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11/02/2020 | FRANCE | N°19PA00668

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 11 février 2020, 19PA00668


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des rappels d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2011 à 2013.

Par un jugement n° 1718868/2-2 du 10 décembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 7 février et 24 juin 2019, M. A..., représenté par Me Hervé-Ant

oine Couderc, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1718868/2-2 du 10 décembre 2018 du T...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des rappels d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2011 à 2013.

Par un jugement n° 1718868/2-2 du 10 décembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 7 février et 24 juin 2019, M. A..., représenté par Me Hervé-Antoine Couderc, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1718868/2-2 du 10 décembre 2018 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée devant le tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'insuffisance de motivation en ce qu'il ne répond pas à certains arguments invoqués à l'appui des moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, et des I bis et I ter de l'article 170 de l'annexe IV à ce code ;

- la procédure de contrôle était irrégulière, tant au regard de la loi que de la doctrine, dès lors que la proposition de rectification était insuffisamment motivée et que l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales en ne l'informant pas des documents obtenus auprès du directeur des finances publiques de la Nouvelle-Calédonie ;

- l'administration a fait une application erronée des dispositions du 4 de l'article 199 undecies A et de l'article 217 undecies du code général des impôts en appréciant le seuil de 2 millions d'euros par " programme immobilier " alors que ce seuil s'apprécie, selon le c du 2 du même article, par rapport au prix de souscription de parts ou d'actions de sociétés et que les investissements visés sont ceux réalisés par le contribuable lui-même, ainsi que le prévoient l'instruction référencée 5 B-1-06 du 9 janvier 2006, qui mentionne un critère unique lié au montant de la souscription au capital, et le BOFIP du 12 septembre 2012, qui mentionne les souscriptions réalisées par les personnes physiques ;

- l'administration ne peut se contenter de se fonder sur l'avis rendu par le Conseil d'Etat sous le n° 41360, en contradiction avec les conclusions du rapporteur public, dès lors que les avis ne sont pas des décisions contentieuses et ne lient ni l'administration ni le juge ;

- l'article 170 decies de l'annexe IV au code général des impôts n'a pas pour objet de définir les modalités de détermination du seuil de 2 millions d'euros au-delà duquel un agrément préalable devient nécessaire, mais de préciser l'autorité administrative compétente pour octroyer l'agrément ;

- la doctrine administrative référencée BOI-IR-RICI-80-30-20130826 publiée le 26 août 2013 a irrégulièrement ajouté à la loi.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

En application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative la clôture d'instruction a été fixée au 24 juin 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Jeorca, sise à Nouméa, a créé en 2011 quatorze sociétés civiles immobilières (SCI) auxquelles elle a revendu deux " lots-volume " d'un programme immobilier en Nouvelle-Calédonie. En décembre 2011, M. A... a souscrit à l'augmentation de capital social de l'une de ces SCI, la SCI Alaska, domiciliée à Nouméa, à concurrence de la somme de 41 900 euros. A ce titre, il a bénéficié d'une réduction d'impôt sur le revenu au titre des années 2011 à 2013 sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies A du code général des impôts. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a remis en cause cet avantage fiscal et a assujetti M. A..., au titre des trois années concernées, à des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales dont l'intéressé a demandé, en vain, au Tribunal administratif de Paris de le décharger en droits et pénalités. Par la requête susvisée, M. A... relève appel du jugement n° 1718868/2-2 du 10 décembre 2018 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Si le requérant reproche au tribunal un défaut de réponse à des conclusions, il résulte du dossier de première instance, transmis à sa demande à la Cour, que les premiers juges ont statué sur l'ensemble des conclusions qui leur étaient soumises par M. A... dans ses écritures de première instance. Le moyen tiré de l'omission à statuer sur des conclusions doit, par suite, être écarté comme non fondé. Par ailleurs, il ressort des points 4 à 6 du jugement attaqué que le tribunal a répondu de manière suffisante au moyen tiré de ce que l'administration aurait méconnu les dispositions de l'article L.76 B du livre des procédures fiscales, et que son jugement satisfait, à cet égard, à l'obligation de motivation posée par l'article L. 9 du code de justice administrative. Par ailleurs, dès lors que le tribunal a estimé que l'administration était légalement fondée à remettre en cause la réduction d'impôt en litige sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies A et du III de l'article 217 undecies du code général des impôts, il n'était pas tenu de répondre au moyen, inopérant, tiré de la méconnaissance des dispositions des I bis et I ter de l'article 170 de l'annexe IV à ce code.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, M. A... reprend devant la Cour les moyens invoqués par lui en première instance et tirés de ce que l'administration lui aurait adressé une proposition de rectification insuffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales et aurait méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du même livre en ne l'informant pas de manière suffisamment précise sur la nature et l'origine des documents sur lesquels elle s'était fondée pour procéder aux rectifications litigieuses et en ne lui communiquant pas l'ensemble de ces documents. Toutefois et ainsi que l'ont exposé à bon droit les premiers juges aux points 3 et 5 de leur jugement, dont il y a lieu pour la Cour d'adopter les motifs, ces moyens sont dépourvus de fondement. En effet, alors même que la proposition de rectification est intervenue après un simple contrôle sur pièces du dossier fiscal de M. A..., celui-ci a été mis à même de discuter utilement des rectifications envisagées et de demander, s'il le souhaitait, la communication des documents mentionnés dans cette proposition par le vérificateur, qui en avait indiqué de manière suffisamment précise l'origine et la teneur et avait d'ailleurs spontanément annexé une partie d'entre eux à sa proposition.

4. En second lieu, les circulaires et instructions de l'administration traitant de questions touchant la procédure d'imposition ne peuvent pas être regardées comme comportant une "interprétation de la loi fiscale" au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales. En conséquence, M. A... ne peut utilement, sur le fondement du 2ème alinéa de cet article L.80 A, se prévaloir des mentions figurant au bulletin officiel des finances publiques-impôts sous la référence BOI-CF-IOR-10-40 n°40,12-09-2012, pour contester la régularité de la procédure d'imposition.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

5. Aux termes de l'article 199 undecies A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " 1. Il est institué une réduction d'impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui investissent dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises (...) : / 2. La réduction d'impôt s'applique : / (...) b) Au prix de revient de l'acquisition ou de la construction régulièrement autorisée par un permis de construire d'un immeuble neuf situé dans les départements ou collectivités visés au 1, que le propriétaire prend l'engagement de louer nu dans les six mois de l'achèvement ou de l'acquisition si elle est postérieure pendant cinq ans au moins à des personnes, autres que son conjoint ou un membre de son foyer fiscal, qui en font leur habitation principale / c) Au prix de souscription de parts ou actions de sociétés dont l'objet réel est exclusivement de construire des logements neufs situés dans les départements ou collectivités visés au 1 et qu'elles donnent en location nue pendant cinq ans au moins à compter de leur achèvement à des personnes, autres que les associés de la société, leur conjoint ou les membres de leur foyer fiscal, qui en font leur habitation principale. Ces sociétés doivent s'engager à achever les fondations des immeubles dans les deux ans qui suivent la clôture de chaque souscription annuelle. Les souscripteurs doivent s'engager à conserver les parts ou actions pendant cinq ans au moins à compter de la date d'achèvement des immeubles ; 4. Lorsque le montant des investissements mentionnés aux b, c, d, f, g et h du 2 est supérieur à deux millions d'euros, le bénéfice de la réduction d'impôt est conditionné à l'obtention d'un agrément préalable délivré par le ministre chargé du budget dans les conditions prévues au III de l'article 217 undecies.".

6. Aux termes du III de l'article 217 undecies du code général des impôts, dans sa version applicable : " 1. Pour ouvrir droit à déduction, les investissements mentionnés au I (...) doivent avoir reçu l'agrément préalable du ministre chargé du budget, après avis du ministre chargé de l'outre-mer. L'organe exécutif des collectivités d'outre-mer compétentes à titre principal en matière de développement économique est tenu informé des opérations dont la réalisation le concerne ".

7. D'une part, M. A... soutient que c'est au prix d'une interprétation et d'une application erronées des dispositions rappelées aux deux points précédents que l'administration a estimé que le seuil de deux millions d'euros, à partir duquel un agrément ministériel était nécessaire, devait s'apprécier non pas au regard des souscriptions au capital des sociétés, mais au regard du coût total du programme immobilier en vue duquel les souscriptions de parts ou d'actions de sociétés ont été réalisées. Toutefois, et par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal aux points 8 à 10 de son jugement, ce moyen ne peut qu'être écarté comme non fondé.

8. D'autre part, dès lors que l'administration était fondée, en application des seules dispositions rappelées ci-dessus aux points 4 et 5, à considérer que constituent un programme immobilier, les bâtiments collectifs ou les ensembles de logements individuels faisant l'objet d'une même demande de permis de construire, le requérant ne peut utilement soutenir que l'article

170 decies de l'annexe IV au code général des impôts n'a pas pour objet de définir la notion de programme d'investissement pour l'application du seuil de deux millions d'euros au-delà duquel un agrément ministériel préalable est requis. Est également inopérant, le moyen tiré de l'illégalité de la doctrine administrative référencée BOI-IR-RICI-80-30-20130826 publiée le 26 août 2013, qui ne constitue pas le fondement des impositions litigieuses.

9. De tout ce qui précède, il résulte que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin de décharge présentées devant la Cour doivent être rejetées. Il en va de même, en conséquence, de celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 29 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme C..., président assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Lu en audience publique le 11 février 2020.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

3

N° 19PA00668


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00668
Date de la décision : 11/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : STC PARTNERS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-02-11;19pa00668 ?
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