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29/12/2020 | FRANCE | N°20PA01631

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 29 décembre 2020, 20PA01631


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2019 par lequel la préfète de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1903674 du 15 octobre 2019, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 3 juillet 2020, M. A..., représent

é par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 janv...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2019 par lequel la préfète de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1903674 du 15 octobre 2019, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 3 juillet 2020, M. A..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2019 en tant que la préfète de Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le délai de départ volontaire à trente jours ;

3°) d'enjoindre à la préfète de Seine-et-Marne de procéder au réexamen de sa demande et de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen complet de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours :

- elle est entachée d'un défaut de motivation, notamment au regard du caractère approprié du délai de trente jours ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que la préfète de Seine-et-Marne s'est crue liée par l'octroi d'un délai de départ volontaire de trente jours ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que le délai de trente jours est insuffisant au regard de sa situation personnelle ;

- il n'a pas été informé de la possibilité de solliciter un délai supplémentaire, notamment dans l'hypothèse, avérée en l'espèce, d'une décision de refus de titre de séjour ;

- il appartenait à la préfète de Seine-et-Marne, en vertu de l'article 16 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, d'allonger le délai de départ volontaire de sa propre initiative, alors même qu'il n'a pas sollicité un tel allongement de délai ;

- la décision est entachée d'un défaut d'examen complet de sa situation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 septembre 2020, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 4 mars 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1404 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien, né le 26 juin 1979 à Attecoube (Côte d'Ivoire), entré en France le 5 mai 2016, a sollicité, par courrier du 29 novembre 2017, la régularisation de sa situation au regard de sa vie familiale. Par un arrêté en date du 22 janvier 2019, la préfète de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 15 octobre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, M. A... n'a formulé dans sa requête introductive d'instance aucune conclusion dirigée contre la décision par laquelle la préfète de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire ne peut qu'être écarté.

3. En second lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ". Aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Il ressort de l'examen de l'arrêté attaqué que la décision de refus de titre de séjour vise notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, mentionne que M. A... s'est maintenu en situation irrégulière depuis son entrée en France le 5 mai 2016, s'est marié le 16 septembre 2017 à Souppes-sur-Loing (Seine-et-Marne) avec une compatriote détentrice d'une carte de résident et précise les raisons pour lesquelles l'admission au séjour de l'intéressé, tant sur le fondement des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueillie, non plus d'ailleurs que sur tout autre fondement de ce code. La décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.

4. D'autre part, il résulte des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'obligation faite à un étranger de quitter le territoire français n'a pas à comporter une motivation spécifique, distincte de celle du refus de titre de séjour qu'elle accompagne. L'obligation faite à M. A... de quitter le territoire français, qui fait suite à la décision de refus de titre de séjour, laquelle est suffisamment motivée ainsi qu'il a été dit au point 3, fait référence aux dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est donc suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

5. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment de l'arrêté attaqué, que la préfète de Seine-et-Marne n'aurait pas examiné de manière complète la situation personnelle de M. A..., notamment en considération de sa vie privée et familiale. Il s'ensuit que le moyen tiré d'un défaut d'examen de sa situation personnelle doit être écarté.

6. Enfin, M. A... fait valoir qu'il réside de manière continue en France depuis cinq ans et qu'il est marié depuis septembre 2017 avec Mme D..., titulaire d'une carte de résident, avec laquelle il a eu un enfant né le 28 avril 2019 à Amilly (Loiret). Il ressort toutefois des pièces du dossier que, d'une part, M. A... ne résidait en France que depuis moins de trois ans à la date de la décision attaquée et, d'autre part, qu'il n'était marié à cette même date avec Mme D... que depuis seize mois, alors qu'il n'établit ni même n'allègue par ailleurs être privé d'attaches familiales en Côte d'Ivoire où il a vécu jusqu'au moins l'âge de trente-sept ans. La naissance de l'enfant du couple, postérieure à la décision attaquée, est en outre sans incidence sur sa légalité. Enfin, le requérant n'établit ni même n'allègue aucune insertion particulière à la société française. Dans ces conditions, et à supposer même établie sa résidence continue en France depuis 2016, la décision attaquée ne saurait être entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de M. A....

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

7. Aux termes des dispositions de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ont été transposées en droit interne au II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui dispose : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...). Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) ". Et aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. _ L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Le délai de départ volontaire accordé à l'étranger peut faire l'objet d'une prolongation par l'autorité administrative pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation. (...) ".

8. En premier lieu, dès lors que le délai de trente jours accordé à un étranger pour exécuter une obligation de quitter le territoire français constitue un délai équivalent au délai de droit commun le plus long susceptible d'être accordé en application de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, l'absence de prolongation de ce délai n'a pas à faire l'objet d'une motivation spécifique, distincte de celle du principe même de ladite obligation, à moins que l'étranger ait expressément demandé le bénéfice d'une telle prolongation ou justifie d'éléments suffisamment précis sur sa situation personnelle susceptibles de rendre nécessaire, au sens desdites dispositions de l'article 7, une telle prolongation. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... ait demandé à la préfète à bénéficier d'une prolongation dudit délai. Par suite, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que la décision de la préfète lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours n'est pas suffisamment motivée.

9. En second lieu, il ne ressort ni des termes de la décision contestée, ni d'aucune autre pièce du dossier, que la préfète de Seine-et-Marne, qui a recherché s'il y avait lieu d'accorder à M. A..., à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, n'ait pas exercé son pouvoir d'appréciation et se soit estimé lié par le délai de trente jours fixé au II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut être qu'écarté.

10. En troisième lieu, M. A... soutient que la préfète de Seine-et-Marne n'a pas tenu compte des éléments relatifs à sa situation personnelle et familiale pour fixer le délai de départ volontaire. Toutefois, compte tenu de ce qui a été dit au point 6, il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation personnelle de M. A... aurait nécessité un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. En outre, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au préfet d'informer l'intéressé de la possibilité de solliciter un délai de départ volontaire supplémentaire. Par suite, le moyen tiré de ce que la préfète de Seine-et-Marne aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en fixant à trente jours le délai de départ volontaire doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera délivrée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme B..., président de chambre,

- M. C..., président assesseur,

- Mme Portes, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 décembre 2020.

Le rapporteur,

P. C...Le président,

M. B...Le greffier,

A. BENZERGUALa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA01631 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01631
Date de la décision : 29/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : GOURVEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-12-29;20pa01631 ?
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