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21/07/2020 | FRANCE | N°19PA00501

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 21 juillet 2020, 19PA00501


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La compagnie nationale Royal Air Maroc a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 6 octobre 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a infligé une amende de 10 000 euros.

Par un jugement n° 1717959/3-3 du 27 novembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 janvier 2019 et un mémoire en réplique enregistré le 18 juillet 2019, la compagnie nationale Royal Air Maroc r

eprésentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 novembre 2018 ;...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La compagnie nationale Royal Air Maroc a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 6 octobre 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a infligé une amende de 10 000 euros.

Par un jugement n° 1717959/3-3 du 27 novembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 janvier 2019 et un mémoire en réplique enregistré le 18 juillet 2019, la compagnie nationale Royal Air Maroc représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 novembre 2018 ;

2°) d'annuler cette décision du 6 octobre 2017 du ministre de l'intérieur ;

3°) de la décharger de l'amende prononcée à son encontre, ou d'en réduire le montant à la somme de 1 000 euros.

Elle soutient que :

- il n'appartient pas à un transporteur aérien de se substituer à l'Etat dans le contrôle de la régularité des conditions d'entrée d'un étranger sur le territoire national ;

- l'irrégularité de l'entrée du passager concerné dans l'espace Shengen n'était pas manifeste ;

- le montant de l'amende est disproportionné.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 avril 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 3 juillet 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 juillet 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le règlement (CE) 539/2001 du Conseil du 15 mars 2001 ;

- le règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 ;

- le code des transports ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 6421-2 du code des transports : " Le transporteur ne peut embarquer les passagers pour un transport international qu'après justification qu'ils sont régulièrement autorisés à atterrir au point d'arrivée et aux escales prévues. ". Aux termes de l'article L. 625-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Est punie d'une amende d'un montant maximum de 10 000 euros l'entreprise de transport aérien ou maritime qui débarque sur le territoire français, en provenance d'un Etat avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen, un étranger non ressortissant d'un Etat de l'Union européenne et démuni du document de voyage et, le cas échéant, du visa requis par la loi ou l'accord international qui lui est applicable en raison de sa nationalité. (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 625-5 du même code : " Les amendes prévues aux articles L. 625-1 et L. 625-4 ne sont pas infligées : (...) 2° Lorsque l'entreprise de transport établit que les documents requis lui ont été présentés au moment de l'embarquement et qu'ils ne comportaient pas d'élément d'irrégularité manifeste. ".

2. Ces dispositions font obligation aux transporteurs aériens de s'assurer, au moment des formalités d'embarquement, que les voyageurs ressortissants d'États non membres de l'Union européenne sont en possession de documents de voyage leur appartenant, le cas échéant revêtus des visas exigés par les textes, non falsifiés et valides. Si elles n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de conférer au transporteur un pouvoir de police aux lieu et place de la puissance publique, elles lui imposent de vérifier que l'étranger est muni des documents de voyage et des visas éventuellement requis et que ceux-ci ne comportent pas d'éléments d'irrégularité manifeste, décelables par un examen normalement attentif des agents de l'entreprise de transport. En l'absence d'une telle vérification, à laquelle le transporteur est d'ailleurs tenu de procéder en vertu de l'article L. 6421-2 du code des transports, le transporteur encourt l'amende administrative prévue par les dispositions citées ci-dessus.

3. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : / 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur (...) ". Aux termes de l'article 6 du règlement (CE) n°399/2016 visé ci-dessus : " Pour un séjour prévu sur le territoire des États membres, d'une durée n'excédant pas 90 jours sur toute la période de 180 jours, ce qui implique d'examiner la période de 180 jours précédant chaque jour de séjour, les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers sont les suivantes : a) être en possession d'un document de voyage en cours de validité autorisant son titulaire à franchir la frontière qui remplisse les critères suivants (...) ; b) être en possession d'un visa en cours de validité si celui-ci est requis en vertu du règlement (CE) no 539/2001 du Conseil sauf s'ils sont titulaires d'un titre de séjour ou d'un visa de long séjour en cours de validité (...) ". Selon les dispositions du règlement (CE) n° 539/2001 du Conseil du 15 mars 2001 visé ci-dessus alors en vigueur et de son annexe 2, les ressortissants américains doivent être munis d'un visa lors du franchissement des frontières extérieures des États membres, pour des séjours dont la durée excède 90 jours sur toute période de 180 jours.

4. La compagnie nationale Royal Air Maroc soutient que la passagère débarquée ayant la nationalité américaine, elle n'a en principe pas besoin d'un visa Schengen, qu'il n'appartient pas aux agents des compagnies aériennes de vérifier sur la dizaine de pages du passeport, l'ensemble des cachets qui y sont apposés pour comptabiliser le nombre de jours passés par le passager dans l'espace Schengen, afin de vérifier s'il peut régulièrement y débarquer de nouveau et qu'en tout état de cause l'irrégularité du document de voyage de la passagère n'était pas manifeste. Ce faisant, elle se borne à reprendre en appel le moyen qu'elle avait présenté en première instance, sans l'assortir d'éléments nouveaux de nature à remettre en cause le bien-fondé du jugement sur ce point. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les juges de première instance, d'écarter ce moyen.

5. La compagnie nationale Royal Air Maroc soutient en outre que l'erreur commise par les agents de la compagnie n'est pas manifeste, contrairement à ce qu'a considéré le ministre de l'intérieur et qu'en conséquence le montant de l'amende est disproportionné.

6. Il appartient au juge administratif, saisi d'un recours de pleine juridiction contre la décision infligeant une amende sur le fondement des dispositions citées ci-dessus du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de statuer sur le bien-fondé de la décision contestée et de réduire, le cas échéant, le montant de l'amende infligée en tenant compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce.

7. Il résulte de l'instruction que la durée de validité du visa Schengen de la passagère concernée était expirée et qu'elle ne pouvait donc pas, compte tenu de la durée de ses précédents séjours, pénétrer à nouveau dans l'espace Schengen, ce que l'agent de la compagnie pouvait aisément constater. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le montant de l'amende n'était pas disproportionné et que la compagnie nationale Royal Air Maroc n'était pas fondée à demander la réduction de l'amende qui lui a été infligée.

8. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les conclusions de la requête d'appel de la compagnie nationale Royal Air Maroc ne peuvent qu'être rejetées, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la compagnie nationale Royal Air Maroc est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la compagnie nationale Royal Air Maroc et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme B..., président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 juillet 2020.

L'assesseur,

J-C. NIOLLETLe président rapporteur,

O. B...

Le greffier,

T. ROBERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA00501 4

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00501
Date de la décision : 21/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

65-03-04-02 Transports. Transports aériens. Aéroports. Police des aérodromes.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Odile FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : CLYDE et CO LLP

Origine de la décision
Date de l'import : 29/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-07-21;19pa00501 ?
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