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09/06/2020 | FRANCE | N°18PA02828

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 09 juin 2020, 18PA02828


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. O... M..., Mme G... X..., M. T... I..., M. AC..., Mme Q... L..., M. R... A..., Mme E... C... épouse A..., M. B... P..., Mme J... V... épouse P..., M. S... F..., Mme Z... H... et M. AB... K... ont demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision du 9 mai 2017 par laquelle le chef du service de l'urbanisme de la Polynésie française a délivré à la SARL " Les Hauts de Taapuna " un permis de travaux immobiliers pour la construction d'un immeuble de 15 logements sur la parc

elle référencée AX n° 131 au cadastre de la commune de Punaauia.

Par un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. O... M..., Mme G... X..., M. T... I..., M. AC..., Mme Q... L..., M. R... A..., Mme E... C... épouse A..., M. B... P..., Mme J... V... épouse P..., M. S... F..., Mme Z... H... et M. AB... K... ont demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision du 9 mai 2017 par laquelle le chef du service de l'urbanisme de la Polynésie française a délivré à la SARL " Les Hauts de Taapuna " un permis de travaux immobiliers pour la construction d'un immeuble de 15 logements sur la parcelle référencée AX n° 131 au cadastre de la commune de Punaauia.

Par un jugement n°1700315 du 15 mai 2018, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 17 août 2018, et un mémoire enregistré le 12 février 2020, M. O... M..., Mme G... X..., M. T... I..., M. AC..., Mme Q... L..., M. R... A..., Mme E... C... épouse A..., M. B... P..., Mme J... V... épouse P..., M. S... F..., Mme Z... H... et M. AB... K..., représentées par la SELARL MetH, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Polynésie française du 15 mai 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 9 mai 2017 par laquelle le ministre du logement, de l'aménagement et de l'urbanisme a délivré à la SARL " Les Hauts de Taapuna " l'autorisation de construire un immeuble de 15 logements " Résidence Iriatai " sur la parcelle cadastrée AX

n° 131 de la commune de Punaauia ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 1 000 euros à verser à chacun des requérants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la demande, pour laquelle ils ont qualité à agir et qui n'est pas tardive, est recevable ;

- en particulier, le défaut de notification de la requête en méconnaissance de l'article R.600-1 du code de l'urbanisme ne saurait leur être opposé, en l'absence sur le panneau d'affichage des informations exigées ;

- la note de renseignement délivrée le 10 mai 2016 sur la base de documents erronés fournis par la SCI Les Hauts de Taapuna ne conférait aucun droit au pétitionnaire ; le permis délivré sur le fondement exclusif du plan général d'aménagement de 2005 est illégal de ce fait ;

- le projet ne comporte pas de plan faisant apparaitre le raccordement du projet au réseau public d'eau potable et le rejet des eaux pluviales comporte des indications contradictoires en méconnaissance de l'article A 114-10 du code de l'aménagement ;

- le projet, situé sur un remblai instable, dans une zone d'aléa moyen à fort, ne comporte pas les études et les mesures de protection exigées par l'article 2.1.1.3 du plan de prévention des risques ;

- la hauteur de la construction, calculée à partir de repères arbitraires, excède les limites fixées par le plan général d'aménagement de 2005 ;

- le dépassement excède des proportions raisonnables et obère la vue depuis la parcelle de M. M... ;

- les prospects, calculés à partir d'une hauteur sous-évaluée, ne sont pas respectés ;

- l'accord de voisinage, requis pour la construction de la plateforme de parking, n'a pas été versé au dossier ;

- les places de stationnement n'ont pas la longueur de 5 mètres exigée par le plan et ne comportent qu'une place pour handicapé alors qu'il en fallait deux ;

- la parcelle ne dispose pas d'un accès à la voie publique, ni d'une alimentation en eau potable en l'absence d'un accord de l'association syndicale du lotissement Taapuna ;

- le choix d'un assainissement de type individuel est déraisonnable et dangereux ;

- les dispositions relatives au rejet des eaux pluviales sont contradictoires et insuffisantes ;

- l'accès des véhicules de secours et d'incendie n'est pas assuré.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 décembre 2019, la Polynésie française, représentée par Me D... AA..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme globale de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les requérants, qui n'auront pas une vue directe sur la construction, n'ont pas d'intérêt à agir ;

- le recours n'a pas été notifié dans les conditions prévues à l'article R.600-1 du code de l'urbanisme, applicable en Polynésie française ;

- les indications contenues dans le plan de masse sont suffisantes ;

- les préconisations du géotechnicien assurent un niveau de sécurité conforme aux exigences du plan de prévention des risques ;

- les règles de hauteur et de prospect, celles relatives aux places de stationnement, et celles relatives à l'accès et à l'alimentation en eau ont été respectées ;

- l'assainissement individuel n'est pas inapproprié ;

- l'évacuation des eaux pluviales et l'accès des véhicules de secours sont assurés.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 décembre 2019, la SARL Les Hauts de Taapuna représentée par Me Y... N... conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge solidaire des requérants la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le permis de construire ayant été publié au JOPF le 26 mai 2017 et affiché sur place le 12 mai 2017 ainsi qu'il ressort d'un constat d'huissier, la demande était tardive ;

- les requérants n'ont pas intérêt à agir ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction est intervenue le 24 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- le code de l'aménagement de la Polynésie française ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. U...,

- et les conclusions de Mme Pena, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 9 mai 2017, le chef du service de l'urbanisme de la Polynésie française a délivré à la SARL " Les Hauts de Taapuna " un permis de travaux immobiliers pour la construction d'un immeuble de 15 logements sur la parcelle référencée AX n° 131 au cadastre de la commune de Punaauia. M. M..., et les autres requérants, résidents du lotissement Taapuna, relèvent appel du jugement du 17 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision.

En ce qui concerne la composition du dossier :

2. Aux termes de l'article A. 114-10 du code de l'aménagement de la Polynésie française : " Le projet architectural comprend : I / Au titre des documents planimétriques : a) Un plan de masse coté établi à une échelle comprise entre 1/200e et 1/500e comportant : / (...) / - le cas échéant (...) l'indication des surfaces nivelées du terrain ; / (...) / - l'implantation des bâtiments existants à maintenir ou à démolir (...) / - le tracé et les caractéristiques des réseaux d'alimentation en eau (du point de raccordement à un réseau d'eau public ou privé, autorisé, jusqu'à la limite de propriété ou à l'ouvrage de comptage s'il existe), d'évacuation des eaux pluviales (des points de collecte jusqu'aux ouvrages d'évacuation ou d'infiltration) et d'eaux usées (des points de collecte jusqu'aux ouvrages d'assainissement ou tabouret de branchement si un réseau collectif est disponible) / (...) ".

3. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

4. S'il est vrai que le plan de masse ne comporte pas le tracé et les caractéristiques des réseaux d'alimentation en eau, le pétitionnaire a fourni à l'appui de sa demande la concession des servitudes de passage extraites de l'acte notarié permettant l'alimentation en eau du projet depuis le lotissement Taapuna. Au vu de cet élément qui était en l'espèce suffisant, le maire de Punaauia a pu indiquer le 13 décembre 2016 que " le raccordement au réseau d'eau potable prévu dans le projet satisfaisait au règlement du service de l'eau potable de la ville de

Punaauia ". L'existence d'un différend entre le pétitionnaire et le lotissement Taapuna sur les servitudes est indifférente quant au caractère suffisant des éléments produits à l'appui de la demande.

5. Par ailleurs, les caniveaux par où s'évacueront les eaux pluviales figurent sur le plan de masse. Les autres pièces du dossier, et notamment l'étude préalable du bureau Begetech qui propose une évacuation par le réseau du lotissement, tandis que la solution retenue en définitive est celle d'une évacuation par la rivière en contrebas étaient suffisants pour permettre à l'administration de se prononcer en connaissance de cause sur la conformité du projet à la réglementation.

6. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance du dossier doit être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance du plan de prévention des risques :

7. Le terrain d'assiette du projet autorisé est situé en zone bleue de risque moyen à fort de mouvement de terrain du plan de prévention des risques de la commune de Punaauia. Cette parcelle est constructible en tenant compte des recommandations du règlement du plan de prévention des risques dont l'article 2.1.1.3 dispose, pour les constructions comportant quatre niveaux et plus : " (...) Les constructions seront autorisées en mettant en oeuvre une étude technique réalisée par un bureau d'étude compétent, afin de définir les mesures de construction adaptées au projet et au site. Dans ce cas, les mesures de protection et de mise en oeuvre préconisées doivent être appliquées/ (...) / Il est précisé qu'une fois l'autorisation obtenue, la réalisation des travaux et la conformité de leur exécution vis-à-vis des règles de construction applicables sont de la responsabilité exclusive des intervenants dans l'acte de bâtir. / L'étude technique devra traiter les points suivants : / 1° Nature géologique et caractéristiques géotechniques du terrain ; / 2° Stabilité des terrains (...) ; / 3° Drainage périphérique aux constructions ; / 4° Mesures de protection et dispositions constructives applicables aux ouvrages (...) ".

8. L'étude technique Begetech jointe au dossier de demande de permis de construire, qui comporte une analyse géomorphologique du site, constate que le terrain est terrassé en déblais et en remblais et recommande une purge intégrale afin de mettre à jour le terrain naturel. Elle comporte les recommandations en matière de terrassement et de dimensionnement particulier des murs de soutènement en prenant en compte les paramètres géomécaniques des matériaux. Elle traite de la question des eaux de ruissellement et relève que le projet ne comporte pas d'anomalie en termes de fondations dès lors que les prescriptions sont respectées. La circonstance que le recul par rapport au talus n'ait pas été prise en compte pour le type de sol en cause, s'agissant de normes susceptibles d'être adaptées au contexte, ne saurait caractériser une insuffisance de cette étude susceptible d'entacher d'illégalité l'autorisation de construire.

En ce qui concerne le règlement du plan général d'aménagement de la commune de Punaauia applicable à la construction autorisée :

9. Aux termes de l'article LP 115-2 du code de l'aménagement de la Polynésie française : " La note de renseignements d'aménagement indique les dispositions d'urbanisme ou d'aménagement et les limitations administratives au droit de propriété applicables à un terrain. Elle indique également si le terrain est constructible au regard des surfaces constructibles mentionnées au code de l'aménagement ou plan d'aménagement de la commune sur laquelle est situé le terrain ". Aux termes de l'article LP 115-3 : " Si une demande de travaux immobiliers est déposée dans un délai de douze (12) mois à compter de la délivrance de la note de renseignements d'aménagement et respecte les dispositions qui y sont mentionnées, celles-ci ne peuvent être remises en cause, à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique ". Les modalités de délivrance des notes d'aménagement sont précisées par les articles A.115-1 à A.115-3 du code de l'aménagement.

10. Il ressort des pièces du dossier que le projet autorisé par la décision attaquée a fait l'objet d'une note de renseignements d'aménagement délivrée le 10 mai 2016. Si, en cause d'appel, les requérants soutiennent que cette note de renseignements, qui aurait été délivrée au vu de pièces fausses ou erronées, serait caduque, les documents exigés par la réglementation se limitent au nom du propriétaire, à un extrait cadastral, à la superficie du terrain et au nom du lotissement. A supposer que le titre annexé relatif à certaines servitudes ait été incomplet, il n'entrait pas au nombre des pièces dont la production était exigée pour la délivrance de la note d'aménagement. Celle-ci n'était donc pas caduque. Par suite, la réglementation fixée par le plan général d'aménagement de la commune de Punaauia rendu exécutoire par arrêté n° 263 CM du 18 mai 2005 était applicable à la demande déposée le 20 décembre 2016.

En ce qui concerne la hauteur des constructions :

11. Aux termes de l'article UCc 10 du règlement du plan général d'aménagement : " Le nombre de niveaux hors sol est limitée à R + 2 + comble. / Les bâtiments ne doivent pas dépasser le gabarit : - limité en façade par une hauteur de 13,50 mètres, appliqué en tout point de la projection horizontale de l'enveloppe extérieure du bâtiment, structure porteuse comprise. La hauteur est calculée à partir du niveau du sol naturel ; / (...) / Toutefois, pour certaines constructions adossées à la montagne ou proches du talus qui ne créent pas de masque gênant pour les propriétés situées en amont (...), un dépassement de ces règles de hauteur peut être admis dans des proportions raisonnables (R + 4 + comble maximum). Ces dispositions feront l'objet d'un avis motivé du maire (...). ".

12. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet autorisé est constitué de deux plateaux, dont le plus élevé est situé en contrebas du lotissement Taapuna. La construction, conçue pour s'adapter à cette topographie, est un immeuble de 15 logements constitué de deux parties qui se rejoignent au niveau du rez-de-chaussée de la première partie, implantée en partie haute (bâtiment A, 5 logements en R + 2 + combles), tandis que la seconde partie (bâtiment B, 10 logements en R + 4 + combles), implantée en partie basse, a son rez-de-chaussée et ses deux premiers niveaux en contrebas du bâtiment A.

13. Les dispositions précitées de l'article UCc 10 du règlement du plan général d'aménagement qui permettent pour les constructions adossées à la montagne, ce qui est le cas en l'espèce, de porter le nombre de niveaux à R+4 + comble autorisent de ce fait les constructions comportant cinq niveaux d'habitation. Il n'y a pas lieu de regarder comme un rez-de-chaussée l'espace sous pilotis situé au niveau du jardin qui n'est pas un étage d'habitation. La construction autorisée n'excède donc pas la limite R + 4 + comble posée par ces dispositions. Si la hauteur du bâtiment B est de 22,26 m par rapport au terrain naturel, ce dépassement conserve des proportions raisonnables au sens de l'article UCc 10. La construction ne crée pas de masque gênant pour les propriétés situées en amont, ni pour celle de M. M..., dont la propriété est située en contrebas de la construction et dont la vue n'est pas masquée par elle.

En ce qui concerne les prospects :

14. Aux termes de l'article UCc7 du plan général d'aménagement : " Les constructions doivent respecter un recul D de la limite séparative au plan vertical des façades en fonction de la hauteur H suivant la formule D= H/2 avec un recul minimal de 4 mètres ". Le plan définit la hauteur comme la dimension verticale d'une façade et précise qu'elle est mesurée à partir du sol existant jusqu'au sommet du bâtiment, en son milieu, à l'aplomb de sa projection au sol.

15. Si les requérants soutiennent que la limite séparative n'est pas respectée s'agissant de la propriété de M. M..., cette affirmation n'est assortie d'aucun élément permettant à la Cour de déterminer la situation de cette propriété par rapport aux différentes façades du bâtiment, dont les hauteurs varient de manière très sensible suivant l'orientation, et donc de se prononcer sur le bienfondé de ce moyen. Par ailleurs, si le parking en extension sur la façade est du bâtiment devrait être construit en élévation, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il comporterait une façade. Les dispositions invoquées ne lui sont pas dès lors applicables. Le moyen tiré de ce que l'accord des voisins n'a pas été produit au dossier de demande doit être écarté par voie de conséquence.

En ce qui concerne les places de stationnement :

16. Aux termes de l'article 9 du règlement du plan général d'aménagement : " (...) Pour le calcul des aires de stationnement, on retiendra une surface de 25 m² par véhicule particulier comprenant la place proprement dite et l'aire de manoeuvre. Les dimensions minimales sont de 2,50 mètres par 5,00 mètres. (...) ".

17. Si sur le plan du niveau rez-de-chaussée figure une longueur de 4,90 mètres pour les places de stationnement n°20 à 27 et pour les places du parc visiteurs n°02 et 03, cette indication ne correspond pas à l'espace effectif offert au stationnement des véhicules qui, concrètement, satisfait à l'exigence d'une dimension minimale de 5 mètres. Il ne ressort pas par ailleurs des documents graphiques que l'aire de manoeuvre d'environ 400 m2 pour une superficie totale de

1 126 m2 et les voies de circulation seraient insuffisantes.

18. Aux termes de l'article A 132-6 du code de l'aménagement : " Tout parc de stationnement automobile intérieur ou extérieur, dépendant d'une installation ouverte au public, doit comporter une place aménagée pour les handicapés par tranche de 20 places ou fraction de 20 places en sus ". En vertu du 4° de l'article D 132-2 du même code, ces dispositions, relatives à l'accessibilité aux personnes handicapées, ne s'appliquent qu'aux grands programmes d'habitation en immeubles collectifs, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Les dispositions du 1° du même article qui visent la voirie publique, les parties de la voirie privée qui reçoivent du public ou desservent des établissements recevant du public, et, de manière générale, tous les espaces publics ou privés aménagés en vue de leur utilisation par le public ne trouvent pas davantage à s'appliquer à ce petit immeuble de quinze logements. Le moyen tiré de l'insuffisance de places de stationnement pour handicapés doit être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance des exigences réglementaires en matière d'accès et d'adduction en eau :

19. D'une part, aux termes de l'article LP 114-6 du code de l'aménagement de la Polynésie française : " (...) § 2. Les autorisations de travaux immobiliers ne peuvent être accordées que si les travaux, constructions et aménagements projetés sont conformes aux dispositions réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords (...). / § 3. L'autorité compétente en matière d'urbanisme vérifie, avant d'accorder une autorisation de travaux immobiliers, la conformité du projet avec les dispositions réglementaires mentionnées au §.2. (...) / Les autorisations de travaux immobiliers sont délivrées sous réserve des droits des tiers. Il appartient aux personnes qui s'estiment lésées par la construction, l'aménagement ou les travaux d'engager les démarches nécessaires devant le tribunal compétent. (...). " D'autre part, aux termes l'article UCc 3 du règlement du PGA : " Pour être constructible un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fonds voisin. (...). " Aux termes de l'article UCc 4 du même règlement : " Toute construction à usage d'habitation doit être raccordée au réseau public d'alimentation en eau dans des conditions conformes aux règlements en vigueur. (...)".

20. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet autorisé est accessible par les voies du lotissement Taapuna et qu'il peut être raccordé aux réseaux de ce lotissement notamment en ce qui concerne l'eau. Si un désaccord existe entre les requérants et le pétitionnaire sur la portée des stipulations de la convention du 12 décembre 2002 conclue entre le propriétaire du terrain et le lotisseur qui règle les servitudes de passage et de branchement, et notamment sur le point de savoir si ces servitudes peuvent bénéficier à un immeuble collectif, l'existence de ce litige de droit privé entre la SARL " Les Hauts de Taapuna " et l'association syndicale libre du lotissement Taapuna, ne peut être utilement invoquée pour contester la légalité du permis de construire.

En ce qui concerne le choix d'un assainissement de type individuel :

21. Aux termes de l'article UCc4 du plan général d'aménagement : " Toute construction ou installation doit être raccordée au réseau public d'assainissement s'il existe (...) / A défaut de réseau public d'assainissement et si la nature du sol le permet, les constructions ou installation devront comporter un dispositif d'assainissement individuel ou collectif suffisant à la construction ou à l'installation et conforme aux normes territoriales en vigueur. / L'évacuation d'eaux usées non traitées dans les rivières, fossés ou égouts d'eaux pluviales est interdite ".

22. Il est constant qu'il n'existe pas de réseau d'assainissement collectif auquel l'immeuble dont la construction est autorisée pourrait se raccorder. Il ressort de l'étude du bureau technique Begetech, que n'entache aucune insuffisance et qui comporte des recommandations appropriées, que la mise en place d'un assainissement individuel est possible. Le centre d'hygiène et de salubrité publique a émis un avis favorable à ce dispositif, le 24 avril 2017, en l'assortissant de préconisations strictes. Par ailleurs, le permis de travaux immobiliers est assorti de prescriptions relatives à l'exécution de ces ouvrages et aux justificatifs à fournir lors de la demande de certificat de conformité. Si les requérants soulignent les inconvénients, au demeurant peu contestables, du choix d'un assainissement individuel pour un immeuble de quinze logements, leur argumentation ne permet pas d'établir que le dispositif agréé serait insuffisant ni qu'il présenterait des risques pour la santé et la salubrité publique.

En ce qui concerne l'évacuation des eaux pluviales :

23. Il ressort des pièces du dossier que si, dans l'étude technique préalable avait envisagé une collecte des eaux pluviales par les caniveaux, le dossier de demande précise que l'évacuation se fera par déversement dans le ruisseau adjacent. Cette formule a reçu l'accord du centre d'hygiène et de salubrité publique et celui de la direction de l'équipement du 13 février 2017 sous réserve de prescriptions techniques assurant le respect des obligations posées par les articles D.333-1 et D.333-2 du code de l'aménagement. Il résulte de ce dernier avis que le ruisseau se raccorde au réseau d'assainissement de la commune. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'autorité administrative peut délivrer une autorisation de construire subordonnée au respect des obligations dont elle est assortie. Le permis étant délivré sous réserve des droits des tiers, le pétitionnaire n'avait pas à justifier de l'autorisation éventuellement nécessaire pour le passage de la canalisation par la parcelle AX9. Dès lors que la direction de l'équipement avait déterminé les prescriptions qui s'appliqueraient à l'évacuation des eaux pluviales, auxquelles se référait le permis de construire, et qu'il n'est ni établi ni même soutenu que ces prescriptions auraient été insuffisantes, l'autorisation pouvait être accordée sans qu'aient été effectué un calcul de vitesse d'écoulement des eaux ou envisagé un ouvrage de dispersion, qui ne s'imposaient pas compte tenu de la superficie imperméabilisée. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que le choix retenu provoquerait une aggravation des risques naturels dans la zone.

En ce qui concerne le passage des véhicules incendies :

24. La direction de l'équipement, dans son avis du 9 mai 2017, s'est bornée à relever qu'il convenait simplement de s'assurer que la route d'accès permettait l'accès et le retournement des engins de secours. Le maire de Punaauia, dans son avis du 13 décembre 2016 qui porte notamment sur la sécurité incendie, a indiqué que le chemin d'accès faisait plus de quatre mètres de large. Aucun des documents et études figurant au dossier de demande ne fait état de difficultés particulières d'accès à la parcelle. En particulier, les dessertes ont une bande de roulement de 4,60 à 5,30 mètres et elles ne sont en aucun point d'une largeur inférieure à 3,30 mètres. Le constat de l'huissier mandaté par M. M... n'infirme pas ces mesures. S'il affirme qu'un virage en épingle à cheveux serait susceptible d'être difficile à négocier par des véhicules lourds, cette opinion n'est pas suffisante pour infirmer l'avis des services techniques qui n'ont pas relevé de problème d'accessibilité particulière.

25. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que M. M... et les autres requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Papeete a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

26. La Polynésie française n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions des requérants présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge solidaire des requérants une somme globale de 1 500 euros à verser à la Polynésie française et une somme globale de 1 500 euros à verser à la SARL " Les Hauts de Taapuna " au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. M... et autres est rejetée.

Article 2 : M. M... et autres verseront une somme globale de 1 500 euros à la Polynésie française et une somme globale de 1 500 euros à la SARL " Les Hauts de Taapuna " sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. O... M..., à Mme G... X..., à M. T... I..., à M. AC..., à Mme Q... L..., à M. R... A..., à Mme E... C... épouse A..., à M. B... P..., à Mme J... V... épouse P..., à M. S... F..., à Mme Z... H..., à M. AB... K..., à la Polynésie française et à la SARL " Les Hauts de Taapuna ".

Copie en sera adressée pour information au Haut-Commissaire de la République en Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2020, à laquelle siégeaient :

- M. W..., premier vice-président,

- M. U..., président assesseur,

- Mme Mornet, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 9 juin 2020.

Le rapporteur,

Ch. U...Le président,

M. W...

Le greffier,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au ministre des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA02828


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02828
Date de la décision : 09/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Outre-mer - Droit applicable - Lois et règlements (hors statuts des collectivités) - Collectivités d'outre-mer et Nouvelle-Calédonie - Polynésie française.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : SELARL MetH

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-06-09;18pa02828 ?
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