêmes missions. Ces opérations sont réalisées de plein droit, nonobstant toute disposition ou stipulation contraire, et entraînent les effets d'une transmission universelle de patrimoine. Elles n'ont aucune incidence sur ces biens, droits et obligations et n'entraînent, en particulier, ni la modification des contrats et des conventions en cours conclus par SNCF Réseau, SNCF Mobilités ou les sociétés qui leur sont liées au sens des articles L. 233-1 à L. 233-4 du code de commerce, ni leur résiliation, ni, le cas échéant, le remboursement anticipé des dettes qui en sont l'objet. ". Aux termes de l'article L. 2111-9 du code des transports : " L'établissement public national à caractère industriel et commercial dénommé " SNCF Réseau " a pour missions d'assurer, conformément aux principes du service public et dans le but de promouvoir le transport ferroviaire en France dans une logique de développement durable : 1° L'accès à l'infrastructure ferroviaire du réseau ferré national, comprenant la répartition des capacités et la tarification de cette infrastructure ; 2° La gestion opérationnelle des circulations sur le réseau ferré national ; 3° La maintenance, comprenant l'entretien et le renouvellement, de l'infrastructure du réseau ferré national ; 4° Le développement, l'aménagement, la cohérence et la mise en valeur du réseau ferré national ; 5° La gestion des installations de service dont il est propriétaire et leur mise en valeur. ".

3. En vertu de ces dispositions SNCF Réseau est substituée à SNCF pour les droits et obligations de toute nature, y compris immatériels, attachés aux missions de gestion de l'infrastructure ferroviaire, nonobstant toute disposition ou stipulation contraire. Dès lors, SNCF Réseau doit être regardée comme s'étant substituée à SNCF en ce qui concerne les droits et obligations nés de l'exécution du marché mentionné au point 1, conclu avec l'entreprise Meccoli et Cie . Il s'en suit que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont prononcé la mise hors de cause de l'établissement SNCF, et ce quel que soit le rattachement administratif du pilote qui est intervenu le jour du sinistre.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

4. Aux termes des stipulations de l'article 58. 4 du cahier des clauses et conditions générales travaux : " L'entrepreneur supporte seul les conséquences pécuniaires des dommages de toute nature et quelle qu'en soit la cause qui, du fait ou à l'occasion de l'exécution du marché, pourraient lui être causés ou subis par les biens dont lui-même ou ses préposés seraient propriétaires ou détenteurs à un titre quelconque./ En conséquence, l'entrepreneur renonce à exercer tout recours contre le maitre de l'ouvrage, son mandataire, ses représentants et agents respectifs, et ses éventuels assureurs ".

5. Contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, qui ne peuvent se prévaloir de décisions du juge judiciaire, aucune loi ou règlement ni aucun principe general du droit n'interdit les clauses contractuelles d'irresponsabilité de la personne publique dans les marchés publics. Toutefois, ces clauses limitatives de responsabilité peuvent être écartées en cas fautes lourdes commises par cette dernière.

6. Or, il résulte de l'instruction que le dommage litigieux est survenu lors de l'exécution du marché, laquelle inclut l'acheminement du véhicule sur le chantier, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes. Par ailleurs, s'il résulte également de l'instruction que la régaleuse a été endommagée alors qu'elle était pilotée ou co-pilotée par un agent de SNCF ou de SNCF Réseau, qui ne pouvait toutefois pas voir à temps le talon dérailleur relevé, car la neige, qui aurait dû être enlevée par le gestionnaire du réseau, recouvrait les voies, ces circonstances ne sauraient caractériser une faute lourde de SNCF ou de SNCF Réseau, contrairement à ce que soutiennent à titre subsidiaire les sociétés requérantes. Dans ces conditions, la société Meccoli et par voie de conséquence la compagnie Albingia son assureur dont la subrogation ne lui confère que les droits et actions appartenant à son assuré, ne sont pas recevables à demander l'indemnisation du dommage ainsi subi lors de l'exécution du marché conclu entre SNCF et la société Meccoli.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la compagnie Albingia et la société Meccoli et Cie ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n' y a pas lieu de mettre à la charge de la compagnie Albingia et de la société Meccoli et Cie une somme au titre des frais exposés par la SNCF et par SNCF Réseau. et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la compagnie Albingia et de la société Meccoli et Cie est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la SNCF et de SNCF Réseau au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la compagnie Albingia , à la société Meccoli, à la SNCF et à SNCF Réseau.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2021 à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juin 2021.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

K. PETIT

La République mande et ordonne au ministre chargé des transports en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA01246 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA01246
Date de la décision : 04/06/2021
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SCP RAFFIN ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-04;19pa01246 ?
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