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19/01/2021 | FRANCE | N°20PA01247

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 19 janvier 2021, 20PA01247


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts H... ont demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler le permis de construire accordé le 24 juin 2019 par le ministre du logement et de l'aménagement du territoire de la Polynésie française à Mme B... A... pour des travaux de construction d'une maison d'habitation à Mahina.

Par un jugement n° 1900239 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enre

gistrée le 28 avril 2020, M. C... H..., Mme I... H... et Mme G... H..., représentés par Me D......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts H... ont demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler le permis de construire accordé le 24 juin 2019 par le ministre du logement et de l'aménagement du territoire de la Polynésie française à Mme B... A... pour des travaux de construction d'une maison d'habitation à Mahina.

Par un jugement n° 1900239 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 28 avril 2020, M. C... H..., Mme I... H... et Mme G... H..., représentés par Me D..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Polynésie française du

28 janvier 2020 ;

2°) d'annuler le permis de travaux immobiliers n° 19-518-3 /MLA.AU accordé le

24 juin 2019 à Mme B... A... ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... A... la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- Mme B... A..., qui n'a pas la qualité d'héritière, n'a pas de droits de propriété sur la parcelle ;

- le permis de construire a été obtenu par fraude ;

- la règle de prospect fixée par l'article LP 362-1 du code de l'aménagement a été méconnue ;

- les plans sont trompeurs, la maison existante de M. H... qui a été détruite en toute illégalité n'y figurant pas, et l'article A 114-10 du code de l'aménagement a donc été méconnu ;

- Mme B... A... n'a jamais obtenu les autorisations de droit privé des autres indivisaires exigées par l'article LP. 114-6.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 décembre 2020, la Polynésie française, représentée par la SELARL Piriou Quinquis Bambridge Babin, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge des consorts H... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Mme B... A..., à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire.

La clôture de l'instruction est intervenue le 17 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- le code de l'aménagement de la Polynésie française ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bernier, rapporteur,

- les conclusions de Mme Péna, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant les consorts H....

Considérant ce qui suit :

1. Les consorts H..., qui entretiennent avec Mme B... A... un contentieux sur la propriété d'une parcelle sise sur la commune de Mahina, issue de l'héritage de Mme E... J..., décédée en 2012, et demeurée en indivision, ont demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler le permis de construire accordé le 24 juin 2019 par le ministre du logement et de l'aménagement du territoire de la Polynésie française à Mme B... A... pour des travaux de construction d'une maison d'habitation sur ce terrain. Ils relèvent appel du jugement du 28 janvier 2019 par lequel le tribunal a rejeté leur demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article A. 114-8 du code de l'aménagement de la Polynésie française : " 1.- La demande d'autorisation de travaux immobiliers est établie conformément à un modèle type. / Elle est présentée : soit par le propriétaire ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs

co-indivisaires ou leur mandataire ; (...) ". Aux termes de l'article A. 114-9 du même code, la demande de permis de construire comporte " l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article A.114-8 pour déposer une demande de permis ".

3. Il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article A 114-9 cité ci-dessus. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article A. 114-9 du code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande. Les tiers ne sauraient utilement invoquer, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l'attestation requise, la circonstance que l'administration n'en aurait pas vérifié l'exactitude.

4. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article A. 114-8 du code de l'aménagement, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif. Il en est notamment ainsi lorsque l'autorité saisie de la demande de permis de construire est informée de ce que le juge judiciaire a remis en cause le droit de propriété sur le fondement duquel le pétitionnaire avait présenté sa demande.

5. Il ressort des pièces versées au dossier que Mme B... A... a signé l'attestation requise par les dispositions de l'article A. 114-9 précité du code de l'aménagement de la Polynésie française, dont aucun élément ne laissait apparaître, à la date de délivrance du permis de construire litigieux, un caractère frauduleux. Par ailleurs, il ressort de l'acte de notoriété dressé par le notaire chargé de la succession de Mme E... L... J... que Mme K... B... A... figure dans cet acte en qualité d'indivisaire de la parcelle sur laquelle a été autorisée la construction. A la date de la décision, l'autorité administrative n'était pas informée d'une décision judiciaire qui aurait remis en cause les droits dont se prévalait la pétitionnaire, le tribunal foncier de Papeete n'ayant été au demeurant saisi d'une requête tenant à la liquidation partage de la succession que le 7 mai 2019. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article

A. 114-8 du code de l'aménagement de la Polynésie française et celui tiré de la fraude doivent dès lors être écartés. Le moyen tiré de la violation de l'article 1003 du code civil relatif au legs universel ne saurait être utilement soulevé à l'encontre de la décision d'accorder le permis de construire.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article A.114-10 du code de l'aménagement de la Polynésie française : " Le projet architectural comprend : I/ Au titre des documents planimétriques a) Un plan de masse coté établi à une échelle comprise entre 1/200e et 1/500e comportant : (...) l'implantation des bâtiments existants à maintenir ou à démolir, précisant le cas échéant la position des ouvrages d'assainissement existants ; les distances d'implantation des constructions projetées (assainissement y compris) par rapport aux limites du terrain et aux autres constructions existantes sur le terrain ; l'emplacement et la nature des clôtures existantes ou projetées ; (...) ".

7. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

8. Si les requérants font valoir qu'une maison d'habitation qui existait sur la parcelle ne figure pas sur les documents graphiques il ressort des pièces du dossier que cette construction avait été détruite avant le 24 avril 2019 alors que la pétionnaire a déposé sa demande de permis de construire le 29 avril 2019. Les documents n'avaient pas dès lors à faire état d'une construction qui n'existait plus. La circonstance que cette démolition aurait été irrégulière et qu'elle aurait porté atteinte au droit de propriété des requérants n'est pas de nature à être utilement invoquée à l'appui du moyen tiré de la méconnaissance de l'article A.114-10. Par ailleurs, les distances d'implantation de la construction projetée par rapport aux limites du terrain peuvent être déterminées au regard des mentions du plan de masse produit. Enfin, le plan de masse fait état de la présence d'un mur en parpaings existant et il n'est pas allégué que d'autres clôtures seraient existantes ou projetées. Les requérants ne sont ainsi pas fondés à soutenir que le dossier de demande de permis de construire aurait été insuffisant.

9. En troisième lieu aux termes de l'article LP 361-2 du code de l'aménagement : " Les dispositions du présent titre (relatif aux implantations des constructions et aux prospects) ne sont applicables que dans les zones où les plans d'aménagement n'imposent pas des règles particulières ou différentes à l'implantation des constructions ". S'applique dans la commune de Mahina un plan général d'aménagement rendu exécutoire par l'arrêté n° 933 du 4 juillet 2007, publié au Journal Officiel du 31 aout 2007. Les requérants ne sauraient dès lors utilement se prévaloir de la méconnaissance de l'article LP. 361-3 du code de l'aménagement. Au demeurant, et pour le surplus, il ressort des pièces du dossier et notamment des documents graphiques, que les exigences en la matière de l'article UB7 du plan général d'aménagement de la commune de Mahina qui prévoient que " les constructions doivent s'implanter à une distance au moins égale à 4 mètres de la limite séparative " ont été en l'espèce respectées.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article LP 114-6 du code de l'aménagement de la Polynésie française : " (...) §.3.- L'autorité compétente en matière d'urbanisme vérifie, avant d'accorder une autorisation de travaux immobiliers, la conformité du projet avec les dispositions réglementaires mentionnées au §.2.- du présent article. Il appartient au bénéficiaire de ladite autorisation, avant tout commencement de travaux, d'obtenir les autorisations nécessaires sur le fondement du droit privé, comme notamment l'accord des autres indivisaires, la convention de passage sur une voie de desserte, autorisation de passage des canalisations (...). " Les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de la méconnaissance de cet article, lequel concerne le commencement des travaux et non la délivrance du permis de construire.

11. Enfin, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir, à l'appui de la présente requête, de ce que le permis de construire litigieux porterait atteinte à leur droit de propriété sur la maison précédemment édifiée sur le terrain, ou sur le terrain lui-même.

12. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts H... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande.

13. Leur requête ayant été rejetée, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions que les consorts H... présentent sur ce fondement. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge des consorts H... la somme de 1 500 euros à verser à la Polynésie française au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... H..., Mme I... H... et Mme G... H... est rejetée.

Article 2 : Les consorts H... verseront à la Polynésie Française la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... H..., Mme I... H... et Mme G... H..., à la Polynésie française et à Mme K... B... A....

Copie en sera adressée pour information au Haut-Commissaire de la République en Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 5 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

- M. F..., premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme Jayer, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 janvier 2021.

Le rapporteur,

Ch. BERNIERLe président,

M. F...

Le greffier,

A. DUCHER

La République mande et ordonne au ministre des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 20PA01247


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01247
Date de la décision : 19/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

38-03 Logement. Aides financières au logement.


Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : SEP USANG CERAN-JERUSALEMY

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-01-19;20pa01247 ?
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