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22/04/2021 | FRANCE | N°20PA00275

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 22 avril 2021, 20PA00275


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler le titre exécutoire n° 291971 émis le 16 octobre 2018 à son encontre par la maire de Paris et de le décharger du paiement de la somme de 7 285,08 euros au titre des droits de voirie additionnels concernant les dispositifs de chauffage de ses terrasses, mise à sa charge pour l'année 2017.

Par un jugement n° 1902873 du 22 novembre 2019 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 janvier 2020, M. C... et la société Café du métro, représe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler le titre exécutoire n° 291971 émis le 16 octobre 2018 à son encontre par la maire de Paris et de le décharger du paiement de la somme de 7 285,08 euros au titre des droits de voirie additionnels concernant les dispositifs de chauffage de ses terrasses, mise à sa charge pour l'année 2017.

Par un jugement n° 1902873 du 22 novembre 2019 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 janvier 2020, M. C... et la société Café du métro, représentés par Me Meilhac, demandent à la Cour :

1°) avant dire-droit, d'enjoindre à la Ville de Paris de produire " les lourdes études préalables " dont la direction de l'urbanisme a fait état dans sa réponse au projet de rapport d'audit de l'inspection générale ayant donné lieu au rapport définitif d'avril 2016 ;

2°) d'annuler le jugement du 22 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté la requête de M. C... ;

3°) d'annuler le titre exécutoire n° 291971 émis le 16 octobre 2018 à l'encontre de la société Café du métro par la maire de Paris et de décharger cette dernière de la somme de 7 285,08 euros mise à sa charge au titre des droits de voirie additionnels pour l'année 2017 en ce qui concerne les dispositifs de chauffage ;

4°) à titre subsidiaire, de la décharger de la somme de 3 700,23 euros compte tenu de l'erreur commise dans la mesure de la surface des terrasses ouvertes au titre des droits ordinaires d'occupation du domaine public qu'elle supporte ;

5°) de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 2 000 euros au bénéfice de la société Café du métro au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- le titre exécutoire contesté n'indique pas de manière suffisamment précise les bases de liquidation ;

- la Ville de Paris ne justifie pas de la signature du titre de recettes conformément aux dispositions du 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ;

- l'arrêté du 13 janvier 2017 fixant les tarifs de perception des droits de voirie, sur lequel le titre exécutoire s'est fondé, est entaché d'illégalité en ce qu'il méconnaît l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques ; la Ville de Paris, à laquelle la preuve incombe, ne justifie pas des avantages pris en compte pour le calcul de la redevance et de la proportionnalité de son montant par rapport à ces avantages, et pour les différents droits supplémentaires, ne justifie pas pourquoi ils sont déterminés par rapport à la surface de la terrasse, ni de leur niveau par rapport à celui des droits ordinaires ; le jugement attaqué ne pouvait se fonder sur le seul chiffre d'affaires pour apprécier le caractère excessif des tarifs additionnels alors que d'autres critères d'appréciation ont été dégagés par la jurisprudence, dont la valeur locative du local ; les tarifs des droits de voirie supplémentaires de la Ville de Paris ne se fondent pas sur le chiffre d'affaires dégagé par l'installation de dispositifs, qui est incalculable, mais sur la valeur locative, pour laquelle la ville n'apporte pas d'éléments précis, et, plus encore, sur une logique dissuasive poursuivant un objectif environnemental ;

- l'appréciation des droits supplémentaires, de façon forfaitaire, annuelle et par rapport à la surface de la terrasse et non au nombre des équipements, est entachée d'une erreur de droit et induit des tarifs qui sont manifestement excessifs ;

- les tarifs additionnels sont disproportionnés par rapport à ceux des droits ordinaires, ce qui souligne leur caractère excessif ; les tarifs supplémentaires de sa terrasse sont disproportionnés par rapport à la valeur locative de son local intérieur ; la fixation de ces tarifs est donc entachée d'erreur manifeste d'appréciation et présente un caractère discriminatoire ;

- le titre exécutoire est entaché d'erreur de fait, la Ville de Paris n'apportant pas la preuve de l'existence de dispositifs de chauffage avant l'émission de ce titre et les mesures des surfaces des terrasses prises en compte étant erronées. En l'absence de justification par la Ville de Paris de la surface se trouvant dans le tiers du trottoir, ils demandent de recalculer les droits ordinaires sur la base d'une surface de terrasses ouvertes hors du tiers du trottoir de 19 m2 et par conséquent de les décharger de la somme de 3 700,23 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2021, la Ville de Paris, représentée par Me Falala, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des appelants une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, par lettre du 19 mars 2021, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à la décharge des droits de voirie ordinaires supportés par les terrasses, qui sont nouvelles en appel, seuls les droits additionnels ayant été contestés en première instance.

Par un mémoire complémentaire enregistré le 21 mars 2021, la société Café du métro, représentée par Me Meilhac, conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens et soutient en outre que :

- la Ville de Paris ne produit pas les études préalables de sa direction de l'urbanisme ;

- l'arrêté du 13 janvier 2017 fixant les tarifs de perception des droits de voirie, sur lequel le titre exécutoire s'est fondé, est entaché d'illégalité en ce qu'il est rétroactif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- la délibération 2011 DU 54 des 28, 29 et 30 mars 2011 du Conseil de Paris portant réforme des droits de voirie ;

- l'arrêté du maire de Paris du 6 mai 2011 portant règlement des étalages et terrasses applicable, à compter du 1er juin 2011, sur l'ensemble du territoire de la Ville de Paris ;

- l'arrêté de la maire de Paris du 13 janvier 2017 fixant les tarifs applicables aux droits de voirie à compter du 1er janvier 2017 ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Renaudin,

- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public,

- les observations de Me Gorse pour la Ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que la société Café du métro est propriétaire d'un fonds de commerce de café-restaurant situé 18 place Maubert dans le 5ème arrondissement de Paris, dont l'exploitation est réalisée en location-gérance par M. C.... La société Café du métro bénéficie d'une autorisation d'occupation du domaine public pour cinq terrasses, dont deux ouvertes et les autres fermées, d'une surface totale de 71 m², réparties autour de l'établissement place Maubert et à l'angle du 60 boulevard Saint-Germain. La maire de Paris a émis le 16 octobre 2018 un titre exécutoire mettant à la charge de la société Café du métro les droits de voiries pour ces terrasses au titre de l'année 2017, pour un montant de 36 581,57 euros. M. C... a contesté devant le tribunal administratif de Paris ce titre exécutoire, et demandé à être déchargé du paiement de la somme de 7 285,08 euros correspondant aux droits de voirie additionnels au titre des dispositifs de chauffage de la terrasse ouverte hors tiers du trottoir de 12 m² devant le pan coupé entre la place Maubert et le 60 boulevard Saint-Germain. Par un jugement du 22 novembre 2019, ce tribunal a rejeté sa demande. M. C... et la société Café du métro font appel de ce jugement.

Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des demandes de M. C... et de la société Café du métro :

Sur les conclusions tendant à la décharge d'une somme de 3 700,23 euros correspondant à des droits ordinaires d'occupation du domaine public :

2. M. C... a saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant, à l'annulation du titre exécutoire litigieux en tant seulement qu'il mettait à la charge de la société Café du métro, des droits de voirie additionnels d'un montant de 7 285,08 euros, et à la décharge de l'obligation de payer cette somme. En appel, M. C... et la société Café du métro font valoir que la surface de la terrasse retenue pour le calcul des droits ordinaires d'installation sur le domaine public est erronée et demandent en conséquence à être déchargés de la somme de 3 700,23 euros mise à la charge de la société Café du métro à ce titre, qui correspondrait à cette erreur. Toutefois, dès lors que M. C... n'a demandé en première instance qu'une annulation partielle du titre exécutoire se limitant au montant des droits additionnels, ces conclusions sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables.

Sur la régularité du jugement :

3. L'article L. 9 du code de justice administrative dispose que : " Les jugements sont motivés ".

4. Les premiers juges ont considéré, au point 5 de leur jugement, que les gains attendus de l'exploitation des terrasses étaient liés à leur surface, et qu'il était constant qu'une terrasse chauffée est plus rentable qu'une terrasse ne disposant pas de tels dispositifs. Ils ont mentionné que, le requérant, qui se bornait à indiquer que les droits de voirie au titre des chauffages étaient cinq fois supérieurs à ceux dus au titre de l'occupation du domaine public, ne justifiait pas de son chiffre d'affaires et de la rentabilité des dispositifs de chauffage en cause, et n'apportait, dans ces conditions, aucun élément de nature à démontrer que la redevance mise à sa charge au titre des chauffages installés sur les terrasses n'aurait pas été fixée au regard des avantages de toute nature que lui procure leur exploitation ou qu'elle serait discriminatoire. Ils ont ainsi suffisamment répondu aux arguments soulevés à l'appui du moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques, la question de la charge de la preuve ne constituant notamment pas un moyen autonome devant le juge du fond. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués, et notamment à celui de la comparaison entre les droits de voirie mis à la charge de la société Café du métro et son loyer commercial, ont donc suffisamment motivé leur jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité externe du titre de recette contesté :

S'agissant de sa signature :

5. Aux termes du 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " Quelle que soit sa forme, une ampliation du titre de recettes individuel ou de l'extrait du titre de recettes collectif est adressé aux redevables (...) / En application de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration, le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis ainsi que les voies et délais de recours. / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation. ". Il résulte de ces dispositions, d'une part, que l'ampliation du titre de recettes individuel adressée au redevable doit mentionner les noms, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis et, d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative de justifier en cas de contestation que le bordereau de titre de recettes comporte la signature de l'émetteur.

6. Il résulte de l'instruction, que l'avis des sommes à payer adressé à la société requérante mentionne que le titre n° 291971 rendu exécutoire le 16 octobre 2018 est émis, par délégation, par Mme D... B..., chef du service de l'expertise comptable. La Ville de Paris a produit un document du 15 mars 2019 émanant de sa société prestataire Docapost Fast, attestant que le bordereau dématérialisé de ce titre de recettes, comporte la signature électronique de Mme B.... En vertu des dispositions précitées du 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, la Ville de Paris n'avait pas à produire, contrairement à ce que soutient la société requérante, le titre de recette lui-même, le bordereau de ce titre suffisant à justifier de la signature de la personne l'ayant émis. Au surplus, la société requérante n'avait pas à être destinataire du titre de recette, seule une ampliation de ce dernier étant adressée au redevable en vertu des mêmes dispositions. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales doit donc être écarté.

S'agissant de sa motivation :

7. Aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " Dans les conditions prévues pour chaque catégorie d'entre elles, les recettes sont liquidées avant d'être recouvrées. La liquidation a pour objet de déterminer le montant de la dette des redevables. (...) Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de liquidation. ". Ainsi, tout état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur.

8. En l'espèce, l'avis des sommes à payer, valant ampliation de titre de recette, comporte un tableau récapitulatif qui vise l'article L. 2213-6 du code général des collectivités territoriales et l'arrêté municipal du 13 janvier 2017, précise l'adresse des terrasses considérées ainsi que la catégorie des rues dans lesquelles elles se situent et calcule, par référence aux différentes rubriques de l'arrêté municipal du 13 janvier 2017 fixant les droits de voirie, chacun des droits à percevoir pour la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2017, en détaillant le prix au mètre carré et le nombre de mètres carrés pour lesquels le droit est dû, en distinguant les différentes installations taxées et leur situation sur la voie publique. Ces droits sont clairement identifiés et comprennent en l'espèce, en ce qui concerne les chauffages, une somme de 7 285,08 euros pour la terrasse ouverte hors tiers du trottoir située 60 boulevard Saint-Germain, d'une surface de 12 m². Cet avis permet ainsi au redevable de connaitre précisément le mode d'établissement des redevances mises à sa charge. Les appelants étaient, en outre, mis à même de contester une éventuelle erreur dans la mesure de la superficie de leurs terrasses et plus précisément de leurs parties situées dans le tiers et hors du tiers du trottoir, sur laquelle les droits de voirie s'appuient, sans que le titre ait, dès lors, à mentionner la largeur du trottoir. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de mention des bases de liquidation dans le titre de recette contesté doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne du titre de recette contesté :

S'agissant de la légalité des tarifs appliqués :

9. L'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques dispose : " Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 donne lieu au paiement d'une redevance (...) ". Aux termes de l'article L. 2125-3 du même code : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation ".

10. Les appelants excipent de l'illégalité de l'arrêté du 13 janvier 2017, au regard des dispositions précitées de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques à l'appui de ses conclusions dirigées contre le titre exécutoire contesté.

11. Par délibération 2011 DU 54 des 28, 29 et 30 mars 2011 portant réforme des droits de voirie, le Conseil de Paris, siégeant en formation de conseil municipal, a pris acte de nouveaux modes d'occupation du domaine public et notamment de l'installation sur les terrasses exploitées commercialement de divers équipements, tels que la protection des terrasses ouvertes par des écrans parallèles, les modes de chauffage ou de climatisation, destinés à atténuer les aléas climatiques, qui prolongent et facilitent ainsi l'usage privé du domaine public. Il a décidé de soumettre ces installations à des droits de voirie additionnels, fixés selon la catégorie de la voie et calculés de façon annuelle et forfaitaire proportionnellement à la surface de la terrasse exploitée. L'annexe de l'arrêté du 13 janvier 2017 du maire de Paris fixant les tarifs applicables aux droits de voirie à compter du 1er janvier 2017 prévoit ainsi, s'agissant des " prescriptions applicables aux étalages et terrasses ", au sujet des " droits annuels ", que : " Selon les cas, un droit de voirie additionnel, s'ajoutant à celui prévu pour diverses emprises (étalage, terrasse ouverte, terrasse fermée, prolongement intermittent de terrasse ou d'étalage, contre-étalage ou contre-terrasse, contre-terrasse sur chaussée) est perçu pour : (...) / - l'installation de tout mode de chauffage (...) sur tout type de terrasse ouverte (bâchée ou non, dotée ou non de tout type de protection, notamment sous forme d'écrans parallèles). / Ces droits de voirie additionnels sont appréciés annuellement, de façon forfaitaire et indivisible. Ils s'appliquent quelles que soient les dates de pose ou dépose de ces dispositifs et leur temps de présence effectif au cours de l'exercice considéré. Il n'est procédé à aucun abattement mensuel ou calcul au " prorata temporis " lors de la première année d'installation ou dans les cas de cessation d'activité ou de démontage (...) / Le cas échéant, les droits de voirie additionnels précités se cumulent en fonction de la présence de différentes installations sur un même emplacement. / Les étalages et terrasses sont taxés au mètre carré et pour l'exercice en cours. Toutefois, les installations situées hors du tiers du trottoir (...), peuvent être taxées au prorata temporis mensuel en cas de démontage régulier, à l'exclusion des installations suivantes :- tout type de protections, notamment sous forme d'écrans parallèles, sur tout type de terrasse ouverte (dotée ou non d'un moyen de chauffage ou de climatisation) ; / - tout mode de chauffage ou de climatisation dans tout type de terrasse ouverte (bâchée ou non, dotée ou non de tout type de protection, notamment sous forme d'écrans parallèles) ". S'agissant de l'installation de tout mode de chauffage ou de climatisation dans tout type de terrasse ouverte, cet arrêté précise que " le droit de voirie additionnel s'apprécie exclusivement sur la totalité de la surface occupée par la terrasse de tout type et non en fonction des surfaces des dispositifs à usage de chauffage ou de climatisation. ".

12. En premier lieu, les appelants, tout en admettant que les dispositifs de chauffage d'une terrasse sont de nature à en améliorer l'attractivité, soutiennent que la Ville de Paris n'a pas indiqué comment elle avait fixé le montant des droits additionnels réclamés et qu'il n'est pas possible de déterminer comptablement le gain spécifique procuré par chacune des installations. Toutefois, en l'absence précisément d'individualisation comptable permettant de soumettre l'occupation du domaine public à une redevance proportionnelle au chiffre d'affaires ou au bénéfice généré par chaque installation, la Ville de Paris pouvait légalement fixer un tarif au mètre carré, variable en fonction de la nature du dispositif et de son association ou non avec d'autres dispositifs, ainsi que de l'attractivité de la voie publique sur laquelle il est installé déterminée selon un classement par catégories effectué par la Ville de Paris, et du positionnement de la terrasse hors tiers ou dans le tiers du trottoir, critères qui ne sont pas étrangers aux " avantages de toute nature " procurés à l'occupant privatif du domaine public par chaque installation, une installation hors du premier tiers du trottoir, dans un espace normalement réservé à la circulation des piétons, constituant une autorisation encore plus dérogatoire de l'usage de l'espace public, bénéficiant à l'exploitant, et ayant, par sa dimension et sa fréquentation, un effet d'appel pour les clients.

13. En deuxième lieu, s'il est soutenu que la Ville de Paris aurait fixé un tarif élevé pour les chauffages afin de dissuader, pour des motifs écologiques, les exploitants d'en installer, cette motivation ne résulte pas de l'instruction ni des textes fixant les tarifs, et notamment de la délibération 2011 DU 54. Le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut en tout état de cause qu'être écarté.

14. En troisième lieu, la circonstance que les droits additionnels taxant les dispositifs de chauffage, soient nettement supérieurs aux droits ordinaires dus pour l'emprise d'une terrasse ouverte, ne démontre pas une erreur de droit dans la fixation de ceux-ci. Les requérants reconnaissent en effet eux-mêmes que l'installation de ces dispositifs permet une exploitation supplémentaire de la terrasse, qui, selon eux, porte sur six mois de l'année, soit d'octobre à mars et qui est susceptible de doubler le chiffre d'affaires. La Ville de Paris fait valoir, quant à elle, que l'occupation d'une terrasse est encore plus longue en présence de ces dispositifs, les droits supplémentaires sur les chauffages étant couplés à ceux de la climatisation, laquelle permet une occupation plus importante en été et les chauffages pouvant également être utilisés à certaines périodes ou plages horaires du printemps ou de l'été, de sorte que ces dispositifs optimisent la fréquentation de la terrasse tout au long de l'année. Elle s'appuie également sur le constat de la généralisation des dispositifs de chauffages sur les dernières années, et d'une fréquentation accrue de ces terrasses, pour démontrer que celles-ci sont plus attractives pour la clientèle et procurent donc des avantages aux exploitants. Dans ces conditions, la fixation de droits supplémentaires supérieurs à ceux appliqués à la terrasse elle-même, dont la Ville de Paris justifie qu'elle tient compte d'avantages notoires, n'est pas entachée d'erreur de droit. Dès lors qu'il n'est pas contesté par les appelants que ces dispositifs leur procurent des avantages supplémentaires dans l'exploitation de la terrasse, et en l'absence de production par ceux-ci d'éléments, notamment comptables, permettant d'apprécier la rentabilité de la terrasse chauffée, le montant des droits additionnels supportés par la société requérante n'apparaît manifestement pas disproportionné par rapport à ces avantages.

15. En quatrième lieu, les appelants contestent le caractère forfaitaire, annuel et " en fonction de la surface de la terrasse et non des dispositifs " des droits additionnels, prévus à l'annexe à l'arrêté du 13 janvier 2017. La Ville de Paris fait valoir que l'installation de dispositifs de chauffage, couplés à ceux de climatisation autorise l'exploitation de la terrasse tout au long de l'année et de la journée, et que leur utilisation, compte tenu, en outre, de leur caractère amovible, est ajustée en fonction des besoins liés aux conditions climatiques, un décompte par dispositif étant inadéquat. Les installations en cause procurent donc un avantage spécifique à la terrasse dans son ensemble, la circonstance que les droits de voirie additionnels soient appréciés par rapport à la surface occupée par la terrasse, de façon forfaitaire et annuelle est légalement justifiée et n'entache pas les tarifs fixés d'erreur manifeste d'appréciation.

16. En cinquième lieu, les appelants font valoir que la somme globale qu'ils acquittent pour leur terrasse chauffée, au titre des droits ordinaires et additionnels excède, proportionnellement à sa surface, le loyer qu'ils acquittent pour leur local commercial, qu'ils évaluent à 383 euros par m². Il ressort des pièces du dossier qu'une somme totale de 36 581 euros a été mise à la charge de la société appelante pour les droits d'occupation et additionnels concernant l'ensemble de ses terrasses d'une surface totale de 71 m², soit un rapport de 515 euros par m². Toutefois, les appelants en se bornant à se référer au loyer global qui porte sur 241 m² de locaux à la disposition de l'exploitation, dont notamment deux sous-sols et une boutique, ne permet pas de comparer la part du loyer supportée par les salles de restaurants, aux droits d'occupation du domaine public supportés par la terrasse. En tout état de cause, la circonstance invoquée d'une supériorité des tarifs de la terrasse par rapport à la valeur locative de son local, ne serait pas de nature à démontrer que la somme demandée pour l'occupation privative du domaine public excèderait les avantages qui lui sont ainsi attribués, dès lors que le domaine public, n'est pas en principe destiné à une occupation commerciale, particulièrement hors du tiers du trottoir. La Ville de Paris fait également valoir que les terrasses chauffées reçoivent généralement plus de clients que les salles intérieures, et génèrent au-delà de la moitié du chiffre d'affaires total. Ces éléments justifient objectivement et sans discrimination une différenciation des tarifs par rapport aux terrasses ne bénéficiant pas de ces installations.

17. Enfin, la société Café du Métro soutient que l'arrêté du 13 janvier 2017, publié le 27 janvier suivant, qui fixe les tarifs pour l'année 2017, est entaché d'illégalité en raison de son caractère rétroactif. Il ressort cependant des visas et motifs de cet arrêté qu'il fait suite à un arrêté municipal pris le 20 décembre 2016 portant fixation des tarifs applicables aux droits de voirie pour 2017, qui appréciait ces tarifs, de manière erronée, sur la base d'une augmentation de 2 %, alors qu'il convenait de prendre en compte une augmentation de 1 %, et qui a donc fait l'objet d'un retrait par l'article 1er de l'arrêté du 13 janvier 2017, celui-ci relevant à son article 2 les tarifs applicables en 2016 de 1 % pour l'année 2017, et appliquant par son article 3, cette hausse à chaque catégorie d'objets ou d'installations, dans les voies publiques de la Ville de Paris, à compter de sa date d'effet. Il ressort, en outre, de l'annexe de cet arrêté relative aux tarifs de perception des droits de voirie, dans sa note commune, que les droits de voirie additionnels sont appréciés annuellement, de façon forfaitaire et indivisible, et sont donc calculés pour l'année échue. Dans ces conditions, l'arrêté du 13 janvier 2017 ne peut être regardé comme entaché d'une rétroactivité illégale.

18. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de procéder aux mesures d'instruction demandées, que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que le maire de Paris aurait méconnu les dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques en faisant application des tarifs adoptés par la délibération 2011 DU 54 du 28, 29 et 30 mars 2011 et fixés pour l'année 2017 par l'arrêté du 13 janvier 2017.

S'agissant de la matérialité des faits :

19. Les appelants se bornent à soutenir que la charge de la preuve de l'existence de dispositifs de chauffage sur les terrasses appartient à la Ville de Paris. Dès lors qu'ils n'apportent eux-mêmes en l'espèce aucun élément nature à démontrer l'absence de ces dispositifs, et que la Ville de Paris a produit au dossier des photographies des mois d'avril, mai et octobre 2017 issues du site google street view attestant de la présence de ces dispositifs sur la période sur laquelle porte le titre exécutoire, ce moyen ne peut qu'être écarté.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... et la société Café du métro ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande présentée par M. C....

Sur les frais liés à l'instance :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Ville de Paris, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. C... et la société Café du métro demandent au titre des frais qu'ils ont exposés. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de M. C... et la société Café du métro une somme de 1 500 euros à verser à la Ville de Paris.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... et la société Café du métro est rejetée.

Article 2 : M. C... et la société Café du métro verseront à la Ville de Paris une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à la société Café du métro et à la Ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Renaudin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 avril 2021.

Le président,

J. LAPOUZADE

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA00275 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00275
Date de la décision : 22/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

24-01-02-01-01-04 Domaine. - Domaine public. - Régime. - Occupation. - Utilisations privatives du domaine. - Redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Mathilde RENAUDIN
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : MEILHAC

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-04-22;20pa00275 ?
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