Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B..., Mme L... P..., Mme E... R..., M. A... N... et M. I... F..., ont demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 5 avril 2016 par lequel le maire de la commune de Saint-Denis (La Réunion) a délivré au groupe SPAG " Serpentines " un permis de construire pour la réalisation de 34 logements au 5 allée des serpentines à Bellepierre.
Par un jugement n° 1600692 du 6 juillet 2017 le tribunal administratif de La Réunion a donné acte du désistement d'instance de M. G... et de M. D... et rejeté la demande des autres requérants.
Procédure devant la Cour :
Par une ordonnance n° 428220 du 1er mars 2019, prise sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, le président de la section du contentieux du Conseil d'État a attribué à la Cour administrative d'appel de Paris le jugement du dossier d'appel enregistré à la Cour administrative d'appel de Bordeaux.
Par une requête et des mémoires enregistrés les 27 septembre 2017, 23 juillet 2018, 12 juillet et 25 novembre 2019 et le 11 février 2020, M. C... B..., Mme L... P..., Mme E... R..., M. A... N..., et M. I... F..., représentés par Me M..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 6 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté leur requête ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 avril 2016 par lequel le maire de la commune de Saint-Denis a délivré à la société " Groupe SPAG Serpentines " un permis de construire pour la réalisation de 34 logements au 5 allée des serpentines à Bellepierre ;
3°) de mettre à la charge de la société " Groupe SPAG Serpentines " et de la commune de Saint-Denis une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur requête est recevable : ils ont intérêt et qualité pour agir, ont respecté le délai de recours courant à compter de l'affichage du permis de construire et justifient de la notification de leur requête dans les conditions prévues à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;
- l'arrêté litigieux est entaché d'incompétence de son auteur ;
- Il méconnait le plan de prévention des risques naturels prévisibles et l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme;
- Il méconnait également le principe de précaution ;
- Il est contraire à l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- il porte atteinte à la sécurité de la circulation et méconnaît à ce titre les articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme ;
- il méconnaît enfin le cahier des charges du lotissement dans lequel est situé le terrain d'assiette du projet.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 novembre 2017, la commune de Saint-Denis, représentée par Me J..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens de la requête sont infondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 novembre 2017 et 13 août 2018, le Groupe SPAG " Serpentines ", représenté par Me O..., conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de la requête, et subsidiairement, à son rejet au fond et à la confirmation du jugement attaqué, et à ce que soit mis à la charge de M. B..., Mme P..., Mme R..., M. N..., et M. F... le versement d'une somme de 2000 euros, chacun, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- faute pour les requérants de justifier de leur intérêt à agir, leur requête est irrecevable ;
- les moyens de la requête sont infondés.
Les parties ont été informées le 5 décembre 2019, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de mettre en oeuvre les dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme en raison du vice d'incompétence de l'auteur de l'acte affectant l'arrêté litigieux.
Des observations en réponse à cette communication, ont été respectivement présentées le 9 décembre 2019 pour le Groupe SPAG " Serpentines " et pour les requérants.
Une note en délibéré présentée pour la commune de Saint-Denis a été enregistrée le 13 décembre 2019 après l'audience du 12 décembre 2019,
L'instruction a été rouverte par une ordonnance en date du 17 janvier 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme K...,
- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 5 avril 2016, le maire de la commune de Saint-Denis a délivré à la société " Groupe SPAG Serpentines " un permis de construire pour la réalisation d'un immeuble de 34 logements en R + 5 avec 2 niveaux de sous-sol affectés au stationnement au 5 allée des serpentines au lieu-dit Bellepierre. Des riverains de la construction projetée ont saisi le tribunal administratif de la Réunion d'une demande tendant à l'annulation de ce permis de construire. Par jugement du 6 juillet 2017, dont M. B... et autres relèvent appel, le tribunal administratif de la Réunion a rejeté leur requête.
Sur la fin de non-recevoir soulevée par le Groupe SPAG " Serpentines " tiré du défaut d'intérêt à agir des requérants :
2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci.
4. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
5. Il ressort des pièces du dossier que le domicile respectif de M. B... et de Mme P... est situé à proximité immédiate du terrain d'assiette du projet. Les intéressés invoquent les risques pour la stabilité des sols et de survenance éventuelle de désordres dans leurs maisons, liés aux travaux nécessités par le projet, ainsi que les conséquences de cette construction sur la circulation dans l'allée des Serpentines et, ainsi, des atteintes à leur conditions d'occupation d'utilisation ou de jouissance de leur bien. Ils justifient donc d'un intérêt à agir contre le permis de construire en cause. Si des problèmes d'identification de l'adresse de certains autres requérants sont relevés par le Groupe SPAG Serpentines, cette circonstance est sans incidence sur la recevabilité de la requête, qui étant présentée collectivement et M. B... et Mme P... ayant intérêt à agir, celle-ci est recevable.
Sur la légalité de l'arrêté litigieux :
En ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'acte :
6. Le permis de construire du 5 avril 2016 a été signé pour le maire de la commune de Saint-Denis par M. Q... H..., adjoint, auquel, par l'arrêté n°1596/2014 du 28 avril 2014, le maire de la commune de Saint-Denis a délégué la gestion et le suivi des affaires relatives à l'urbanisme réglementaire, dont les permis de construire, ledit arrêté comportant délégation de signature pour tous documents y afférents. Si la mention de la date de cet arrêté de délégation n'a pas été complétée au-dessus de la signature du maire, cette circonstance est par elle-même sans incidence sur sa régularité, dès lors que l'arrêté comporte un tampon daté du 28 avril 2014 et la mention de sa télétransmission, le même jour, aux services de la préfecture. Toutefois, la commune de Saint-Denis n'établit pas la publication effective, qui conditionne son entrée en vigueur, de cet arrêté dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales, dès lors qu'elle s'est bornée à produire à la Cour, le 13 décembre 2019, une page de couverture du recueil des actes administratifs de la ville, du 2ème trimestre 2014, dépourvue de tout sommaire ou de toute table des matières, qui ne démontre pas que ce recueil aurait comporté la publication de l'arrêté en cause dont s'agit. Par suite, M. B... et autres sont fondés à soutenir que l'arrêté contesté est entaché d'un vice d'incompétence.
En ce qui concerne la méconnaissance des dispositions du plan de prévention des risques naturels prévisibles de la commune de Saint-Denis et de celles de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme :
7. Il ressort du rapport de présentation du plan de prévention des risques naturels prévisibles de la commune de Saint-Denis approuvé le 17 octobre 2012, qu'il a pour objet de délimiter les zones exposées aux risques et de prescrire, le cas échéant, les conditions dans lesquelles les constructions autorisées peuvent être réalisées. Il est constant que le terrain d'assiette de l'immeuble projeté est situé en zone B3 de ce plan, qui correspond à une zone bleue, moyennement ou faiblement exposée aux aléas de mouvement de terrain et d'inondation, et constructible avec prescriptions. Dans cette zone, sont notamment autorisés d'une part, les aménagements liés à la desserte de parcelles, à la condition de démontrer la non-aggravation des risques naturels par la production d'une attestation du maître d'oeuvre, d'autre part, les logements et toutes constructions nouvelles, pour lesquelles la cote du premier plancher devra se situer au-dessus de la cote de référence en cas d'aléa d'inondation non nul, et enfin les parkings souterrains et sous-sols, sous réserve que toutes les dispositions techniques soient prises pour éviter les infiltrations d'eau ou faire face à une éventuelle inondation, et que soit réalisée une étude préalable dont le maître d'oeuvre devra attester. Ce plan dispose que la nature et les conditions d'exécution des mesures de prévention prises pour l'application du règlement sont définies et mises en oeuvre sous la responsabilité du maître d'ouvrage et du maître d'oeuvre concernés par la construction.
8. Aux termes de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date du permis de construire contesté : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : (...) / e) Lorsque la construction projetée est subordonnée par un plan de prévention des risques naturels prévisibles (...) approuvés, ou rendus immédiatement opposables en application de l'article L. 562-2 du code de l'environnement, (...), à la réalisation d'une étude préalable permettant d'en déterminer les conditions de réalisation, d'utilisation ou d'exploitation, une attestation établie par l'architecte du projet ou par un expert certifiant la réalisation de cette étude et constatant que le projet prend en compte ces conditions au stade de la conception ; ".
9. Il appartient au juge, saisi d'un moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme de s'assurer de la production, par le pétitionnaire, d'un document établi par l'architecte du projet ou par un expert attestant qu'une étude a été menée conformément aux exigences de la règlementation et que ses résultats ont été pris en compte au stade de la conception du projet. Il ne saurait en revanche, dans ce cadre, porter une appréciation sur le contenu de l'étude et son caractère suffisant au regard des exigences des plans de prévention des risques qui en imposent la réalisation.
10. Il ressort du dossier de demande du permis de construire que, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme, il comporte une attestation en date du 22 février 2016 par laquelle l'architecte certifie que le projet inscrit en zone bleue prend en compte au stade de la conception, l'étude de sol menée sur la parcelle et les conditions du plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé sur la commune de Saint-Denis. Ainsi, selon cette attestation, les prescriptions d'études préalables prévues pour la zone B3 par le plan de prévention des risques naturels prévisibles ont été respectées. Si, par ailleurs, les requérants soutiennent que, contrairement à ce que prévoient les dispositions du plan de prévention des risques, l'ouvrage n'a pas fait l'objet d'une étude géotechnique de dimensionnement avec calcul de stabilité, ces prescriptions ne concernent en réalité que les zones B2u, du fait d'une plus grande intensité et fréquence des aléas, et non pas la zone B3 dans laquelle se situe la construction envisagée. Les moyens tirés de la méconnaissance du plan de prévention des risques naturels prévisibles ainsi que des dispositions de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme doivent, par suite, être écartés.
En ce qui concerne la méconnaissance du principe de précaution :
11. Selon le principe de précaution, l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable. S'il appartient à l'autorité administrative compétente de prendre en compte le principe de précaution lorsqu'elle se prononce sur l'octroi d'une autorisation délivrée en application de la législation sur l'urbanisme, les dispositions de l'article 5 de la Charte de l'environnement de 2004 ne permettent pas de refuser légalement la délivrance d'une autorisation d'urbanisme en l'absence d'éléments circonstanciés sur l'existence, en l'état des connaissances scientifiques, de risques, même incertains, de nature à justifier un tel refus d'autorisation.
12. En l'espèce, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir du principe de précaution dès lors qu'ils invoquent des risques qui sont pris en compte par le plan de prévention des risques naturels prévisibles. S'ils font référence à des glissements de terrain et éboulements, il ressort dudit plan que, dans les secteurs soumis à ces aléas, qui sont classés en zone B2u, s'applique une réglementation spécifique par rapport à ces contraintes, alors que la zone B3 où se situe le projet n'est pas concernée par celles-ci. Les requérants ne sont pas davantage fondés à évoquer au titre de ce même principe, l'éventualité d'une déstructuration des sols par l'effet de la construction de l'immeuble projeté, dès lors que ce risque ressortit uniquement aux modalités de la construction, lesquelles reposent sur la responsabilité des maîtres d'ouvrage et d'oeuvre. En outre, le plan de prévention des risques prévoit, dans ses recommandations générales applicables à l'ensemble du territoire communal, que les aménagements ne doivent pas aggraver les risques naturels existants et leurs effets, y compris durant la phase " chantier ". Enfin, les requérants n'apportent aucun élément circonstancié susceptible d'établir l'existence alléguée d'un risque de mouvements de terrain accru dans le secteur en cause qui serait lié à l'augmentation des précipitations compte tenu de modifications climatiques.
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :
13. Aux termes des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Si les requérants se prévalent d'une étude datant de 1992 et relative aux éboulements de la falaise atteignant des zones situées dans la rivière Saint-Denis en contrebas, il ne ressort pas de ladite étude que des éboulements risqueraient de provenir de la parcelle concernée par la construction, dès lors que cette dernière ne se situe pas en bord de falaise mais en retrait de celle-ci de plus de 50 mètres, ainsi qu'il est établi par un procès-verbal d'huissier du 20 juillet 2016 produit au dossier, cette circonstance justifiant au demeurant que ce secteur ne soit pas, à l'instar de ladite falaise, classé en zone rouge au plan de prévention des risques. Par ailleurs, si les requérants font valoir qu'à l'instar de la construction d'un immeuble récent, qui a eu pour effet de provoquer des désordres sur une copropriété voisine, l'édification projetée par le permis de construire aura des conséquences sur la déstructuration des sols, ils ne ressort pas des pièces du dossier que cette occurrence serait susceptible de se reproduire, alors qu'il s'infère d'une expertise du 12 novembre 2013 qu'ils ont eux-mêmes produite au dossier, que lesdits désordres étaient en réalité imputables à une défectuosité d'ordre technique affectant la réalisation des soutènements des parois de l'excavation réalisée dans le terrain d'assiette de l'immeuble. Enfin si les requérants font état de fissures affectant des maisons du même quartier, aucun élément au dossier ne révèle leur imputabilité à cette construction. Il ne ressort donc pas des pièces du dossier que le maire de la commune de Saint-Denis aurait, en délivrant le permis de construire litigieux, commis une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la possible aggravation des risques naturels, au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
En ce qui concerne la méconnaissance des articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme :
14. Les requérants ne sont pas fondés à invoquer, au titre des conditions d'insécurité de la circulation générées par la construction prévue, les dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme, dès lors qu'aux termes de l'article R. 111-1 du même code, elles ne sont pas applicables dans les territoires dotés d'un plan local d'urbanisme.
15. Les requérants invoquent également la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, citées ci-dessus au point 10. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que la construction de l'immeuble, quoique prévu pour comporter 43 places de stationnement réparties dans des parkings en sous-sol et en extérieur, aurait pour effet d'aggraver les problèmes d'encombrement de la voie publique par des stationnements non autorisés, dès lors que ces derniers sont en réalité la conséquence des débords de l'institut universitaire de formation des maîtres et d'un centre hospitalier situés dans le secteur, et ainsi étrangers à la question du permis de construire en cause. En outre, les documents produits sont relatifs à la période 2008/2010 alors que, l'institut universitaire de formation des maîtres s'est désormais en partie relocalisé ailleurs. Il ne ressort, en outre, notamment pas du constat d'huissier du 20 juillet 2016, ni de celui du 16 juillet 2019, que l'encombrement des stationnements sur la voie publique tels qu'invoqué revête un caractère permanent. Enfin, la présence d'un terre-plein utilisé comme parking et situé à côté du terrain d'assiette du projet peut contribuer à la surcharge de circulation invoquée, dont le lien de causalité avec la densité des constructions dans le secteur n'est pas démontrée par les documents versés au dossier, tandis que le constat d'huissier de 2016 relève que la circulation y est fluide. Il ressort du même constat d'huissier que la voie publique au droit du terrain d'assiette du projet est d'une largeur de 7 mètres, qui ne caractérise pas l'étroitesse alléguée par les requérants, et qu'il est prévu qu'elle soit portée à 8 mètres au droit du futur immeuble, cet élargissement faisant l'objet d'un emplacement réservé inscrit au plan local d'urbanisme. La dégradation de l'état de la chaussée de la voie publique invoquée par les requérants n'est établie que par des documents datant de 2008, alors qu'il ressort du constat d'huissier du 20 juillet 2016 qu'à cette dernière date, ladite chaussée se trouvait en bon état. Dans ces conditions, il n'est pas établi que l'accès des véhicules de secours serait rendu très difficile du fait des conditions de circulation. Il ne ressort dès lors pas des pièces du dossier que le maire de la commune de Saint-Denis aurait, en délivrant le permis de construire litigieux, commis une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la sécurité de la circulation et de l'accès à la voie publique, au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
En ce qui concerne la méconnaissance du cahier des charges du lotissement les Alizés :
16. Aux termes de l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme : " Les règles d'urbanisme contenues dans les documents du lotissement, notamment le règlement, le cahier des charges s'il a été approuvé ou les clauses de nature réglementaire du cahier des charges s'il n'a pas été approuvé, deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu. / De même, lorsqu'une majorité de colotis a demandé le maintien de ces règles, elles cessent de s'appliquer immédiatement si le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu, dès l'entrée en vigueur de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové. / Les dispositions du présent article ne remettent pas en cause les droits et obligations régissant les rapports entre colotis définis dans le cahier des charges du lotissement, ni le mode de gestion des parties communes. (...) ".
17. Il ressort d'un courrier du maire de la commune de Saint-Denis du 3 mars 2010 produit au dossier que, si le règlement du lotissement " Les Alizées " a été arrêté en dernier lieu après modification, en 1965, il n'a ultérieurement fait l'objet d'aucune prorogation. En outre, et en tout état de cause, les règles d'urbanisme contenues dans le cahier des charges du lotissement, dans lesquelles entrent les dispositions relatives au nombre d'étages de l'immeuble et à la zone non aedificandi de la parcelle d'assiette, qui ne constituent pas des obligations régissant les rapports entre colotis telles que définies dans le troisième alinéa de cet article, ont, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme, cessé d'être applicables au plus tard le 26 mars 2014, date de l'entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014. Par suite, le moyen tiré de ce que le projet serait contraire aux dispositions de ce cahier des charges relativement aux règles précitées, est inopérant
18. Il résulte de tout ce qui précède que seul le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte est de nature à justifier l'annulation du permis de construire litigieux.
Sur la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :
19. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par un permis modificatif peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si un tel permis modificatif est notifié dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations ".
20. Il résulte de ce qui a été dit aux points 6 et 18 que seul le vice d'incompétence de son auteur entache d'illégalité l'arrêté du 5 avril 2016 par lequel le maire de la commune de Saint-Denis a délivré au groupe SPAG " Serpentines " un permis de construire. Un tel vice est susceptible de faire l'objet d'une régularisation par la délivrance d'un permis modificatif signé par une autorité compétente à cette fin.
21. Dans ces conditions, il y a lieu, en l'espèce, en application des dispositions précitées de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, de surseoir à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation du permis de construire, afin de permettre la régularisation, par un permis modificatif, du vice tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté du 5 avril 2016, et d'impartir au groupe SPAG " Serpentines " un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt aux fins d'obtenir et notifier à la cour la modification du permis de construire initial.
DÉCIDE :
Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de M. B... et autres jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, pour permettre au groupe SPAG " Serpentines " de notifier à la Cour un permis de construire modificatif régularisant le vice mentionné au point 6.
Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me M..., représentant M. C... B..., Mme L... P..., Mme E... R..., M. A... N... et M. I... F..., à Me J..., représentant la commune de Saint-Denis et à Me O..., représentant le groupe SPAG " Serpentines ".
Copie en sera adressée au préfet de La Réunion, préfet de la région La Réunion.
Délibéré après l'audience du 27 février 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (premier alinéa) et R. 222-6 (premier alinéa) du code de justice administrative,
- M. Legeai, premier conseiller ;
- Mme K..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition greffe de la Cour, le 19 mai 2020.
Le président de la formation de jugement,
S. DIÉMERT
La République mande et ordonne au préfet de La Réunion, préfet de la région La Réunion en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA23191