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31/07/2020 | FRANCE | N°18PA01748

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 31 juillet 2020, 18PA01748


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler son contrat de travail à durée indéterminée conclu le 31 décembre 2015 avec la commune de Villeparisis, d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2016 par lequel la commune de Villeparisis a fixé son régime indemnitaire, d'enjoindre à la commune de Villeparisis de lui présenter un contrat de travail conforme, de condamner la commune de Villeparisis à lui verser la somme de 990, 89 euros brut au titre du rattrapage de traitement pour chaque mois

non conforme ou, à défaut, d'enjoindre à la commune de Villeparisis de pro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler son contrat de travail à durée indéterminée conclu le 31 décembre 2015 avec la commune de Villeparisis, d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2016 par lequel la commune de Villeparisis a fixé son régime indemnitaire, d'enjoindre à la commune de Villeparisis de lui présenter un contrat de travail conforme, de condamner la commune de Villeparisis à lui verser la somme de 990, 89 euros brut au titre du rattrapage de traitement pour chaque mois non conforme ou, à défaut, d'enjoindre à la commune de Villeparisis de procéder à un réexamen de son dossier.

Par un jugement n° 1601625 du 27 mars 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de M. D....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 23 mai 2018 et le

17 mai 2019, M. B... D..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1601625 du 27 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

2°) d'annuler son contrat de travail conclu le 31 décembre 2015 et l'arrêté du 12 janvier 2016 par lequel le maire de Villeparisis a fixé son régime indemnitaire ;

3°) d'enjoindre à la commune de Villeparisis d'établir et de lui présenter un contrat de travail conforme, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de condamner la commune de Villeparisis à lui verser la somme de 990, 89 euros à titre de rattrapage de traitement pour chaque mois de rémunération non conforme ;

5°) à titre subsidiaire, d'enjoindre à la commune de Villeparisis de procéder au réexamen de son dossier ;

6°) de condamner la commune de Villeparisis aux entiers dépens ;

7°) de mettre à la charge de la commune de Villeparisis une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ; d'une part, le délai de recours ne commençant à courir qu'à compter de la date de notification du contrat et de l'arrêté du 12 janvier 2016, ses conclusions aux fins d'annulation ne sont donc pas tardives, d'autre part, dès lors que sa demande de rattrapage de traitement n'est que la conséquence de l'annulation du contrat de travail et de l'arrêté du 12 janvier 2016, il n'avait pas à présenter de réclamation préalable.

I - Sur le contrat de travail :

- en application de l'article L. 1224-3 du code du travail, la commune de Villeparisis aurait dû reprendre, dans son contrat de travail transféré, les clauses substantielles de son contrat de travail initial ; en lui attribuant une rémunération nettement inférieure à celle faisant l'objet de son contrat initial et en prévoyant qu'il exercerait les fonctions de ludothécaire au lieu des fonctions de directeur de la ludothèque, la commune de Villeparisis a méconnu les dispositions de cet article en procédant à la modification de clauses substantielles et entaché le contrat d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la date de l'avenant n° 3 le nommant aux fonctions de directeur de ludothèque est sans incidence sur le statut et la rémunération auxquels il a droit, dès lors que cette circonstance n'a créé aucune charge nouvelle pour la commune de Villeparisis ;

- les dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail ne prévoient pas l'assujettissement de la rémunération au niveau de diplôme de l'intéressé ; la rémunération correspond au poste occupé et non aux diplômes dont il est titulaire ; il justifie d'une très grande expérience et d'une grande compétence professionnelle ; il a, en outre, exercé effectivement les fonctions de directeur de la ludothèque.

II - Sur l'arrêté du 12 janvier 2016 :

- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il lui attribue le grade d'adjoint animation de 1ère classe qui ne correspond pas aux fonctions d'encadrement et aux responsabilités qui lui incombent.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 avril 2019, la commune de Villeparisis, représentée par la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. D... la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, la requête de M. D... est tardive car elle doit être regardée comme formée contre la proposition de contrat qui lui a été remise en mains propres le 19 novembre 2015 ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- les observations de Me E..., représentant M. D...,

- et les observations de Me A..., représentant la commune de Villeparisis.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... a été recruté par l'Office municipal de la jeunesse de Villeparisis par contrat à durée indéterminée à compter du 2 mai 2001 en qualité de ludothécaire au sein de la ludothèque de Villeparisis. La commune de Villeparisis ayant décidé de reprendre en régie les activités de la ludothèque, elle a proposé à M. D..., le 20 novembre 2015, le transfert de son contrat de travail de l'office municipal de la jeunesse à la commune de Villeparisis à compter du 1er janvier 2016 en qualité d'adjoint animation de 1ère classe. Par lettre du 30 novembre 2015, M. D... a donné son accord au transfert de son contrat de travail tout en demandant à la commune de Villeparisis de modifier sa proposition. Par lettre du 21 décembre 2015, le maire de Villeparisis a rejeté la demande de M. D.... Le contrat de travail a été signé le 31 décembre 2015 et par arrêté du 12 janvier 2016, la commune de Villeparisis a fixé son régime indemnitaire. Par un jugement du 27 mars 2018 dont M. D... relève appel, le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de son contrat de travail et de l'arrêté du 12 janvier 2016.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 1224-3 du code du travail, applicable à la date de la décision attaquée : " Lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires. Sauf disposition légale ou conditions générales de rémunération et d'emploi des agents non titulaires de la personne publique contraires, le contrat qu'elle propose reprend les clauses substantielles du contrat dont les salariés sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'en écartant, en l'absence même de toute disposition législative ou réglementaire contraire, la reprise des clauses du contrat dont le salarié transféré était titulaire relatives à la rémunération, lorsque celles-ci ne sont pas conformes aux " conditions générales de rémunération et d'emploi des agents non titulaires de la personne publique ", le législateur n'a pas entendu autoriser la personne publique concernée à proposer aux intéressés une rémunération inférieure à celle dont ils bénéficiaient auparavant au seul motif que celle-ci dépasserait, à niveaux de responsabilité et de qualification équivalents, celle des agents en fonctions dans l'organisme d'accueil à la date du transfert. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce que soient reprises, dans le contrat de droit public proposé au salarié transféré, des clauses impliquant une rémunération dont le niveau, même corrigé de l'ancienneté, excèderait manifestement celui que prévoient les règles générales fixées, le cas échéant, pour la rémunération de ses agents non titulaires. En l'absence de telles règles au sein d'une collectivité territoriale, la reprise de la rémunération antérieure n'est en tout état de cause légalement possible que si elle peut être regardée comme n'excédant pas manifestement la rémunération que, dans le droit commun, il appartiendrait à l'autorité administrative compétente de fixer, sous le contrôle du juge, en tenant compte, notamment, des fonctions occupées par l'agent non titulaire, de sa qualification et de la rémunération des agents de l'Etat de qualification équivalente exerçant des fonctions analogues. Pour l'application de ces dispositions, la rémunération antérieure et la rémunération proposée doivent être comparées en prenant en considération, pour leurs montants bruts, les salaires ainsi que les primes éventuellement accordées à l'agent et liées à l'exercice normal des fonctions, dans le cadre de son ancien comme de son nouveau contrat.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a été recruté en 2001 par l'office municipal de la jeunesse de Villeparisis en qualité d'assistant puis de ludothécaire. A ce dernier titre, il percevait une rémunération d'un montant brut de 1 712 euros. Cependant, alors même que le principe de la reprise en régie par la commune de Villeparisis avait été décidé, l'office municipal de la jeunesse a conclu le 1er novembre 2015 avec M. D... un avenant à son contrat de travail par lequel celui-ci était nommé directeur de la ludothèque avec une rémunération d'un montant mensuel brut de 2 100 euros assorti d'une prime d'ancienneté et d'un treizième mois, soit un montant total de plus de 3 000 euros. M. D... soutient que la commune de Villeparisis était tenue, en application des dispositions précitées de l'article L. 1224-3 du code du travail, de reprendre la rémunération qu'il percevait en vertu de cet avenant. Toutefois, au regard des conditions générales de rémunération et d'emploi des agents non titulaires de la personne publique, en tenant compte, notamment, de la qualification de M. D..., titulaire d'un CAP d'employé des services administratifs, d'un BEP " administration commerciale et comptable " et d'un brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur, ce dernier relevait d'un recrutement, en qualité de ludothécaire, dans le corps des adjoints territoriaux d'animation. Si M. D... se prévaut de son expérience professionnelle de quatorze ans en qualité de ludothécaire, il n'avait exercé les fonctions de directeur de la ludothèque que pendant deux mois à la date de transfert de son contrat. En outre, la rémunération brute d'un montant de 1 890 euros perçue au titre d'adjoint territorial d'animation est supérieure à celle qu'il percevait en sa qualité de ludothécaire. Si M. D... soutient également qu'il aurait dû être recruté dans le corps des conservateurs territoriaux du patrimoine, les conditions générales d'emploi de ce corps de catégorie A, et notamment le niveau de qualification requis, font obstacle à une telle intégration. Par suite et nonobstant la circonstance que M. D... a exercé les fonctions de directeur de la ludothèque, qui est sans incidence sur le contrat de travail du 31 décembre 2015 et l'arrêté du

12 janvier 2016, il n'est pas fondé à soutenir que la commune de Villeparisis aurait entaché ses décisions d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 1224-3 du code de travail ni d'une erreur manifeste d'appréciation.

5. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à sa requête par la commune de Villeparisis, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de son contrat de travail signé le 31 décembre 2015 et de l'arrêté du 12 janvier 2016 fixant son régime indemnitaire.

Sur les conclusions indemnitaires :

6. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que les conclusions indemnitaires tendant à la réparation du préjudice de rémunération que M. D... estime avoir subi ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

7. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation du contrat de travail et de l'arrêté du 12 janvier 2016 n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte de la requête doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Villeparisis, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. D..., au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... la somme demandée par la commune de Villeparisis, au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Villeparisis présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. B... D... et à la commune de Villeparisis.

Délibéré après l'audience du 26 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme F..., présidente,

- M. Mantz, premier conseiller,

- Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 31 juillet 2020.

Le rapporteur,

C. C...La présidente,

M. F...Le greffier,

S. GASPAR

La République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

N° 18PA01748


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01748
Date de la décision : 31/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme JULLIARD
Rapporteur ?: Mme Celine PORTES
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : VAUTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-07-31;18pa01748 ?
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