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04/05/2021 | FRANCE | N°20PA01598

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 04 mai 2021, 20PA01598


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... G... et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de la Polynésie française de condamner la Polynésie française à leur verser la somme de 11 000 000 francs CFP en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de l'impossibilité d'obtenir un permis de construire ou un certificat de conformité pour leur parcelle située sur le territoire de la commune de Punaauia et cadastrée CE n°202.

Par un jugement n° 1900445 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de la Pol

ynésie française a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requê...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... G... et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de la Polynésie française de condamner la Polynésie française à leur verser la somme de 11 000 000 francs CFP en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de l'impossibilité d'obtenir un permis de construire ou un certificat de conformité pour leur parcelle située sur le territoire de la commune de Punaauia et cadastrée CE n°202.

Par un jugement n° 1900445 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er juillet 2020, et un mémoire enregistré le 12 février 2021, M. G... et Mme D..., représentés par Me B..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la Polynésie française à leur verser la somme de 100 000 euros au titre de leurs préjudices ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les informations erronées contenues dans la note de renseignement d'aménagement le 22 octobre 2013, qui ne faisait pas état de l'inconstructibilité du terrain n° 202, engagent la responsabilité de la Polynésie française ;

- ils ont acquis cette parcelle de bonne foi ; alors que la commune de Punaauia dispose d'un plan de prévention des risques naturels depuis le 25 mars 2010, les services de l'urbanisme ne les ont informés de l'inconstructibilité du terrain que le 15 mai 2019 ;

- ils ont subi un préjudice anormal et spécial ;

- leur préjudice est constitué par l'obligation de rembourser une somme de

1 140 348 F CFP correspondant aux droits d'enregistrement de l'acquisition de leur parcelle, dont ils avaient été exonérés, augmentée des intérêts de retard ; ils subissent également des préjudices liés à l'impossibilité de construire, à l'obligation de régler leur crédit sur une durée de vingt ans et à l'impossibilité de revendre leur parcelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 janvier 2021, la Polynésie française, représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. G... et de Mme D... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la note de renseignement d'urbanisme du 22 octobre 2013 délivrée à l'ancien propriétaire du terrain faisait état du plan de prévention des risques naturels approuvé le 25 mars 2010, et comportait en annexe des cartes dont il se déduisait que la future parcelle C n°202 se situait en zone rouge d'aléa de mouvement de terrain ; dès lors les requérants, qui n'ont pas sollicité de note de renseignement d'urbanisme spécifique à leur parcelle, étaient informés qu'une autorisation de construire, était susceptible de leur être refusée ;

- la circonstance que le notaire ne les ait pas suffisamment mis en garde ne saurait engager la responsabilité de la Polynésie française ;

- les requérants sont donc redevables du remboursement des exonérations fiscales dont ils ont bénéficié, la maison n'ayant pas été édifiée dans les délais réglementaires.

La clôture de l'instruction est intervenue le 8 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- et les conclusions de Mme Péna, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un acte de vente du 26 mars 2014, conclu devant un notaire et enregistré au service des hypothèques le 2 avril 2014, M. G... et Mme D... ont fait l'acquisition d'une parcelle cadastrée section C n° 202, détachée d'une parcelle anciennement cadastrée section C n° 184, à Punaauia. A cette occasion, ils ont bénéficié d'exonérations et d'avantages fiscaux en matière de droits d'enregistrements, qui étaient néanmoins subordonnés à la réunion de plusieurs conditions, dont celle d'édifier sur la parcelle une maison individuelle dans un délai de cinq ans et celle d'affecter cette construction à leur habitation principale pendant une durée minimale de quatre ans suivant l'achèvement des travaux.

2. M. G... et Mme D..., qui n'ont pas déposé de permis de construire dans le délai imparti, n'ont pas satisfait à ces conditions. Le 7 mai 2019, la recette de la conservation des hypothèques a mis en recouvrement la somme de 1 140 348 F CFP correspondant aux droits d'enregistrement dont ils ne s'étaient pas acquittés au moment de leur achat immobilier. Puis, le 15 mai 2019, le service de l'urbanisme de la Polynésie française a indiqué à M. G... et Mme D... qu'une demande de permis de construire pour l'édification d'une maison sur la parcelle cadastrée n° 202 ferait l'objet d'un refus, cette parcelle figurant dans une zone d'aléa fort de mouvements de terrain du plan de prévention des risques naturels de la commune de Punaauia.

3. M. G... et Mme D... ont vainement demandé au gouvernement de la Polynésie française de les indemniser de leurs préjudices. Ils relèvent appel du jugement du

16 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande tendant à ce que la Polynésie française soit condamnée à leur verser une indemnité.

Sur la faute :

4. M. G... et Mme D... font valoir que, sur la note de renseignements d'aménagement délivrée le 22 octobre 2013 à l'ancien propriétaire, peu de temps avant la vente, il était indiqué que les parcelles n°196, 199, 201, 200 et 202, qui seraient issues de la division des parcelles n°183/184 " était constructibles au titre des caractéristiques du terrain indiquées dans la réglementation mentionnée au B du présent document dans le respect des dispositions des articles UCb1 et UCb2 du plan général d'aménagement de Punaauia ", et qu'ils ont été induits en erreur par cette information inexacte. Cependant, il résulte de l'instruction que la note précisait également en son point B que s'appliquait à ces terrains le plan de prévention des risques naturels approuvé le 23 mars 2010 et que, sur les parcelles situées en zone rouge de mouvements de terrain, un refus d'autorisation était susceptible d'être opposé à une demande d'autorisation de travaux immobiliers. A cette note de renseignement était joint un plan dont il ressortait que la majeure partie de la parcelle n°184 était située en zone rouge. Il en résulte donc que la note de renseignements d'aménagement du 22 octobre 2013 ne comportait pas d'information erronée quant à la possibilité d'y construire. S'il est vrai que cette note de renseignement demandée par l'ancien propriétaire, qui portait sur un terrain plus étendu que la parcelle dont M. G... et Mme D... ont fait l'acquisition, ne permettait pas de déterminer au premier regard dans quelle mesure la future parcelle n°202 était susceptible d'être affectée par les restrictions qui s'imposent aux constructions situées en zone rouge, il était loisible aux requérants de solliciter une note de renseignement d'aménagement spécifique au terrain qu'ils envisageaient d'acquérir. Si les requérants n'ont pas été suffisamment éclairés au moment de la transaction sur la possibilité à laquelle ils s'exposaient d'un refus d'autorisation de construire motivé par les risques naturels, un éventuel manquement du notaire à son devoir de conseil n'est pas de nature à engager la responsabilité de l'administration.

Sur la responsabilité sans faute :

5. Si M. G... et Mme D... invoquent le caractère anormal et spécial de leur préjudice, il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est plus sérieusement allégué en appel, que celui-ci trouverait son origine dans les lois et règlements de la Polynésie française. Au demeurant, il appartient au propriétaire concerné de supporter l'intégralité du préjudice résultant de l'inconstructibilité de son terrain nu résultant des risques naturels le menaçant, sauf dans le cas où ce propriétaire supporterait une charge spéciale et exorbitante hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi. Tel n'est pas le cas en l'espèce.

6. Il résulte de ce qui précède que M. G... et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de M. G... et de Mme D... tendant à ce que soient mis à la charge de la Polynésie française les frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions que présente la Polynésie française sur le même fondement.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. G... et de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la Polynésie française sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... G... et à Mme C... D..., et à la Polynésie française.

Délibéré après l'audience publique du 20 avril 2021, à laquelle siégeaient :

- M. E..., président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Jayer, premier conseiller,

- Mme Mornet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mai 2021.

L'assesseur le plus ancien,

M-D. JAYER Le président de la formation de jugement,

président-rapporteur,

Ch. E... Le rapporteur,

Ch. E...Le président,

M. E...

Le greffier,

E. MOULIN

Le greffier,

A. DUCHER

La République mande et ordonne au ministre des outre-mer et au Haut-Commissaire en Polynésie française en ce qui les concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 20PA01598


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01598
Date de la décision : 04/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BERNIER
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : SEP USANG CERAN-JERUSALEMY

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-05-04;20pa01598 ?
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