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26/05/2021 | FRANCE | N°21PA00689

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 26 mai 2021, 21PA00689


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 6 février 2020 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination vers lequel il sera reconduit ; d'enjoindre au préfet de police à titre principal de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 2005107 du 15 décembre 2020, le

tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 6 février 2020 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination vers lequel il sera reconduit ; d'enjoindre au préfet de police à titre principal de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 2005107 du 15 décembre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 février 2021, M. C... A..., représenté par

Me F..., demande à la Cour :

1°) d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Paris du 15 décembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 6 février 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police à titre principal de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire de réexaminer sa situation avec délivrance d'une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet ne lui a pas transmis d'enveloppe au cachet du secret médical en méconnaissance de la loi du 7 mars 2016 et du décret du 28 octobre 2016 ;

- le préfet ne lui a pas transmis la notice explicative et le certificat médical vierge requis par l'article 1er de l'arrêté du 26 décembre 2016 ;

- l'avis de l'OFII ne comporte pas la mention de l'absence ou de la présence d'examens complémentaires ;

- ni l'avis du collège des médecins de l'OFII ni le courriel de notification ne sont signés ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé et sa situation n'a pas été examinée ;

- le préfet s'est cru lié par l'avis du collège médical de l'OFII ;

- il ne peut pas bénéficier d'un traitement approprié du lupus au Sénégal où il est exposé aux rayons du soleil et où les traitements qui lui sont prescrits sont indisponibles ;

- il va perdre son emploi en France.

Le préfet de police, à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- le décret n°2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

Sur l'insuffisance de la motivation :

1. L'arrêté contesté, qui cite les textes applicables, mentionne que le préfet a été saisi par M. A... d'une demande de renouvellement du titre de séjour qui lui avait été délivré en qualité d'étranger malade, que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé le 8 janvier 2020 que, si l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité il pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié au Sénégal, et il expose les raisons pour lesquelles il n'est pas porté une atteinte excessive au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale. L'arrêté contesté, qui n'avait pas à préciser la situation médicale du requérant, dès lors que le secret médical interdit au collège des médecins de révéler au préfet des informations sur la pathologie de l'intéressé, énonce ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de police a fondé sa décision.

Sur les vices de procédure :

2. Aux termes de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Article 1 : L'étranger qui dépose une demande de délivrance ou de renouvellement d'un document de séjour pour raison de santé est tenu, pour l'application des articles

R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de faire établir un certificat médical relatif à son état de santé par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier. / A cet effet, le préfet du lieu où l'étranger a sa résidence habituelle lui remet un dossier comprenant une notice explicative l'informant de la procédure à suivre et un certificat médical vierge, dont le modèle type figure à l'annexe A du présent arrêté. Article 2 : Le certificat médical, dûment renseigné et accompagné de tous les documents utiles, est transmis sans délai, par le demandeur, par tout moyen permettant d'assurer la confidentialité de son contenu, au service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont l'adresse a été préalablement communiquée au demandeur. Article 3 : Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical, conformément au modèle figurant à l'annexe B du présent arrêté. (...) Article 5 : Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport (...). Article 6 : Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

3. Si M. A... allègue que le préfet de police ne lui aurait pas remis le dossier comprenant la notice explicative l'informant de la procédure à suivre et le certificat médical vierge prévus par l'article 1er de l'arrêté du 27 décembre 2016, ainsi qu'une enveloppe au cachet du secret médical, le collège des médecins a traité sa demande, ce dont il se déduit que celle-ci était régulière en la forme et recevable ; à supposer que le dossier ne lui ait pas été remis, il incombait au requérant de le solliciter ; en tout état de cause, et à supposer que le dossier qui lui a été remis ait été incomplet, cette circonstance n'a pas été susceptible d'exercer une influence sur le sens de l'avis émis par le collège des médecins et n'a pas privé M. A... d'une garantie dès lors qu'il n'est pas contesté que le requérant a pu fournir l'ensemble des éléments médicaux qui ont permis à cette instance de formuler un avis sur son cas.

4. Si M. A... relève que l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne porte pas la mention d'examens complémentaires, il est constant qu'aucun examen complémentaire n'a eu lieu. Il n'y avait dès lors lieu de renseigner les cases correspondantes.

5. Si le requérant soutient que les signatures des médecins ayant siégé au sein du collège de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne sont pas lisibles, il ressort de la copie produite que l'avis comporte des traces de signature et mentionne de façon lisible les noms de ces trois médecins qui peuvent ainsi être identifiés. Le courriel de transmission de cet avis a, quant à lui, été signé de manière parfaitement lisible par Mme B..., directrice de l'OFII.

6. Il résulte de ce qui précède de que la procédure a été régulière et que l'avis du collège des médecins n'est entaché d'aucun vice susceptible de conduire à l'annulation de la décision du préfet.

Sur la légalité interne :

7. Si le préfet de police s'est approprié l'avis du collège des médecins, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait considéré qu'il était lié par lui. Il s'est par ailleurs prononcé sur l'atteinte que sa décision serait susceptible de porter au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale et s'est par suite livré à un examen personnel et complet de la situation de M. A....

8. Aux termes du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit à " l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat ".

9. Il ressort des pièces du dossier que M. A... souffre d'un lupus, maladie auto-immune relativement rare affectant plus particulièrement la peau. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les médications qui lui sont actuellement prescrites, telles que le plaquenil, nom sous lequel est commercialisé l'hydroxychloroquine, nonobstant d'occasionnelles ruptures d'approvisionnement, ou les antipaludéens, ne seraient pas disponibles au Sénégal ni que le suivi de sa maladie, de ses troubles oculaires et de ses lombalgies ne pourrait pas se poursuivre dans son pays d'origine. La circonstance que les atteintes dermatologiques et oculaires des personnes affectées par un lupus sont aggravées par l'exposition aux rayons du soleil, ce qui l'obligerait à porter des vêtements couvrants et des lunettes de soleil lors de ses sorties diurnes, ne fait pas obstacle à un suivi de sa maladie au Sénégal. Celle suivant laquelle il serait davantage exposé à une contamination au virus du covid 19 au Sénégal qu'en France n'est pas établie et elle est, au demeurant, sans incidence sur l'appréciation portée quant à la possibilité d'être suivi pour le lupus dans son pays d'origine. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent doit dès lors être écarté.

10. Si M. A... fait valoir que sa maladie sera moins bien traitée au Sénégal qu'en France et que le refus de renouveler son titre de séjour l'expose à perdre son emploi de gardien, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police se serait manifestement mépris sur la gravité des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. A....

11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 18 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- M. D..., président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Jayer, premier conseiller,

- Mme Mornet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 mai 2021.

L'assesseur le plus ancien,

M-E... Le président de la formation de jugement,

président-rapporteur,

Ch. D...

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA00689 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00689
Date de la décision : 26/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BERNIER
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : ALAGAPIN-GRAILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-05-26;21pa00689 ?
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