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08/10/2020 | FRANCE | N°18PA00107

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 08 octobre 2020, 18PA00107


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Wallis-et-Futuna d'annuler l'arrêté du 28 avril 2017 par lequel le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social l'a maintenu à disposition du ministère des Outre-mer pour exercer les fonctions de chef du service de l'inspection du travail et des affaires sociales à Wallis-et-Futuna, en tant que cet arrêté prévoit une période de seulement trois mois à compter du 1er mai 2017.

II. M. C... B... a demand

é au tribunal administratif de Wallis-et-Futuna d'annuler et de réformer l'arrê...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Wallis-et-Futuna d'annuler l'arrêté du 28 avril 2017 par lequel le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social l'a maintenu à disposition du ministère des Outre-mer pour exercer les fonctions de chef du service de l'inspection du travail et des affaires sociales à Wallis-et-Futuna, en tant que cet arrêté prévoit une période de seulement trois mois à compter du 1er mai 2017.

II. M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Wallis-et-Futuna d'annuler et de réformer l'arrêté du 28 avril 2017 par lequel le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social l'a maintenu à disposition du ministère des Outre-mer pour exercer les fonctions de chef du service de l'inspection du travail et des affaires sociales à Wallis-et-Futuna, en tant que cet arrêté prévoit une période de seulement trois mois à compter du 1er mai 2017.

Par un jugement n° 17600010-17600014 du 12 octobre 2017, le tribunal administratif de Wallis-et-Futuna a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 10 janvier 2018 et le 12 novembre 2018, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 17600010-17600014 du 12 octobre 2017 du tribunal administratif de Wallis-et-Futuna ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 avril 2017 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en tant qu'il renouvelle sa mise à disposition pour exercer les fonctions de chef de service de l'inspection du travail et des affaires sociales à Wallis-et-Futuna pour une période de seulement trois mois ;

3°) de mettre à la charge de l'État à lui verser la somme de 3 500 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B... soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé, faute pour les premiers juges de s'être prononcés sur sa position statutaire ;

- le jugement est entaché d'erreurs de fait, de droit et d'appréciation ;

- le principe du contradictoire a été méconnu, les premiers juges s'étant fondés sur des éléments qui n'ont pas été débattus ;

- l'article 2 du décret du 16 septembre 1985 a été méconnu ;

- le rapport prévu à l'article 11 de ce décret, qui doit intervenir après un entretien et une procédure contradictoire, n'a pas été établi ;

- l'avis du préfet, administrateur supérieur des îles Wallis-et-Futuna, qui ne pouvait évaluer ses missions d'inspection du travail, est illégal ;

- il n'a pas bénéficié d'un préavis ;

- en application de l'article 2 du décret du 26 novembre 1996, confirmée par une note interne, la mise à disposition devait être renouvelée pour une durée de deux ans ;

- la décision attaquée n'a pas été prise dans l'intérêt du service ;

- le préjudice qu'il subit est caractéristique d'une sanction déguisée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2018, le ministre du travail conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens présentés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 modifiée conférant aux îles de Wallis-et-Futuna le statut de territoire d'outre-mer ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;

- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'État, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions ;

- le décret n° 96-1026 du 26 novembre 1996 relatif à la situation des fonctionnaires de l'État et de certains magistrats dans les territoires d'outre-mer de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française et de Wallis-et-Futuna ;

- le code de justice administrative, dans sa version applicable dans les îles Wallis-et-Futuna.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., avocat de M. B....

Une note en délibéré, présentée pour M. B..., a été enregistrée le 21 septembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 22 avril 2015 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, M. B..., directeur adjoint du travail, a été mis à disposition du ministère de l'outre-mer pour exercer les fonctions de chef de service de l'inspection du travail et des affaires sociales à Wallis-et-Futuna à compter du 1er mai 2015. Par un arrêté du 28 avril 2017, le ministre a maintenu M. B..., directeur du travail, à disposition du ministère des outre-mer pour exercer les mêmes fonctions du 1er mai 2017 au 31 juillet 2017. M. B... fait appel du jugement du 12 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Wallis-et-Futuna a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 avril 2017, en tant qu'il limite sa mise à disposition à une durée de trois mois.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire (...) ".

3. Pour apprécier si l'arrêté contesté a été pris dans l'intérêt du service, les premiers juges se sont fondés sur les écritures et pièces produites par le requérant lui-même, ainsi que le mentionne expressément le jugement attaqué. M. B... n'est dès lors pas fondé à soutenir que ce jugement serait fondé sur des éléments qui ne figuraient pas aux dossiers de première instance et que l'instruction des affaires n'aurait ainsi pas été contradictoire.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

5. Il ressort des écritures de première instance que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments avancés par M. B..., relatifs notamment à sa position statutaire, ont répondu de manière motivée aux moyens de légalité interne dont ils étaient saisis auxquels se rattachaient ces arguments. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ce jugement doit ainsi être écarté.

6. En troisième lieu, la circonstance que les premiers juges auraient commis des erreurs de fait, de droit et d'appréciation s'attache au bien-fondé du jugement attaqué et est sans incidence sur sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

7. En premier lieu, aux termes de l'article 2 du décret du 16 septembre 1985 : " I. La convention de mise à disposition conclue entre l'administration d'origine et l'organisme d'accueil définit la nature des activités exercées par le fonctionnaire mis à disposition, ses conditions d'emploi, les modalités du contrôle et de l'évaluation de ces activités (...) ".

8. L'arrêté du 28 avril 2017 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social se borne à maintenir M. B... à disposition du ministère des outre-mer pour une durée de trois mois, sans modifier la nature des activités exercées, les conditions d'emploi et les modalités du contrôle et de l'évaluation de ces activités. En l'absence de tout changement sur ces points, M. B... n'est dès lors pas fondé à soutenir que cet arrêté devait être accompagné de la convention prévue à l'article 2 du décret du 16 septembre 1985 et serait irrégulier en l'absence d'une telle convention.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 11 du décret du 16 septembre 1985 : " Un rapport sur la manière de servir du fonctionnaire est établi par son supérieur hiérarchique direct ou par le responsable sous l'autorité duquel il est placé au sein de chaque organisme d'accueil. Ce rapport, rédigé après un entretien individuel, est transmis au fonctionnaire, qui peut y porter ses observations, et à l'administration d'origine qui l'utilise comme support pour apprécier la valeur professionnelle du fonctionnaire. Le cas échéant, la notation est établie par l'administration d'origine au vu du rapport mentionné à l'alinéa précédent ".

10. Ni les dispositions précitées, relatives seulement à l'évaluation du fonctionnaire mis à disposition, ni aucune autre disposition, ne subordonnent le renouvellement ou non d'une mise à disposition d'un fonctionnaire à l'élaboration d'un rapport sur sa manière de servir, après entretien et procédure contradictoire. M. B... n'est dès lors pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté serait irrégulier, faute d'avoir été précédé d'une telle procédure.

11. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la loi du 29 juillet 1961 : " L'administrateur supérieur du territoire (...) dépositaire des pouvoirs de la République, représente chacun des membres du Gouvernement (...) ".

12. Il résulte de ces dispositions que le préfet, en tant qu'administrateur supérieur des îles Wallis-et-Futuna représentant chacun des membres du gouvernement, y compris le ministre des outre-mer, pouvait légalement transmettre la demande de renouvellement de la mise à disposition pour une durée de deux ans, formulée par M. B..., à son administration d'origine en émettant un avis défavorable à un tel renouvellement. A cet égard, M. B... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 150 du code du travail applicable dans le territoire des îles Wallis-et-Futuna, qui placent les inspecteurs du travail sous l'autorité du ministre chargé de l'outre-mer, qui ne faisaient pas obstacle à ce que le préfet émette un avis sur le renouvellement demandé.

13. En quatrième lieu, aux termes de l'article 6 du décret du 16 septembre 1985 : " I. La mise à disposition peut prendre fin avant le terme prévu par arrêté du ministre ou décision de l'autorité dont relève le fonctionnaire, sur demande de l'administration d'origine, de l'organisme d'accueil ou du fonctionnaire, sous réserve le cas échéant des règles de préavis prévues dans la convention de mise à disposition (...).

14. La mise à disposition de M. B... n'a pas pris fin avant le terme prévu par l'arrêté contesté. Le moyen tiré de l'absence de préavis doit ainsi être écarté.

15. En cinquième lieu, aux termes de l'article 4 du décret du 16 septembre 1985 : " La durée de la mise à disposition est fixée dans l'arrêté la prononçant. Elle est prononcée pour une durée maximale de trois ans et peut être renouvelée par périodes ne pouvant excéder cette durée ". Aux termes de l'article 2 du décret du 26 novembre 1996 : " La durée de l'affectation dans les territoires d'outre-mer de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française et de Wallis-et-Futuna est limitée à deux ans. Cette affectation peut être renouvelée une seule fois à l'issue de la première affectation (...) ".

16. Contrairement à ce que soutient M. B..., les dispositions de l'article 2 du décret du 26 novembre 1996, qui se bornent à prévoir une durée d'affectation dans le territoire d'outre-mer de Wallis-et-Futuna de deux ans susceptible d'être renouvelée une seule fois et ne régissent pas les modalités de renouvellement des mises à disposition, ne lui ouvraient aucun droit à un renouvellement de sa mise à disposition pour une durée de deux ans après une première période de deux ans, sa mise à disposition pouvant être renouvelée par périodes suivant l'intérêt du service, pour une durée maximale ne pouvant excéder quatre années. M. B... n'est ainsi pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaîtrait les dispositions de l'article 2 du décret du 26 novembre 1996, faute de renouveler sa mise à disposition pour une durée de deux ans.

17. A cet égard, M. B... ne peut utilement se prévaloir de la note du 27 avril 2015 adressée par le directeur des ressources humaines du ministère de l'intérieur au préfet, administrateur supérieur des îles Wallis-et-Futuna indiquant que, en pratique, le ministère de l'intérieur affecte de manière systématique les agents pour des durées de renouvellement de deux ans, cette note, dépourvue de caractère règlementaire, n'ouvrant en tout état de cause aucun droit à un renouvellement d'une mise à disposition pour une durée de deux ans.

18. En sixième lieu, si la capacité de M. B... à se mobiliser sur les dossiers qui lui ont été confiés, tout en adoptant une approche humaine, n'a à aucun moment été remise en cause, il ressort des pièces du dossier, notamment du bilan d'activité adressé par M. B... à la direction générale de l'outre-mer produit par le requérant lui-même, que celui-ci a, à plusieurs reprises au cours de sa période d'affectation, entretenu des relations tendues avec le préfet, administrateur supérieur des îles Wallis-et-Futuna, représentant chacun des membres du gouvernement. Ainsi, des désaccords et des oppositions se sont manifestés dans le cadre de l'action respective de l'intéressé et du préfet, par exemple en ce qui concerne les projets en matière d'hygiène et de sécurité dans le port de Mata-Utu interférant avec l'organisation du port, l'organisation de la création d'un service de médecine du travail, l'application du droit du travail aux agents permanents de l'administration, la rédaction d'arrêtés ou le suivi des chantiers de développement local. Cette situation, même si aucun manquement professionnel n'est imputé au requérant, était de nature à justifier la volonté de ne pas renouveler la mise à disposition pour la durée que M. B... sollicitait en tant que chef du service de l'inspection du travail et des affaires sociales à Wallis-et-Futuna, afin de ne pas nuire à la cohérence de l'action de l'État dans ce territoire. Ainsi, compte tenu de la spécificité et de l'importance du poste occupé par M. B... et des relations insatisfaisantes de celui-ci avec les services du préfet, administrateur supérieur des îles Wallis-et-Futuna, l'intérêt du service justifiait de ne pas renouveler la mise à disposition pour la durée de deux ans sollicitée par M. B..., qui ne disposait d'aucun droit à voir sa mise à disposition renouvelée pour une telle durée, mais seulement pour une durée de trois mois, afin d'éviter une vacance de poste et d'assurer la continuité du service public. Le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté n'a pas été pris dans l'intérêt du service et serait ainsi entaché d'erreur manifeste d'appréciation en tant qu'il renouvelle la mise à disposition pour une durée de trois mois doit dès lors être écarté.

19. En septième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la nature des faits qui ont justifié la limitation à une durée de trois mois du renouvellement de la mise à disposition de M. B..., à qui aucune faute n'est reprochée, et l'intention poursuivie par l'administration révèleraient une mesure disciplinaire déguisée, qui ne saurait résulter de la seule perte des indemnités et primes afférentes à une affectation à Wallis-et-Futuna et des responsabilités inhérentes au poste en litige. Le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué constituerait une sanction déguisée doit ainsi être écarté.

20. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Wallis-et-Futuna a rejeté ses demandes. Sa requête, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit ainsi être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. D..., président de la formation de jugement,

- Mme Marion, premier conseiller,

- M. Sibilli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2020.

Le président-rapporteur,

F. D...

L'assesseur le plus ancien,

I. MARIONLe président - rapporteur,

F. D...

Le greffier,

C. DABERT

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA00107


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00107
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Enseignement et recherche - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement - Enseignement du second degré - Personnel enseignant.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. Simon-Louis FORMERY
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : ETIENNE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-10-08;18pa00107 ?
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