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24/09/2019 | FRANCE | N°19PA01048

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 24 septembre 2019, 19PA01048


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2018 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et fixé le pays de destination ; d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2018 par lequel le préfet de police de Paris lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de douze mois ; d'annuler l'arrêté du 27 décembre 2018 par lequel le préfet de police a décidé son maintien en rétention.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2018 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et fixé le pays de destination ; d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2018 par lequel le préfet de police de Paris lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de douze mois ; d'annuler l'arrêté du 27 décembre 2018 par lequel le préfet de police a décidé son maintien en rétention.

Par un jugement nos 1824081-1824096 du 10 janvier 2019, le tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés attaqués.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mars 2019, le préfet de police, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 10 janvier 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a retenu le moyen tiré de ce que M. B... était mineur. En effet, le demandeur a tout au long de la procédure, et jusqu'à la veille de l'audience, affirmé être G... B..., majeur. Il n'apporte aucun élément dont il ressortirait qu'il puisse être confondu avec F... B..., son frère mineur.

La requête a été communiquée à M. B..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

Sur le motif d'annulation retenu par le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Paris :

1. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : 1° L'étranger mineur de dix-huit ans ; / (...) ".

2. Pour annuler l'arrêté du 24 décembre 2018 par lequel le préfet de police a obligé

M. B..., ressortissant malien, à quitter le territoire français sans délai et fixé le pays à destination et, par voie de conséquence, de l'arrêté du même jour portant interdiction de retour sur le territoire français et de l'arrêté du 27 décembre 2018 le maintenant en rétention, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a considéré que l'intéressé, qui se présentait devant lui comme F... B..., mineur de dix-huit ans, entrait dans le champ des dispositions citées au point précédent.

3. Il ressort des procès-verbaux établis le 24 décembre 2018 par un officier de police judiciaire et signés par l'intéressé que, lors de son interpellation puis de son audition par les services de police, le défendeur s'est présenté sous le nom de G... B..., né le

8 juillet 1994 au Mali et, pour justifier de cette identité, a produit un extrait d'acte de naissance à ce nom. C'est également de cette identité dont il s'est prévalu lors de l'audience devant le juge des libertés et de la détention, en présence d'un interprète, et par la suite dans le cadre de l'instruction de sa demande d'asile. Le nom de G... B... et cette date de naissance figurent également sur l'ensemble des documents de notification des arrêtés contestés, notifiés en présence d'un interprète à M. B... qui les a signés sans émettre aucune contestation. C'est également sous le nom de H... B... que le défendeur a introduit ses demandes devant le tribunal administratif de Paris. Ce n'est que dans son mémoire complémentaire enregistré le

9 janvier 2019 que M. B... a allégué être M. F... B..., mineur né en 2002. Cependant, cette nouvelle identité tardivement revendiquée sans explication sérieuse, qui contredit l'ensemble des indications qu'il avait spontanément fournies à la police, au juge des libertés et de la détention et à l'office français de protection des réfugiés et apatrides et qui n'est pas assortie du moindre élément qui permettrait d'en apprécier la crédibilité, doit être regardée comme ayant été alléguée pour les besoins de la cause dans l'unique but de faire obstacle à l'exécution des arrêtés contestés. En l'absence de tout élément probant dont il serait possible d'inférer une confusion sur l'identité de l'intéressé, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la méconnaissance du 1° de l'article

L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler les arrêtés contestés.

4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... à l'encontre des arrêtés contestés.

Sur les autres moyens soulevés par M. B... :

Concernant l'arrêté du 24 décembre 2018 portant obligation de quitter le territoire sans délai et fixant le pays de destination :

Sur le moyen commun à l'ensemble des décisions :

5. Par un arrêté n° 2018-00738 du 20 novembre 2018, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 27 novembre 2018, le préfet de police a donné à Mme E... A..., délégation à effet de signer, notamment, les décisions relatives à la police des étrangers. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas apporté la preuve de la régularité de la décision de délégation en vertu de laquelle avait agi le signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté comme manquant en fait.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ".

7. L'arrêté contesté vise notamment l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne le fait que M. B... ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et qu'il n'a pas sollicité de titre de séjour. Il précise également que l'intéressé est célibataire, sans charge de famille et sans domicile personnel et certain. L'obligation de quitter le territoire français comporte, dès lors, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. La motivation de l'arrêté répond ainsi aux exigences de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En deuxième lieu, il ressort de la motivation de cette décision et des pièces du dossier que le préfet de police a examiné la situation personnelle de M. B....

9. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... est dépourvu de toute attache privée ou familiale en France et ne dispose, par ailleurs, dans ce pays, ni de ressources propres, ni d'un logement. Par suite, la décision attaquée n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de cet arrêté sur sa situation personnelle.

10. Il résulte de ce qui précède que l'obligation de quitter le territoire n'est pas entachée d'illégalité.

Sur la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

11. En premier lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...)3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au deuxième alinéa de l'article L. 611-3, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 513-4, L. 513-5, L. 552-4, L. 561-1, L. 561-2 et L. 742-2 ; (...) ".

12. La décision en litige vise notamment l'article L. 511-1 II et mentionne que l'intéressé ne pouvait justifier être entré régulièrement sur le territoire français, qu'il n'avait pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, qu'il ne justifiait pas être en possession de documents d'identité en cours de validité, qu'il n'avait entamé aucune démarche en vue de régulariser sa situation et qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente ou se déclare sans domicile fixe. Cette décision est suffisamment motivée.

13. En deuxième lieu, il ressort de la motivation de cette décision et des pièces du dossier que le préfet de police a procédé à un examen suffisant de la situation personnelle de M. B....

14. En troisième lieu, l'obligation de quitter le territoire n'étant pas entachée d'illégalité, le moyen tiré de ce que la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire serait illégale de ce fait doit être écarté.

15. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, n'a justifié de son identité que par la production d'un acte de naissance dont il a prétendu en cours de procédure qu'en définitive il ne serait pas le sien, et ne justifie d'aucune résidence permanente. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point 11 doit être écarté.

16. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation personnelle de M. B....

17. Il résulte de ce qui précède que la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire n'est pas entachée d'illégalité.

Sur la décision fixant le pays de destination :

18. En premier lieu, la décision fixant le pays de destination vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et notamment les dispositions de l'article L. 511-1 ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, mentionne la nationalité du requérant et indique que l'intéressé ne justifie pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne des droits de l'homme en cas de retour dans son pays d'origine. Ainsi, la décision en litige mentionne les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision manque en fait et doit être écarté.

19. En deuxième lieu, il ressort de la motivation de cette décision et des pièces du dossier que le préfet de police a procédé à un examen suffisant de la situation personnelle de M. B....

20. En troisième lieu, l'obligation de quitter le territoire n'étant pas entachée d'illégalité, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait illégale de ce fait doit être écarté.

21. En dernier lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée cette décision n'est assorti d'aucune précision permettant au juge d'en apprécier la portée et l'éventuel bien-fondé. En tout état de cause, si M. B... soutient qu'il a fui son pays par craintes de persécutions, il ne justifie pas la réalité des menaces qu'il allègue.

22. Il résulte de ce qui précède que la décision fixant le pays de destination n'est pas entachée d'illégalité.

Concernant l'arrêté du 24 décembre 2018 portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois :

23. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire doit être écarté par les motifs figurant au point 5 du présent arrêt.

24. En deuxième lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour.(...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".

25. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.

26. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

27. En l'espèce, la décision en litige vise le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relève que M. B... avait déclaré être entré en France en décembre 2016, qu'il était célibataire et sans enfant à charge, qu'ainsi il ne pouvait être regardé comme se prévalant de lien suffisamment anciens, forts et caractérisés avec la France, qu'enfin compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'était pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de l'intéressé par une interdiction de retour d'une durée d'un an. Le préfet de police a ainsi rappelé les dispositions applicables à la situation de M. B... et a exposé les circonstances de fait qu'il a retenues pour prononcer sa décision d'interdiction de retour. Le préfet de police qui, après prise en compte de ces critères, n'a pas retenu la circonstance que M. B... représentait une menace pour l'ordre public, ni celle qu'il avait fait l'objet par le passé d'une mesure d'éloignement, n'était pas tenu de le préciser expressément. Il a dès lors procédé à un examen particulier de sa situation et suffisamment motivé cette décision au regard des exigences du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

28. En troisième lieu, l'obligation de quitter le territoire n'étant pas entachée d'illégalité, le moyen tiré de ce que l'interdiction de retour sur le territoire français serait illégale de ce fait doit être écarté.

29. M. B... ne fait valoir aucune considération humanitaire, au sens des dispositions précitées, de nature à faire obstacle à ce que le préfet prononce à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prenant une décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois, le préfet de police ait commis une erreur d'appréciation.

30. Il résulte de ce qui précède que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant un délai de douze mois n'est pas entachée d'illégalité.

Concernant l'arrêté du 27 décembre 2018 portant maintien en rétention :

31. En premier lieu, aux termes de l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "Lorsqu'un étranger placé en rétention en application de l'article L. 551-1 présente une demande d'asile, l'autorité administrative peut procéder pendant la rétention à la détermination de l'Etat membre responsable de l'examen de cette demande conformément à l'article L. 742-1 et, le cas échéant, à l'exécution d'office du transfert dans les conditions prévues à l'article L. 742-5. Si la France est l'Etat membre responsable de l'examen de cette demande et si l'autorité administrative estime, sur le fondement de critères objectifs, que cette demande est présentée dans le seul but de faire échec à l'exécution de la mesure d'éloignement, elle peut prendre une décision de maintien en rétention de l'étranger pendant le temps strictement nécessaire à l'examen de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, en cas de décision de rejet ou d'irrecevabilité de celle-ci, dans l'attente de son départ. (...). La décision de maintien en rétention est écrite et motivée ".

32. La décision attaquée vise notamment l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se fonde sur ce que la demande d'asile de M. B... a été présentée à titre dilatoire en vue de faire échec à son éloignement dès lors qu'entré en France au mois de décembre 2016 de manière irrégulière, il n'a effectué aucune démarche en vue de régulariser sa situation, il n'a jamais formulé ni déposé de demande d'asile depuis son entrée sur le territoire national et ne justifie d'aucun empêchement pour ce faire, et il ne présente cette demande qu'après avoir été placé en rétention administrative en vue de son éloignement. Le préfet de police a dès lors procédé à un examen particulier de la situation personnelle de

M. B... et suffisamment motivé cette décision.

33. En deuxième lieu, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans ses arrêts C-166/13 et C-249/13 des 5 novembre et 11 décembre 2014, le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Ce principe n'implique toutefois pas que l'administration mette l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision de le maintenir en rétention administrative pendant le temps nécessaire à l'examen de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, en cas de décision de rejet de celle-ci, dans l'attente de son départ, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou sur la perspective de l'éloignement. Si la décision litigieuse est intervenue, le 27 décembre 2018, soit le même jour que le dépôt de sa demande d'asile par M. B..., il ne ressort pas des pièces du dossier que celui-ci aurait été empêché, depuis son placement en rétention le 24 décembre 2018, ou depuis l'expression ce même 27 décembre 2018 de son intention de demander l'asile, d'émettre toutes observations utiles relatives à son maintien en rétention durant l'examen de sa demande d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe fondamental du droit d'être entendu tel qu'il est énoncé au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté.

34. En troisième lieu, si l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration prévoit de soumettre au respect d'une procédure contradictoire préalable les décisions individuelles devant être motivées en application de l'article L. 211-2 de ce code ou celles prises en considération de la personne, l'article L. 121-2 du même code prévoit que ces dispositions ne sont pas applicables en cas d'urgence ou aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont institué une procédure contradictoire particulière. Il ressort des dispositions de l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger demandeur d'asile le maintien de son placement en rétention administrative. Dès lors, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ne saurait être utilement invoqué à l'encontre de la décision litigieuse.

35. En quatrième lieu, M. B... a soutenu que la décision attaquée méconnaissait les dispositions des articles R. 741-2, R. 741-4 et R. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, portant sur l'information que doit recevoir un étranger souhaitant demander l'asile lors de son placement en rétention. Toutefois, la méconnaissance, à la supposer établie, de la procédure relative à la demande d'asile d'un étranger placé en rétention administrative est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée portant maintien en rétention. Il ressort de surcroît de la notification de l'arrêté préfectoral portant placement en rétention le 24 décembre 2018 que l'intéressé a été informé de la possibilité de déposer un recours gracieux, un recours hiérarchique ou de former un recours contentieux, de la faculté de prendre connaissance de son dossier, de bénéficier du concours d'un interprète et d'un médecin, de se faire assister par un avocat, de saisir son consulat ou une personne de son choix et de la possibilité de saisir une association d'aide aux demandeurs d'asile dont les coordonnées lui ont été données. Dès lors le moyen tiré de ce qu'il n'aurait pas reçu l'information prévue par les dispositions mentionnées plus haut ne peut qu'être écarté.

36. En dernier lieu, la décision litigieuse est, comme dit précédemment, motivée par la circonstance que M. B..., interpellé deux ans après son entrée en France, n'y avait entrepris aucune démarche afin de solliciter l'asile et n'a déposé de demande qu'après avoir fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai assortie d'un placement en centre de rétention administrative. Le préfet de police a également retenu que, lors de son interpellation, M. B... n'a pas fait état de craintes en cas de retour dans son pays d'origine et a indiqué être entré en France " pour étudier ". En estimant, pour ces motifs, que la demande d'asile formulée le 27 décembre 2018 était dilatoire et visait uniquement à faire obstacle à la reconduite à la frontière imminente, le préfet de police n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

37. Il résulte de ce qui précède que la décision portant maintien en rétention n'est pas entachée d'illégalité.

38. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé ses arrêtes du 24 décembre 2018 et du 27 décembre 2018 pris à l'encontre de M. B....

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 10 janvier 2019 est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Paris sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise pour information au préfet de police

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. D..., premier vice-président,

- M. C..., président assesseur,

- Mme Jayer, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 24 septembre 2019.

Le rapporteur,

Ch. C... Le président,

M. D...

Le greffier,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 19PA01048


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA01048
Date de la décision : 24/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme PENA

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-09-24;19pa01048 ?
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