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30/04/2021 | FRANCE | N°19PA00469

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 30 avril 2021, 19PA00469


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association tutélaire de la Meuse, agissant en qualité de tuteur de M. A... B..., a demandé à la commission départementale d'aide sociale de la Meuse d'annuler la décision du 10 août 2016 par laquelle le président du conseil départemental de la Meuse lui a notifié une prise en charge à hauteur de 760 euros mensuels des frais d'hébergement de M. B..., en tant que cette prise en charge est insuffisante au regard des ressources de l'allocataire.

Par une décision du 21 juin 2017, la commission dé

partementale d'aide sociale de la Meuse a rejeté sa demande.

Procédure devant la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association tutélaire de la Meuse, agissant en qualité de tuteur de M. A... B..., a demandé à la commission départementale d'aide sociale de la Meuse d'annuler la décision du 10 août 2016 par laquelle le président du conseil départemental de la Meuse lui a notifié une prise en charge à hauteur de 760 euros mensuels des frais d'hébergement de M. B..., en tant que cette prise en charge est insuffisante au regard des ressources de l'allocataire.

Par une décision du 21 juin 2017, la commission départementale d'aide sociale de la Meuse a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 septembre 2017, et des mémoires enregistrés les 16 juillet et 23 octobre 2018, l'Association tutélaire de la Meuse demande d'annuler la décision de la commission départementale d'aide sociale de la Meuse et de reconnaître à M. B... le bénéfice de l'aide sociale en lui permettant de conserver 30 % du montant de l'allocation aux adultes handicapés.

Elle soutient que :

- le minimum légal fixé à 30 % de l'allocation aux adultes handicapés pour une personne handicapée à 80 % n'est pas respecté ;

- de fait, le budget de M. B... est déficitaire de 62,32 euros par mois ;

- une erreur matérielle figure dans la décision de la commission départementale d'aide sociale qui mentionne dans le dispositif le nom de M. A...-E... C... ;

- le conseil départemental ne tient pas compte du règlement départemental d'aide sociale qui précise à la page 9 que les revenus sont pris en considération sur la part d'épargne supérieure à 5 000 euros et à hauteur du taux de rendement en vigueur ; ce règlement a repris ainsi une pratique pré-existante ;

- le total des ressources de M. B... est donc de 1 128,46 euros, et non de 1 185,80 euros comme calculé par le conseil départemental ;

- le conseil départemental ne déduit des revenus mensuels de M. B... que les revenus tirés d'un des deux contrats d'assurance-vie handicap souscrits par ce dernier, et non les revenus tirés des deux contrats handicap-vie.

Par des mémoires en défense enregistrés les 20 mars et 17 septembre et le janvier 2019, le président du conseil départemental de la Meuse conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la référence au règlement départemental d'aide sociale n'est pas recevable, celui-ci ayant été adopté le 13 juillet 2017, soit postérieurement à la date de la décision contestée ;

- le contrat épargne handicap est un contrat d'assurance-vie défini au 2° de l'article 199 septies du code général des impôts ; les revenus tirés de ce contrat doivent être pris en compte pour l'appréciation des revenus de l'allocataire ;

- le requérant ne peut faire grief au conseil départemental d'avoir sous-évalué le montant de ses revenus en ne prenant en compte que ceux tirés d'un de ses deux contrats d'assurance-vie handicap ;

- la pratique de l'abattement de 5 000 euros sur les revenus tirés des capitaux placés a pu être évoquée avec les représentants des bénéficiaires de l'aide sociale sans être pour autant opposable au département pour les décisions antérieures au 13 juillet 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

En application de l'article 12 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 et du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018, le dossier de la requête susvisée a été transféré à la Cour administrative d'appel de Paris, où elle a été enregistrée le 2 janvier 2019 sous le n° 19PA00469.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 ;

- le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que M. B..., né en 1949, est hébergé au sein de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes de Montfaucon en Argonne depuis le 18 septembre 2003. Il a été admis au bénéfice de l'aide sociale à l'hébergement " personne handicapée " à compter de son entrée dans cet établissement. A l'occasion de la révision de son dossier, le président du conseil départemental de la Meuse a pris en compte, pour estimer le montant des ressources de M. B..., les intérêts, évalués à une somme mensuelle totale de 155,15 euros, des sommes de 5 663,79 euros détenue sur un livret d'épargne populaire, 21 447,35 euros détenue sur une assurance-vie option épargne-handicap et 38 252,68 euros détenue sur un contrat de capitalisation. Par une décision en date du 10 août 2016, modifiant un arrêté du 4 janvier 2016, le président du conseil départemental de la Meuse a fixé la participation forfaitaire mensuelle du département à 760 euros et la part de M. B... à 856,04 euros. L'Association tutélaire de la Meuse, maintenue en qualité de tuteur de M. B... par le tribunal d'instance de Verdun dans son jugement du 19 janvier 2010, demande l'annulation de la décision de la commission départementale d'aide sociale de la Meuse du 21 juin 2017 rejetant son recours dirigé contre la décision du 10 août 2016.

2. La circonstance que le dispositif de la décision de la commission départementale d'aide sociale de la Meuse est entaché d'une erreur matérielle quant au nom du majeur protégé aux droits duquel se présentait l'Association tutélaire de la Meuse est sans incidence sur la régularité et le bien-fondé de cette décision.

3. L'article L. 132-1 du code de l'action sociale et des familles dispose : " Il est tenu compte, pour l'appréciation des ressources des postulants à l'aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire ". Aux termes de l'article L. 132-3 du même code : " Les ressources de quelque nature qu'elles soient, à l'exception des prestations familiales, dont sont bénéficiaires les personnes placées dans un établissement au titre de l'aide aux personnes âgées ou de l'aide aux personnes handicapées, sont affectées au remboursement de leurs frais d'hébergement et d'entretien dans la limite de 90 %. (...). Aux termes de l'article L. 344-5 du même code : " Les frais d'hébergement et d'entretien des personnes handicapées accueillies, quel que soit leur âge, dans les établissements mentionnés au b du 5° et au 7° du I de l'article L. 312-1, à l'exception de celles accueillies dans les établissements relevant de l'article L. 344-1, sont à la charge : / 1° A titre principal, de l'intéressé lui-même sans toutefois que la contribution qui lui est réclamée puisse faire descendre ses ressources au-dessous d'un minimum fixé par décret et par référence à l'allocation aux handicapés adultes, différent selon qu'il travaille ou non. Ce minimum est majoré, le cas échéant, du montant des rentes viagères mentionnées à l'article 199 septies du code général des impôts ainsi que des intérêts capitalisés produits par les fonds placés sur les contrats visés au 2° du I de l'article 199 septies du même code ". Aux termes de l'article D. 344-35 du même code : " Lorsque l'établissement assure un hébergement et un entretien complet, y compris la totalité des repas, le pensionnaire doit pouvoir disposer librement chaque mois : 1° S'il ne travaille pas, de 10 % de l'ensemble de ses ressources mensuelles et, au minimum, de 30 % du montant mensuel de l'allocation aux adultes handicapés ; (...) ".

4. Si le département a bien exclu des ressources à prendre en compte les revenus d'un contrat " épargne handicap " conclu chez Generali, sur lequel était alors placée la somme de 73 035,03 euros, c'est à tort en revanche qu'il a pris en compte les revenus du contrat d'assurance vie multisupport que M. B... détient au sein de l'association française d'épargne et de retraite (AFER), sur lequel était placée la somme de 21 447,35 euros. Il résulte en effet de l'instruction, et notamment du " certificat d'admission " à ce contrat que ce contrat a la nature d'un contrat " épargne handicap " visé au 2° du I de l'article 199 septies du code général des impôts. Les seuls revenus de capitaux placés pouvant être retenus s'élèvent en conséquence aux montants annuels de 70,79 euros correspondant aux intérêts de 1,25 % des capitaux placés sur le livret d'épargne populaire de M. B... et de 1 147,58 euros correspondant à 3 % des capitaux placés sur son contrat de capitalisation " Himalia " ouvert chez Generali, soit une somme totale mensuelle de 101,53 euros au lieu des 155,15 euros retenus par le département. En conséquence, en mars 2016, à la date de la révision de l'aide, les ressources de M. B..., composées de pensions de retraite, de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et d'allocations logement, ainsi que des seuls revenus de capitaux placés pouvant être pris en compte s'élevaient au montant mensuel de 1 132,18 euros. Une fois déduits de ce montant les frais de tutelle acquittés par M. B... pour 7,11 euros, ainsi que, conformément aux dispositions du règlement départemental d'aide sociale de la Meuse, ses frais de mutuelle acquittés pour 78,36 euros et les frais d'assurance responsabilité civile pour 1,99 euros, soit un total de 87,46 euros, les ressources de M. B... s'élevaient à 1 044,72 euros, le requérant ne demandant plus, dans le dernier état de ses conclusions, la déduction de ses frais de garantie obsèques. Le reste à vivre de M. B... correspondant à 10 % de ce montant, soit 104,47 euros, étant inférieur au montant de 242,30 euros correspondant à 30 % de l'AAH, laquelle s'élevait à cette date à 807,65 euros, doit par suite être fixé à ce montant de 242,30 euros.

5. Il s'ensuit que la participation de M. B... à ses frais d'hébergement devait être fixée, à compter du 1er mars 2016, au montant de 802,42 euros. Il y a lieu, en conséquence, de réformer la décision en date du 10 août 2016 du département de la Meuse et la décision en date du 21 juin 2017 de la commission départementale d'aide sociale de la Meuse en tant qu'elles fixent cette participation à un montant supérieur à cette somme et de rejeter le surplus des conclusions de la requête.

DÉCIDE :

Article 1er : La participation mensuelle de M. B... à ses frais d'hébergement est fixée à la somme de 802,42 euros à compter du 1er mars 2016.

Article 2 : La décision en date du 10 août 2016 du département de la Meuse et la décision en date du 21 juin 2017 de la commission départementale d'aide sociale de la Meuse sont réformées en tant que le montant de la participation de M. B... est fixé à une somme supérieure à 802,42 euros.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association tutélaire de la Meuse, agissant en qualité de tuteur de M. A... B..., et au président du conseil départemental de la Meuse.

Copie en sera adressée à l'EHPAD de Montfaucon en Argonne, dans la Meuse.

Délibéré après l'audience du 12 avril 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Luben, président de la formation de jugement,

- Mme D..., magistrat honoraire,

- Mme Collet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2021.

Le président de la formation de jugement,

I. LUBEN

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 19PA00469


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00469
Date de la décision : 30/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

04-02-03-02 Aide sociale. Différentes formes d'aide sociale. Aide sociale aux personnes âgées. Placement.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Suzanne TANDONNET-TUROT
Rapporteur public ?: Mme BERNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-04-30;19pa00469 ?
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