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10/07/2020 | FRANCE | N°19PA02466

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 10 juillet 2020, 19PA02466


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Jemeau Productions a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009 et 2010, et, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2010, ainsi que des pénalités correspondantes. La société Jemeau Productions a également d

emandé au tribunal de lui accorder la décharge des amendes fiscales qui lui ont été...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Jemeau Productions a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009 et 2010, et, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2010, ainsi que des pénalités correspondantes. La société Jemeau Productions a également demandé au tribunal de lui accorder la décharge des amendes fiscales qui lui ont été infligées sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, à raison des distributions effectuées au titre des exercices clos en 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1719096/1-2 du 28 mai 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2019, la société Jemeau Productions, représentée par Me C..., doit être regardée comme demandant à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1719096/1-2 du 28 mai 2019 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des droits, pénalités et amendes contestés ;

3°) de condamner l'Etat aux dépens de l'instance ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le service ne pouvait regarder la somme de 20 000 euros, portée en 2010 au crédit du compte courant d'associé ouvert dans ses écritures au nom de la société Jacques Mechali et Autres, comme un passif injustifié devant être réintégré sur le fondement du 2. de l'article 38 du code général des impôts sans méconnaître la position qu'il a prise s'agissant de l'exercice clos en 2011;

- faute de revenus distribués désinvestis de ses bénéfices sociaux, le service ne pouvait lui infliger l'amende fiscale prévue par l'article 1759 du code général des impôts sans méconnaître la réponse ministérielle apportée au député B..., le 7 janvier 1954.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête de la société Jemeau Productions, qui ne contient pas de moyens d'appel, est irrecevable ;

- en tout état de cause, aucun des moyens soulevés par la SNC Jemeau Productions n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020 modifiée portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société Jemeau Productions, qui exerce une activité de conception et de distribution de mobilier et de décoration, dans le 16ème arrondissement de Paris, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos de 2009 à 2011. Dès lors qu'elle ne conteste pas l'irrecevabilité de ses conclusions portant sur le rehaussements d'impôt sur les sociétés initialement dû et non acquitté au titre des exercices 2009 et 2010 et les impositions supplémentaires mises à sa charge au titre de l'exercice 2009, qu'a retenue le Tribunal, elle doit être regardée comme relevant appel du jugement du 28 mai 2019 du Tribunal administratif de Paris en tant seulement qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2010, ainsi que des pénalités correspondantes, et, d'autre part, des amendes fiscales qui lui ont été infligées sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, à raison des distributions effectuées au titre des exercices clos en 2009 et 2010.

Sur le bien-fondé des impositions contestées :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. D'une part, aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ". Il appartient au contribuable, pour l'application de ces dispositions, de justifier l'inscription d'une dette au passif du bilan de son entreprise.

3. Si, pour justifier de la somme de 20 000 euros portée en 2010 au crédit du compte courant d'associé ouvert dans ses écritures au nom de la société Jacques Mechali et Autres, la société Jemeau Productions soutient que celle-ci a réalisé pour son compte des prestations de sous-traitance sur le chantier de l'hôtel Buddha Bar, situé 4 rue d'Anjou dans le 8ème arrondissement de Paris, qu'elle supervisait pour le compte de la société Dumez IDF Agence aux termes d'une convention signée le 26 août 2010, elle n'apporte aucune pièce à l'appui de ses allégations. Notamment, la société Jemeau Productions ne justifie nullement que dans l'attente des factures à recevoir de la société Jacques Mechali et Autres, elle lui aurait consenti des avances ayant débité son compte courant d'associé ouvert dans ses écritures. Dans ces conditions, la société Jemeau Productions n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le service a réintégré la somme en litige dans ses résultats imposables de l'exercice clos en 2010, sur le fondement du 2. de l'article 38 du code général des impôts.

4. D'autre part, faute de moyens soulevés sur ce point, la société Jemeau Productions ne saurait reprocher au service, d'une part, d'avoir réintégré à ses résultats de l'exercice clos en 2010 les recettes correspondant aux prestations qu'elle a elle-même réalisées à raison de la convention signée le 26 août 2010, qu'elle ne conteste pas avoir encaissées sur son compte ouvert au CIC, et, d'autre part, d'avoir rappelé la taxe sur la valeur ajoutée correspondante.

En ce qui concerne la prise de position du service :

5. Si la société Jemeau Productions soutient qu'est opposable à l'administration, au titre de l'exercice clos en 2010, la position du 14 février 2013 par laquelle l'interlocuteur départemental a admis que les sommes ayant crédité en 2011 le compte courant d'associé de la société Jacques Mechali et Autres n'étaient pas constitutives de passifs injustifiés, il est toutefois constant que cette position formelle du service sur l'appréciation d'une situation de fait n'a été prise que postérieurement à l'imposition primitive en litige. Le moyen implicitement soulevé sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales doit donc être écarté.

Sur les amendes :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

6. Aux termes de l'article 1759 du code général des impôts : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées (...) ". L'article 109 du même code dispose que : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / (...) ". Enfin, en vertu de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759 ".

7. Après avoir estimé que les bénéfices reconstitués de la société Jemeau Productions au titre des exercices clos en 2009 et 2010, à la suite de la taxation d'office dont elle a fait l'objet, étaient constitutifs de revenus distribués au profit de tiers, le service lui a vainement demandé de désigner les bénéficiaires des revenus en cause dans le délai de trente jours imparti par l'article 117 du code général des impôts. Dès lors que le 1° du 1. de l'article 109 précité du code général des impôts établit une présomption de distribution à l'égard de tous les bénéfices qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital, qu'en l'espèce la société Jemeau Productions ne renverse pas en se bornant à alléguer que ses bénéfices seraient demeurés investis en son sein, c'est à bon droit que le service lui a infligé l'amende fiscale prévue par l'article 1759 du code général des impôts, au titre des distributions effectuées en 2009 et 2010.

En ce qui concerne l'application de la doctrine administrative :

8. La SNC Jemeau Productions ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la réponse ministérielle du 7 janvier 1954 faite à M. B..., député, laquelle ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il vient d'être fait application.

9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que la société Jemeau Productions n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les dépens :

10. La société Jemeau Productions n'établit pas avoir engagé de dépens dans la présente instance. Sa demande tendant à ce qu'ils soient mis à la charge de l'Etat ne peut donc, en tout état de cause, qu'être rejetée.

Sur les frais de justice :

11. L'Etat n'étant pas la partie perdante à l'instance, il y a lieu de rejeter les conclusions de la société Jemeau Productions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Jemeau Productions est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Jemeau Productions et ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle contrôle fiscal et affaires juridiques).

Délibéré après l'audience du 30 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Hamon, président,

- Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

- Mme A..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 10 juillet 2020.

Le rapporteur,

C. A...Le président,

P. HAMON

Le greffier,

C. MONGISLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 19PA02466


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02466
Date de la décision : 10/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Dettes.


Composition du Tribunal
Président : Mme HAMON
Rapporteur ?: Mme Christelle ORIOL
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : SELARL ZAMOUR et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-07-10;19pa02466 ?
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