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30/06/2020 | FRANCE | N°17PA24134

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 30 juin 2020, 17PA24134


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Générale des Eaux Guadeloupe (GDEG) a demandé au Tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner la communauté d'agglomération Sud Basse-Terre (CASBT), devenue la communauté d'agglomération Grand Sud Caraïbe (CAGSC), à lui verser la somme de 2 379 314,44 euros ou, à défaut, la somme de 2 277 875 euros, en règlement de prestations relatives à la gestion du service public de l'eau potable et de l'assainissement pour la période du 1er janvier 2014 au 30 septembre 2014.

Par un ju

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Générale des Eaux Guadeloupe (GDEG) a demandé au Tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner la communauté d'agglomération Sud Basse-Terre (CASBT), devenue la communauté d'agglomération Grand Sud Caraïbe (CAGSC), à lui verser la somme de 2 379 314,44 euros ou, à défaut, la somme de 2 277 875 euros, en règlement de prestations relatives à la gestion du service public de l'eau potable et de l'assainissement pour la période du 1er janvier 2014 au 30 septembre 2014.

Par un jugement n° 1600454 du 31 octobre 2017, le Tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 décembre 2017 au greffe de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, dont le jugement a été attribué à la Cour administrative d'appel de Paris par ordonnance n° 428220 du 1er mars 2019 du président de la section du contentieux de Conseil d'Etat et des mémoires, enregistrés le 15 octobre 2019 et le 29 mai 2020, la société Générale des Eaux Guadeloupe (GDEG), représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la communauté d'agglomération Grand Sud Caraïbe (CAGSC) à lui verser la somme de 2 349 168,44 euros, en règlement de prestations relatives à la gestion du service public de distribution d'eau potable et de l'assainissement pour la période du

1er janvier 2014 au 31 mars 2015 ;

3°) de mettre à la charge de la CAGSC la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'enrichissement sans cause de la CAGSC est avéré dès lors qu'elle a assuré toutes les prestations de distribution d'eau potable et d'assainissement concernant les communes de Capesterre-Belle-Eau, Terre-de-Haut et Terre-de-Bas pour la période du 1er janvier 2014 au

15 septembre 2014, sans lien contractuel ni avec ces communes ni avec la CAGSC ;

- l'opposition systématique de la CAGSC, ou à tout le moins son manque de diligence notoire, l'a conduite, dans un souci de continuité du service public, à poursuivre l'approvisionnement des communes concernées sans percevoir la rémunération de ses prestations ;

- dès lors que l'enrichissement sans cause de la communauté d'agglomération Sud Basse-Terre a été reconnu par l'ordonnance n° 16BX00640, 16BX00677 du juge d'appel des référés de la cour administrative de Bordeaux du 22 mai 2016, à propos de la livraison d'eau en gros par le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe (SIAEAG) aux trois communes précitées, il doit l'être également en ce qui concerne la prestation d'adduction et de distribution d'eau qui en est le corollaire ;

- la prétendue fin de non-recevoir opposée par la CAGSC doit être écartée dès lors que l'enrichissement sans cause peut résulter de l'absence de lien contractuel entre l'enrichi et l'appauvri, que ce soit du fait du défaut de signature d'une convention entre les parties ou de l'échec de la conclusion d'une convention provisoire, ou que les prestations aient été exécutées en marge d'un contrat, dans le cadre de la cessation d'un contrat ou sur le fondement d'un contrat nul ou annulé ;

- elle ne pouvait faire usage d'aucune autre voie de droit à l'encontre de la CAGSC ;

- la CAGSC n'est pas fondée à invoquer un intérêt personnel, notamment commercial, que la société GDEG aurait prétendument retiré du maintien de ses prestations, alors que

celles-ci étaient nécessaires à quelque vingt mille usagers ;

- elle ne peut se voir opposer une faute lourde constitutive de dol à l'encontre de la CAGSC ;

- les montants facturés par elle, qui se décomposent en charges fixes et charges variables, augmentés d'une marge de 2,5 %, correspondent à la stricte application des stipulations des deux conventions de gestion provisoires " eau " et " assainissement " du 14 mars 2014 conclues avec le SIAEAG, auxquelles s'ajoute le montant des charges supportées après le 17 septembre 2014 pour pallier les carences de la CAGSC.

Par un mémoire en défense et des pièces complémentaires, enregistrés le 23 avril 2019 et le 23 avril 2020, la communauté d'agglomération Grand Sud Caraïbe (CAGSC), représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société Générale des Eaux Guadeloupe (GDEG) à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors qu'il n'existe aucun lien juridique entre elle-même et la société GDEG et qu'il ne peut y avoir d'enrichissement sans cause concernant une compétence qui ne lui appartenait pas ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par des mémoires en observations, enregistrés le 16 mai 2019 et le 30 mai 2020, le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe (SIAEAG), également dénommé O'DILES-Eaux des îles de Guadeloupe, représenté par Me E... et Me B..., conclut à sa mise hors de cause.

Il soutient que :

- aucune demande n'a été présentée contre lui ni aucune condamnation prononcée à son encontre par le jugement attaqué ;

- les allégations de la CAGSC sont erronées et celle-ci doit supporter l'appauvrissement de la société GDEG, sous réserve de l'établissement par cette dernière de son préjudice.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- les observations de Me C... pour la société Générale des Eaux Guadeloupe (GDEG).

Un mémoire a été enregistré le 2 juin 2020 pour la communauté d'agglomération Grand Sud Caraïbe.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du préfet de la Guadeloupe en date du 30 décembre 2011, la communauté de communes du Sud Basse-Terre a fait l'objet d'une transformation en communauté d'agglomération disposant de la compétence optionnelle " eau et assainissement ". Par un arrêté préfectoral du 2 mai 2013, les communes de Capesterre-Belle-Eau, Terre-de-Bas et Terre-de-Haut, qui étaient auparavant membres du syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable et d'assainissement de la Guadeloupe (SIAEAG), ont été intégrées à compter du 1er janvier 2014 à la communauté d'agglomération du Sud Basse-Terre (CASBT). Par un arrêté préfectoral du 27 février 2014, ces trois communes ont été retirées à compter du 1er janvier 2014 du SIAEAG du fait de leur intégration à la CASBT qui exerce désormais, en leur lieu et place, les compétences " eau et assainissement ". Le SIAEAG et la CASBT s'étant trouvés en conflit sur les modalités du transfert des biens meubles et immeubles consécutif au retrait des trois communes du syndicat, ce dernier a toutefois assuré la continuité de l'approvisionnement en eau de ces communes, en dépit de l'absence de conclusion d'une convention provisoire avec la CASBT. Par ailleurs, la société Générale des Eaux Guadeloupe (GDEG) s'est vu confier par le SIAEAG l'exploitation des services, d'une part, de collecte et de traitement des eaux usées et, d'autre part, de production, d'adduction et de distribution d'eau potable, en vertu de deux marchés publics conclus le 31 mars 2008 pour une durée de cinq ans, prolongés par deux avenants jusqu'au 31 décembre 2013, puis prorogés ensuite à titre transitoire jusqu'au 31 décembre 2014 par deux conventions de gestion provisoire en date du 14 mars 2014 qui excluent de leur périmètre les trois communes précitées. La société GDEG a toutefois maintenu ses prestations de distribution d'eau potable et d'assainissement aux usagers des trois communes précitées, malgré l'absence de signature d'une convention d'exploitation avec la CASBT, et sans percevoir de rémunération correspondant à ces prestations. Par une lettre du 19 janvier 2016, reçue le 25 janvier 2016 par la CASBT, la société GDEG a demandé à celle-ci de lui verser la somme de 2 379 318,44 euros, en règlement des prestations précitées délivrées par elle entre le 1er janvier 2014 et le 30 septembre 2014 au bénéfice des communes de Capesterre-Belle-Eau, Terre-de-Bas et Terre-de-Haut. La CASBT a implicitement rejeté cette demande. La société Générale des Eaux Guadeloupe (GDEG) relève appel du jugement du 31 octobre 2017 par lequel le Tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté d'agglomération du Sud Basse-Terre (CASBT), devenue la communauté d'agglomération du Grand Sud Caraïbe (CAGSC), à lui verser la somme précitée ou, à défaut, la somme de 2 277 875 euros.

Sur les conclusions présentées par le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe (SIAEAG) tendant à sa mise hors de cause :

2. Il ressort des termes du jugement attaqué que le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe (SIAEAG), devenu O'DILES-Eaux des îles de Guadeloupe, qui s'est vu notifier cette décision, n'a toutefois fait l'objet d'aucune demande le mettant en cause, y compris en appel, et n'a fait l'objet d'aucune condamnation. Il est, dès lors, fondé à demander sa mise hors de cause.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne le droit de la société GDEG au remboursement des dépenses utiles exposées par elle :

3. En cas de nullité d'un contrat ou en l'absence de contrat, un fournisseur peut prétendre, sur un terrain quasi-contractuel, au remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles à la collectivité envers laquelle il s'était engagé, à l'exclusion de tout bénéfice. Les fautes éventuellement commises par l'intéressé sont sans incidence sur son droit à indemnisation au titre de l'enrichissement sans cause de la collectivité, sauf si elles ont été de nature à vicier le consentement de l'administration, ce qui fait obstacle à l'exercice d'une telle action.

4. En premier lieu, la circonstance qu'aucun lien juridique n'aurait existé entre la communauté d'agglomération du Sud Basse-Terre (CASBT) et la société GDEG n'est pas de nature à rendre irrecevable la demande indemnitaire de cette dernière fondée sur l'enrichissement sans cause. En deuxième lieu et ainsi qu'il a été dit au point 1, il résulte, d'une part, de l'arrêté précité du préfet de la Guadeloupe du 30 décembre 2011 que la CASBT a exercé de plein droit, en lieu et place de ses communes membres, à compter de l'entrée en vigueur de cet arrêté, les compétences relatives à l'alimentation en eau potable et à l'assainissement et, d'autre part, que par un arrêté du 2 mai 2013, la même autorité a étendu le périmètre de la CASBT à sept communes à compter du 1er janvier 2014, dont les communes de Capesterre-Belle-Eau, Terre-de-Bas et Terre-de-Haut, anciennement membres du SIAEAG. Enfin, par arrêté préfectoral du 27 février 2014, les trois communes concernées ont été retirées à compter du 1er janvier 2014 du SIAEAG, du fait de leur intégration à la communauté d'agglomération. Par suite et contrairement à ce que soutient la CAGSC, la CASBT exerçait bien, à compter du 1er janvier 2014, la compétence " eau et assainissement " en lieu et place des trois communes précitées.

5. Il résulte de l'instruction que, nonobstant les différends existants entre le SIAEAG et la CASBT relativement au transfert des biens meubles et immeubles affectés au service de l'eau et de l'assainissement sur le territoire des trois communes de Capesterre-Belle-Eau, Terre-de-Bas et Terre-de-Haut, consécutivement au retrait de ces communes du SIAEAG à compter du 1er janvier 2014, la société GDEG a maintenu ses prestations de distribution d'eau potable et d'assainissement aux usagers de ces trois communes. La société GDEG soutient ainsi avoir exposé, à compter du 1er janvier 2014 et jusqu'au 30 septembre 2014, des dépenses utiles pour la communauté d'agglomération du Sud Basse-Terre (CASBT), à la réalisation desquelles cette dernière, qui ne s'y est pas opposée, a donné, fût-ce tacitement, son consentement. Si la CASBT, devenue la CAGSC, soutient que la société GDEG aurait commis des fautes en maintenant ses prestations de fourniture d'eau aux trois communes de Capesterre-Belle-Eau, Terre-de-Bas et Terre-de-Haut, en l'absence de tout contrat conclu avec la communauté d'agglomération, une telle circonstance, à la supposer même fautive, est en tout état de cause sans incidence sur le droit à indemnisation de la requérante au titre de l'enrichissement sans cause de la collectivité, dès lors qu'il n'est ni soutenu ni même allégué qu'elle aurait été de nature à vicier le consentement de l'administration. Si la CAGSC soutient en outre que la société GDEG aurait trouvé un intérêt personnel à l'enrichissement de la CASBT et qu'elle ne pourrait de ce fait l'invoquer à son encontre, il résulte de l'instruction que le maintien par la requérante des services de distribution d'eau potable et d'assainissement à un bassin de population de plus de vingt mille habitants, qui répondait à une nécessité de service public, ne saurait avoir été dicté par son seul intérêt propre. De plus, la CAGSC ne peut utilement faire valoir que le SIAEAG n'aurait plus été compétent en matière de traitement de l'eau et de l'assainissement au 14 mars 2014, date de la passation d'une convention de gestion provisoire entre ce syndicat et la société GDEG, destinée à assurer la continuité du service public au bénéfice des communes membres du syndicat à compter du 1er janvier 2014 en l'absence de modalité nouvelle d'exécution de ce service, dès lors que les trois communes précitées étaient précisément exclues du périmètre de cette convention du fait de leur retrait du SIAEAG.

6. Enfin, si la CAGSC soutient que la société GDEG n'établit pas avoir épuisé toutes les voies de droit lui permettant le recouvrement de sa créance et ne pourrait dès lors utilement invoquer l'enrichissement sans cause de la CASBT, il est constant que, malgré la demande réitérée de la société requérante d'établir avec la CASBT une convention d'exploitation, fût-elle provisoire, relative aux services de distribution d'eau potable et d'assainissement, ainsi qu'en atteste notamment son courrier du 12 juin 2014 adressé à la présidente de la communauté d'agglomération, aucun contrat n'a pu être conclu entre les deux entités. Il en résulte que la société GDEG ne pouvait fonder sa demande indemnitaire sur un fondement contractuel. Par suite, et dès lors que la CAGSC n'oppose à la société GDEG aucune autre voie de droit qui aurait été susceptible de permettre à celle-ci de fonder sa demande, la société GDEG est fondée à demander à la CAGSC, qui a bénéficié de ses services de distribution d'eau potable et d'assainissement au profit des usagers des trois communes de Capesterre-Belle-Eau, Terre-de-Bas et Terre-de-Haut sans les rémunérer, le remboursement des dépenses utiles exposés par elle au titre de la gestion de ces services.

En ce qui concerne le montant des dépenses utiles :

7. Il résulte de l'instruction que, pour établir le montant des dépenses utiles exposées concernant les trois communes de Capesterre-Belle-Eau, Terre-de-Bas et Terre-de-Haut, la société GDEG s'est fondée sur le mode de rémunération prévu dans l'accord de négociation passé avec le SIAEAG le 30 décembre 2013 ainsi que dans les deux conventions provisoires de gestion passées avec celui-ci le 14 mars 2014, ayant pour objet de lui confier, à titre transitoire, la gestion des services de distribution d'eau potable et d'assainissement au bénéfice des six communes restant dans le périmètre dudit syndicat à la date du 1er janvier 2014. Ce mode de calcul des dépenses utiles n'est pas contesté par la CAGSC.

8. Les deux conventions mentionnées au point 7 prévoyaient ainsi un prix global et forfaitaire, ou partie fixe, égal aux charges indirectes prévisionnelles du service et une part variable, égale aux charges directes ou affectables du service. Les charges fixes correspondaient aux charges de personnel des agents affectés aux fonctions centrales de direction et de support de la société, au coût des locaux associés, aux coûts informatiques ainsi qu'à la contribution des services centraux facturée par le groupe Veolia, maison-mère de la société GDEG. Ces charges fixes imputées aux deux services précités, pour la période de gestion provisoire allant du 1er janvier 2014 au 15 septembre 2014, ont été estimées par la société GDEG à partir des charges indirectes de l'année 2013, en fonction de la quote-part représentative des deux conventions dans son activité globale, des volumes d'activité respectifs des services de l'eau et de l'assainissement ainsi que du nombre d'abonnés de chacune des trois communes précitées, proratisé en fonction du nombre de communes, à la somme de 765 034,15 euros TTC. Les charges directes ou variables correspondent aux factures fournisseurs, aux sorties de stock et aux charges de personnel des agents affectés au périmètre des trois communes précitées. Elles ont été estimées par la société GDEG pour les trois communes concernées, au titre de la période précitée, à la somme de 1 415 969,10 euros TTC. Le montant total des charges directes et indirectes facturé à la CASBT au titre de la gestion provisoire des deux services de l'eau et de l'assainissement entre le 1er janvier 2014 et le 15 septembre 2014 s'élève ainsi à la somme de 2 181 003,25 euros TTC, à l'exclusion de tout bénéfice.

9. En outre, la société GDEG, qui affirme sans être contredite que la CASBT a décidé, le 15 septembre 2014, de reprendre la gestion de ces deux services en régie à compter du 17 septembre 2014, soutient qu'elle a assuré une gestion transitoire de ceux-ci entre le 15 septembre 2014 et le 30 septembre 2014. Elle a estimé le montant des dépenses utiles exposées au titre de cette période, qui correspondent uniquement à des charges directes, à la somme de 55 208,58 euros TTC en ce qui concerne le service de distribution d'eau potable et de 25 366,73 euros TTC concernant le service d'assainissement. Le montant total des charges directes facturé à la CASBT au titre de la gestion transitoire des deux services entre le 15 septembre 2014 et le 30 septembre 2014 s'élève ainsi à la somme de 80 575,31 euros TTC, à l'exclusion de tout bénéfice. Si la société GDEG demande en outre une somme de 9 918,70 euros au titre de loyers, de taxes et de frais d'électricité pour les deux agences de Capesterre et Saintes pour la période allant du 16 septembre 2014 au 31 mars 2015, elle n'établit pas le caractère de dépenses utiles de cette somme au titre de la gestion transitoire qu'elle a assurée pour le compte de la CASBT entre le 15 septembre 2014 et le 30 septembre 2014.

10. Il résulte de l'ensemble de ce qui a été dit aux points 8 et 9 que la société GDEG soutient avoir exposé des dépenses utiles au profit de la communauté d'agglomération du Sud Basse-Terre (CASBT) concernant les trois communes de Capesterre-Belle-Eau, Terre-de-Bas et Terre-de-Haut, au titre de sa gestion provisoire et transitoire des services de distribution d'eau potable et d'assainissement entre le 1er janvier 2014 et le 30 septembre 2014, à l'exclusion de tout bénéfice, pour un montant global de 2 261 578,56 euros TTC (2 181 003,25 euros TTC + 80 575,31 euros TTC). Ces dépenses, justifiées par des états de compte, des factures adressées à la CASBT, des registres de facturation et de salaires, des courriers de relances et des relevés de factures impayées, des factures d'EDF, des états mensuels de loyers ainsi que des factures de fournisseurs, notamment celles de l'Eurl Tous Services Travaux Publics, ne sont pas contestées en tant que telles par la CAGSC qui, notamment, n'apporte aucun élément de nature à établir leur caractère excessif. Cette dernière fait toutefois valoir qu'il convient d'établir un bilan global de l'action menée par la société GDEG, et notamment de prendre en compte les sommes perçues par elle au titre de la facturation des usagers concernant les prestations de distribution d'eau potable et d'assainissement au titre de la période allant du 1er janvier 2014 au 30 septembre 2014. A cet égard, la société requérante soutient, sans être contredite, que les prestations qu'elle a assurées au titre de cette période n'ont été facturées par elle qu'à quatre-vingt-huit abonnés, représentant moins de deux pour cent de l'ensemble des abonnés des trois communes, à hauteur d'une somme globale de 4 574,61 euros correspondant à un volume de 1 443 mètres cubes d'eau, et que cette facturation parcellaire a en tout état de cause été intégralement annulée. Il résulte en effet de l'instruction que par une délibération en date du 1er décembre 2014, le conseil communautaire de la CASBT a décidé d'annuler les factures et les titres de recettes contestés émis au nom des abonnés de Capesterre-Belle-Eau, de Terre-de-Bas et de Terre-de-Haut, ainsi que d'arrêter les éventuelles poursuites à l'encontre de ces usagers, " tant que leur situation ne sera pas mise à plat en ce qui concerne l'établissement du coût exact des consommations réellement dues ". En outre, il résulte des informations produites par la CAGSC que l'ensemble des consommations relatives à l'eau potable et l'assainissement ont été facturées aux usagers des trois communes concernées entre le 2 mars 2016 et le 24 avril 2017. Par suite, la société GDEG doit être regardée comme établissant qu'elle n'a perçu aucune recette relative à la facturation des usagers au titre de la période concernée. Il en résulte que le montant total dû par la communauté d'agglomération sur le fondement de l'enrichissement sans cause doit être fixé à la somme totale de 2 261 578,56 euros TTC.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Générale des Eaux Guadeloupe (GDEG) est fondée, d'une part, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande et, d'autre part, à demander la condamnation de la communauté d'agglomération Sud Basse-Terre (CASBT), devenue la communauté d'agglomération Grand Sud Caraïbe (CAGSC), à lui verser la somme de 2 261 578,56 euros TTC.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société GDEG, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la CAGSC demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la CAGSC une somme de 1 500 euros à verser à la société GDEG, sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe, devenu O'DILES-Eaux des îles de Guadeloupe, est mis hors de cause.

Article 2 : L'article 1er du jugement n° 1600454 du Tribunal administratif de la Guadeloupe du 31 octobre 2017 est annulé.

Article 3 : La communauté d'agglomération Grand Sud Caraïbe est condamnée à verser à la société Générale des Eaux Guadeloupe la somme de 2 261 578,56 euros toutes taxes comprises.

Article 4 : La communauté d'agglomération Grand Sud Caraïbe versera à la société Générale des Eaux Guadeloupe une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération Grand Sud Caraïbe sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la société Générale des Eaux Guadeloupe est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à société Générale des Eaux Guadeloupe, à la communauté d'agglomération Grand Sud Caraïbe et au syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe, devenu O'DILES-Eaux des îles de Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme F..., présidente,

- M. A..., premier conseiller,

- Mme Mach, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 juin 2020.

La présidente,

M. F...

La République mande et ordonne au préfet de la Guadeloupe en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA24134


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA24134
Date de la décision : 30/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-04-02 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de longue durée.


Composition du Tribunal
Président : Mme JULLIARD
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : DEPORCQ

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-06-30;17pa24134 ?
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