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31/12/2019 | FRANCE | N°18PA01114

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 31 décembre 2019, 18PA01114


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision de la ministre des affaires sociales et de la santé du 13 juillet 2016 en tant qu'elle limite la prise en charge de l'accident de service dont a été victime Mme D... à la période du 2 juin 2015 au

30 novembre 2015 et d'enjoindre à la ministre des affaires sociales et de la santé de prolonger le régime de prise en charge de l'accident de service au-delà du 1er décembre 2015 ou, à défaut, de réexaminer son dossier

, sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1615971/5-2 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision de la ministre des affaires sociales et de la santé du 13 juillet 2016 en tant qu'elle limite la prise en charge de l'accident de service dont a été victime Mme D... à la période du 2 juin 2015 au

30 novembre 2015 et d'enjoindre à la ministre des affaires sociales et de la santé de prolonger le régime de prise en charge de l'accident de service au-delà du 1er décembre 2015 ou, à défaut, de réexaminer son dossier, sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1615971/5-2 du 11 janvier 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 3 avril 2018, 5 juin 2018 et 12 novembre 2019, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1615971/5-2 du 11 janvier 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

2°) d'annuler la décision du 13 juillet 2016 en tant que, par cette décision, la ministre des affaires sociales et de la santé a limité la prise en charge de son accident de service à la période du 2 juin 2015 au 30 novembre 2015 ;

3°) d'enjoindre à la ministre des solidarités et de la santé de prolonger le régime de prise en charge de l'accident de service au-delà du 1er décembre 2015, ou à défaut, de réexaminer sa situation, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué a été rendu à la suite d'une procédure irrégulière dès lors que les mémoires échangés entre les parties n'ont pas été régulièrement notifiés ;

- la décision du 13 juillet 2016 est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'elle est fondée sur deux avis de la commission de réforme ministérielle en méconnaissance de l'article 26 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- elle n'a pas été informée de la réunion de la commission de réforme du 3 décembre 2015, ce qui l'a privée de la possibilité de consulter son dossier et de présenter des observations ;

- un membre de la commission de réforme du 20 juin 2016 n'a pas assisté à la séance et n'y a participé qu'en audioconférence en méconnaissance de l'article 19 du décret du 14 mars 1986 ;

- elle n'a pas été convoquée à l'expertise médicale du 22 juillet 2016 ;

- l'administration a commis une erreur d'appréciation en fixant la date de consolidation au 1er décembre 2015 ;

- la décision du 13 juillet 2016 est entachée d'erreur d'appréciation et d'inexactitude matérielle concernant son état de santé.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 septembre et 21 novembre 2019, la ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, par courrier en date du 13 novembre 2019, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des moyens relatifs à l'irrégularité de la procédure qui sont fondés sur une cause juridique distincte de celle qui fondait les moyens de première instance et qui constitue ainsi une demande nouvelle en appel.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mach, premier conseiller,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., avocat, en présence de Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., secrétaire administrative de classe normale au ministère des affaires sociales et de la santé, a été victime d'un accident le 13 août 2014. Par décision du 23 juin 2015, cet accident a été reconnu imputable au service et ont été prises en charge à ce titre les périodes d'interruption de services du 13 août au 14 septembre 2014, du 15 décembre 2014 au 2 janvier 2015 et du 9 février au 1er juin 2015. Par avis du 20 juin 2016, la commission de réforme ministérielle a fixé la date de consolidation au 1er décembre 2015. Par décision du 13 juillet 2016, l'administration a prolongé le bénéfice des dispositions relatives à l'imputabilité au service pour la période du 2 juin au 30 novembre 2015 et doit être regardée comme ayant refusé la prise en charge au titre de l'accident de service à compter du 1er décembre 2015. Par jugement du 11 janvier 2018, dont Mme D... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 juillet 2016 en tant qu'elle a limité la prise en charge de son accident de service à la période du 2 juin 2015 au 30 novembre 2015.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à la date du jugement attaqué : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". En vertu de l'article R. 611-8-2 du même code, les juridictions administratives peuvent adresser, par le moyen de l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1 de ce code (Télérecours), à une partie ou à un mandataire toutes les communications et notifications prévues par le livre VI du code de justice administrative. Les parties ou leur mandataire sont réputés avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été ainsi adressé, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique.

3. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif que la demande introductive d'instance de Mme D..., enregistrée le 23 septembre 2016, a été communiquée à la ministre des affaires sociales et de la santé sur l'application informatique Télerecours le

12 octobre 2016, et qu'il a été accusé réception le même jour. Le mémoire en défense enregistré le 13 janvier 2017 et les pièces complémentaires régularisées le 9 février 2017 ont été mises à disposition de l'avocat de Mme D... sur l'application informatique Télérecours le

10 février 2017 et ce dernier a consulté ces documents le même jour. Aucun autre mémoire, ni pièces complémentaires n'ont été produits au dossier du tribunal par les parties. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait intervenu au terme d'une procédure irrégulière au motif que tous les mémoires échangés n'ont pas été régulièrement notifiés doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Mme D..., qui avait soutenu devant le tribunal administratif que la décision contestée du 13 juillet 2016 était entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation, n'avait ainsi soulevé que des moyens de légalité interne. Les moyens tirés des vices de procédure dont serait entachée la décision du 13 juillet 2016 et relatifs à l'impossibilité de consulter les pièces du dossier et de présenter des observations en vue de la commission de réforme du 3 décembre 2015, à l'irrégularité de la composition de la commission de réforme du 20 juin 2016, à l'absence de convocation à l'expertise médicale du 22 juillet 2016 et à l'existence de deux avis distincts de la commission de réforme ministérielle relèvent de la légalité externe de l'acte contesté. Ces moyens, fondés sur une cause juridique différente de celle qui fondait les moyens de première instance, constituent ainsi une demande nouvelle en appel et sont, par suite irrecevables.

5. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...). / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; ". Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à l'existence de troubles présentant un lien direct, mais non nécessairement exclusif, et certain avec l'accident de service. Doivent être pris en charge au titre de l'accident de service les honoraires médicaux et frais directement entraînés par celui-ci, y compris, le cas échéant, s'ils sont exposés postérieurement à la date de consolidation constatée par l'autorité compétente.

6. D'une part, il résulte des dispositions citées au point 5 que le droit à la prise en charge des congés de maladie et des honoraires et frais médicaux entraînés par un accident de service est indépendant de la date de consolidation de l'état de santé du fonctionnaire victime de cet accident. Par suite, le moyen tiré de ce que l'administration a commis une erreur d'appréciation en fixant la date de consolidation au 1er décembre 2015 est inopérant à l'encontre de la décision contestée du 13 juillet 2016 en tant qu'elle refuse d'accorder à Mme D... le bénéfice des dispositions du deuxième alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 à compter du 1er décembre 2015.

7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, et notamment des documents établis le 13 août 2014 à la suite de son accident de service, que Mme D... a subi un traumatisme direct des deux membres supérieurs n'engendrant pas d'hématome au bras droit et une contusion au poignet gauche. Mme D... soutient que des douleurs à l'épaule droite ont perduré postérieurement au 1er décembre 2015 et sont dues à la pose d'une attelle pendant plusieurs mois sur son bras gauche en conséquence de l'accident de service. Mme D... a fait l'objet de deux expertises médicales réalisées par deux rhumatologues agréés les 11 septembre 2015 et 27 avril 2016, lesquels se sont expressément prononcés sur les douleurs d'épaule droite et du rachis cervical et non uniquement, ainsi que le fait valoir l'appelante, sur le poignet gauche. Il ressort des conclusions concordantes de ces deux expertises que la manifestation des douleurs au niveau de l'épaule droite n'a été constatée qu'à compter d'un certificat médical établi le 15 décembre 2014 et que ces douleurs ne présentent aucun lien direct avec l'accident de service survenu le 13 août 2014. L'appelante ne contredit pas utilement les conclusions des deux experts, lesquelles ne sont pas entachées d'inexactitude matérielle des faits, par la seule production en première instance d'un certificat médical de prolongation d'arrêt de travail jusqu'au 18 janvier 2016 établi par un médecin généraliste le 24 novembre 2015. Dans ces conditions, l'interruption du service à compter du 1er décembre 2015 ne peut être regardée comme étant en lien direct avec l'accident de service. Par suite, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que l'administration a entaché la décision du 13 juillet 2016 d'inexactitude matérielle des faits et d'erreur d'appréciation en lui refusant le bénéfice des dispositions du deuxième alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 postérieurement au 30 novembre 2015.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme A..., président de chambre,

- Mme E..., présidente assesseure,

- Mme Mach, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 décembre 2019.

Le rapporteur,

A-S MACHLe président,

M. A...Le greffier,

S. GASPARLa République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 18PA01114 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01114
Date de la décision : 31/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-07-10-01 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties. Garanties et avantages divers. Protection en cas d'accident de service.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie MACH
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : FONTEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-12-31;18pa01114 ?
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